République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1225-A
13. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mme et MM. Régis de Battista, René Longet, Luc Gilly, Christian Ferrazino, David Hiler et Caroline Dallèves-Romaneschi concernant la PC au repos. ( -) M1225
Mémorial 1998 : Annoncée, 3595. Développée, 6802. Adoptée, 6809.

La présente motion, renvoyée le 3 décembre 1998 au Conseil d'Etat, invite celui-ci à poursuivre la restructuration de la protection civile (PCi) en envisageant de :

1. transférer les tâches dévolues à la PCi à d'autres organisations ;

2. répartir le personnel et le matériel en fonction des besoins, en direction de structures publiques et associatives ;

3. veiller à ce qu'en cas de catastrophe l'ensemble des structures concernées soient efficacement coordonnées ;

4. décréter un moratoire sur les investissements en matière de PCi d'une durée de 10 ans.

Lors des débats du 3 décembre 1998 du Grand Conseil, le Conseil d'Etat a indiqué qu'il acceptait volontiers que la motion lui soit renvoyée, dans la mesure où ses intentions sont d'ores et déjà largement prises en compte dans l'organisation cantonale actuelle et dans la future organisation de partenariat dénommée « Sécurité Civile Genève » (SCGe). Ainsi, la réponse donnée à la motion constitue pour le Conseil d'Etat l'occasion de faire état des travaux en cours.

Vers une sécurité civile globale

Une protection civile voulue par le peuple

Avant de répondre aux invites des motionnaires, il est utile de se référer à la législation fédérale en matière de protection civile, révisée en 1994 : « La PCi a pour but de protéger la population contre les effets de catastrophes, de situations extraordinaires ou de conflits armés et contribue à la maîtrise de tels événements ». Dans cette définition, on constate que l'objectif prioritaire n'est plus le conflit armé, mais bien la contribution d'une institution - voulue par le peuple en 1959 pour protéger la population en cas de guerre - à la résolution de sinistres majeurs ou à la prévention d'événements dont les issues pourraient être dramatiques. Somme toute, la protection civile est utile tous les jours dans des actions souvent ignorées du grand public. Ainsi, le service hélicoptère est intervenu 273 fois en 1998 pour des missions de sauvetage sanitaire. Le détachement des spécialistes en dépiégeage a été engagé 209 fois en 1998 pour identifier et détruire des objets ou colis susceptibles de contenir des explosifs.

La réforme de 1991

Dès lors, la mission de la PCi genevoise pouvait être envisagée sous une nouvelle forme. En effet, le service de la PCi est régi par une obligation de servir dès l'âge de 20 ans ou à la libération du service militaire, soit, actuellement, 42 ans. Les effectifs des organisations de PCi étaient donc pléthoriques (25'000 pers.) et venaient s'ajouter à ceux des corps de sapeurs-pompiers (environ 2000 pers.) motivés, mieux équipés et bénéficiant d'une formation continue. C'est ainsi qu'en 1991, le conseiller d'Etat Claude Haegi - fort d'une réforme largement demandée par la population - anticipait la nouvelle législation fédérale et décidait la création d'une sécurité civile réunissant sous une seule direction l'Inspection cantonale du feu et le Service cantonal de la protection civile.

L'engagement des personnes astreintes, leur formation et l'organisation même de la PCi ont été profondément modifiés. Ainsi, ont été retenus des astreints motivés et volontaires qui se sont engagés pour une durée de cinq ans, renouvelables. Quelque 900 d'entre eux - désignés sous l'appellation de « spécialistes » - ont été incorporés dans des formations cantonales d'assistance, de génie civil, de logistique et sanitaire. Le solde des astreints, après avoir reçu une brève information et instruction de trois jours, était attribué aux communes. Ce sont les « généralistes » qui n'interviendraient, pratiquement, que pour le cas de conflit armé.

Sur le plan organisationnel, le regroupement en treize régions des quarante-cinq communes a permis une meilleure efficacité dans le commandement, une répartition plus judicieuse des constructions protégées et du matériel d'intervention et, enfin, une économie non négligeable de 45 millions de francs depuis 1991.

