République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 25 juin 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 9e session - 39e séance
PL 7474-A
Suite du premier débat
M. Jean-François Courvoisier (S). Tout d'abord, je voudrais féliciter les auteurs de ce projet de loi et m'associer à 100% à l'excellent rapport de mon collègue Charles Beer.
Si je tiens à dire quelques mots, c'est pour soutenir le message de mon collègue Christian Brunier et souligner que les retombées financières positives compenseraient en grande partie les millions que coûterait l'adoption de ce projet. Si, grâce à ce chèque formation, des chômeurs pouvaient retrouver un emploi, ils n'auraient plus besoin de l'aide de l'Etat et pourraient même payer des impôts. A la commission de la santé, nous avons vu notamment que les chômeurs sont une des catégories qui coûte le plus cher au département de la santé, tant ils sont nombreux à souffrir de maladies psychiques et physiques. Beaucoup de jeunes chômeurs courent aussi le risque de devenir des drogués, des cas sociaux et des délinquants juvéniles. Il est donc fort probable que les millions que Mme Brunschwig Graf économisera dans son département, si nous refusons ce projet, se reporteront sur les départements de MM. Ramseyer et Segond, car nous serons obligés de soigner les maladies dues au chômage sans nous soucier du coût de ces soins, en plus de l'insécurité dont nous aurons tous à pâtir. Il nous faudra aussi trouver les moyens de rééduquer les délinquants juvéniles, auxquels une formation continue aurait pu donner une raison de vivre avant de leur procurer un emploi.
En dehors des chômeurs, de nombreux travailleurs, dans tous les domaines, se sentent dépassés par l'évolution rapide des moyens de production et des méthodes de travail. Le chèque formation leur permettrait de se mettre à jour et de rester dans le coup, d'être plus performants et de rendre nos entreprises plus compétitives. En commission de l'enseignement, M. Balestra nous a longuement expliqué tout ce que la loi nous interdisait de faire. Mais, dans le cas présent, ce projet est si important que je demanderai aux députées et députés de tous les partis de le soutenir, et au Conseil d'Etat de faire preuve d'imagination pour trouver les moyens nécessaires à son application.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Tout ou presque a été dit par les partisans de ce projet. C'est peu dire que l'Alliance de gauche accueille avec satisfaction son aboutissement. Merci à Charles Beer d'avoir débroussaillé avec brio les très laborieuses discussions qui ont eu lieu pendant plus de deux ans en commission de l'enseignement. A cet égard, si cela a duré aussi longtemps, c'est bien parce que nos adversaires, les adversaires de ce projet, jusque dans les rangs de l'Etat, ont tout fait pour que nous n'allions pas vite et pour ne pas nous aider à y voir clair rapidement.
S'agissant de ce projet, je ne suis pas d'accord avec notre collègue Janine Hagmann quand elle dit que son aspect le plus important est le chèque formation. Ce chèque est certes un aspect important du projet, mais il en est un autre au moins aussi important à mes yeux, qui est d'avoir tenté de clarifier le paysage enchevêtré de la formation des adultes dans notre canton, d'établir l'inventaire de l'offre, des procédures, de voir qui en avait l'initiative, quels étaient les modes de contrôle, comment fonctionnait ce secteur, en partie public, en partie privé, dont certains des aspects les plus liés au marché de la formation sont parfois parfaitement critiquables. Clarifier cette organisation, introduire l'exigence de bilans de formation, de validation ou de certification de formation, exiger la qualité quand on paie, ce sont toutes choses raisonnables et, Madame et Monsieur les rapporteurs de minorité, vous l'avez vous-mêmes reconnu.
Tout le monde reconnaît que prévoir un chèque formation comme moyen d'incitation est une mesure utile, mais vous dites qu'elle n'est pas appropriée en raison de la situation financière de l'Etat. J'aimerais reprendre ce point pour dire qu'il ne s'agit pas d'accorder des formations tous azimuts - qu'il s'agisse de formations accordées dans le cadre d'un emploi ou dans le cadre d'institutions publiques - sans chercher à clarifier l'organisation, comme on l'a fait pour les autres ordres d'enseignement au cours des siècles écoulés, les ordres d'enseignement vont du primaire au secondaire obligatoire et post obligatoire, à l'université, aux hautes écoles, aux formations professionnelles et, aujourd'hui, à la formation des adultes. C'est le chemin inéluctable qui nous attend, dans ce monde où la formation devient la clé du plein emploi, si celui-ci existe, et en tout cas du développement de l'emploi.
