République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 29 octobre 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 11e session - 49e séance
M 1001-A
Le GRAND CONSEIL,considérant :
- qu'il existe depuis 1990 des classes intégrées dans l'enseignement primaire permettant à des enfants mentalement handicapés de suivre un enseignement spécialisé tout en bénéficiant d'une intégration partielle mais régulière dans les classes ordinaires ;
- que le cycle d'orientation intègre depuis plusieurs années, de manière régulière, des adolescents présentant un handicap moteur ou sensoriel ;
- que les adolescents mentalement handicapés issus de classes intégrées du primaire ne peuvent à ce jour bénéficier d'une poursuite de l'intégration scolaire au niveau du cycle d'orientation ;
- les articles de la LIP concernant les objectifs de l'école publique, l'intégration scolaire des handicapés et les relations avec la famille,
invite le Conseil d'Etat
- à présenter au Grand Conseil une évaluation de l'expérience de la création de classes intégrées dans l'enseignement primaire ;
- à mettre en place, une fois ces critères définis, une (des) structure(s) permettant d'offrir une intégration au cycle d'orientation (classe intégrée et/ou intégration individuelle) aux adolescents mentalement handicapés susceptibles d'en bénéficier ;
- à évaluer de manière continue l'adéquation entre la (les) structure(s) mise(s) en place et les objectifs poursuivis par l'intégration d'adolescents mentalement handicapés au cycle d'orientation.
Préambule
Depuis de nombreuses années, le Département de l'instruction publique pratique une politique d'intégration de tous les enfants au système scolaire. Pour ce faire, en plus des classes régulières, il a fallu créer un certain nombre de structures spécialisées pour prendre en compte les difficultés de tous ordres que les jeunes gens et jeunes filles en âge scolaire peuvent rencontrer à s'intégrer dans l'enseignement régulier. On citera, pour mémoire, la division spécialisée de l'enseignement primaire et les classes ateliers et d'accueil du cycle d'orientation. L'effort fourni par l'ensemble de la société genevoise est considérable puisque, pour le seul enseignement obligatoire, le pourcentage d'élèves inscrits dans les structures spécialisées est passé de 2,3 % en 1980 à 3,1 % en 1997.
En ce qui concerne les enfants handicapés physiquement, un effort tout aussi considérable a été consenti pour favoriser leur intégration au système scolaire régulier, tant au point de vue de l'encadrement de ces enfants (formation du corps enseignant, création d'équipes de maîtres, collaboration avec les institutions spécialisées) qu'à celui de l'adaptation des moyens d'enseignement et de l'aménagement des locaux.
Pour les jeunes gens et jeunes filles mentalement handicapés, comme le rappellent les motionnaires, c'est depuis 1990 qu'existent dans l'enseignement primaire des classes qui reçoivent des enfants mentalement handicapés et qui peuvent ainsi bénéficier d'une intégration partielle, mais régulière dans les classes ordinaires.
Au cycle d'orientation, de telles classes n'existent pas. On a privilégié jusqu'à maintenant l'intégration individuelle des jeunes mentalement handicapés, intégration qui s'est concrétisée dans la fréquentation par trois ou quatre jeunes au cours de chacune de ces dernières années d'une ou deux leçons hebdomadaires dans des classes régulières.
Après la création de classes intégrées dans l'enseignement primaire, il convenait dans un premier temps d'évaluer cette expérience, puis, dans un deuxième temps et sur la base des résultats de cette évaluation, d'étudier l'opportunité de créer des classes intégrées au cycle d'orientation.
On trouvera, en réponse aux invites no 1 et no 2 ci-dessous, le texte intégral du rapport de la Commission consultative de l'intégration scolaire (texte en caractères italiques).
1. Evaluation de l'expérience de la création de classes intégrées dans l'enseignement primaire
(Invite No 1)
1.1 Généralités
1.1.1 Intégration scolaire
Les élèves mentalement handicapés, inscrits au Centre des Voirets, bénéficient d'une intégration dans l'école primaire ordinaire, selon deux modalités liées à leurs caractéristiques et aux ressources de leur environnement.
✧ Les intégrations individuelles quotidiennes dans une classe du quartier avec l'appui du centre spécialisé des Voirets. En 1995-1996, 7 élèves étaient concernés.
✧ Les classes intégrées d'élèves handicapés mentaux dans les écoles primaires : elles assurent l'encadrement et l'enseignement spécialisés au sein d'un bâtiment dont les conventions et l'équipement sont communautaires, ce qui favorise les interactions spontanées, ou organisées, entre enfants valides et handicapés dans les espaces communs et dans les classes. Elles concernaient, en 1995-1996, 18 élèves en 3 groupes dans 2 écoles primaires : Les Palettes et Plan-les-Ouates.
1.1.2 Références conceptuelles
Ce sont celles de l'enseignement spécialisé :
✧ Le retard, le déficit ou les troubles ne sont pas considérés comme immuables, ni surtout comme caractéristiques de l'intelligence d'un individu. C'est sur les effets manifestes que provoquent les situations, tâches et instruments proposés que se centre l'observation, afin de mobiliser les capacités pour les développer en compétences.
✧ Cela implique de renoncer à une éducation fondée sur les seuls aspects déficitaires. Il s'agit donc de créer, proposer, entretenir des conditions et des propositions pédagogiques basées sur l'organisation particulière des fonctions mentales de l'enfant et de leurs caractéristiques les plus positives.
✧ En référence à la classification de Wood (OMS), il s'agit de distinguer 3 plans qui interagissent entre eux :
l'atteinte fonctionnelle (déficience) ;
l'altération des compétences de la personne (incapacité qui résulte de la déficience OMS 1981) ;
le désavantage social (handicap).
L'action sur un plan a des effets indirects sur les autres plans. L'action exclusive sur un seul de ces plans a des effets nocifs, en accentuant les limites.
L'intérêt est confirmé de nous centrer sur la part active du sujet notamment en ce qui concerne ses représentations, construites avec ou malgré les altérations.
1.1.3 Les objectifs de l'intégration
Ce sont les mêmes que ceux de l'enseignement spécialisé
Il s'agit d'assurer, rechercher, développer les conditions qui permettent à l'enfant-élève :
de communiquer, interagir, développer des relations,
d'accéder aux conventions sociales et scolaires,
d'apprendre en traitant et en produisant des informations,
d'être conscient de ses capacités et de ses limites,
de jouer un rôle et avoir des satisfactions.
L'intégration des enfants handicapés mentaux est un moyen de développer et de renforcer, d'une part, l'identité de la personne, d'autre part les compétences sociales, langagières et intellectuelles, jamais nulles, jamais achevées. Conjointement, l'intégration vise à développer le respect de la différence et la solidarité chez les élèves non handicapés, les citoyens de demain.
C'est donc essentiellement sur les conditions qui permettent la plus grande variété d'interactions que portent la réflexion, l'organisation et l'évaluation.
1.1.4 Les activités favorables à l'intégration
Les enfants intégrés individuellement, dans une classe de leur quartier, le sont à mi-temps ou plus. Ils participent chaque jour à la vie de leur classe.
Les élèves des classes intégrées participent de façon plus ponctuelle à la vie d'une classe ordinaire, pour des durées plus courtes, et essentiellement pour des activités créatrices, musicales et physiques.
Existe également l'accueil d'élèves valides dans le cadre d'activités dites « décloisonnées ».
1.1.5 Les appuis à l'intégration
Tant les élèves intégrés que les enseignants ordinaires bénéficient d'appuis variés de la part des enseignants et éducateurs spécialisés du Centre des Voirets : adaptation du matériel ou de la tâche, évaluations et ajustement communs aux enseignants, accompagnement et soutien de l'enfant. De plus, certains élèves bénéficient du « tutorat » d'un camarade.