Ainsi, en 1993, la PCi genevoise avait déjà réalisé une profonde réforme - notamment par le transfert aux sapeurs-pompiers de la mission de lutte contre le feu - plus proche de la population et de ses préoccupations quotidiennes, alors qu'à Berne débutait une réflexion similaire au terme de laquelle une nouvelle loi était adoptée par les Chambres fédérales.

Audit Arthur Andersen

En 1997, les conclusions du rapport Arthur Andersen proposent une nouvelle répartition des tâches et des compétences entre le canton, la Ville de Genève et les communes. On parle régionalisation pour, d'une part, renforcer la position d'interlocutrice de chaque commune par rapport au canton et, d'autre part, partager les ressources, équipements et infrastructures. En ce qui concerne la sécurité civile, il est préconisé de développer la complémentarité des moyens de prévention, de formation et d'intervention. C'est ainsi qu'en 1998, une nouvelle étape de réforme des services de l'administration cantonale est accomplie avec la mise en place d'un nouveau fonctionnement de la sécurité civile cantonale intégrant l'inspection du feu, la protection civile cantonale et le service hélicoptère. Cette structure fonctionne depuis le 1er janvier 1999.

Rapport Brunner

Au début 1998, les conclusions du rapport de la Commission d'étude pour les questions stratégiques (Commission Brunner) sont publiées. Une profonde réforme est souhaitée dans le domaine de la défense générale.

La commission recommande de donner aux cantons la compétence d'organiser la PCi, selon les nécessités locales et en étroite collaboration avec les sapeurs-pompiers et les services techniques communaux. Les effectifs doivent être fortement réduits pour gagner en motivation et efficacité. La Confédération doit se borner à fixer le cadre légal et à fournir des appuis ponctuels dans les domaines de la formation et de l'acquisition du matériel. L'infrastructure des abris doit être maintenue, mais son développement arrêté. Enfin, l'obligation de servir concerne aussi bien la PCi que l'armée.

Les propositions formulées dans le rapport Brunner, reprises dans le rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la politique de sécurité de la Suisse (RAPOLSEC 2000), sont reçues très favorablement par la majorité des 306 autorités et organismes consultés, en particulier par le canton de Genève.

Restructuration 1999

Fort de ces constats et d'une expérience commencée en 1993, la direction de la sécurité civile a opéré récemment un changement structurel important au sein des formations rapidement engageables et a planifié la mise en oeuvre des mesures d'optimisation fédérales dans les organisations de PCi communales.

Concernant les quelque 25 000 astreints du canton, 12 000 bénéficient d'une information au Service de la protection civile au cours d'un rapport d'incorporation d'environ trois heures dans leur organisation communale d'attribution. A cette occasion, les astreints ont la possibilité de se porter volontaires pour poursuivre leur formation. Sur cette base, 7000 personnes suivent une instruction avant d'être remises aux organisations communales. Le solde, rendu attentif à ses obligations, est en réserve et ne suit aucune formation.

La Ville de Genève - qui est une organisation communale tout comme une autre commune - a conservé, lors de la réforme de 1993, au contraire des communes suburbaines, une structure lourde de huit secteurs, alors que le concept cantonal en prévoyait quatre. Ainsi, le maintien d'une organisation de cette importance implique des efforts financiers plus soutenus dans des secteurs tels que l'instruction, le matériel, les constructions et le fonctionnement (encadrement professionnel). Encore cette année, l'organisation PCi de la Ville de Genève incorporait les personnes libérées de leurs obligations militaires, alors que les mesures d'optimisation prévoient la diminution des effectifs en favorisant particulièrement les classes d'âges les plus jeunes.

En ce qui concerne les « spécialistes », sans en altérer leur efficacité, l'effectif a été ramené de 900 à 500 personnes volontaires, réparties dans trois domaines d'activités :

l'assistance, formée d'un détachement auquel est rattaché un groupe de psychologues ;

le sauvetage, composé de deux détachements - un sur chaque rive - auxquels est rattaché le groupe des chiens de recherche en décombres et de surface ;

Le sanitaire, constitué de deux détachements, l'un exploitant un poste sanitaire de 160 lits sous le centre commercial de Balexert, l'autre plus mobile, capable d'équiper et de gérer un poste médical avancé sur un lieu de sinistre ou d'exploiter également un autre poste sanitaire protégé de 130 lits situé à Plan-les-Ouates.