Je m'étais donc réjouie, pour ma part, à la première lecture de ce projet de loi, en me disant qu'on allait s'acheminer vers la clarification du domaine de la formation des adultes, dont je connaissais certains aspects, mais dont l'enchevêtrement rebutait et dont certains aspects, liés au marché des cours, étaient franchement désagréables. Je pense ici notamment à la formation en informatique, qui peut faire des ravages : elle coûte très cher et est généralement dépourvue de tout contrôle pédagogique et de toute certification. Créer cet ordre d'enseignement, le clarifier, le rendre visible à ses bénéficiaires potentiels, permettre la reconnaissance de son utilité par une véritable promotion, une véritable information de l'Etat, nécessite des moyens, je le concède au Conseil d'Etat et à tous ceux qui s'y sont opposés. Mais c'est un projet que je juge pour ma part enthousiasmant pour tous ceux qui s'attellent à cette tâche depuis longtemps, que ce soit à l'office cantonal de l'emploi, à l'orientation professionnelle, dans les universités ou dans les écoles. Et je tiens pour acquis que ce projet sera bien accueilli et qu'il suscitera la mise en commun des synergies, des réseaux de formation, et la rentabilisation de ce qui existe. Je me souviens, pour prendre cette comparaison, que dans les rangs antinucléaires on disait que l'énergie la meilleure serait celle qu'on économiserait. Je dirais que les meilleures ressources que nous mettrons à disposition de la formation continue seront celles que nous économiserons dans la jungle du marché actuel.
Tous les partenaires sociaux en sont convaincus. Ce qui nous sépare, c'est le financement, mais j'aimerais rappeler ce que disait un représentant syndical patronal lors de son audition, lorsque nous l'avons interrogé sur le taux de formation professionnelle dans un domaine aussi nécessaire que celui de la construction : 10% des maçons du canton sont porteurs d'un CFC, 90% n'ont que des formations continues extrêmement partielles. Ce représentant disait que, si jamais le marché international s'ouvrait, si les frontières s'érodaient, le marché des maçons à Genève s'écroulerait.
Aussi, si vous êtes d'accord que la formation des adultes constitue un impératif, vous devez faire l'effort supplémentaire d'imaginer quel pourrait être son financement. En l'état, son financement passe en premier lieu par une meilleure exploitation des énergies existantes, une meilleure transparence, une meilleure information, une meilleure promotion de ce qui existe, et ensuite seulement vient le chèque formation.
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Je souhaiterais d'abord répondre à l'intervention du rapporteur de première minorité, M. Balestra, qui a fait une parfaite démonstration des quelques faiblesses de notre argumentation - car il faut effectivement concéder que tout n'est pas parfait dans ce projet de loi, qui représente néanmoins une avancée.
Je qualifierai l'intervention de M. Balestra d'intervention de fausse vraie bonne foi, parce qu'avec sa bonhomie coutumière il a su tailler en pièces certains éléments de la loi que par ailleurs il n'a jamais mis en cause en commission. Ainsi, concernant le chèque formation, nous avons exploré à ce sujet, au cours des septante heures de discussions en commission, beaucoup d'idées, notamment dans le but de resserrer un peu le dispositif de départ. Il a été ainsi imaginé, au-delà des questions de limites financières, de le limiter aux champs professionnellement utiles. Les libéraux n'ont pas souhaité retenir cette idée. Il a également été proposé de cibler certaines populations moins bien formées, tel que cela pouvait ressortir notamment de l'enquête sur la littératie menée par le SRED. Jamais cette idée n'a été saisie au bond par les libéraux. A aucun moment, le concept du chèque formation n'a été l'objet d'amendement, si ce n'est sur la question des limites de revenus. C'est le seul point qui a été mis en avant, et d'ailleurs pas par les libéraux et libérales, qui n'ont pas jugé que c'était là un bon combat, estimant que cette mesure d'impulsion devait profiter à toutes et tous, sans limites de revenus. A cet égard, les libéraux et libérales étaient presque plus avant-gardistes que nous, jugeant que même un revenu important ne pouvait constituer une entrave à l'impulsion représentée par le chèque formation. C'est là un élément important à relever, quant aux travaux de la commission. Au-delà des questions financières, il y a eu parfaite unanimité sur l'ensemble des mesures et jamais aucune idée de la majorité n'a été combattue par le biais d'un amendement. Ce soir, nous devons donc nous baser sur les travaux de la commission et non pas sur un exposé, développé à partir d'un rapport de minorité brillant, mais qui ne reflète pas les travaux de la commission.
