République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8152
32. Projet de loi du Conseil d'Etat sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I) Objet de l'impôt - Assujettissement à l'impôt (D 3 11). ( )PL8152

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,

vu la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990,

décrète ce qui suit :

Art. 1

Le canton perçoit un impôt sur le revenu et un impôt sur la fortune des personnes physiques.

Art. 2 Rattachement personnel

1 Les personnes physiques sont assujetties à l'impôt à raison de leur rattachement personnel lorsqu'elles sont domiciliées ou séjournent dans le canton.

2 Une personne a son domicile dans le canton lorsqu'elle y réside avec l'intention de s'y établir durablement, ou lorsqu'elle y a un domicile légal spécial en vertu du droit fédéral.

3 Une personne séjourne dans le canton lorsque, sans interruption notable:

4 La personne qui, ayant conservé son domicile hors du canton, réside dans le canton uniquement pour y fréquenter un établissement d'instruction, pour se faire soigner dans un établissement ou pour purger une peine de détention, ne s'y trouve ni domiciliée, ni en séjour.

5 Les personnes physiques domiciliées à l'étranger, qui y sont exonérées totalement ou partiellement des impôts sur le revenu et sur la fortune à raison de leur activité pour le compte de la Confédération ou d'autres corporations ou établissements de droit public suisses, sont assujetties à l'impôt dans leur commune d'origine à raison de leur rattachement personnel. Lorsque le contribuable possède plusieurs droits de cité, il est assujetti à l'impôt dans la commune dont il a acquis le droit de cité en dernier lieu. Si le contribuable n'a pas la nationalité suisse, il est assujetti à l'impôt au domicile ou au siège de son employeur. L'assujettissement s'étend également au conjoint et aux enfants au sens de l'article 8.

Art. 3 Rattachement économique

1 Les personnes physiques qui, au regard du droit fiscal, ne sont ni domiciliées, ni en séjour dans le canton sont assujetties à l'impôt à raison du rattachement économique lorsque :

2 Les personnes physiques qui, au regard du droit fiscal, ne sont ni domiciliées, ni en séjour en Suisse sont assujetties à l'impôt à raison du rattachement économique lorsque :

3 On entend par établissement stable, toute installation fixe dans laquelle s'exerce tout ou partie de l'activité d'une entreprise, d'une personne exerçant une activité lucrative indépendante ou une profession libérale. Sont notamment considérés comme établissements stables, les succursales, usines, ateliers, comptoirs de vente, représentations permanentes, mines et autres lieux d'exploitation de ressources naturelles, ainsi que les chantiers de construction ou de montage ouverts pendant douze mois au moins.

Art. 4 Relation avec l'impôt à la source

Demeure réservée la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, du 23 septembre 1994.

Art. 5 Etendue de l'assujettissement

1 L'assujettissement fondé sur un rattachement personnel est illimité; il ne s'étend toutefois pas aux entreprises, aux établissements stables et aux immeubles situés hors du canton.

2 L'assujettissement fondé sur un rattachement économique est limité aux parties du revenu et de la fortune, ainsi qu'aux gains immobiliers qui sont imposables dans le canton.

3 L'étendue de l'assujettissement pour une entreprise, un établissement stable ou un immeuble est définie, dans les relations intercantonales et internationales, conformément aux règles du droit fédéral concernant l'interdiction de la double imposition.

4 Si une entreprise ayant son siège ou son administration effective dans le canton compense, sur la base du droit interne, les pertes subies à l'étranger par un établissement stable avec des revenus obtenus dans le canton et que cet établissement stable enregistre des gains au cours des sept années qui suivent, le département doit procéder à une révision de la taxation initiale, à concurrence du montant des gains compensés auprès de l'établissement stable; dans ce cas, la perte subie par l'établissement stable à l'étranger ne devra être prise en considération, a posteriori, que pour déterminer le taux de l'impôt dans le canton. Dans toutes les autres hypothèses, les pertes subies à l'étranger ne doivent être prises en considération dans le canton que lors de la détermination du taux de l'impôt.

5 Les personnes imposables conformément à l'article 2, alinéa 5, doivent l'impôt sur leurs revenus et leur fortune qui sont exonérés à l'étranger en vertu de conventions internationales ou de l'usage.

Art. 6 Taux de l'impôt

1 Pour les personnes qui ne sont imposables dans le canton que sur une partie de leur revenu ou de leur fortune, le taux de l'impôt doit être celui qui serait applicable au revenu total ou à la fortune totale du contribuable.

2 Toutefois, les contribuables domiciliés à l'étranger qui sont imposables en raison d'une entreprise, d'un établissement stable ou d'un immeuble sis dans le canton sont imposables à des taux correspondant au moins au revenu acquis dans le canton et à la fortune qui y est située.