Il serait certainement possible de transférer encore une partie des tâches décrites ci-dessus à l'armée, dans le cadre des missions définies dans RAPOLSEC 2000. Cela répondrait à la première invite de la motion. Toutefois, et c'est une volonté de tous les gouvernements cantonaux, les troupes de sauvetage de l'armée et ses moyens extraordinaires ne doivent être engagés qu'à la demande des cantons et en extrême limite, après avoir épuisé toutes les capacités civiles dont dispose le canton.

C'est du reste ce schéma, cohérent, qui a été appliqué dans le scénario de l'exercice franco-suisse LEMAN 99 qui s'est déroulé à Genève le 1er juillet. Les éléments de sauvetage, d'assistance et sanitaire de la protection civile genevoise en ont été partie intégrante parce que considérés comme indispensables dans ce genre d'engagement.

Par ailleurs, il faut tenir compte d'un certain laps de temps entre le moment où la demande d'aide militaire parvient au Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports et la mise à disposition des troupes de sauvetage. D'où la nécessité, pour le canton, de disposer d'un minimum de formations rapidement engageables.

Trois exemples récents illustrent également l'utilité pour le canton de pouvoir s'appuyer sur des éléments de la protection civile :

le crash du vol SR 111 en septembre 1998, où quelques minutes après l'annonce de la catastrophe, le groupe de soins psychologiques de la sécurité civile a également été mobilisé à l'aéroport. Durant cinq jours à Genève et à Halifax, ses membres ont apporté un soutien sans relâche aux proches des victimes ;

l'accueil et l'hébergement des demandeurs d'asile. Et quand bien même chacun s'accorde à penser que le logement provisoire des requérants dans des abris souterrains n'est pas l'idéal, c'est, faute de mieux, une solution qui a dû être envisagée pour répondre à une situation d'urgence. Or, l'exploitation des ouvrages protégés nécessite la mise sur pied d'un personnel spécialement formé. Qui mieux que la protection civile peut ainsi apporter son soutien, dans la durée, aux oeuvres caritatives accueillant les requérants d'asile ?

de même, quelle autre organisation que celle de la protection civile est la mieux adaptée aux travaux de remise en état de zones sinistrées ? C'est toujours vers la protection civile que les autorités tournent leur regard pour obtenir des bras là où les machines sont inopérantes. C'est ainsi que sur les deux fronts des avalanches l'hiver dernier, puis des inondations ce printemps, plus de 20'000 jours de service ont été accomplis dans 75 zones sinistrées. La protection civile genevoise n'est pas restée insensible à l'appel d'une aide confédérale. Du 6 au 25 juin, quelques 180 pionniers de sauvetage, à raison de rotations hebdomadaires d'une soixantaine de personnes, ont été engagés à Grimentz (Val d'Anniviers) dans le cadre d'un engagement volontaire.

Tout comme les secours feu, les formations de protection civile peuvent, à la demande de l'Etat requérant, prêter assistance dans les départements français limitrophes (accord franco-suisse du 14 janvier 1987). Enfin, Genève souhaite jouer un rôle actif dans la promotion de la paix par des actions au profit de la communauté internationale. Ainsi, le concours de forces de la PCi pourrait être retenu. A ce sujet, des discussions sont actuellement en cours avec l'Autorité fédérale pour l'instauration d'une collaboration étroite de la PCi avec le CICR. Il s'agit, en particulier, de permettre à des personnes bien formées de la PCi d'être incorporées au sein des délégations du CICR.

Sécurité civile intégrée

L'organisation actuelle de la PCi genevoise répond à la loi d'application cantonale des dispositions fédérales en la matière, soit, en premier échelon, les détachements cantonaux des spécialistes dont il a été question auparavant, et, en deuxième échelon, les miliciens des organisations communales ou régionales. Cette structure est intégrée dans le plan ISIS qui régit toutes les interventions dans le canton, quelle que soit l'importance du sinistre.