J'aimerais insister sur un autre point. M. Balestra a évoqué l'initiative syndicale, nous reprochant de revenir, à partir d'une initiative mal ficelée, avec un projet de loi aussi mal ficelé, pour forcer les choses, comme on aurait tenté de les forcer précédemment. En l'occurrence, il est vrai que le débat a peu changé. Les syndicats ont présenté, sans doute maladroitement, un certain nombre de mesures, qui n'étaient pas toutes cohérentes entre elles et qui ne permettaient pas un choix clair du peuple au moment où il aurait dû trancher pour ou contre l'initiative. Le Tribunal fédéral a confirmé la décision du Grand Conseil - je rappelle que le préavis du Conseil d'Etat avait été clair : il n'en voulait pas ! Puis, après le choc représenté par l'invalidation de l'initiative, le groupe radical - M. Lescaze était attentif à l'époque ! - a souhaité reprendre le message de l'initiative en disant, dans une motion, que l'ensemble des bonnes propositions contenues dans l'initiative devaient être reprises sous forme de projet de loi. C'est donc l'aboutissement de la démarche initiée notamment par le groupe radical que nous examinons aujourd'hui, trois ans après le dépôt du projet de loi. Et, sur ce point, le parti radical n'a effectivement pas changé d'avis, Monsieur Lescaze, j'en conviens tout à fait.
Maintenant, je dirai un mot sur les rôles respectivement du parlement et du département. Le parlement a souhaité avancer, trouver un certain nombre de solutions et développer, tout au long des travaux constructifs de sa commission de l'enseignement et de l'éducation, une approche pragmatique. A ce jour, nous n'avons malheureusement trouvé personne au rendez-vous - si ce n'est sur un point important, à savoir le développement des formations en article 41 par la gratuité. Je rappelle que c'était également un élément de l'initiative et que c'est l'objet d'un rapport de la Commission d'évaluation des politiques publiques. Sur ce point, le département a répondu présent et c'est une bonne chose. Cela dit, le chèque formation doit également permettre aux personnes qui n'ont pas le niveau nécessaire d'entrer directement en article 41, y compris de suivre un certain nombre de cours de culture générale, pour arriver à suivre les cours aboutissant au certificat fédéral de capacité. Nous espérons donc que le département aura, si le vote du parlement est clair, la volonté de mettre en place une formation continue simplifiée et décuplée quant à ses effets d'impulsion, à destination de la population.
Dernier élément, la question du financement et de l'investissement. Nous avons entendu à de réitérées reprises, dans ce parlement, qu'il fallait croire en Genève, qu'il fallait croire en l'avenir et qu'il fallait savoir investir. Mesdames et Messieurs du parti libéral, j'espère que vous ne pensez pas que l'investissement se limite à la pierre, même empilée sous forme de stade ! J'espère que vous êtes convaincus que l'avenir de Genève, au-delà de ces constructions, passe également par une volonté d'investir dans la matière grise, qui représente la seule matière première de notre canton. J'espère que vous pourrez au moins nous rejoindre sur ce point : l'avenir de Genève mérite un acte de foi dans le sens d'un engagement pour un investissement à destination des hommes et des femmes qui font l'économie de ce canton.
Toujours dans le registre financier, on a ironisé tout à l'heure sur le chiffrage du projet. Le rapport de majorité est clair et je l'ai répété tout à l'heure avec, je crois, la même clarté : les chiffres que nous avons cités sont ceux calculés par le département, je dis bien par le département, et non par un député fantaisiste ! De même, les deux éléments qui me permettent d'annoncer 10 millions au lieu de 16 sont factuels et inattaquables. En tout cas, si vous entendez contester ces chiffres, je vous attends de pied ferme !