Art. 7 Début, fin et modification de l'assujettissement

1 L'assujettissement débute le jour où le contribuable prend domicile dans le canton ou y commence son séjour au sens de l'article 2 ou encore le jour où il y acquiert un élément imposable au sens de l'article 3.

2 L'assujettissement prend fin le jour du décès du contribuable, de son départ pour l'étranger ou le jour de la disparition de l'élément imposable dans le canton.

3 En cas de changement de domicile au regard du droit fiscal à l'intérieur de la Suisse, le début et la fin de l'assujettissement sont régis par la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes.

Art. 8 Epoux; enfants sous autorité parentale

1 Le revenu et la fortune des époux vivant en ménage commun s'additionnent, quel que soit le régime matrimonial. Chaque époux est considéré comme un contribuable.

2 L'enfant mineur, au sens du code civil, est astreint personnellement à l'impôt sur le revenu provenant de son activité lucrative.

3 Les autres revenus et la fortune de l'enfant mineur sont ajoutés, pour la taxation et la perception des impôts, aux revenus et à la fortune du ou des parents qui en ont l'autorité parentale et la garde.

Art. 9 Hoiries et sociétés de personnes

Les hoiries, les sociétés simples, les sociétés en nom collectif et en commandite et autres sociétés n'ayant pas la personnalité juridique ne sont pas imposées comme telles; chacun des hoirs, associés, commanditaires et participants paie les impôts sur la part de capital et de revenu à laquelle il a droit dans ces hoiries et ces sociétés.

Art. 10 Sociétés commerciales étrangères et autres communautés de personnes sans personnalité juridique

Les sociétés commerciales étrangères et autres communautés étrangères de personnes sans personnalité juridique qui sont assujetties à l'impôt en raison d'un rattachement économique sont imposables conformément aux dispositions applicables aux personnes morales.

Art. 11 Succession fiscale

1 Les héritiers d'un contribuable défunt lui succèdent dans ses droits et ses obligations. Ils répondent solidairement des impôts dus par le défunt jusqu'à concurrence de leur part héréditaire, y compris les avancements d'hoirie.

2 Le conjoint survivant est responsable jusqu'à concurrence de sa part héréditaire et, s'il reçoit, du fait de son régime matrimonial, une part du bénéfice ou de la communauté supérieure à sa part légale selon le droit suisse, jusqu'à concurrence de ce montant supplémentaire.

Art. 12 Responsabilité des époux et responsabilité solidaire

1 Chaque époux répond du montant correspondant à sa part de l'impôt total. Les époux sont en revanche solidairement responsables de la part de l'impôt total qui frappe le revenu et la fortune des enfants.

2 Sont solidairement responsables avec le ou les contribuables:

3 L'administrateur d'une succession et l'exécuteur testamentaire répondent solidairement avec les successeurs fiscaux du défunt des impôts dus par celui-ci, jusqu'à concurrence du montant qui doit être affecté au paiement de l'impôt selon l'état de la succession au jour du décès. Dans la mesure où l'administration fiscale ne peut prouver aucune faute à leur encontre, ils sont libérés de toute responsabilité.

Art. 13 Présomption de propriété des immeubles

La personne inscrite comme propriétaire d'un immeuble au registre foncier est responsable des impôts afférents à l'immeuble, respectivement solidairement responsable des impôts perçus auprès de l'usufruitier.

Art. 14 Imposition d'après la dépense

1 Les personnes physiques qui, pour la première fois ou après une absence d'au moins dix ans, prennent domicile ou séjournent en Suisse, sans y exercer d'activité lucrative, ont le droit, jusqu'à la fin de la période de taxation en cours, de payer un impôt sur la dépense, au lieu des impôts sur le revenu et la fortune.

2 Lorsque ces personnes ne sont pas des ressortissants suisses, le droit de payer l'impôt calculé sur la dépense peut être accordé au-delà de cette limite.

3 L'impôt est calculé sur la base de la dépense du contribuable et de sa famille et il est perçu d'après le barème de l'impôt ordinaire. Il ne doit toutefois pas être inférieur aux impôts calculés d'après le barème ordinaire sur l'ensemble des éléments suivants:

4 Le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à la perception de l'impôt sur la dépense. Il peut arrêter les bases d'imposition et un mode de calcul de l'impôt dérogeant à l'alinéa 3, si cela est nécessaire pour permettre aux contribuables mentionnés aux alinéas 1 et 2 d'obtenir le dégrèvement des impôts d'un Etat étranger avec lequel la Suisse a conclu une convention en vue d'éviter les doubles impositions.