Outre ces principales tâches d'intervention, la PCi doit assumer celles liées à l'instruction de base et des cadres, organiser l'alarme et l'information de la population, surveiller l'application des mesures incombant aux communes et groupement de communes et édicter les directives relatives aux constructions protégées.

L'unité de commandement, que ce soit pour l'organisation de tous les services apportant les secours aux populations ou leur engagement proprement dit lors d'un sinistre, est capitale. Elle est gage de cohérence et d'efficacité. Or, actuellement, c'est une faiblesse de notre système où l'on constate des commandements distincts entre les sapeurs-pompiers et les organisations de protection civile.

Les réflexions conduites au sein de commissions (Brunner, Sapeurs-pompiers 2000) ou au travers d'audits (Arthur Andersen) ont incité le Conseil d'Etat, le Conseil administratif de la Ville de Genève et l'Association des communes genevoises, au lancement d'un projet prioritaire pour les trois entités précitées, à savoir une organisation intégrée de la sécurité civile dans le canton. En effet, si, en matière PCi, Genève a joué un rôle de pionnier, les autres secteurs de premiers secours, notamment celui de la défense incendie, n'ont pas été impliqués dans un effort de meilleure coordination et de complémentarité des moyens dans la prévention, la formation et l'intervention.

Un groupe de projet a donc été institué à la mi-1998 sous la dénomination « Sécurité Civile Genève » (ci-après SCGe), lequel a d'ores et déjà rendu un  certain nombre de rapports, notamment diffusés sur Internet (http ://www.scge.ch). Sa direction est confiée aux trois secrétaires généraux des collectivités déjà citées ; un comité de coordination, constitué de fonctionnaires et de délégués représentant les parties, travaille sur un ensemble de sous-projets.

Les objectifs fixés au groupe de projet par les autorités répondent à l'attente des motionnaires et notamment à la troisième invite de la motion :

évaluation impartiale des risques ;

suppression des doublons ;

maîtrise et économie des moyens ;

gestion financière efficace.

Parmi les travaux en cours qui touchent une quinzaine de secteurs, le concept d'organisation est plus déterminant puisqu'il trace les lignes directrices de la future sécurité civile à Genève ; concept validé par les autorités cantonales et municipales. Par ailleurs, l'organisation future touche un grand nombre de prestataires de service de secours qui oeuvrent à titre permanent ou volontaire.

Ensemble ou séparément, en fonction de l'événement, ils constituent un maillon indispensable à la réussite d'une intervention. Néanmoins, toutes les particularités ont été prises en compte avant de définir les principes de fonctionnement de la nouvelle organisation. Ils sont au nombre de six :

une unité de commandement qui confère au chef d'intervention de larges compétences pour faire appel immédiatement aux secours complémentaires nécessaires ;

une autonomie de gestion concrétisée par la création d'un établissement de droit public ;

un financement des activités assuré, dans le cadre d'un contrat de prestations, par des subventions, émoluments et autres recettes ;

un centre de formation unifié, composé de formateurs professionnels, polyvalents, appuyés par des instructeurs volontaires dans les domaines bien spécifiques. L'enseignement comprendrait un tronc commun (unité de doctrine) et des spécialisations ;

une centrale logistique pour les achats et la maintenance, ainsi que le regroupement des moyens d'intervention par secteurs ;

une régionalisation consistant en un seul découpage géographique pour l'ensemble des organisations SCGe. Il faut relever que cette régionalisation implique le maintien des sapeurs-pompiers volontaires dans les communes et le renforcement de leurs compétences par une meilleure coordination avec les sapeurs-pompiers professionnels.

Des principes énoncés ci-dessus découlent une organisation découpée en cinq secteurs :

l'intervention, avec les secours proprement dits, la centrale d'engagement, la planification, le réseau des sirènes ;

la prévention, soit la conception des lieux recevant du public ; le contrôle de la maintenance des installations de sécurité, la réflexion prospective pour l'amélioration de la prévention, la sensibilisation du public, la gestion des abris pour la population, la protection des biens culturels ;

la formation pour l'ensemble des intervenants, mais également pour le personnel de sociétés privées (grands magasins, cliniques, dépôts pétroliers, cafetiers, etc.) ou établissements publics (hôpitaux, enseignants, etc.) ;

la logistique, déjà évoquée, et qui comprendrait la gestion du réseau hydraulique (prises d'eau) ;

enfin, l'administration, avec ses volets financiers, des ressources humaines, des systèmes d'information, le contrôle de corps des personnels et un support juridique.