Enfin, il n'a jamais été question de débloquer des postes supplémentaires pour l'application du chèque formation. Cela pour la bonne et simple raison que la commission, unanimement, a considéré que le chèque formation ne devait en aucun cas être conçu comme une prestation soumise au contrôle d'une administration qui serait payée pour éviter qu'elle soit délivrée ! En d'autres termes, il n'est pas question de revenir aux caricatures que combat le NPM - puisque c'est une notion que vous pouvez comprendre. Il s'agit au contraire de libérer les initiatives, de libérer les esprits, de libérer les hommes et les femmes des carcans administratifs, pour leur permettre de bénéficier d'une mesure d'impulsion que, le cas échéant, le parlement déciderait.
J'en termine avec la question d'employabilité et du retour sur investissement. La notion d'employabilité est extrêmement laide, inesthétique et paraît fort technocratique par rapport aux différents problèmes que soulève le chômage. Aussi, je ne résiste pas, pour ponctuer mon intervention, à vous lire trois lignes d'une communication du conseil des ministres de l'OCDE de 1997, qui disait s'être mis d'accord, je cite, «sur l'urgence de mettre en oeuvre des stratégies efficaces de formation tout au long de la vie, pour tous ; renforcer les capacités des individus à s'adapter et à acquérir des qualifications et des compétences nouvelles ; l'importance d'un apprentissage à vie pour permettre la croissance à long terme dans une économie fondée sur le savoir.» Telle est ce soir notre démarche !
Mme Martine Brunschwig Graf. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Ce n'est pas que mes propos soient plus importants que les vôtres, mais pour tous ceux qui auront jeté un coup d'oeil sur l'écran de télévision de la salle des Pas-Perdus, je crois que l'effet produit par ce Grand Conseil dans son brouhaha perpétuel n'est pas de nature à enthousiasmer - puisque c'est un mot à la mode ce soir - les téléspectateurs assez courageux pour suivre nos débats ! Je vous le dis pour la seconde fois, car j'ai quelques préoccupations, partagées, je crois, par le président du Grand Conseil, concernant l'image institutionnelle que nous donnons tous, par distraction ou par laisser-aller. Je vous demanderai d'y songer de temps en temps !
Mesdames et Messieurs les députés, il y a un point sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est l'importance de la formation continue. C'est si vrai que, voilà bien quelques années, les députés et le département avaient accepté d'introduire dans la loi sur l'instruction publique quatre articles qui traitaient de la formation continue des adultes. Articles que vous ignorez d'ailleurs superbement aujourd'hui, puisque vous avez oublié de les annuler, si enthousiastes que vous êtes à l'idée de présenter votre loi. Je me permets donc de souligner qu'il faudra tout de même se mettre à jour de ce point de vue-là.
J'en viens à mon propos. En préambule, j'aimerais dire que les paroles que vous avez eues, les uns et les autres, à l'égard du département et de ses représentants sont des paroles que je ne peux accepter comme telles. L'une de vous, Mme la députée Deuber, a relevé avec quel enthousiasme devrait être accueilli le chèque formation et les propositions contenues dans cette loi, citant notamment l'office d'orientation et de formation professionnelle et les milieux de la formation en général. Mesdames et Messieurs les députés, les fonctionnaires qui ont été délégués par le département dans votre commission sont non seulement des gens respectables et respectés pour leurs qualifications professionnelles, mais sont aussi des connaisseurs particulièrement avertis de ce qu'est l'orientation et la formation professionnelle. Autrement dit, ce sont des professionnels et les avis qu'ils ont donnés, les positions qu'ils ont prises ne résultaient pas d'un diktat de la présidente : ils les ont prises parce qu'ils sont convaincus du métier qu'ils exercent, de ce qu'ils observent sur le terrain et de ce qu'ils pensent être les moyens à mettre en oeuvre en matière de formation. Alors, on peut diverger sur ces moyens, mais j'aimerais tout de même que l'on prenne l'habitude dans ce Grand Conseil de mesurer ses propos. Lorsqu'un département ou ses fonctionnaires émettent, en commission, des avis divergents de ceux des députés et qu'ils s'efforcent par ailleurs, comme ils l'ont fait, de venir à leur rencontre en proposant de faire une tentative, de faire une expérience s'agissant du chèque formation - ce que vous avez refusé - il est regrettable d'entendre systématiquement, dans ce Grand Conseil, des attaques par rapport à des fonctionnaires venus défendre un dossier en leur âme et conscience.
