République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8148
36. Projet de loi de Mmes et MM. Anne Briol, David Hiler, Esther Alder, Fabienne Bugnon, Caroline Dallèves-Romaneschi, Antonio Hodgers, Chaïm Nissim et Georges Krebs modifiant la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (H 1 05) (LALCR). ( )PL8148

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, du 18 décembre 1987, est modifiée comme suit :

Art. 2  Autorité compétente (nouvelle teneur)

1 Le Département de justice et police et des transports (ci-après département) est compétent en matière de gestion de la circulation, notamment pour interdire, restreindre ou régler la circulation sur certaines routes, sous réserve des alinéas suivants.

2 Pour les voies publiques communales, les communes de plus de 3 000 habitants sont compétentes pour la gestion de la circulation dans les domaines suivants :

3 La compétence communale est exercée par le conseil municipal qui peut déléguer certaines de ses compétences au Conseil administratif.

4 Les communes de moins de 3 000 habitants peuvent obtenir, sur demande, la compétence en matière de gestion de la circulation, pour leurs voies communales, dans les domaines énumérés à l'alinéa 2.

5 La compétence de la police ou du Département fédéral de justice et police stipulée par la législation fédérale est réservée.

Art. 3, al. 2   (nouveau)

2 Les communes élaborent, en collaboration avec le département et ses services, les réglementations locales de trafic.

Art. 4  Enquête publique (nouvelle teneur)

1 Toute réglementation locale du trafic non limitée dans le temps est précédée d'une enquête publique ; une nouvelle enquête publique n'est toutefois pas nécessaire lorsque le département ou les communes modifient, sur le même objet, une réglementation locale du trafic édictée depuis moins d'un an par une mesure d'un contenu et d'une portée similaires.

2 L'enquête publique est annoncée, pour les projets de réglementation émanant du département, par la voie de la publication dans la Feuille d'avis officielle, ou, pour les projets de réglementation des communes, par voie d'affichage dans la commune.

3 Pendant un délai de 30 jours à compter de la publication ou de l'affichage, chacun peut consulter les projets de réglementation locale du trafic au département, lorsque ceux-ci émanent de ce dernier, ou à la mairie de la commune concernée, lorsqu'il s'agit d'un projet communal.

Art. 6  Décision (nouvelle teneur)

Toute réglementation locale du trafic adoptée par le département ou les communes fait l'objet d'une décision publiée dans la Feuille d'avis officielle.

Art. 6A  Placement des signaux (nouveau)

Le placement des signaux nécessaires pour l'exécution des réglementations locales du trafic est de la compétence de la collectivité publique dont la réglementation émane.

Art. 7, al. 2   (nouvelle teneur)

2 Les communes fixent les modalités de perception ainsi que le tarif applicable en tenant compte du lieu, du type de parcage ou d'autres éléments. Le tarif ne peut excéder 2 F par heure. Ce tarif peut être adapté à l'évolution de l'indice genevois des prix à la consommation par règlement.

Art. 7A  Zones de parcage (nouvelle teneur)

1 La réglementation locale du trafic peut prescrire des dispositions particulières concernant le parcage de véhicules des habitants d'un secteur ou de tout autre cercle déterminé d'usagers, selon des modalités que les communes fixent par règlement.

2 Une autorisation écrite est délivrée sous forme de macaron aux bénéficiaires potentiels qui la sollicitent contre paiement d'une taxe. Le montant de la taxe ne doit pas dépasser 240 F pour les habitants. Les communes adaptent périodiquement ces montants à l'évolution de l'indice genevois des prix à la consommation. En fonction de la nature, de l'intensité et de la localisation de l'avantage conféré, les communes peuvent édicter un tarif différencié allant de 120 F à 480 F pour une année.

3 Le produit net des taxes est versé à la Fondation des parkings (sous son appellation officielle) pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement destinés aux habitants et aux P + R.

Art. 16  Rôle (nouvelle teneur)

La Commission consultative de la circulation émet un avis à la demande du département ou des communes, ou formule des propositions sur les questions importantes intéressant le domaine de la circulation.

Article 2 Modifications à d'autres lois

(L1 10)

1 La loi sur les routes, du 28 avril 1967, est modifiée comme suit :

Art. 3, al.3   (nouveau)

3 Toute modification de classification des voies publiques communales requiert l'approbation de la commune concernée.

(B 6 05)

2 La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit :

Art. 30, al. 2 (nouveau)

2 Le Conseil municipal délibère également sur les objets suivants :

Art. 36, al.1, lettres g et h (nouvelles)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le canton de Genève n'est malheureusement pas exemplaire en matière de politique des transports. Premier constat : entre 1990 et 1997, Genève a subi une augmentation du trafic motorisé individuel de 10 %. De plus, alors que la plupart des villes suisses et européennes ont aménagé d'importantes zones piétonnes, Genève est très largement à la traîne. Il en est de même pour les zones résidentielles ou les zones 30.