Les missions qui ressortent se comprennent aisément et découlent de la mission générale de la future SCGe, soit : protéger, sauver et secourir les populations, les biens et l'environnement.

Cela étant - et cela doit être relevé - les synergies que permettra la SCGe devraient conduire à une diminution notable des coûts liés à la sécurité pour les différentes collectivités cantonales. C'est dire que, s'il est prévu que la protection civile sous sa forme actuelle soit « mise au repos » - pour reprendre l'expression des motionnaires - c'est pour s'intégrer, avec ses compétences, dans une structure unique pouvant intervenir plus rapidement et plus efficacement en cas de catastrophe.

Moratoire sur les investissements

L'ensemble de ce qui précède répond aux questions 1 à 3 des motionnaires. Pour ce qui est du moratoire sur les investissements au profit de la PCi genevoise, les comptes que vous approuvez chaque année laissent apparaître depuis 1996 une forte diminution des comptes d'investissements, soit plus de 83 %. C'est dire qu'il n'y a pratiquement plus d'investissement, tout en précisant que le matériel d'intervention et l'équipement personnel sont fournis par la Confédération.

Conclusion

En conclusion, le Conseil d'Etat entend aller dans le sens des propositions des motionnaires, s'engageant pour la réalisation d'une organisation de la Sécurité civile à Genève. Le projet est ambitieux. Les écueils sont nombreux et la concertation entre tous les partenaires doit être omniprésente. Sauf aléa, le Grand Conseil devrait cependant être saisi d'un projet de loi d'ici la fin de l'année.

Débat

M. Régis de Battista (S). La lecture du rapport du Conseil d'Etat peut être satisfaisante dans un sens. Mais, dans un autre, nous trouvons que l'esprit profond de la protection civile ne pourra pas être changé et que le sentiment d'un organe militarisé restera malgré tout.

Nous constatons qu'il y a effectivement eu un processus d'économie pour arrêter le gaspillage dans ce service. Cette restructuration est extrêmement intéressante et j'en félicite le Conseil d'Etat. Il me semble par contre, sur la question des spécialistes recherchés et utilisés par la protection civile ou le service sécurité civile de Genève, que ces spécialistes restent malgré tout des personnes provenant du domaine militaire et qu'il n'y a peut-être pas assez de contacts, d'appel aux civils. C'est une remarque. Je constate que dans ce nouveau service sécurité civile de Genève il y a des pompiers, mais on doit pouvoir trouver aussi d'autres spécialistes que des militaires. On a en effet toujours l'impression que la protection civile, ou la sécurité civile genevoise demeure malgré tout une espèce de retraite pour certaines de ces personnes.

Pour résumer, nous prenons acte de ce rapport, tout en restant conscients qu'il faut aller plus loin. 

M. Luc Gilly (AdG). Dans l'ensemble, nous avons trouvé qu'il s'agissait quand même d'un bon rapport. Il trace les grandes lignes de la PC du futur, intégrée dans le nouveau service de sécurité civile de Genève. Il y a bien sûr pas mal d'objections à formuler, surtout venant de ma part, Monsieur Cramer, mais je sais que ce projet est encore loin d'avoir pris sa forme définitive. C'est pourquoi j'aimerais vous poser les questions suivantes, auxquelles je n'ai pas trouvé réponse dans votre rapport.

Je ne sais pas quand vous pourrez me répondre, si c'est aujourd'hui ou demain, mais j'aimerais savoir où vous en êtes, avec le projet de PC allégée, dans vos relations avec la Ville de Genève, donc avec M. Hediger, puisque celui-ci semble en effet bloquer tout projet d'avancement au niveau de la protection civile. Quand pensez-vous ensuite déposer ce projet de loi et quel temps vous donnez-vous pour le faire entrer en vigueur ?