Maintenant, sur le fond, quantité d'articles de cette loi peuvent être acceptés sans autre, dans la mesure où ils donnent un cadre légal, où ils clarifient la situation par rapport à ce qu'est de nos jours la formation continue des adultes. Je ne partage pas l'avis de celle et de celui qui tout à l'heure parlaient de Moyen Age, s'agissant de la formation continue. On en est loin, preuve en est que d'autres ont évoqué la jungle actuelle de l'offre, que d'autres encore ont évoqué à juste titre la nécessité de coordonner les efforts, de mettre en réseau, de mettre en évidence les offres existantes. On ne peut donc pas dire que la formation continue et l'offre en la matière dans ce canton soient du Moyen Age, quand bien même on peut reconnaître - et en cela cette loi a du bon - qu'un effort de rationalisation, de mise en réseau et d'évaluation de la qualité reste à faire, ce qui est d'ailleurs, en partie déjà, mis en chantier au sein du département de l'instruction publique.
Cela dit, un point nous sépare, c'est la conviction que le chèque formation que vous avez voulu mettre sur pied soit la réponse aux problèmes évoqués tout à l'heure, comme les difficultés en matière de littératie ou les problèmes liés au chômage. Mesdames et Messieurs les députés, des spécialistes ont évoqué pour vous les difficultés que pose le chèque formation. Vous avez entendu en commission quelles pouvaient être les mauvaises expériences en ce domaine, les mesures que les Français ont expérimentées avec un succès extrêmement relatif. Lorsqu'on parle de littératie, notre principale préoccupation n'est pas tellement de pouvoir distribuer des chèques formation, mais de savoir comment amener des gens qui ont été en rupture scolaire durable ou momentanée, qui ont gardé de l'école un sentiment de rejet suffisamment fort pour ne pas vouloir intégrer une institution de formation, comment les amener à en acquérir une. En l'occurrence, sans chèque formation, mais avec beaucoup d'à-propos et d'engagement, certaines de nos institutions - je pense notamment à l'Université ouvrière - donnent l'exemple du type d'efforts qui peuvent être mis en oeuvre quand il s'agit de prendre en compte de semblables difficultés. Pour ma part, je ne pense pas, et les fonctionnaires du département non plus, que le chèque formation soit véritablement la réponse pour amener ces gens-là, qui sont notre préoccupation commune, à se former et à se réconcilier avec l'institution, qu'elle soit scolaire, privée ou autre.
S'agissant du chômage, je vous rappelle que la formation existe, qu'elle est même obligatoire en ce qui concerne les mesures actives de chômage et que de ce côté-là le financement existe. Je rends grâce à M. Beer qui l'a dit à plusieurs reprises : s'il est une nécessité, c'est celle d'assurer un meilleur contrôle et une meilleure qualité de certaines formations dispensées, et en cela je partage volontiers l'avis qu'il a émis plusieurs fois en commission. Mais cela m'amène tout de même à dire que, alors que vous croyez avoir trouvé le remède miracle, on peut avoir une analyse différente quant à la façon d'amener les gens à se former. D'autres exemples ont été évoqués en commission qui n'ont pas été repris dans le rapport. Ce sont ceux d'entreprises privées qui ont investi dans un chèque formation interne à l'entreprise et qui ont constaté qu'il profitait malheureusement toujours aux mêmes, à celles et ceux qui se forment volontiers et qui représentent un échantillon de la population dans son ensemble. C'est dire qu'il y a un débat à côté duquel nous sommes passés, que j'ai essayé d'évoquer à plusieurs reprises en commission, mais dont ne rendent pas bien compte les quelques lignes consacrées au résumé de mes trois auditions. Peu importe, je ne crois pas avoir ni vanité d'auteur, ni vanité tout court dans ce domaine ; vous avez choisi ce qui vous convainquait et vous l'avez mis dans le rapport, c'est votre affaire ! Mais je dirai ici que l'on peut parfaitement diverger sur les moyens sans être indigne, sans refuser les efforts de formation continue, en étant conscients les uns et les autres qu'il y a des améliorations à apporter, comme le montrent les articles de loi qui ne sont contestés par personne.