1.2 Evaluation
1.2.1 Evaluation institutionnelle
L'évaluation va de pair avec l'élaboration des modes de faire, les conditions aménagées et les répercussions sur le développement des enfants, leur évolution dynamique en groupe et individuellement.
Elle est assurée en permanence par l'équipe institutionnelle sous la conduite des deux responsables pédagogique et psychologique et fait l'objet de rapports réguliers. L'inspecteur assure le relais avec les collègues, avec les directions de l'enseignement primaire et du SMP, ainsi qu'avec les services et associations partenaires.
De surcroît, des rencontres ont lieu entre les parents du jeune concerné, les enseignants spécialisés et les enseignants qui intègrent.
L'équipe des Voirets bénéficie également d'une collaboration avec l'Université, plus précisément L'Atelier de Recherche et de Soutien à l'Intégration de la FPSE (ARSI).
Les classes dites intégrées fonctionnent avec l'équipement et les ressources de l'enseignement spécialisé, sous le mode d'une institution en réseau. La réflexion pluridisciplinaire qui soutient les modes de faire est conduite par l'équipe des Voirets, sous la direction des responsables et de l'inspecteur spécialisé.
Il ressort de l'évaluation faite par les responsables de l'enseignement spécialisé que l'organisation du Centre des Voirets, l'encadrement des enfants, la réflexion interdisciplinaire sont judicieux et bien investis. Ceci constitue l'atout fondamental pour un travail impliquant un esprit de recherche qui, de par son mandat, doit avant tout garantir les conditions de la meilleure scolarité pour les élèves mentalement handicapés. Une responsabilité attentive, critique et autonome est assurée. Chaque partenaire est au clair sur les rôles de chacun.
1.2.2 Concrètement :
Les éléments qui suivent sont tirés des rapports et des témoignages des partenaires.
Les interactions avec les enseignants et les élèves des classes ordinaires sont de fréquence et de qualité variables.
Elles sont essentiellement liées au contexte scolaire, aux représentations des acteurs, aux caractéristiques individuelles des enfants.
A. Individuellement ou en groupe, les interactions sont qualitativement favorables lorsque les conditions suivantes sont remplies :
- projet initié et contractualisé clairement entre professionnels, autorités et parents ;
- information auprès des élèves de toute l'école ;
- souci de favoriser l'adaptation des enfants handicapés ;
- souci de garantir les conditions d'un rôle actif dans toute intégration individuelle ;
- souci de garantir tout ajustement justifié par le développement ou comportement de l'enfant ;
- définition des besoins par l'équipe spécialisée ;
- souci de responsabiliser l'enseignant de la classe intégrante et de mettre en évidence ses compétences ;
- organisation de la classe favorisant l'entraide entre élèves ;
- définition des besoins par l'équipe spécialisée et collaboration avec les partenaires.
On constate comme effets :
- les attitudes et les interactions entre enfants handicapés mentaux et valides évoluent en symétrie avec celles des adultes ;
- la perception du handicap s'améliore régulièrement ;
- les interactions sont fréquentes ;
- les ajustements nécessaires sont assurés avec souplesse ;
- les professionnels sont attentifs à relever à quel moment et dans quelles conditions se manifestent les stimulations pour les activités cognitives et les activités de communication ;
- des progrès en matière d'apprentissage et socialisation.
Des difficultés subsistent pour certains enfants :
- stigmatisation, marquage, curiosité ;
- comportements imprévisibles liés à l'angoisse (fugues, isolement) ;
- importance des aménagements individuels qui entravent l'animation pédagogique de la classe ;
- règles difficiles à respecter ;
- risque de dévalorisation de l'image de soi ;
- dosage des exigences et attentes.
B. Ces difficultés sont rendues encore plus sensibles lorsque les conditions du projet n'ont pu être réunies que partiellement, soit :
- projet conçu en omettant l'un des partenaires ;
- projet conçu hors contexte précis de l'école ;
- projet insuffisamment discuté avec les futurs acteurs.
On constate alors comme effets :
- pas de mobilisation générale, même sur les implications élémentaires ;
- une curiosité mutuelle sans véritables interactions ;
- de nombreux comportements qui dérangent ;
- un vague intérêt bienveillant ;
- pas de responsabilité réelle ;
- un encadrement difficile, même dans la classe spécialisée ;
- des prestations éducatives et pédagothérapeutiques insuffisamment garanties ;
- des attitudes d'élèves soit très protectrices, soit très craintives.
1.3 Conclusion
Les praticiens ne peuvent investir aisément et totalement les deux faces indissociables du projet de chaque enfant : le projet d'enseignement-scolarisation dans les conditions de l'intégration et le projet éducatif-thérapeutique qui peut prendre beaucoup d'ampleur, compte tenu des caractéristiques de certains enfants.
On peut relever que les activités de division élémentaire sont plus adéquates pour une intégration active et valorisante. L'extension en division moyenne restera toujours plus difficile à maintenir.
Les conditions utiles et nécessaires sont connues mais cela n'assure pas qu'elles puissent être réunies. Dans les circonstances où elles le sont, il est difficile de les maintenir, plus encore de les garantir à long terme.
Les équipes pédagogiques changent. Les investissements, les intérêts, les désirs de formation fluctuent. On constate que la capacité à contenir les difficultés et à consentir des ajustements tient à la qualité des relations entre partenaires qui évoluent et influencent les interactions qui se reproduisent, en similitude, entre les enfants.
2. Intégration scolaire d'élèves mentalement handicapés au CO
(Invite No 2)
2.1 Situation actuelle
2.1.1 Introduction
Depuis l'année scolaire 1994-1995, le cycle d'orientation a répondu à huit demandes d'intégration individuelle (les élèves mentalement handicapés participent régulièrement, mais à temps partiel, aux cours d'une classe ordinaire).
Ces intégrations se sont déroulées dans cinq établissements différents (Bois-Caran, Foron, Cayla, Voirets et Coudriers).
Deux élèves ont bénéficié d'une intégration pendant trois années consécutives, trois autres ont participé à une intégration pendant deux ans.
Le temps passé en classe est de deux heures par semaine pour la plupart des élèves, un des élèves a suivi trois heures de cours hebdomadaires.
2.1.2 Objectifs de l'intégration
Les objectifs de l'intégration sont les mêmes que pour l'enseignement primaire tels que décrits au point 1.1.3.
2.1.3 Les activités favorables à l'intégration
Les élèves participent aux cours de la même manière que les élèves des classes intégrées de l'enseignement primaire. Ils suivent des leçons dans quelques disciplines spécifiques, telles que le dessin, la musique, la cuisine et l'observation scientifique.
Ces disciplines, citées dans l'ordre croissant de fréquence d'apparition, sont les premières à être prises en considération car elles répondent à une des conditions d'intégration, qui est de permettre à l'élève handicapé d'être actif et d'avoir des échanges concrets avec les élèves de la classe ordinaire.
Les disciplines qui peuvent accueillir les élèves sont difficiles à définir à l'avance, elles dépendent à l'évidence des goûts, des dispositions et des antécédents des élèves concernés. Dans quelques cas, des mesures d'ajustement des cours ont été prises, comme la différenciation de l'enseignement ou des leçons données sans la présence de l'élève handicapé par exemple.
Les élèves handicapés peuvent également participer à des manifestations de collège, telles que fête, journée sportive ou semaine décloisonnée.
La classe intégrante est également invitée à rencontrer les élèves de l'institution spécialisée et à prendre part à des activités diverses: le partage d'un repas, le travail en atelier, un camp vert par exemple. Ces activités jouent un rôle pédagogique important auprès des élèves valides.
2.1.4 Les appuis à l'intégration
Les maîtres et les élèves bénéficient de l'aide des enseignants et des éducateurs de l'institution Grand-Chêne d'où proviennent tous les élèves handicapés.