Une des raisons qui explique ce retard dans la modération du trafic est le niveau de la prise de décision. A l'heure actuelle, l'Etat est maître de toutes les décisions finales en matière de circulation, de l'autoroute au chemin agricole en passant par les routes communales. Ainsi lorsqu'une commune veut modifier le statut d'une route, l'Etat doit donner son accord sur la base d'un préavis ou d'une demande de la commune. Il peut aussi mettre son veto, ou transformer la proposition initiale dans un sens qui s'éloignera des préoccupations initiales de la commune. De la sorte, les communes pourtant premières concernées ne peuvent pas décider souverainement de créer par exemple des zones 30 ou des zones piétonnes sur leur territoire. De plus, on assiste parfois à de véritables parties de ping-pong entre l'Etat et les communes, chacun étant mécontent de la décision de l'autre partie, ce qui bloque les réalisations au détriment notamment de la qualité de vie des riverains. On peut citer à titre d'exemple la cas de la Ville de Genève  où à plusieurs reprises le Conseil municipal s'est engagé en faveur de réaménagements qui sont pourtant restés lettre morte.

Le présent projet de loi, qui prévoit un transfert de compétences aux communes en matière de circulation sur les voies publiques communales, permettrait de décentraliser les décisions au niveau adéquat. En effet, ce sont bien les personnes qui subissent quotidiennement les problèmes liés à la circulation qui sont les mieux à même de se prononcer sur l'aménagement de leurs réseaux routiers. En outre, en laissant la gestion de la circulation sur les voies publiques cantonales à la compétence du canton, on conserve une vision globale de la gestion de la circulation routière à l'échelle du canton.

Un tel transfert de compétence permettrait également de répondre au désir de la population genevoise qui durant ces dix dernières années a clairement exprimé son refus d'une politique qui fait une place excessive à la voiture : en juin 1988, 79 % des Genevois ont approuvé la loi sur le réseau des transports publics. En juin 1996, la population genevoise a massivement rejeté le projet de traversée de la rade. En septembre 1998, les citoyens de la Ville de Genève se sont clairement opposés à un parking sous la Place Neuve.

La discussion relative au transfert de compétences aux communes en matière de circulation a plusieurs fois été lancée mais n'a malheureusement jamais abouti : en 1995, la Commission des transports du Grand Conseil s'était penchée sur le sujet mais a finalement décidé de suspendre les travaux. En janvier 1998, le DJPT annonçait à la Commission des transports qu'il était vraisemblable que le Conseil d'Etat dépose un projet de loi allant dans ce sens devant le Grand Conseil, mais cela n'a pas été concrétisé. En mars 1998, une motion socialiste (M 1202 - annexe 1) demandant notamment au Conseil d'Etat de rédiger un projet de loi visant à donner aux communes de plus de 10 000 habitants des compétences en matière de signalisation sur les réseaux local et secondaire, y compris la vitesse, était renvoyé à la Commission des transports. En mars 1999, l'Alliance de Gauche déposait un projet de loi (PL 8014 - annexe 2) visant à confier aux communes la compétence de créer des zones piétonnes. Les auteurs du présent projet de loi souhaitent que la problématique du transfert de compétences aux communes en matière de circulation soit abordée sans délai et dans son ensemble.

Commentaires article par article

Article 1

La loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (LALCR) , du 18 décembre 1987, est modifiée comme suit :

Art. 2  Autorité compétente (nouvelle teneur)

Au sens du présent article (al. 1), le département reste compétent quant à la gestion de la circulation sur les voies publiques cantonales, à savoir, selon l'art.2, al. 2 de la loi sur les routes, sur les routes nationales et sur les routes cantonales, comprenant notamment les quais, ponts, places et tunnels.

Avec cet article modifié (al. 2 et suivants), les communes de plus de 3 000 habitants deviennent compétentes pour la gestion de la circulation sur les voies publiques communales dans les domaines de l'interdiction et de la restriction de la circulation, la création de pistes cyclables, la création de zones piétonnes, la limitation de vitesse, la réglementation du parcage et toute autre mesure de modération du trafic en application de l'art. 3, al 4 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR).

Ces nouvelles compétences sont exercées par le Conseil municipal qui peut décider d'en déléguer certaines à son exécutif (al. 3).

Les communes de moins de 3 000 habitants peuvent quant à elles obtenir, sur demande, la compétence en matière de gestion de la circulation, pour leurs voies publiques communales, dans les domaines énumérés ci-dessus (al. 4). Le nombre minimum de 3 000 habitants a par ailleurs été retenu afin de ne pas imposer ces nouvelles compétences à des communes qui n'auraient pas les moyens de les assumer.

La compétence de la police ou du Département fédéral de justice et police stipulée par la législation fédérale est conservée et n'est donc pas transférée aux communes.