Mesdames et Messieurs les députés, vous avez bien voulu reconnaître que les mesures en article 41 étaient une préoccupation du département. Le Conseil d'Etat se prononcera mercredi prochain sur les propositions du DIP, suite au rapport de la Commission d'évaluation des politiques publiques et aux réflexions entamées par le département depuis plus de deux ans maintenant. Cet article 41 est pour nous une priorité, je vous l'ai dit. Il nous paraît extrêmement important qu'il y ait à la fois une reconnaissance de la formation de base et un accès gratuit, puisqu'il y avait jusqu'ici inégalité de traitement crasse, si je puis dire, entre celles et ceux qui suivaient ce type de formation et les autres qui fréquentaient notamment le collège pour adultes. Il était donc temps de mettre fin à cette injustice. Cette mesure a été pour nous la priorité et elle me paraît aller véritablement dans le bon sens.
En l'état, loin de moi l'idée de dire que tout est parfait, mais je répète que, d'une certaine façon, mettre en place un chèque formation en pensant avoir rempli sa mission est un leurre. Je crains fort que cet effort-là nous détourne d'autres efforts d'analyse bien plus importants, qui concernent celles et ceux, comme je le disais, qui ne veulent pas suivre de formation pour toutes sortes de raisons qui n'ont rien à voir avec des problèmes financiers. Ce d'autant que nous nous efforçons, dans ce canton, par le biais des allocations d'études, des exonérations, des subventionnements, de rendre accessible la formation continue des adultes, particulièrement dans les institutions dépendant du département de l'instruction publique. Ce soir, vous adopterez cette loi, puisque vous êtes majoritaires et convaincus d'avoir raison. Mais j'ai le sentiment que ce n'est pas une affaire de raison et qu'il n'y a pas de victoire à la clé. Je regrette infiniment que vous n'ayez pas accepté l'offre du département, qui allait à votre rencontre et proposait un test. Cette proposition ne vous a pas suffi, nous en assumerons les conséquences !
Je termine sur le financement. Pour vous, tout est prioritaire ! Je suis entrée dans ce Grand Conseil en 1989 et j'ai connu une longue liste de projets de lois votés par tous les partis représentés dans cette enceinte. Lorsqu'on reproche aujourd'hui aux majorités d'alors d'être responsables des déficits, il faut rappeler qu'à chaque fois ces majorités ont admis les priorités des autres bancs et que les députés ont voté ensemble des projets dont nous assumons aujourd'hui les conséquences financières. Ce soir, je crois entendre le même discours que celui entendu pendant toutes ces années-là : il n'est pas important de se soucier du financement ! Si, Mesdames et Messieurs, ça l'est, parce que si 10 millions ne sont rien pour vous, pour moi ce sont 100 postes ! Et, à voir la bagarre que vous avez menée pour obtenir dix postes au service du tuteur général, ou trente postes à l'enseignement primaire, j'en déduis qu'à l'heure actuelle dépenser 10 millions de francs n'est pas anodin, par rapport aux cent postes que l'on pourrait inscrire ailleurs.
Il est difficile pour le département, conscient de ses priorités, d'accepter que le choix des députés se porte finalement sur des moyens que nous n'avions pas choisis. En toute démocratie, vous allez voter, mais vous me permettrez quand même de rappeler que notre constitution doit être respectée et d'annoncer que le département et le Conseil d'Etat ne demanderont pas ce soir le troisième débat, jusqu'à ce que le Grand Conseil ait trouvé le financement adéquat. (Applaudissements.)
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Je voudrais apporter une précision importante sur la question d'un chèque formation sous forme expérimentale. La commission a bien examiné cette possibilité et nous avons, moi-même et d'autres députés, proposé une durée expérimentale de quatre ans pour ce chèque formation. Cette possibilité n'a pas été retenue, y compris par les deux minorités. Il s'agit là d'une précision importante, car vous ne trouverez nulle trace dans les travaux de la commission d'une idée du département à propos d'une telle mesure que la commission aurait rejetée. C'est contraire aux faits que de l'affirmer et je dois quand même le préciser.