La direction générale du CO accorde déjà des moyens sous la forme d'heures de dégrèvement et organise des séances de synthèse et de travail avec tous les acteurs concernés.
2.1.5 Evaluation
L'évaluation des intégrations est assurée, comme décrite au point 1.2.1, par des contacts entre toutes les personnes concernées. Elle est complétée par deux séances de synthèse annuelles avec les enseignants et éducateurs de l'institution spécialisée, l'inspecteur, les enseignants et les directions des établissements concernés et la direction générale du CO.
2.2 Propositions
2.2.1 Préalable
L'expérience de ces dernières années est positive. La poursuite des intégrations entreprises à l'école primaire sera facilitée par les mesures décrites plus loin, notamment par une bonne information des tous les acteurs de l'établissement, ce qui apparaît comme essentiel quel que soit le type d'intégration (classe intégrée ou intégration individuelle).
2.2.2 Difficultés
Les difficultés relevées par les personnes qui suivent de près les élèves intégrés sont les mêmes que celles citées dans l'évaluation des expériences de l'enseignement primaire, notamment au point 1.2.2 B, c'est-à-dire celles qui apparaissent lorsque le projet d'intégration est
- conçu en omettant l'un des partenaires ;
- élaboré hors contexte précis de l'école ;
- insuffisamment discuté avec les futurs acteurs.
(Ces points seront développés plus bas)
Ajoutons les particularités inhérentes à la spécificité du CO, à savoir :
- le nombre important d'acteurs dans un établissement ;
- la multiplicité des intervenants dans une classe ;
- la spécificité de l'enseignant (rattaché à une discipline d'enseignement, contrairement à l'instituteur qui est généraliste) ;
- les attitudes et réactions propres aux adolescents.
2.2.3 Critères
• Afin que tous les partenaires soient associés au projet d'intégration, il est nécessaire d'intensifier l'information des partenaires, notamment pour définir les disciplines d'intégration compte tenu de ce qui a été dit au paragraphe 2.1.3. Cette information sera distincte dans le temps et dans le contenu, selon qu'il s'agit des partenaires directs de l'intégration (direction, maîtres qui intègrent, élèves et parents des classes concernées, parents des élèves handicapés) et les autres partenaires du collège dans lequel l'intégration a lieu. Information spécifique dans le premier cas, plus globale dans le second.
Dans l'information spécifique, le projet d'intégration, incluant les objectifs de celle-ci, occupera une place importante.
En outre, les maîtres spécialisés et les éducateurs recevront également une information sur la structure et l'organisation de l'école concernée.
• Afin que le projet soit conçu dans le contexte précis de l'école, il importe que tous les adultes de l'établissement soient bien sensibilisés à la présence d'élèves mentalement handicapés dans le bâtiment. Chacun doit se sentir concerné, car il peut être en tout temps sollicité pour intervenir directement auprès d'un élève handicapé ou indirectement auprès des autres élèves qui l'interpelleraient sur le sujet. On pense particulièrement ici aux maîtres de classe, aux enseignants des classes concernées, aux surveillants des récréations, aux nettoyeurs, etc.). Dans l'idéal, les intégrations devraient être réalisées dans le cadre d'un projet d'école.
• Afin que le projet soit suffisamment discuté avec les futurs acteurs, les contacts entre futurs partenaires sont pris bien avant la rentrée scolaire suivante.
Les séances de synthèse qui réunissent les acteurs directement concernés, auxquelles seront également associés les futurs enseignants concernés, donneront à chacun la possibilité de faire part de ses réussites, de ses difficultés et de ses propositions.
• Afin que soit prise en compte la spécificité de l'enseignant du cycle d'orientation (et de l'enseignement secondaire en général), les enseignants concernés et intéressés seront invités à formuler leurs besoins spécifiques de formation qui seront pris en compte dans le cadre du dispositif de formation continue.
D'autre part, la problématique de l'intégration d'élèves handicapés devra être concrètement incluse dans la formation initiale des enseignants secondaires.
• Afin que les spécificités de l'adolescence soient prises en considération, les différentes formes de handicap devront être exposées et discutées avec les élèves de l'établissement; de jeunes adultes handicapés pourront y être associés.
Les événements particuliers qui seraient provoqués par les élèves handicapés devront pouvoir être rapidement débattus avec les élèves valides.
Des craintes avaient été émises quant au risque que pourrait courir un élève handicapé intégré dans un cycle d'être confronté à des situations de violence ; or, le suivi des intégrations individuelles permet d'observer des réactions généralement positives et constructives de la part des adolescents. On a constaté des mouvements de générosité spontanée, comme savent très bien le faire les adolescents lorsque qu'ils se mobilisent pour une cause. Cette attitude constructive pourrait servir la mise en place de tutorats, par exemple.
• Afin d'encourager l'extension de l'intégration, il est également important d'accorder les moyens nécessaires aux collèges qui intègrent. (Ces moyens ne devraient toutefois pas faire apparaître des surcoûts importants, mais plutôt des transferts de charges.) Mentionnons les éléments suivants :
- La sous-commission qui a déjà travaillé sur cet objet pourrait assurer un soutien et collaborer au suivi des intégrations (ou des tentatives d'intégration) au CO.
- Les partenaires de l'intégration devraient pouvoir compter sur la disponibilité d'un répondant à la direction générale du CO.
Le temps supplémentaire nécessaire aux maîtres directement concernés par l'intégration d'un élève handicapé est de deux ordres : un temps destiné au travail scolaire supplémentaire proprement dit (notamment le temps de préparation) et, surtout, un temps de concertation, tel que mis en évidence plus haut. Le principe selon lequel ces temps doivent faire l'objet d'une prise en compte dans le poste d'enseignement du maître est réaffirmé. (Le temps que les maîtres intégrants doivent consacrer aux actions de concertation et aux diverses sollicitations spécifiques a fait l'objet d'une première évaluation et est actuellement reconnu par l'octroi d'une demi-heure de dégrèvement annuelle.)
- Sur le plan de la gestion du groupe-classe, la pratique actuelle qui consiste à diminuer de deux unités l'effectif de la classe concernée par une intégration doit se poursuivre. D'autres formes d'aide pourront également être proposées, par exemple l'assistance du maître par un candidat-enseignant ou par un étudiant de la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation.
- Les institutions spécialisées ont, elles aussi, des charges supplémentaires qui consistent notamment dans l'accompagnement des élèves et la collaboration avec les maîtres du CO : elles devront également quantifier les moyens correspondants.
- La question de la responsabilité administrative des institutions respectives devra être tranchée. La commission consultative estime qu'une classe intégrée dans un bâtiment du cycle d'orientation devrait être considérée comme faisant administrativement partie du cycle d'orientation. La direction générale du cycle d'orientation estime pour sa part que cette question doit être examinée avec soin.
2.2.4 La classe intégrée
2.2.4.1 Généralités
Contrairement aux intégrations individuelles, la classe intégrée est une unité regroupant des élèves handicapés dans un bâtiment où se retrouvent les élèves ordinaires d'âge correspondant.
2.2.4.2 Avantages
Dans la suite des intégrations individuelles qui sont pratiquées actuellement, la classe intégrée pourrait apporter les avantages suivants :
- facilité des contacts avec les enseignants de l'établissement et renforcement de leur sensibilisation ;
- extension des temps d'intégration individuelle ;
- accès à l'intégration individuelle accru, en atténuant les inconvénients du transport ;
- développement par les élèves d'un sentiment d'appartenance à un groupe-classe, ce qui réduirait, entre autres, le stress qui peut accompagner l'élève bénéficiant d'une intégration individuelle.