Art. 3  Principe (nouvelle teneur)

Le nouvel alinéa précise que ce sont les communes qui élaborent les réglementations locales de trafic.

Art. 4  Enquête publique (nouvelle teneur)

La référence aux communes de même que leurs obligations sont rajoutées pour toutes les étapes de l'enquête publique étant donné les nouvelles compétences des communes.

Art. 6  Décision (nouvelle teneur)

La référence aux communes est intégrée dans cet article relatif à la publication de la décision dans la Feuille d'avis officielle étant donné les nouvelles compétences des communes.

Art. 6A  Placement des signaux (nouveau)

Il s'agit de préciser la collectivité responsable du placement des signaux : la collectivité dont la réglementation émane doit placer les signaux.

Art. 7  Taxes de parcage sur la voie publique (nouvelle teneur)

Les compétences relatives à la fixation des modalités de perception des taxes de parcage et du tarif applicable sont transférées du Conseil d'Etat aux communes.

Art. 7A  Zones de parcage (nouvelle teneur)

Les compétences relatives aux zones de parcage sont transférées du Conseil d'Etat aux communes.

Art. 16  Rôle (nouvelle teneur)

La référence aux communes est intégrée dans cet article relatif à la Commission consultative de la circulation étant donné les nouvelles compétences des communes.

Article 2

(L 1 10)

1 La loi sur les routes, du 28 avril 1967, est modifiée comme suit :

Art. 3, al.3 (nouveau)

La classification des voies publiques étant de compétence cantonale, ce nouvel alinéa permet aux communes d'avoir leur mot à dire lors de projets de modification de cette classification.

(B 6 05)

2 La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit :

Art. 30 al. 2 (nouveau)

Les nouvelles compétences du Conseil municipal sont inscrites dans la loi sur l'administration des communes : la demande de compétence pour la réglementation locale du trafic pour les communes de moins de 3 000 habitants, les mesures de réglementations locales du trafic telles que l'interdiction et la restriction de la circulation, la création de pistes cyclables, la création de zone piétonnières, la limitation de vitesse ; la réglementation du parcage.

Art. 36 al.1 Objets soumis au droit d'initiative (nouvelle teneur)

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver un accueil favorable à ce projet de loi.

ANNEXE 1

Secrétariat du Grand Conseil

Proposition présentée par les députés:Mmes et M. Liliane Charrière Debelle, Françoise Schenk-Gottret et Christian Brunier

Date de dépôt: 23 mars 1998Messagerie

M 1202

Proposition de motionconcernant la délégation de compétence aux communes en matière de circulation

- la nécessité de revoir la répartition des compétences entre l'Etat et les communes en matière de circulation ;

- les expériences concluantes de la ville de Lausanne ;

- les discussions en cours sur le plan Circulation 2005 ;

- que l'OTC pourrait être déchargé de certaines tâches et consacrer ainsi plus de temps et d'énergie à la sécurité des déplacements, aux grands projets (TC2005, C2005, TGV, plan des mesures OPair, etc.), à la gestion de la circulation en général et à celle du réseau primaire en particulier ;

- que certaines communes ont les moyens techniques de prendre en charge les décisions de circulation sur les rues des réseaux local et secondaire ;

- à présenter au Grand Conseil la hiérarchie du réseau routier constituée de 3 types de rues ou de routes : primaire, secondaire et local ;

- à préparer les modifications législatives et constitutionnelles donnant aux communes, sur le modèle vaudois, les compétences nouvelles suivantes en matière de circulation :

• aux communes de moins de 10 000 habitant-e-s : compétence en matière de signalisation sur le réseau local (rues de quartier), vitesse exceptée ;

• aux communes de plus de 10 000 habitant-e-s, qui en font la demande : compétence en matière de signalisation sur les réseaux local et secondaire, y compris la vitesse.

- à proposer un système de financement en relation avec cette nouvelle répartition des compétences.

ANNEXE 2

Projet de loimodifiant la loi sur le domaine public (L 1 05)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi sur le domaine public, du 24 juin 1961, est modifiée comme suit :

Art. 1, lettre a (nouvelle teneur)

Art. 1A (nouveau)

1 Les communes sont compétentes pour décider de la création sur leur territoire de zones piétonnes ou de promenades réservées exclusivement aux piétons. Elles sont habilitées, après avoir procédé à une enquête publique de 30 jours au moins, à désaffecter dans ce but des routes communales secondaires ouvertes à la circulation routière, tout en prévoyant, d'entente avec le Département de justice, police et transports, les modalités d'accès pour les livraisons et les interventions d'urgence.

2 Les zones piétonnes doivent ménager un couloir de passage réservé aux TPG si ces zones empiètent sur le réseau des transports publics.

Article 2 Modification à une autre loi (B 6 05)

La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit :

Art. 30, al. 1, lettre z (nouvelle)

Ce projet est renvoyé à la commission des transports sans débat de préconsultation.