Art. 15 Allégements fiscaux

1 Le Conseil d'Etat peut, après consultation des communes concernées, accorder des allégements fiscaux à des entreprises nouvellement créées, afin de faciliter leur installation et leur développement s'ils sont dans l'intérêt de l'économie du canton; ces allégements ne peuvent aller au-delà d'une période de dix ans. La modification importante de l'activité de l'entreprise peut être assimilée à une fondation nouvelle.

Le département des finances statue sur toute demande d'allégements fiscaux dans un délai de 60 jours à compter de la date d'enregistrement de la demande. Lorsque des pièces ou renseignements complémentaires nécessaires à l'instruction de la requête sont sollicités, ce délai est suspendu jusqu'à réception des documents.

2 Si l'entreprise transfère son siège ou une partie prépondérante de son activité hors du canton pendant la durée des allégements ou dans les cinq années qui suivent celle où ils cessent de déployer leurs effets, le montant des impôts qui auraient été perçus sans allégement est exigible en totalité.

3 Les communes concernées sont informées des allégements fiscaux accordés. Le Conseil d'Etat présente un rapport annuel au Grand Conseil, dans le cadre du compte rendu, sur sa politique en matière d'allégements.

Art. 16 Exemptions

1 Sont exonérés des impôts sur le revenu et la fortune, dans la mesure où le prévoient les conventions, accords et arrangements avec les organisations internationales publiques:

2 Sont également exonérés les consuls de nationalité étrangère au bénéfice de l'exequatur de Conseil fédéral et les fonctionnaires consulaires de carrière, de nationalité étrangère, nommés par leur gouvernement et qui ont leur poste en Suisse.

3 Cette exonération ne s'étend pas aux personnes, leur conjoint ou leurs enfants mineurs qui remplissent les conditions d'assujettissement prévues à l'article 3.

4 En cas d'assujettissement partiel, l'article 6, alinéa 1, est applicable.

Art. 17  Entrée en vigueur

1 La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 2001.

2 L'article 12, alinéa 1, entre en vigueur le 1er janvier 2003.

Art. 18  Modification à une autre loi (D 3 05)

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit :

Art. 2 (abrogé)

Art. 3 à 9 (abrogés)

Art. 10, al. 8 (abrogé)

Art. 11 (abrogé)

Art. 13 (abrogé)

Art. 14 et 14A (abrogés)

Art. 15 (abrogé)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP - I)

Objet de l'impôt - Assujettissement à l'impôt

Avant d'aborder le commentaire proprement dit du présent projet de loi (II), il est apparu nécessaire d'exposer, d'une manière aussi synthétique que possible, les différentes étapes qui ont conduit à son élaboration (I).

I. Les différentes étapes qui ont conduit à l'élaboration du présent projet de loi

A. Le projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (PL 7532) et la Loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques (PL 7532-A)

Le projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (PL 7532; D 3 1,1), émanant du Conseil d'Etat, a été déposé par devant le Secrétariat du Grand Conseil, en date du 30 septembre 1996.

L'objectif du Conseil d'Etat était alors d'adapter la législation fiscale genevoise, relative aux personnes physiques, à la Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes , du 14 décembre 1990.

Ce projet a été renvoyé à la Commission fiscale du Grand Conseil, en date du 8 novembre 1996 et examiné par celle-ci, de janvier à septembre 1997. La première lecture dudit projet a eu lieu durant la période du 22 avril au 19 août 1997.

C'est au cours de sa séance du 2 septembre 1997 que la Commission fiscale a décidé de traiter en priorité les dispositions du PL 7532 relatives à l'imposition dans le temps des personnes physiques (art. 61 à 66 du PL 7532). Et, une deuxième lecture de ces dispositions, regroupées entre-temps dans un projet de loi autonome, a eu lieu les 2 et 9 septembre 1997. Le projet de loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques a finalement été adopté par le Grand Conseil en date du 4 décembre 1997, donnant ainsi naissance à la Loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques (D 3 12).

B. L'examen du projet de loi sur l'imposition des personnes physique (PL 7532) par la Commission de relecture

Quant au reste des dispositions du PL 7532, relatives à l'imposition des personnes physiques, elle ont fait l'objet d'un examen approfondi de la part d'une commission d'experts, intitulée "Commission extra-parlementaire chargée de procéder à une relecture du projet de loi sur l'imposition des personnes physiques" (ci-après, Commission de relecture) constituée par Madame Micheline Calmy-Rey, cheffe du Département des finances .