L'autre élément que je voudrais souligner, c'est que ce projet de loi représente une avancée incontestable qui est le fait d'une décision du parlement. Et je dois dire que je ne trouve pas très adroit, Madame la présidente, d'associer vos fonctionnaires lorsque vous donnez votre avis. Vous ne pensez pas que le chèque formation soit une bonne mesure, ce qui est votre droit le plus strict, mais en citant vos fonctionnaires vous les livrez en quelque sorte en pâture au débat politicien et je ne trouve pas cela très adroit. Je le dis fort modestement, car je sais également apprécier leurs compétences professionnelles. Il n'est pas bon d'évoquer dans cette enceinte leur opinion - qu'ils n'ont pas directement manifestée en commission - s'agissant du fait que le chèque serait une mauvaise mesure. J'entendais simplement le relever. Ils auront certainement l'occasion de s'exprimer très largement, car ils n'assistent probablement pas pour rien à ce débat, depuis la tribune !
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3.
Art. 4
M. Christian Brunier (S). Nous présentons un amendement à l'article 4. Il est essentiel que les établissements de formation respectent les conditions de travail et nous proposons d'ajouter un alinéa 3 nouveau, ainsi libellé :
«3 L'ensemble des établissements mentionnés aux alinéas 1 et 2 ont l'obligation de respecter les conditions de travail en usage dans la branche.»
Mme Martine Brunschwig Graf. Je connais bien ce type de démarche, il est habituel dans ce parlement. Savez-vous simplement que certaines institutions de formation, et je pense ici à l'Université ouvrière par exemple, emploient des bénévoles ? Entendez-vous par là que dorénavant ils devront être salariés ?
M. Christian Brunier (S). Madame la présidente du gouvernement, je crois que vous avez mal compris notre amendement. J'ai parlé du respect «des conditions de travail», je n'ai pas parlé de militantisme, d'engagement volontaire... Cet amendement ne concerne bien entendu pas les bénévoles, qui font un travail formidable mais qui ne sont pas rétribués ; il concerne les employés proprement dits de ces institutions de formation.
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. J'aimerais rassurer cette enceinte parlementaire sur cet amendement concernant les conditions de travail en usage. J'ai eu l'occasion de discuter personnellement et professionnellement avec l'Université ouvrière. Celle-ci, ainsi que les juristes des différentes organisations syndicales et différents représentants politiques dans cette enceinte savent que les conditions de travail en usage valent bien entendu pour les professionnels engagés et ne concernent pas, Madame la présidente, les bénévoles. Il n'y a aucune équivoque à cet égard ; il s'agit simplement d'éviter que, dans un secteur aussi exposé à la demande, on fasse reposer sur les uniques épaules des salariés les fluctuations du marché. C'est malheureusement ce qui se passe aujourd'hui et certains cas sont bien connus. Des interpellations urgentes ici même ont permis de démontrer que des écoles privées, donnant des cours à des personnes envoyées par l'office cantonal de l'emploi, pratiquaient des salaires de moitié inférieurs à ceux des professionnels de l'Université ouvrière ou de l'IFAGE, pour donner ces deux exemples. Le dumping doit donc être combattu ; une telle offre est intéressante pour autant qu'on respecte les usages existants, comme cela se fait dans n'importe quelle autre branche et comme certains dans cette salle peuvent en témoigner.
M. Bernard Lescaze (R). Je suis un peu étonné qu'après trente-sept séances de commission - et pas trente-six, Monsieur le rapporteur de majorité - on en arrive à de tels amendements et à une telle discussion... (Exclamations.) L'amendement de M. Brunier est typiquement une question qui aurait dû être traitée en commission. Je ne demande pas le retour en commission, puisque le Conseil d'Etat a annoncé qu'il ne demanderait pas le troisième débat. Mais à partir d'un certain moment on est en droit d'attendre des députés un travail sérieux ! Il est probable que votre amendement est judicieux - même si nous nous abstiendrons lors du vote - mais il aurait clairement dû être présenté et discuté en commission.