J'ai encore une autre question : comment est-il possible, et je reviens sur mon interpellation urgente de tout à l'heure, comment est-il possible de réduire fortement les effectifs de la protection civile pour gagner en motivation et en efficacité, tout en maintenant l'obligation de servir ? Cette obligation est toujours inscrite dans la loi fédérale alors qu'on souhaite aujourd'hui réduire le nombre d'hommes. Je ne comprends donc pas comment il est possible de réduire et de punir en même temps. Et comment réduire fortement les effectifs, toujours dans la même ligne, pour gagner en motivation et en efficacité, si M. Adolf Ogi - et vous l'avez tous vu ou lu ces derniers jours - propose un libre choix entre l'armée et la protection civile ? Libre choix, lorsqu'il aura effectivement annoncé le nombre de soldats dont il a besoin pour sa nouvelle armée.

Je me demande donc si tout ce travail de renouvellement de la protection civile à Genève ne risque pas d'être remis en question avec l'annonce du retour d'une nouvelle PC mammouth, dont nous ne voulons évidemment plus.

Puisque j'ai la parole, j'aimerais ajouter un mot concernant les abris de la protection civile - j'avais à ce propos une chose à dire à M. Visseur, mais il n'est pas là et je le lui dirai de vive voix demain. Un grand nombre d'entre nous, vous le savez, et un grand nombre de citoyens et de citoyennes vous demandent de fermer définitivement les abris de la PC accueillant des réfugiés de guerre et cela le plus vite possible ! Et j'espère que nous pourrons encore discuter de cette problématique inacceptable au sein de ce parlement, malgré les propos tenus par M. Visseur ! 

M. Robert Cramer. Monsieur le député, vous m'avez posé trois ou quatre questions extrêmement précises. Je vais vous répondre point par point et, j'espère, d'une façon aussi précise que vous avez formulé vos questions. Je ne répondrai peut-être pas dans l'ordre, parce que l'on peut adopter une systématique un peu différente pour présenter les choses.

Le premier thème de réflexion est le suivant : comment est-il compatible de vouloir réduire les effectifs de la protection civile d'une part et de respecter l'obligation de servir d'autre part ? A cet égard, il faut savoir que ce que la Confédération demande aux cantons, et plus particulièrement aux groupements communaux qui s'occupent de protection civile, c'est de disposer des effectifs nécessaires pour accomplir leurs tâches. Il incombe ensuite à chacun de définir ce que sont ces effectifs nécessaires. Ce que nous avons convenu avec l'autorité fédérale - Genève est en ce sens un site pilote - c'est que nous allions décider quels seraient les effectifs nécessaires et que nous ferions dans un premier temps appel au volontariat pour les atteindre. S'il devenait impossible d'atteindre les effectifs fixés par le biais du volontariat, on contraindrait alors les astreints, mais uniquement dans ce cas-là, à suivre des cours de protection civile. En d'autres termes, nous disposons d'un registre des astreints. Comme l'astreinte à la PC ne change pas, nous avons donc le répertoire de toutes les personnes qui devraient théoriquement aller à la PC. Nous informons ensuite toutes ces personnes du fait que si elles veulent effectuer des cours, cela présente certains avantages, mais si elles ne le veulent pas et que nous avons des effectifs suffisants, nous ne ferons pas appel à elles.

Depuis que nous appliquons ce système dans 44 communes du canton - la quarante-cinquième, qui est la Ville de Genève, n'entend pas l'appliquer - nous nous sommes aperçus que le nombre de volontaires était largement suffisant pour répondre à nos besoins, car il y a passablement de gens qui souhaitent suivre des cours de protection civile pour payer moins de taxe militaire. Voilà donc comment nous rendons compatible l'obligation d'aller à la PC et le fait de n'engager que les effectifs nécessaires : en faisant appel à des volontaires.