Les principales orientations qui ont guidé les travaux de la Commission de relecture peuvent être résumées en quelques mots: tenir compte des modifications de la législation fédérale intervenues depuis 1996, date du dépôt du PL 7532, rédiger une loi plus simple, transparente et respectant mieux la capacité contributive (article 125 chiffre 1 de la nouvelle Constitution fédérale) et simplifier la déclaration d'impôt, tant pour le contribuable que pour l'administration. Les travaux de la Commission de relecture ont eu lieu du 13 février au 8 juillet 1999. Il se sont concrétisés par un rapport final, en réalité un commentaire article par article des dispositions de la loi.

C. L'examen par la Commission fiscale

Au cours de sa séance du 31 août 1999, la Commission fiscale du Grand Conseil a débattu du problème de l'avancement des travaux de la Commission de relecture. Plusieurs membres de la Commission fiscale se sont inquiétés du temps qui leur restait imparti, jusqu'au 1er janvier 2001, pour examiner le nouveau projet de loi. Ils ont rappelé à ce propos que la future loi sur l'imposition des personnes physiques devait impérativement entrer en vigueur le 1er janvier 2001.

Madame Micheline Calmy-Rey, cheffe du Département des finances, a souligné à cette occasion que les travaux de la Commission de relecture étaient terminés mais qu'elle attendait encore, avant de soumettre le nouveau projet de loi à la Commission fiscale, les résultats des travaux de chiffrage demandés au Professeur Carlevaro.

Le Président de la Commission fiscale a alors suggéré au Département des finances de "présenter d'abord les objets de la LIPP qui résultent de questions de principe, ceux qui requièrent un chiffrage pouvant être traités ultérieurement" (PV de la Commission fiscale du 31 août 1999, p. 9).

D. Le projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I)

Telle est la raison d'être du présent projet de loi intitulé "Projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I)" et dont le contenu est limité à l'objet de l'impôt et à l'assujettissement à l'impôt des personnes physiques, étant précisé que, par rapport au PL 7532, les modifications sont relativement peu nombreuses.

II. Commentaire article par article

Le texte reproduit ci-dessous est celui qui figure dans le rapport final de la Commission de relecture, dont nous avons repris la totalité des propositions, à l'exception des dispositions finales.

Article 2

(Rattachement personnel)

alinéa 2

Le Tribunal fédéral a déjà admis que la notion de domicile fiscal était autonome de celle du droit civil. La définition fiscale permet de déterminer plus précisément le domicile d'un individu et, ainsi, d'en appréhender toute la réalité économique.

Par domicile légal spécial, on vise en particulier le domicile du tuteur des personnes incapables de discernement.

alinéa 3

L'administration fiscale indique que toute personne étrangère qui conserve son domicile à l'étranger et qui désire travailler pendant une période déterminée dans le canton doit requérir un permis de travail de courte durée (90 ou 120 jours). Un tel permis n'est délivré que dans la mesure où l'administration fiscale donne un préavis favorable. Ces revenus sont assujettis à un impôt perçu à la source en vertu de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales (LIS). Le paiement de l'impôt est une condition nécessaire au renouvellement du permis de travail l'année suivante. De cette manière l'administration fiscale peut exercer son contrôle.

Les termes "sans interruption notable" sont nécessaires sous peine de laisser la porte ouverte à des abus. Cette adjonction permet d'éviter qu'une personne qui quitterait le canton un jour par semaine ne tombe dès lors plus sous le coup de cette disposition.

alinéa 5

Cette disposition, qui correspond au droit fédéral (article 3 alinéa 5 LIFD), ne vise que les diplomates, à l'exclusion du personnel des organisations internationales. Ils sont imposables à Genève sur les revenus qu'ils touchent de la Confédération.

Article 3

(Rattachement économique)

Nous avons repris le système prévu par l'article 4 LHID qui a la particularité de séparer le plan cantonal et le plan international en deux alinéas distincts. Cette solution permet de clarifier le libellé de la disposition.

alinéa 1

lettre c

Là également, il y a eu reprise des termes de l'art. 4 alinéa 1 LHID afin d'élargir l'assujettissement jugé trop restrictif, tout en précisant qu'il s'agit d'un ou de plusieurs immeubles. Ce nouveau libellé permettra notamment d'englober la notion d'usufruit.

lettre e

Cette disposition traite du problème des pendulaires, soit des personnes qui résident dans un autre canton et qui viennent, en principe, tous les jours dans le canton de Genève pour y exercer une activité salariée.

En vertu de la jurisprudence fondée sur l'article 46 alinéa 2 de la Constitution fédérale (interdiction de la double imposition intercantonale, art. 129 al. 2 Cst. 98), les pendulaires sont assujettis au lieu de domicile. A noter que la jurisprudence précitée repose sur des considérations anciennes qui ne sont plus forcément au goût du jour.

