République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 novembre 1999 à 17h
54e législature - 3e année - 1re session - 52e séance
IU 757
M. Luc Gilly (AdG). Au mois de septembre déjà, je voulais vous parler de ce sujet, mais mon émotion était trop grande et j'y ai renoncé.
Suite au décès, cet été, de mon ami Maxime Chalut, j'ai en effet été très ému par l'hommage que lui a rendu le président du Grand Conseil, lors de notre séance de fin septembre 1999.
Je rappelle, pour ceux qui ne connaissent pas ou plus Maxime Chalut, qu'il fut député - peut-être même à la place que j'occupe, je n'en sais rien. Il a siégé longtemps au Municipal et au Grand Conseil. J'ai pensé demander au gouvernement s'il entendait faire quelque chose en son honneur, car Maxime Chalut a été l'un des seuls à refuser de quitter la caserne de Lausanne en 1932 pour aller tirer sur la foule des manifestants à Genève.
Or, année après année, Madame la présidente, Madame Brunschwig Graf - la dame du DAM - un silence, une amnésie politique et historique se sont installés sur ce fait d'arme, sur ce courageux militaire... - pour une fois que c'est dans l'autre sens ! - ...et cette amnésie me fait énormément de peine, car les années passent et jamais un mot n'est venu de la part du gouvernement, jamais les médias n'ont parlé de cette affaire d'une autre manière, en évoquant le courage de cet homme. Alors, des citoyens s'en occupent.
Au moment où la droite - le fascisme aussi - est en train de reprendre du poil de la bête un peu partout en Europe, en Suisse également, je m'étonne que l'on n'ait pas pensé, en cette dernière année du millénaire, à lier 1932 au futur et à rendre un hommage tout particulier à Maxime Chalut qui, courageusement, refusa de se rendre à Genève avec la troupe.
Depuis six ans que je siège au Grand Conseil, j'ai reçu presque chaque mois des invitations pour rendre des honneurs militaires à des gens qui sont morts pour la patrie. J'en reçois pour l'Escalade, pour les Vieux-Grenadiers qui vont encore faire bénir leurs canons devant la cathédrale Saint-Pierre, etc. Je m'étonne que tous ces événements militaires soient commémorés d'une façon ou d'une autre et que les autorités ne pipent mot sur les civils morts en 1932, à Genève - je vous rappelle que treize civils sont morts et qu'il y a eu plus de quatre-vingts blessés - qui revendiquaient l'interdiction d'un meeting fasciste à Genève.
Madame Brunschwig Graf, vous connaissez très bien cette période historique qui a été grave pour notre République. En tout cas, l'honneur de ces gens n'a jamais été défendu par les autorités. Je suis un peu ému de raconter tout cela, car durant six ans de parlement, alors que j'ai reçu des invitations en permanence pour ceci ou cela, il ne s'est trouvé personne pour parler de ces gens-là, surtout dans une perspective historique. Je trouve que ce n'est pas très correct. (Applaudissements.) Je demande au gouvernement s'il lèvera le petit doigt dans cette affaire pour le 9 novembre de l'an prochain ?