2.2.4.3 Difficultés
Il ne faut toutefois pas taire les inconvénients d'une classe intégrée. Il s'agit, notamment :
- de l'articulation entre le rythme horaire bien marqué du cycle d'orientation, et la souplesse qui existe dans une classe où un changement d'activité peut rapidement être mis en place, si cela s'avère nécessaire ;
- du changement de norme : dans l'institution, l'élève handicapé passe la majeure partie de ses journées avec ses semblables, alors qu'il serait constamment confronté à la différence dans l'école ;
- du risque que la classe soit considérée comme une classe-ghetto ;
- de l'absence (éventuelle) de libre circulation dans l'établissement pendant les heures de cours ;
- de la disparition de l'avantage d'une intégration dans le cycle du quartier qui permet à l'élève de retrouver ses camarades de l'école primaire.
2.2.4.4 Problèmes à prévenir
Afin que les élèves puissent bénéficier des avantages énumérés ci-dessus et que les difficultés possibles soient surmontées, il importe que les conditions suivantes soient remplies :
Préservation du faisceau de relations tissées antérieurement entre enfants valides et enfants handicapés, du fait des intégrations scolaires déjà réalisées.
Présence d'un lieu d'accueil et thérapeutique externe.
Engagement de l'établissement concerné à assurer des intégrations pendant trois ans dans les trois degrés.
Mise à disposition des moyens nécessaires tant aux institutions qu'aux établissements du cycle.
Application de toutes les dispositions décrites dans les paragraphes précédents qui visent à améliorer les intégrations individuelles.
2.3 Conclusion
Toutes les mesures préconisées ou décrites plus haut vont dans le sens d'une amélioration des intégrations individuelles qui devraient permettre de mieux répondre à ce type de demande. Parallèlement, l'évaluation devrait nous conduire à développer d'autres réponses (moyens) dont la classe intégrée est une des formes possibles.
3. Mise en place d'une structure permettant d'offrir une intégration au cycle d'orientation a des adolescents mentalement handicapés
(Invite No 3)
3.1 Préambule
Les discussions nombreuses qui ont eu lieu entre la direction générale du cycle d'orientation et des spécialistes de l'intégration d'enfants mentalement handicapés en milieu scolaire ont permis d'établir que la création d'une nouvelle structure, c'est-à-dire l'ouverture d'une classe intégrée, pourrait engendrer des coûts considérables, les transferts de charges préconisés par la commission consultative de l'intégration scolaire n'étant pas toujours réalisables.
En effet, il faudrait
- au cours de l'année qui précède l'ouverture d'une telle classe :
² élaborer un projet d'école au sein d'un groupe constitué d'enseignants du cycle d'orientation et de l'institution spécialisée et de membres des directions concernées ;
- dès la première année d'ouverture de la classe intégrée :
² aménager deux locaux (deux demi-classes) pour accueillir les diverses activités de prise en charge des élèves en dehors des temps d'intégration en classe ;
² créer un poste d'enseignant et un poste d'éducateur spécialisé ;
² organiser et rétribuer les interventions d'un psychologue et d'un logopédiste auprès des élèves handicapés, des élèves ordinaires et des adultes de l'école ;
² rétribuer la charge supplémentaire pour les enseignants et la direction de l'établissement (participation aux colloques de l'institution spécialisée, préparations spécifiques dans leur discipline, activités complémentaires de formation continue, supervision, ...) ;
² acquérir ou louer un lieu d'accueil et thérapeutique extérieur proche du collège ;
² rétribuer un éducateur présent dans ce lieu d'accueil extérieur ;
² aménager et entretenir ce lieu d'accueil ;
² supporter le coût de la restauration des élèves pendant les pauses de midi ;
² supporter le coût du transport des élèves.
En conséquence, le Conseil d'Etat estime qu'il convient de mieux investir, voire de développer les structures existantes plutôt que d'en créer de nouvelles.
3.2. Concrètement
3.2.1 Dans le cadre de la formation continue, le cycle d'orientation organise à l'intention du personnel, un dispositif de sensibilisation à la question de l'intégration des élèves mentalement handicapés, sur la base du contenu de la réponse à l'Invite No 2 ci-dessus.
3.2.2 Attendu que le collège de Bois-Caran possède la plus longue expérience d'intégration d'adolescents handicapés mentaux en collaboration étroite avec l'institution spécialisée voisine (Grand-Chêne), la direction de cet établissement a été chargée d'établir un projet visant à :
² augmenter le nombre possible d'intégrations individuelles ;
² intensifier l'accueil des adolescents handicapés mentaux dans les cours réguliers ;
² développer la participation des adolescents handicapés mentaux aux activités hors classes organisées par l'établissement (journées sportives, semaines décloisonnées, fêtes de collège, repas, sorties scolaires, etc.) ;
² favoriser la prise de conscience par les élèves et les adultes travaillant dans l'établissement de l'enrichissement personnel que constitue le partage de la différence.
3.2.3 Le projet élaboré par le collège de Bois-Caran devra s'intégrer dans la concrétisation de la priorité no 4 de la rénovation du cycle d'orientation : « Participation et encadrement des élèves ». Ce projet, opérationnel dès la rentrée 1999 avec l'accord de la direction générale du cycle d'orientation, pourra, en cas d'évaluation positive, servir de modèle aux autres établissements du cycle d'orientation.
4. Evaluation de la structure mise en place
(Invite No 4)
4.1 Conditions générales
Les objectifs de l'intégration des élèves handicapés mentaux dans l'enseignement régulier étant particulièrement bien définis (voir point 1.1.3 ci-dessus), l'évaluation du dispositif mis en place au collège de Bois-Caran en sera d'autant facilitée.
4.2 Concrètement
4.2.1 L'évaluation de la structure expérimentée par le collège de Bois-Caran se fera au gré de réunions régulières regroupant le représentant de la direction générale du cycle d'orientation pour les questions d'intégration scolaire (directeur du service de la scolarité) et des représentants de la direction, du corps enseignant concerné et de l'Association des parents d'élèves du cycle d'orientation du collège de Bois-Caran, de l'institution Grand-Chêne, du Service médico-pédagogique et des parents des élèves handicapés sur la base de critères élaborés par le Service de la recherche en éducation.
4.2.2 L'évaluation finale de l'expérience après une année sera confiée à la Commission consultative de l'intégration scolaire qui devra fournir un rapport intermédiaire après le premier semestre de l'année 1999-2000.
4.2.3 Sur la base des conclusions de l'évaluation finale, décision sera prise par la présidente du département de l'instruction publique d'autoriser le maintien du dispositif expérimenté au collège de Bois-Caran et de l'étendre à d'autres établissements dès l'année scolaire 2001-2002, le rapport intermédiaire mentionné sous point 4.2.2 ci-dessus devant lui permettre de prendre une décision provisoire relative à l'année scolaire 2000-2001.
5. Conclusion
Le rapport de la Commission consultative de l'intégration scolaire laisse clairement apparaître qu'une classe pour élèves handicapés mentaux intégrée au cycle d'orientation ne pourrait pas s'articuler harmonieusement avec les classes régulières en raison principalement du rythme horaire très marqué de celles-ci. Il y aurait donc un risque majeur de marginalisation d'une classe intégrée, ce qui serait totalement contre-productif pour les élèves qui la fréquenteraient et ce qui ne permettrait pas d'atteindre les objectifs de meilleure prise en compte des différences et de tolérance par les autres élèves. Comme la multiplication de classes intégrées ne peut être envisagée, en raison du faible nombre d'élèves susceptibles d'y être accueillis, les jeunes gens et jeunes filles handicapés ne pourraient être assurés de trouver une classe dans leur quartier et seraient astreints à des déplacements qui leur feraient perdre le bénéfice d'avoir tissé des liens privilégiés avec leurs camarades de l'école primaire.
Enfin, la situation des finances publiques impose de ne pas engager des moyens importants dans la création d'une structure nouvelle dont l'efficacité n'est pas raisonnablement garantie.
Les mesures préconisées vont dans le sens d'une amélioration des intégrations individuelles qui devraient permettre de mieux répondre à ce type de demande. Parallèlement, l'évaluation devrait nous conduire à développer d'autres réponses.