Nous estimons que cette jurisprudence mériterait d'être revue à la lumière des circonstances économiques actuelles (libre circulation des travailleurs ou chômage ; par exemple, l'article 16 alinéa 2 lettre f LACI autorise un trajet de deux heures dans chaque sens afin de se rendre à son lieu de travail) d'une part, et de l'évolution du droit fiscal international (conventions de double imposition, accords frontaliers), d'autre part. Le droit fiscal international prévoit actuellement le principe incontesté selon lequel le revenu du travail est imposé au lieu de l'exercice de l'activité.

Il convient toutefois de relever une exception fondée sur le critère de la fonction dirigeante. En effet, la jurisprudence considère qu'un cadre qui a des responsabilités particulières et la responsabilité de nombreux subordonnés exerce une telle fonction, et ainsi, est assujetti au lieu de son activité professionnelle dans la mesure où il ne revient pas tous les jours à son lieu de domicile (cf. ATF du 9 novembre 1993 publié dans RDAF 1994, p. 19 et ATF 104 Ia 268, consid. 3).

alinéa 2

lettre a

Cette disposition est à mettre en parallèle avec l'article 4 LIPP (imposition à la source).

lettre d

La jurisprudence dégagée par le Tribunal fédéral relative à l'interdiction de la double imposition prévoit la règle selon laquelle les rentes sont imposables dans le canton du domicile. Ainsi, les retraites genevoises perçues par des personnes domiciliées dans le canton de Vaud sont imposables exclusivement dans ce dernier canton.

A noter que, sur le plan international, la quasi totalité des pays prévoient d'imposer les rentes dans le pays dont elles sont issues sous réserve des Conventions de double imposition.

alinéa 3

La définition de l'établissement stable de l'article 3 alinéa 2 du projet LIPP 1996 a été jugée trop restrictive. En effet, certains cas de figure dont la qualification n'a pas encore été arrêtée risquent d'échapper au fisc.

Par ailleurs, il convient de prévoir expressément l'imposition des chantiers de construction ou de montage ouverts pendant 12 mois au moins afin de légaliser la pratique administrative genevoise non contestée et d'harmoniser notre législation avec le droit fédéral (harmonisation verticale) (article 4 alinéa 2 LIFD). Il s'agit de préciser qu'un chantier n'est considéré comme établissement stable qu'à la condition qu'il déploie une activité commerciale (critère qualitatif) et qu'il réalise un chiffre d'affaire (critère quantitatif; voir ATF 102 Ib, 264 et ss.).

Pour toutes ces raisons, le libellé de l'article 4 alinéa 2 LIFD a été repris.

En outre, l'administration fiscale relève que le terme "fixe" qui qualifie l'établissement stable est un élément de base de la disposition que l'on ne saurait supprimer.

Article 5

(Etendue de l'assujettissement)

alinéa 4

Cette disposition permet d'intégrer les bénéfices réalisés à l'étranger à concurrence du montant des pertes qui ont pu faire l'objet d'une déduction à Genève les années précédentes.

Le libellé de l'article 3 alinéa 3 LIFD, plus clair, a été repris à l'article 5 alinéa 4 LIPP. Cela permet une harmonisation verticale qui est souhaitable.

Article 6

(Taux de l'impôt)

alinéa 2

Le principe général de la répartition internationale est de prendre le taux qui correspond au revenu et à la fortune mondiale. Toutefois, pour les contribuables domiciliés à l'étranger, il est parfois difficile d'avoir des renseignements appropriés sur le revenu et la fortune étrangers. En conséquence, l'article 6 alinéa 2 LIPP a prévu le principe selon lequel les contribuables domiciliés à l'étranger qui sont imposables en raison d'une entreprise, d'un établissement stable ou d'un immeuble sis dans le canton sont imposables à des taux correspondant au moins au revenu acquis dans le canton et à la fortune qui y est située.

Ce mécanisme peut être illustré par l'exemple suivant. Un établissement qui, par hypothèse, réaliserait un revenu de 10'000 francs dans le canton et qui subirait une perte de 2'000 francs à l'étranger, se verrait appliquer au revenu de 8'000 francs le taux applicable à un revenu de 10'000 francs.