La question du libre choix PC-armée est aujourd'hui très largement ouverte. Selon les convictions personnelles de M. Ogi, il ne faudrait pas qu'il y ait libre choix et l'obligation de servir dans le cadre d'un service militaire devrait continuer à s'imposer. Mais plusieurs cantons, dont le canton de Genève, ne sont pas de cet avis. Nous souhaitons que ce libre choix soit offert. Je crois qu'il est prématuré de discuter sur ce point des questions d'effectifs qui pourraient se poser au cas où le libre choix s'imposerait.

Qu'en est-il de la suite des travaux quant à la constitution de cette sécurité civile, que nous concevons donc comme étant un service de pure aide en cas de catastrophe, sorte de corps de pompiers élargi à d'autres tâches, c'est-à-dire également à des tâches de protection civile ? En l'occurrence, nous discutons de ce projet de loi, comme nous vous l'avons dit dans le rapport, avec la Ville et les communes. Les séances de travail se suivent à un rythme rapproché. Aujourd'hui, et c'est une nouvelle que je peux vous annoncer, nous avons chiffré dans le détail le coût de fonctionnement de ce projet. Nous avons ainsi pu constater qu'il induirait des économies considérables, en tout cas de l'ordre de 20 %. Nous espérons que ces chiffres vont convaincre tous nos partenaires que cela vaut la peine d'aller de l'avant. Ces prochaines semaines seront décisives. Soit nous réussirons à boucler le dossier d'ici la fin de l'année et nous serons donc en mesure de déposer un projet de loi au Grand Conseil d'ici là - c'est en tout cas mon objectif - au pire dans les premières semaines de l'année prochaine. Soit l'on s'apercevra que le projet est irréalisable pour cause de blocage de nos partenaires. Et ma foi, c'est un projet que nous ne pouvons concrétiser tout seuls. Il implique les communes, la Ville et l'Etat. Pour qu'il se fasse, il faut qu'il y ait au moins deux partenaires qui soient d'accord. Je ne pense pas qu'un partenaire ait le droit de tout bloquer, mais je ne pense pas non plus que l'Etat puisse aller tout seul de l'avant, si toutes les autres collectivités publiques s'y opposent, parce que l'on n'aurait alors pas les conditions nécessaires de succès. Ces prochaines semaines seront donc réellement décisives pour le succès de cette démarche !

Dernière question que vous avez posée : qu'en est-il des abris de la protection civile ouverts pour héberger des requérants d'asile ? Nous fermons ces abris ! Il y a déjà un certain nombre d'abris qui ont été fermés. Je ne peux pas vous en donner la liste, car je ne me suis pas préparé à répondre à cette question, mais il doit en tout cas y en avoir trois ou quatre qui ont été fermés, si ce n'est cinq. Et notre objectif est réellement de tous les fermer d'ici la fin de l'année, ou encore avant. Comme vous, nous considérons qu'il n'est pas sain que des requérants d'asile séjournent dans des abris. Nous pensons que ce sont des conditions de vie qui ne conviennent pas du tout à des séjours de longue durée. Les abris ont été conçus pour permettre à des gens de séjourner pendant quelques heures, la nuit et sur de courtes périodes. Ils ne sont pas faits pour y héberger des familles pendant des mois. C'est donc une situation extrêmement malheureuse à laquelle nous sommes confrontée en raison de la pénurie d'autres possibilités d'hébergement. Ce n'est pas une situation que nous avons recherchée, ce n'est pas une situation que nous avons souhaitée.

A travers vos interpellations, vous avez vu que l'Etat a empoigné avec résolution ce problème, qui n'était normalement pas le sien. Il aurait dû être celui d'autres organismes, tels l'Hospice général et l'Agecas. Nous nous sommes rendu compte que l'Agecas et l'Hospice général n'avaient pas les moyens, malgré toute leur bonne volonté, de donner une réponse complète à ces questions d'hébergement. L'Etat s'y est donc substitué. Nous avons fait, je crois, avec beaucoup de résolution, toutes les démarches nécessaires pour trouver des solutions. Ces solutions sont maintenant largement trouvées. J'espère réellement qu'il n'y aura à Noël plus personne dans les abris de Genève. 

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport. 

Le président. Je vous propose d'arrêter là nos travaux. Nous les reprendrons demain à 17 h.

La séance est levée à 23 h 35.