Annexe p.19
Débat
Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). Le groupe socialiste n'est pas satisfait du rapport du Conseil d'Etat pour les raisons suivantes.
En préambule, le Conseil d'Etat donne le pourcentage d'élèves inscrits dans les structures spécialisées, qui est passé de 2,3% en 1980 à 3,1% en 1997. Nous ne pouvons donc pas parler d'intégration; au contraire, cela prouverait plutôt que la priorité est de placer les enfants dans des lieux spécialisés ! La référence au texte intégral du rapport de la commission consultative de l'intégration scolaire est inexacte, car ce dernier a été modifié et a donc perdu son sens initial. De plus, au chapitre des généralités, nous noterons que les chiffres sont dépassés, car ils datent de 1995/96. Cinq ans se sont passés depuis le dépôt de la pétition signée par cinq mille personnes... (Brouhaha.) Je suis bien consciente qu'il est tard, mais je pense tout de même que le sujet est important : nous parlons de l'intégration d'enfants handicapés au cycle d'orientation. Je me permets par conséquent de vous demander d'être un peu attentifs.
Par ailleurs, s'agissant de la violence et des problèmes dus à la violence qui ont été évoqués, l'expérience d'intégration mise en place à Martigny a rencontré un accueil favorable. A Paris également, des enfants autistes ont été intégrés sans aucun problème. De toutes façons, l'intégration des enfants mentalement handicapés doit se faire sur la base d'évaluations personnelles, personnalisées, modulables et souples.
L'affirmation figurant en page 8 est fausse, selon laquelle les activités de division élémentaire sont plus adéquates pour une intégration active et valorisante que dans l'extension en division moyenne. Cela n'est que spéculations.
Vous nous dites également que, depuis l'année 1994/95, le cycle d'orientation a répondu à huit demandes d'intégration individuelles et que le temps passé en classe a été de deux heures par semaine. Pour nous, cela ressemble plus à du «tourisme intégratif» qu'à de l'intégration ! Les enfants handicapés sont capables de suivre des cours de géographie, d'histoire, d'observation scientifique et pas uniquement des cours de dessin, comme on essaye de nous le faire croire !
En haut de la page 13, vous citez la commission consultative; toutefois, vous rajoutez une phrase qui change le sens voulu par la commission. Sur la même page, on trouve également des modifications du texte initial de la commission consultative, ce qui peut être analysé comme une révélation du mal-être par rapport au problème soulevé.
Je vais parler maintenant d'un point important qui a été bien mis en exergue dans le rapport du Conseil d'Etat, à savoir les coûts.
Elaboration d'un projet d'école. Il est évident que ce travail fait déjà partie du mandat de l'institution spécialisée. D'autre part, la commission consultative m'a même dit être prête à travailler bénévolement sur ce point.
Aménagement de deux locaux. Mais de quel aménagement parle-t-on ? On ne va pas capitonner des salles pour accueillir des enfants handicapés, comme des enfants trisomiques et des enfants autistes ! Il est évident qu'il n'y a aucun aménagement spécifique à faire, d'autant plus qu'il n'y aurait besoin que d'un seul endroit. Une salle de classe ordinaire suffit.
Création d'un poste d'enseignant et d'un poste d'éducateur spécialisé. Il s'agit là d'un transfert de charges de l'institution spécialisée au cycle d'orientation. Il n'y a donc absolument rien à créer.
Organisation et rétribution des interventions d'un psychologue et d'un logopédiste auprès des élèves handicapés... - écoutez-moi bien ! - ...des élèves ordinaires et des adultes de l'école... Alors là, on se retrouve dans un scénario digne de «Vol au-dessus d'un nid de coucous» ! En effet, si on peut comprendre qu'il faille suivre les enfants handicapés, pourquoi donc doit-on suivre les enfants dits «normaux» et les adultes du cycle d'orientation ? Il est évident qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un soutien psychologique pour fréquenter des enfants handicapés, et il va de soi que cela ne va pas nuire au bien-être des enfants. Au contraire, une telle mixité représenterait un apport tout à fait positif. Je trouve ces arguments scandaleux !
Rétribution de la charge de travail supplémentaire pour les enseignants. En analysant de près le dossier, il nous semble que c'est tout à fait exagéré.
Acquisition ou location d'un lieu d'accueil. Le cycle d'orientation des Voirets comporte déjà un centre d'appui et, pour le cycle d'orientation du Bois-Caran, le centre d'appui de Mancy ferait l'affaire. Il n'est donc pas nécessaire d'acquérir ni de louer un lieu d'accueil spécifique, puisqu'ils existent déjà.
Rétribution d'un éducateur. Il n'a jamais été question de rétribuer un éducateur présent dans ce lieu d'accueil.
Coût de la restauration des élèves à midi. Je ne sais pas comment vous voyez les choses, mais il est évident que ce sont les parents qui payent les repas de midi que ce soit pour les enfants dits «normaux» ou pour les enfants handicapés. Il n'y a aucune prise en charge de l'Etat à ce niveau-là.
Transport des élèves. Les Transports publics genevois sont là pour assurer les trajets des enfants, d'autant que l'abonnement des TPG est pris en charge par l'assurance-invalidité des enfants concernés.
Je vous disais donc que nous ne sommes pas satisfaits de ce rapport et sa conclusion nous fait réagir... Cette dernière n'est qu'une interprétation et ne représente pas la position de la commission consultative avec les membres de laquelle j'ai pu avoir de longues discussions. Il est très clair que la question des coûts cache en fait le fond du problème, c'est-à-dire la volonté politique de donner aux handicapés mentaux une structure scolaire obligatoire - puisque nous parlons d'enseignement obligatoire - digne et adaptée à notre société.
Un point anecdotique doit être noté : à plusieurs reprises, M. Claude Goldschmid, de la direction générale du cycle d'orientation, responsable du dossier «Intégration», a annoncé l'ouverture d'une classe intégrée. Ainsi, à la rentrée 1998, il a affirmé à une personne membre de la commission consultative qu'une classe s'ouvrirait en septembre 1999 à Bois-Caran, ce qui n'a pas été le cas...
Mesdames et Messieurs les députés, je ne vous demande pas l'impossible; je vous demande simplement de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, pour qu'il nous fournisse un nouveau rapport sur des bases plus documentées et, surtout, sur des faits, afin d'avoir une vision optimale et plus objective de la problématique de l'intégration des enfants handicapés au cycle d'orientation. Je demande donc formellement le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat pour qu'il nous fournisse un nouveau rapport dans un délai raisonnable.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Mme Castioni a excellemment évoqué ce qui ne nous apparaît pas tout à fait acceptable dans ce rapport au vu des développements qui se font et des volontés qui s'expriment dans ce domaine.
Ce document n'est visiblement pas destiné aux députés : c'est le rapport de la commission consultative de l'intégration scolaire sur un certain nombre de domaines, d'évaluations de l'expérience en cours, mais il ne répond pas point par point aux invites de notre motion. C'est la raison pour laquelle on flotte un peu à la lecture de ce document entre l'information, les explications sur les classes spécialisées, sur les classes intégrées, sur les intégrations individuelles, sur les intégrations partielles, etc. Il faut pratiquement un lexique pour le non-initié, s'il veut s'y retrouver ! Cela pour la forme.
Pour le fond. Les attentes développées par Mme Castioni rencontrent évidemment notre compréhension, et nous les partageons. Mais nous savons que toute cette problématique doit être posée à un niveau éthique particulièrement exigeant. Dans quel but veut-on intégrer les enfants handicapés au cycle d'orientation ? Si le but est l'apprentissage, l'éducation, l'instruction, il faut en fixer les conditions, sinon - je le dis carrément - c'est une hypocrisie...