Article 7

(Début, fin et modification de l'assujettissement)

alinéas 1 & 2

Les alinéas 1 et 2 de l'article 7 reprennent, en les adaptant à l'échelle cantonale, les règles contenues dans la LIFD (art. 8) qui elles-mêmes reposent sur la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de double imposition.

alinéa 3

En cas de changement de domicile au regard du droit fiscal, à l'intérieur de la Suisse, la LHID contient une règle contraignante, à son article 68. L'article 216, alinéa 3 LIFD énonce, quant à lui, une règle différente en ce qui concerne la compétence pour percevoir l'impôt. D'autre part, à l'article 68 LHID, il n'a pas été tenu compte de la coexistence de cantons avec des systèmes d'imposition dans le temps différents (systèmes praenumerando bisannuel et postnumerando annuel). Actuellement, une modification de l'article 68 LHID est en cours. Dans ces circonstances, la Commission d'harmonisation (COHA) de la Conférence des fonctionnaires fiscaux d'Etat recommande un renvoi aux dispositions de la LHID, de telle sorte qu'un changement de la LHID soit immédiatement applicable.

Article 8

(Epoux; enfants sous autorité parentale)

Cette disposition traite de la taxation du revenu et de la fortune des époux et des enfants mineurs, alors que la question de la responsabilité du paiement de l'impôt est prévue à l'article 12.

Bien que la Commission de relecture soit favorable à la solution de la taxation séparée des époux, on rappellera que ce système est incompatible avec la LHID dans sa teneur actuelle. Toutefois, une réforme du régime de l'imposition de la famille est proposée par une commission d'experts fédérale dont les travaux ont été rendus publics le 12 mars 1999. Il conviendra de suivre sur ce point l'évolution probable de la LHID et d'adapter la loi fiscale genevoise en conséquence.

alinéa 1

L'addition des revenus des époux est maintenue, en raison du caractère impératif de l'article 3 LHID. Par contre, chaque époux est considéré comme un contribuable. Cette modification implique que les déductions soient chiffrées par contribuable et non plus par couple.

Pour des raisons de simplification d'écriture, le projet de loi continue à faire référence au "; contribuable " même lorsqu'il s'agit d'un couple de contribuables mariés.

alinéa 2

Les enfants mineurs qui réalisent un revenu provenant d'une activité lucrative dépendante sont taxés à la source (article 1 LIS, compatible avec l'article 9 alinéa 2 LIFD). Les autres revenus de l'enfant, issus d'une activité lucrative indépendante, font l'objet d'une taxation séparée (article 19 alinéa 1 LIPP).

alinéa 3

Actuellement, les autres revenus et la fortune de l'enfant sous autorité parentale sont ajoutés aux revenus et à la fortune des détenteurs de l'autorité parentale, à l'exception du revenu de l'activité lucrative sur lequel les enfants sont imposés séparément (article 9 alinéa 2 LIFD).

Dans une perspective d'harmonisation verticale, nous avons repris le libellé de l'article 9 alinéa 2 LIFD. Elle précise toutefois le texte par l'adjonction des termes "; du ou des parents ". De la sorte, cet alinéa règle le sort des revenus et de la fortune des enfants d'un couple marié, d'une famille monoparentale, ainsi que de parents divorcés dont l'un se voit confier la garde et l'autorité parentale.

Nous sommes conscients que l'entrée en vigueur du nouveau droit du divorce qui prévoit la possibilité d'attribuer l'autorité parentale conjointe aux parents divorcés, ou non mariés, peut poser des problèmes d'ordre fiscal. Toutefois, une telle solution ne pourra être choisie par le juge qui si les parents soumettent au juge une convention qui détermine notamment la répartition des frais d'entretien de celui-ci. La question fiscale devra également être réglée.

Article 10

(Sociétés commerciales étrangères et

autres communautés de personnes sans personnalité juridique)

Cette disposition qui introduit une différence de traitement entre les sociétés étrangères et les sociétés suisses permet d'appréhender toutes les sociétés étrangères quelle que soit la complexité de leur structure.

Seuls les associés, à l'exclusion des employés, sont visés par l'article 10. Les employés font l'objet de l'imposition ordinaire sur le revenu.

Article 11

(Succession fiscale)

alinéa 2 (nouveau)

L'alinéa 2 trouve son origine dans l'article 12 alinéa 2 LIFD. Cette disposition a été adoptée dans un souci d'harmonisation verticale.

Cet article permet d'éviter qu'au moyen de certains artifices, au moment de la liquidation du régime matrimonial ensuite du décès de l'un des époux, la responsabilité fiscale du conjoint survivant soit fortement réduite, voire totalement supprimée. Il n'établit pas un nouvel impôt mais précise l'étendue de la responsabilité du conjoint survivant.

Article 12

(Responsabilité des époux et responsabilité solidaire)

La législation actuelle, ainsi que le projet LIPP 1996, prévoient la responsabilité solidaire des époux concernant la dette d'impôts. La responsabilité s'éteint uniquement lorsque les époux ne vivent pas en ménage commun.