Quelles sont ces conditions ? Il faut que le temps d'apprentissage se déroule toujours avec le même maître; qu'il y ait une continuité. Or, le rapport dit très clairement que cela est impossible à 100% dans une école qui divise son enseignement en heures, où l'on change de classe et de professeur à tout moment. Pour l'instant, les intégrations sont donc individuelles et partielles pour quelques enseignements qui s'y prêtent. On pourrait même imaginer que ce pourrait être l'enseignement du français ou des maths - pourquoi pas ? Pour l'instant, on en reste à des disciplines moins théoriques, mais, je le répète, la continuité est nécessaire.
Il faut ensuite que ce maître dispose d'une formation professionnelle spécialisée, et certains de ces maîtres qui effectuent ces intégrations ont reçu ou reçoivent ces formations. Autrement, il est trop difficile pour l'école et trop périlleux pour le maître d'assurer ces intégrations.
En Italie, où on a conduit une expérience pilote dans la suppression des enseignements spécialisés et dans l'intégration des enfants, il a fallu réorganiser l'ensemble des cours; il a fallu que les enseignants - tous les enseignants - reçoivent une formation supplémentaire spécifique; il a fallu aussi que parents et élèves des classes soient sensibilisés à la présence d'élèves apportant leur diversité, une diversité qui reste encore mal perçue dans la société en général et qui, je dois le dire, est souvent mieux perçue dans les écoles que dans la société.
Il faut peut-être aussi, pour réussir à intégrer des élèves au cycle d'orientation - et c'est là que le bât blesse, parce que le rapport n'en dit pas un mot - réviser la philosophie de l'école. L'intégration dans une école qui est sélective, d'orientation et, quand même, de compétition n'est pas souhaitable pour ces enfants qui vivront alors d'office une situation d'exclusion, puisqu'ils n'avanceront pas dans un système de sélection pour des raisons bien évidentes.
C'est la raison pour laquelle nous sommes bien conscients que si, au plan de la socialisation, ces intégrations peuvent faire du bien aux enfants, à leur environnement, à leur famille, il faut quand même garder à l'esprit que si l'enfant handicapé n'acquiert pas de savoir et s'il est exclu du savoir que ses camarades acquièrent, il y a sélection et donc échec de l'enfant. Et ce n'est certes pas dans ces conditions que l'on peut souhaiter l'élargissement des intégrations.
Le département est allé à petits pas dans un dossier que les socialistes, je dois le dire, défendent avec beaucoup d'opiniâtreté depuis de nombreuses années. Nous avons toujours soutenu leur combat, mais je voudrais éviter l'hypocrisie qui consisterait à dire qu'il faut continuer à aller de l'avant sans envisager à aucun moment, dans aucune des modifications envisagées à l'école primaire ou au cycle d'orientation, de changer la philosophie de l'école. Et j'attends qu'on nous en dise un mot dans un prochain rapport. Toutes ces idées, je le sais, sont débattues à l'école, au cycle d'orientation, au département, par les enseignants, par les parents et par les politiques, comme à la commission de l'enseignement. Il est indispensable que la vie scolaire permette à tout un chacun de se former, y compris aux enfants qui sont en difficulté.
J'ai envie de vous dire, Madame Castioni, que l'on peut renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, et je soutiendrai peut-être ce renvoi au terme de ce débat. Mais j'aimerais surtout solliciter le Conseil d'Etat pour qu'il renforce les expériences qu'il a inaugurées et que l'on réfléchisse à un enseignement qui permette d'intégrer non seulement ces enfants individuellement, mais éventuellement toute une classe, notamment dans les cycles d'orientation qui ont des classes hétérogènes en 7e et dans les troncs communs. Cela pourrait se faire à Bois-Caran ou aux Coudriers. Ce petit pas, toujours expérimental, donnerait peut-être de l'espoir à ceux qui se battent depuis si longtemps pour changer quelque chose dans l'exclusion dont sont encore victimes les enfants qui présentent des handicaps. Je suis persuadée que ce problème ne peut être résolu que par un changement de philosophie de l'école. Et c'est dans ces classes pilotes que cette expérience pourrait être tentée.
Si le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat doit permettre au département de s'exprimer sur ces questions - qui ne sont pas d'hier mais de demain - je le soutiendrai et mon groupe avec moi.
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Nous ne pouvons que féliciter le département de l'instruction publique de sa politique d'intégration. On ne fait jamais assez pour les enfants et les adolescents qui ont des besoins spéciaux.
On constate que dans l'enseignement primaire l'intégration se poursuit selon une ligne pédagogique claire et diversifiée. Les conditions d'accueil des intégrations, sans cesse évaluées, sont d'un niveau remarquable, soutenues par les enseignants, les éducateurs spécialisés, les chercheurs, les parents. Ce partage d'objectifs fait de l'intégration en primaire un investissement bien ciblé. Mais l'intégration a quelques limites. Intégration signifie : faire partie intégrante. Et l'on réalise que si l'intégration est facilement réalisable dans la division élémentaire, elle l'est déjà un peu moins dans la division moyenne et elle devient très délicate au cycle. En effet, l'expérience faite en Italie montre que l'intégration «à travers tout» n'est pas une solution, ni pour l'élève qui a des besoins spéciaux ni pour les autres élèves. De plus, constituer une classe spécialisée en parallèle des autres classes n'est pas non plus une solution.
Néanmoins, ce problème est complexe et, dans l'objectif d'optimiser l'offre, le groupe radical propose de renvoyer cette motion en commission de l'enseignement.
Mme Janine Hagmann (L). Le groupe libéral a pris connaissance avec intérêt de ce long rapport sur un sujet véritablement difficile.
La commission de l'enseignement, dont je faisais déjà partie à l'époque, avait travaillé non seulement avec sa tête mais aussi avec son coeur avant de «pondre» la motion 1001. Les réponses apportées par le Conseil d'Etat sont largement explicitées. Une première constatation s'impose : une intégration d'enfants différents est plus facile dans les petits degrés que plus tard. Dès l'adolescence, des solutions spécifiques doivent être trouvées. Un suivi pédagogique qui corresponde à la problématique de chaque enfant devrait être mis en place.
Il faut donc, à mon avis, beaucoup plus qu'une simple volonté politique pour réunir les conditions utiles et nécessaires à un fonctionnement adéquat. Apparemment - vous l'avez tous et toutes dit avant moi - tout va bien à l'école primaire, mais certains problèmes surgissent au niveau du cycle.
Madame Castioni-Jaquet, vous semblez mettre en doute l'affirmation de ce rapport qui dit que l'expérience de ces dernières années est positive. Je voudrais insister sur l'intensification de l'information de tous les acteurs. Je ne sais si vous vous rendez compte, Mesdames et Messieurs les députés, que pour un seul cas, il s'agit souvent de regrouper de nombreux partenaires. J'ai vécu d'une façon très proche un cas d'intégration. Eh bien, figurez-vous que pour un seul enfant, huit personnes étaient convoquées à chaque décision qu'il fallait prendre ! Il faut d'ailleurs apprécier cette prise de conscience et cette volonté de trouver des solutions pour chaque cas.
Renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat va-t-il vraiment améliorer la situation ? Vous n'êtes pas satisfaits, vous trouvez quelques imperfections à ce rapport, même quelques imprécisions... Ok ! J'admets ! Pour moi, ce rapport montre un réel souci, dans la réflexion, de traiter chaque cas. Chaque fois qu'une intégration individuelle sera possible, elle sera proposée aux parents et aux nombreux intervenants, qui s'occupent de cas souvent très lourds.
La création de classes intégrées au cycle poserait effectivement quelques problèmes. La multiplication de classes intégrées ne peut être envisagée : il ne faut pas rêver ! D'abord, le nombre des élèves susceptibles d'y être accueillis est très faible. Les jeunes gens et jeunes filles ne pourraient être assurés de trouver une classe dans leur quartier et devraient de toute façon être astreints à des déplacements qui leur feraient perdre le bénéfice d'avoir tissé des liens privilégiés avec leurs camarades de l'école primaire.
Je tiens tout de même à rappeler que nous pouvons être fiers d'avoir un excellent service médico-pédagogique à Genève. Les gens qui ont fourni les éléments pour établir ce rapport, je les ai moi aussi contactés, Madame ! Ce sont des gens de terrain, ce ne sont pas des théoriciens. Ils sont proches de la réalité. Pour votre information, on m'a signalé que l'année dernière trois enfants de Mancy bénéficiaient d'une intégration à Bois-Caran. Savez-vous combien il y en a cette année, vérification faite hier ? Onze ! Et cette intégration demande effectivement de gros efforts au corps enseignant que nous ne pouvons que remercier. Ne croyez vraiment pas, Madame, que je minimise la souffrance des parents d'enfants différents, ni leur volonté de donner à leur enfant les mêmes chances que les autres ! Mais je sais que le département est aussi conscient de ce problème et qu'il étudie chaque cas avec bienveillance.
C'est pourquoi, au nom du groupe libéral, je prends acte de ce rapport avec satisfaction et remerciements.
M. Albert Rodrik (S). Madame la présidente, permettez-moi de vous faire deux remarques en toute amitié, et ne les prenez pas pour de la pédanterie !
Quand des commissions consultatives spécialisées et des services très spécialisés livrent des rapports de ce genre et dans des domaines aussi délicats et pointus, ils ne peuvent pas... (Brouhaha.)
Une voix. Oh ! mais c'est incroyable, ils font un de ces bruits !
M. Albert Rodrik. ...ils ne peuvent pas ne pas transiter par l'autorité politique qui y ajoute un vrai message politique sur la finalité de l'entreprise, finalité qui doit apparaître clairement et non pas être noyée dans les détails techniques... Ce message fait défaut. Ayant pratiqué dans ce domaine, je n'ai pas beaucoup de doutes sur le fondement, l'objectif poursuivi, mais il n'apparaît pas. Il est pourtant important qu'au-delà du fatras de détails techniques et explicatifs, à chaque fois que l'on a affaire à ce genre de chose, le message politique du chef - de la cheffe - de département, du Conseil d'Etat apparaisse. Et tant que cela n'est pas, on se noie dans les détails.
Deuxième chose que je vous dis tout aussi amicalement : les services très spécialisés, le SMP mais d'autres aussi dans l'administration, ont tendance à dire : tout va très bien, je sais, merci, rompez ! Il appartient, sur ce point également, que le chef du département fasse passer ce message par un filtre critique, parce qu'il est, comme élu, le représentant, je dirais, de l'usager potentiel. Cela n'est certes pas facile, car cela touche un domaine très particulier. Le message que je ferais passer à mes anciens collègues du SMP est le suivant : l'insatisfaction des milieux concernés, des parents et des proches n'est pas un «emmerdement» mais, comme le disait Jaques Vernet, «un engrais qui permet de faire mieux» ! C'est peut-être cela qui fait défaut, et c'est pour cela que le groupe socialiste demande au département un nouveau rapport avec un message clair de son intention d'intégration.
Nous savons bien qu'il ne faut pas idéaliser l'intégration à tout prix, parce que l'on risque l'échec, alors que l'enfant qui est intégré dans une classe spécialisée doit être dans une voie de succès par rapport à sa propre trajectoire et par rapport à ses propres possibilités. Ni l'intégration dans une classe ordinaire ni l'intégration dans une classe spéciale ne sont une calamité. Ce qui est fait doit l'être pour le bonheur de l'enfant, et il n'y a pas de jugement de valeur à porter dans l'un ou l'autre cas. Par contre, l'aiguillon que constitue le mécontentement inévitablement constant des milieux proches doit être considéré comme une incitation à faire mieux et à mieux expliquer.
Je le répète, je fais ces remarques en toute amitié, Madame la présidente !
Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). Je vous remercie de vos propos, Madame Hagmann. Je ne mets absolument pas en doute les compétences des personnes qui ont travaillé sur ce rapport, que ce soit au niveau de la commission consultative ou au niveau de l'Etat. Je ne porte évidemment pas de jugement de valeur.
Vous dites que les enfants handicapés peuvent avoir les mêmes chances que les autres enfants... Ce n'est malheureusement pas possible ! Il n'auront jamais les mêmes chances, mais le peu qu'on peut leur apporter est déjà important. Il faut évoquer ce problème avec un regard un peu différent et ne pas penser qu'un enfant handicapé va mobiliser huit, six ou quatre personnes. Ce qui compte, c'est que l'enfant handicapé puisse bénéficier d'un minimum d'intégration dans l'école obligatoire. Certains se demandent ce qui va se passer ensuite. C'est un autre problème.
Pour le moment, on ne parle que de l'enseignement obligatoire, dont fait partie le cycle d'orientation. Cela semble évident à tous les parents d'enfants handicapés. Il n'y a pas de raison que les enfants qui ne sont pas dans les mêmes normes que les autres n'aient pas droit au moins à l'enseignement obligatoire, même si c'est à dose homéopathique. Ce droit, revendiqué par tous les parents d'enfants handicapés, paraît légitime.
C'est pour cela que j'insiste pour vous demander de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat.
M. Roger Beer (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés - en tout cas ce qu'il en reste - je me sens un peu emprunté...
Pour ma part, je ne prétends pas, Madame la présidente, que vous répondiez à une motion dans les six mois, car je comprends que vous êtes débordée et que vos services ne peuvent pas faire davantage. En tant que motionnaire, je suis satisfait de ce rapport, car il permet de se rendre compte de la manière de travailler dans notre République. Ce rapport montre que le problème dont nous discutons est pris en considération. A mon avis, la commission consultative de l'intégration scolaire a bien travaillé et elle a fait le tour de la question très objectivement. Maintenant, nous devons savoir quelles seront concrètement les conséquences de notre motion. Alors là, j'hésite entre vos arguments, Madame Hagmann, que je comprends parfaitement de par votre métier d'institutrice, et vos attentes non satisfaites, Monsieur Rodrik !
Si nous renvoyons ce rapport au Conseil d'Etat, que va-t-il se passer ? On va remettre 20 centimes dans la machine, la commission va se réunir, les différentes instances de l'instruction publique seront auditionnées et des pages seront à nouveau noircies. Nous obtiendrons ensuite un nouveau rapport dans huit mois, deux ou trois ans, dont on ne sera vraisemblablement pas beaucoup plus satisfait. Je peux comprendre la frustration de certains et leur désir de renvoyer sa copie au Conseil d'Etat. A titre tout à fait personnel - puisque le groupe radical est plutôt favorable au renvoi au Conseil d'Etat - je trouve que c'est inutile.
Madame la présidente du Conseil d'Etat et du département de l'instruction publique, je voudrais vous dire qu'à mon avis l'intégration des jeunes handicapés après l'école primaire - car je crois qu'à l'école primaire cela marche assez bien - ne peut se faire qu'à une seule condition : la motivation des enseignants. Je vous demanderai donc, à vous la présidente du département, de motiver les directions qui à leur tour motiveront les groupes d'enseignants pour qu'ils acceptent une telle charge. Et pour cela, je ne vois pas comment le Grand Conseil va faire avancer les choses en vous renvoyant ce rapport. C'est à vous de le faire. En tant que député, je ne peux que vous le demander. En vous donnant le signe de notre mécontentement, même si nous comprenons bien que cette problématique ne peut être réglée par un simple rapport, nous députés du Grand Conseil attendons de vous, en tant que présidente du département, que vous motiviez vos nombreuses troupes pour que des groupes se forment afin d'agir positivement sur cette problématique.