Nous estimons que la responsabilité solidaire face à la dette d'impôts pénalise celui des conjoints, le plus souvent l'épouse, qui réalise un revenu nettement inférieur à l'autre, ce qui provoque une discrimination indirecte contraire à l'article 4 de la Constitution fédérale. Elle propose donc une solution qui prévoit la responsabilité de chaque époux uniquement pour le montant des impôts afférents à son revenu et à sa fortune. Cette solution, qui implique la suppression de l'alinéa 2 du projet LIPP 1996, est plus respectueuse du principe d'égalité. Elle aura pour conséquence que l'administration fiscale devra, à la demande de l'un des conjoints, faire le calcul de la part d'impôts afférente à chacun des revenus.

Concernant la dette d'impôts des enfants, les époux faisant ménage commun restent solidaires de l'impôt total qui frappe le revenu, autre que professionnel, et la fortune des enfants.

Compte tenu des difficultés pratiques de mise en oeuvre de cette nouvelle règle de solidarité entre époux, la Commission préconise une disposition transitoire dans la LIPP, selon laquelle l'art. 12 entre en vigueur le 1er janvier 2003.

alinéa 2

Tous les cas prévus par l'alinéa 2 introduisent une règle de solidarité subsidiaire.

lettre a

On rappellera que chaque époux est un contribuable, contrairement à ce qui est prévu dans la LCP où seul le couple est contribuable.

De ce fait, et pour se conformer à la LHID, la lettre a précise que la solidarité s'étend aux enfants placés sous l'autorité parentale et sous la garde, jusqu'à concurrence de leur part totale d'impôt.

lettre c

La lettre c reprend le contenu de la LHID, ainsi que l'article 13 alinéa 3 lettre c LIFD. Elle engage toutefois la responsabilité de l'acheteur et du vendeur à hauteur de 6 pour cent du prix de vente, dès lors que l'impôt cantonal et communal est plus élevé que celui de la LIFD.

Il s'agit d'une clause anti-abus qui a pour but d'offrir une garantie quant à la perception de l'impôt sur la commission perçue par l'intermédiaire domicilié hors de Suisse lors de la vente d'un immeuble. Etant donné qu'il s'agit d'un cas plutôt rare, on peut penser que le vendeur et l'acheteur devraient s'informer auprès du fisc des conséquences éventuelles de leur acte. Cette disposition ne concerne pas le bénéfice immobilier qui est taxé selon les dispositions spécifiques (impôt sur les gains immobiliers).

alinéa 3

L'alinéa 3 du projet LIPP 1996 est complété afin de faire ressortir plus clairement l'existence d'une présomption d'absence de faute de l'administrateur ou de l'exécuteur testamentaire.

Article 13

(Présomption de propriété des immeubles)

A l'origine, cette disposition reprenait la réglementation actuelle de la LCP, de même que celle du projet LIPP 1996. Elle instituait une responsabilité unique du propriétaire inscrit comme tel au registre foncier, pour le paiement de l'impôt. Cette disposition était incomplète, dans la mesure où elle ne réglementait pas la situation où le bien immobilier est soumis à usufruit. Dans cette hypothèse, l'impôt sur le revenu (valeur locative), l'impôt sur la fortune et l'impôt immobilier complémentaire sont prélevés auprès de l'usufruitier, lequel doit être avant tout responsable du paiement de ceux-ci.

La nouvelle disposition permet de rendre responsable le nu-propriétaire du paiement de l'impôt lorsque l'usufruitier fait défaut.

Nous nous sommes encore interrogés sur l'application d'une telle disposition au propriétaire tombé en faillite qui n'a plus la jouissance de ses biens du fait qu'ils sont gérés par la masse en faillite. Nous n'avons pas jugé bon d'introduire dans la LIPP une réglementation particulière, dès lors que la responsabilité d'un tel propriétaire peut être exclue par l'application des règles de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite.

Article 14

(Imposition d'après la dépense)

alinéa 2

Le libellé de l'article 6 alinéa 2 LHID a été repris, ce qui implique que l'obligation d'octroyer l'imposition sur la dépense devient une faculté de l'administration.

alinéa 3

Le nombre de personnes soumises à l'impôt d'après la dépense représente plus de 550, ce qui génère un montant d'impôts annuels de 55 à 60 millions (impôts cantonal et fédéral compris). En tout état de cause, le forfait ne couvre pas les impôts de successions et donations qui sont perçus en totalité. Ces montants peuvent être importants. Par ailleurs, l'administration fiscale précise que la grande majorité des bénéficiaires de ce mode d'imposition sont des retraités et que, partant, les cas d'abus sont rares.

Article 15

(Allégements fiscaux)

S'agissant des conditions d'application générales de l'article 15, il faut que l'entreprise nouvellement créée soit créatrice d'emploi, qu'elle ne fasse pas concurrence à d'autres entreprises genevoises actives dans le même domaine sur le marché local et qu'elle respecte les conditions locales de travail. La condition qui sous-tend cette disposition est celle d'investissements de la part de la nouvelle entreprise.

L'administration fiscale indique que, hormis le lieu où elles s'exercent, les professions libérales ne nécessitent en général pas de gros investissements. Il en découle qu'elles sont à priori exclues du champ d'application de cette disposition. Cependant, des exceptions sont envisageables.

L'article 15 ne vise pas la taxe professionnelle qui ne tombe pas sous le coup de la LHID.

alinéa 1, § 1

La Commission propose de reprendre la définition de l'article 5 LHID, en particulier pour éviter le terme "restructuration" qui peut porter à confusion car la LIPM l'utilise dans un sens différent.

alinéa 1, § 2 & § 3

Les paragraphes 2 et 3 de l'alinéa 1 traitent de la procédure en matière d'allégements fiscaux. Ainsi c'est le Département des finances qui est compétent pour statuer sur toute demande. Le délai qui lui est imparti est de 60 jours, à compter de la date d'enregistrement de la demande (§2). Le paragraphe 3 indique dans quelles circonstances ce délai de 60 jours peut être suspendu et jusqu'à quand.

alinéa 2 (nouveau)

Il convient de prévoir une base légale consacrant la pratique actuelle qui permet une reprise des allégements accordés (clause de rattrapage) au cas où l'entreprise déciderait de quitter le canton dans les cinq ans après la fin des allégements fiscaux. La codification de cette pratique permettra d'éviter que des entreprises contestent les reprises.

De manière à limiter les abus, l'administration fiscale tient compte des allégements dont les entreprises ont déjà bénéficié, cas échéant, dans d'autres cantons.

Article 16

(Exemptions)

Cet article, qui traite de l'exonération des fonctionnaires internationaux, fait référence aux accords de sièges signés avec les organisations internationales.

L'exonération sur le revenu et la fortune dont bénéficient les fonctionnaires internationaux s'applique, en fonction des accords.

Le cas particulier des diplomates est régi par les conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires.

Article 17

(Entrée en vigueur)

alinéa 1

L'alinéa 1 de l'article 17 fixe l'entrée en vigueur du présent projet de loi au 1er janvier 2001. Il s'agit de la date limite à laquelle le canton de Genève doit adapter sa législation à la Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID) du 14 décembre 1990 qui devient directement applicable si les dispositions de droit fiscal cantonal s'en écartent (art. 72, alinéa 2, LHID).

A noter encore que l'article 17, alinéa 1, est indispensable. Son absence aurait en effet pour conséquence de rendre applicables les dispositions de la Loi sur la forme, la publication et la promulgation des actes officiels (B 2 05), en particulier les articles 14 et 14A, avec toutes les conséquences que cela implique.

La responsabilité solidaire, telle qu'elle est prévue à l'article 12, ne fait l'objet d'aucune disposition spécifique dans la LHID qui, de ce fait, n'est pas contraignante, en particulier en matière de date d'entrée en vigueur. Dès lors, l'entrée en vigueur de l'alinéa 2 de l'article 12, qui relève de l'autonomie cantonale, a été fixée au 1er janvier 2003, afin de tenir compte des difficultés résultant de la mise en pratique d'une telle disposition.

Article 18

(Modification à une autre loi)

Sont ici abrogées les dispositions de la Loi générale sur les contributions publiques qui ont le même objet que celles du présent projet de loi.

A l'origine, l'article 18 contenait un second alinéa précisant que, pour le surplus, les autres dispositions de la Loi générale sur les contributions publiques demeuraient applicables.

Cet alinéa a finalement été supprimé. Il est apparu, en effet, qu'il pourrait créer des problèmes d'interprétation dans la mesure où de futures autres lois sur l'imposition des personnes physiques pourraient contenir une disposition abrogeant certaines dispositions de la Loi générale sur les contributions publiques.

En définitive, il va de soi que les dispositions de la Loi générale sur les contributions publiques non abrogées restent en vigueur, même au-delà du 1er janvier 2001, pour autant bien entendu qu'elles ne dérogent pas à la Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990.

Au bénéfice de ces explications, nous vous remercions d'ores et déjà, Mesdames et Messieurs les Députés, d'accueillir favorablement le présent projet de loi.

Ce projet est renvoyé à la commission fiscale sans débat de préconsultation.