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je tiens tout d'abord à rappeler à certains d'entre vous que cette motion a une histoire et que je n'ai pas cru devoir rappeler tous les éléments fournis largement en son temps à la commission de l'éducation, que ce soit sur la politique d'intégration du département ou sur mon appréciation personnelle...
Monsieur Rodrik, mon appréciation n'était pas fondée sur la base de ce que disaient les collaborateurs des services, mais sur les constatations sur le terrain que j'avais faites moi-même, suite à la demande de certains parents qui souhaitaient qu'une classe soit intégrée au cycle d'orientation. Je me suis alors rendue sur les lieux sans prévenir personne - à l'insu de l'administration - pour pouvoir me rendre compte de la situation par moi-même; seule ma secrétaire générale m'a accompagnée. Ensuite, j'ai reçu personnellement tous les parents concernés pour faire le tour de la question. C'est cela le début de l'histoire de cette motion. Et, effectivement, ce qui avait été dit par les collaborateurs des services concernés était pertinent par rapport au cas en question.
C'est d'ailleurs si vrai que la plupart des parents ont ensuite renoncé à leur demande. D'ailleurs, si nous avions cédé, les enfants auraient probablement rencontré de grandes difficultés, alors qu'ils ont eu un parcours beaucoup plus heureux dans des structures adéquates, adaptées à leur cas particulier... En l'occurrence, l'intégration de cette classe n'aurait pas été la solution, et, pourtant, c'est ce que demandaient les parents à l'époque.
Alors, je me sens relativement indépendante, pour de nombreuses raisons qui n'ont rien à voir avec ce Grand Conseil et aussi parce que je me suis donné la peine d'écouter et d'observer, sans passer par l'administration. Ensuite, le Grand Conseil s'est préoccupé de ce problème, par le biais d'une pétition, dont nous avons débattu en commission de l'enseignement. La politique du département a alors été largement expliquée, qu'elle ait été appréciée ou non. Puis une motion qui a été déposée a fait l'objet d'un rapport, dont la rédaction a effectivement été confiée à la commission consultative, qui a mis beaucoup de temps pour différentes raisons, notamment parce que le texte a dû être repris deux fois, car il ne répondait pas à toutes les questions qui étaient posées. Cette commission consultative n'est pas composée que de fonctionnaires et, s'il y en a, ils ne sont certainement pas majoritaires, puisque tous les milieux intéressés y sont représentés.
Cela dit, le département - et non le rapporteur - indique ce qu'il compte faire concrètement et notamment au point 3.2.1 - raison de vos préoccupations - je cite : «Dans le cadre de la formation continue, le cycle d'orientation organise à l'intention du personnel un dispositif de sensibilisation à la question de l'intégration des élèves mentalement handicapés, sur la base du contenu de la réponse à l'invite n° 2». Cela signifie bien des mesures concrètes de formation pour les enseignants !
Au point 3.2.2, il est dit que le collège de Bois-Caran, qui possède la plus grande expérience d'intégration d'adolescents handicapés mentaux, est chargé :
«d'augmenter le nombre possible d'intégrations individuelles;
d'intensifier l'accueil des adolescents handicapés mentaux dans les cours réguliers;
de développer la participation des adolescents handicapés mentaux aux activités hors classes organisées par l'établissement (...);
de favoriser la prise de conscience par les élèves et les adultes travaillant dans l'établissement de l'enrichissement personnel que constitue le partage de la différence.»
Le projet - on parle bien d'un projet - devra s'intégrer dans la concrétisation de la priorité qui est donnée au cycle d'orientation dans son ensemble, intitulée : «Participation et encadrement des élèves». Il est dit par ailleurs que ce projet pourra être étendu, en cas d'évaluation positive, à d'autres établissements dès l'année scolaire 2001/2002, puisque d'ici là j'aurai les informations pour prendre les décisions nécessaires.
Alors, moi je veux bien que vous exprimiez votre insatisfaction à la lecture de ce rapport. Mais je suis navrée de vous dire que le département a apporté des réponses claires à toutes les demandes, en fixant des délais, en mettant un cadre et en indiquant une intention politique sans ambiguïté. Alors, on peut toujours débattre à l'infini pour savoir si la meilleure solution, c'est une classe intégrée ou non. Vous avez tout de même été nuancés, puisque vous avez exprimé que ce qui primait était la volonté de trouver une voie d'intégration pour chacun lorsque c'est possible.
Madame Deuber Ziegler, vous dites qu'il faut d'abord changer la philosophie du cycle... Je ne partage probablement pas vos idées à ce sujet, mais je suis au moins d'accord sur un point : c'est que l'intégration ne doit pas obéir à une idéologie; elle doit répondre à l'intérêt de l'enfant concerné. La solution d'une classe intégrée n'aurait été souhaitable pour aucun des enfants concernés, et c'est bien pour cette raison que nous avons recherché des solutions beaucoup plus souples.
Vous reprochez au département de ne pas donner suite : non seulement il donne suite, mais il exprime ses intentions. Seulement, il avance de façon progressive car, comme vous l'avez dit, une opération de sensibilisation ne se fait pas en deux minutes ! Il faut former, il faut renseigner, il faut aussi habituer les gens à certaines idées, et cela prend du temps. Vous reconnaissez que l'intégration se passe bien à l'école primaire : c'est bien parce qu'il y a une réelle volonté politique d'intégration ! Cette volonté politique ne varie certes pas en fonction du niveau de l'enseignement, mais nous essayons en permanence de trouver les meilleures solutions, ce qui n'implique pas de répondre favorablement à n'importe quelle demande.
Mesdames et Messieurs les députés, renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, c'est refuser de prendre acte de son programme et des efforts qui sont faits dans ce domaine. Cela serait regrettable pour toutes les personnes de l'administration qui s'engagent sur le terrain et qui cherchent à trouver les solutions les meilleures en leur âme et conscience. Monsieur Rodrik, vous savez bien que je n'ai jamais été l'otage de l'administration dans les arbitrages que je suis amenée à faire, et ça n'est pas parce que l'administration émet un avis que je le suis - parfois, on me le reproche peut-être. Nous essayons simplement de faire le mieux possible, et cela dans l'intérêt de tous les élèves.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Je vous remercie, Madame la présidente, de vos explications qui éclairent un tout petit peu la portée du rapport.
Je relève toutefois en page 3 : «On trouvera, en réponse aux invites n° 1 et n° 2 ci-dessous, le texte intégral du rapport de la commission consultative de l'intégration scolaire (texte en caractères italiques ).» Mais le texte n'est pas en caractères italiques : il faut donc comprendre de quel texte il s'agit ! Dans la méthodologie du rapport aux invites n° 3 et n° 4 le ton ne change pas : on ne trouve que des «devrait», «doit», etc. Ce sont des déclarations d'intention ! Vous venez de nous éclairer en disant qu'au point 3.2 ce qui est annoncé se fait. C'est la réponse que j'attendais de vous et je pense que nous pouvons nous féliciter que le département soit entré dans cette brèche et que le collège de Bois-Caran accepte de poursuivre cette expérience. Nous attendrons le rapport d'évaluation de cette expérience et je renonce, pour ma part, à demander le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat.
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Je veux simplement dire que nous sommes d'accord de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat... (Exclamations.) Pardon ! De l'accepter, d'en prendre acte. C'est la fatigue...
Le président. Il est proposé de prendre acte de ce rapport. Il avait également été proposé de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat... Madame Castioni, vous avez la parole !
Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). Je voudrais simplement confirmer la demande de renvoi du rapport au Conseil d'Etat... Je suis comme Mme de Tassigny : je me suis endormie, excusez-moi !
Le président. Pour simplifier les choses, nous allons voter sur la proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat. Ceux qui l'acceptent le manifestent en levant la main... (Exclamations.)
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
La proposition de renvoyer le rapport au Conseil d'Etat est rejetée par 43 non.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.