Monsieur Brunier, votre camarade de parti comme les deux rapporteurs de minorité ont reçu 3700 F pour leurs rapports ! M. Beer a rendu un certain nombre de pages, les deux autres ont rendu des rapports de trois pages : c'est cher payé la page, c'est cher payé notre temps ce soir ! D'autant que nous avons beaucoup de points à l'ordre du jour et que la présidente du département de l'instruction publique a annoncé que le troisième débat ne serait pas demandé ce soir, ce qui signifie que vous avez encore six mois pour préparer, peaufiner vos amendements pour le troisième débat. Alors, de grâce, ne nous faites pas perdre plus de temps !
Mme Nelly Guichard (PDC), rapporteuse de deuxième minorité. Je ne reviendrai pas sur les propos de M. Lescaze en ce qui concerne les rapports, ils ne méritent même pas qu'on s'y arrête ! Par contre... (Commentaires de M. Lescaze.)
Le président. Silence, Monsieur Lescaze, s'il vous plaît !
Mme Nelly Guichard, rapporteuse de deuxième minorité. Par contre - si vous permettez, Monsieur Lescaze ! - je ne voterai pas et mon groupe ne votera pas les amendements proposés par M. Brunier. La commission a tenu suffisamment de séances de travail ; nous avons voté la plupart des propositions qui étaient faites, nous sommes en tout cas toujours entrés en matière, nous en avons toujours discuté. Je refuse donc cette manière cavalière et stupide de présenter un amendement, important certes, intéressant, mais qu'on ne présente pas après autant de séances de commission, Monsieur Brunier !
M. Armand Lombard (L). Je ne sais pas ce que je dois comprendre de cet amendement. M. Brunier et M. Beer le défendent avec tant de sagesse, semble-t-il, que je n'ose croire ce que je crois comprendre : s'il s'agit, par cet amendement, d'obliger les établissements privés à hausser leurs salaires pour les amener au niveau de ceux de l'Etat, ce n'est à l'évidence pas la bonne manière ni le bon moment de le présenter. Rediscutez cela pendant l'été, cela fera du bien au projet. Maintenant, je peux me tromper complètement, c'est parfaitement possible, mais je préfère dire tout de suite ce que je crains, plutôt que d'avoir manqué de le dire !
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Je pense que la question de M. Lombard mérite une réponse tout à fait sérieuse. S'agissant des conditions de travail en usage dans une branche, nous avons le même type de configuration dans le domaine de la santé par exemple, où il existe à la fois des établissements publics et des établissements privés. Là, cette notion de conditions de travail usuelles dans la branche est appliquée notamment en matière de politique de main-d'oeuvre étrangère. Définir les conditions de travail usuelles de la branche ne vise pas - je pense toujours à la politique des conditions de travail de la santé - à hausser le niveau des salaires du privé au niveau du public - même si je le souhaite par ailleurs; mais tel n'est pas le but. Le but est de dégager les usages professionnels, notion tout à fait claire, qui n'est pas basée sur les seules conditions de travail du secteur public, mais également sur les conditions de travail statistiques dans la branche. Il s'agit d'une notion parfaitement claire, qui a d'ailleurs été parfaitement bien comprise et admise par le Grand Conseil lorsque je l'ai proposée dans le débat sur les taxis. A cette époque, mon amendement n'a pas suscité la moindre ire ; on n'a pas dit qu'il y avait coup de force, manque de respect du travail de la commission... (Commentaires de M. Halpérin.) Mais, encore une fois, intéressez-vous aux conditions de travail de la santé, Monsieur Halpérin ! Je vois que vous êtes sorti de la lecture de «L'Hebdo», c'est une bonne chose...
Voilà ce que je souhaitais dire sur la notion de conditions de travail en usage. Par ailleurs, je souhaiterais qu'on complète cet amendement ainsi : «...l'ensemble des établissements et institutions mentionnés...», puisque c'est le libellé exact utilisé dans le titre.
Nous présentons enfin un second amendement, à l'alinéa 2, qui n'est pas non plus un coup de force, mais qui est plus technique. Il y avait une erreur dans le libellé, lors des travaux de la commission, d'où un renvoi à un mauvais article, que nous proposons de corriger... Monsieur Halpérin, vous prendrez la parole quand vous l'aurez demandée !
M. Michel Halpérin. Je la prendrai quand je voudrai !
Le président. Non, Monsieur Halpérin, quand je vous la donnerai ! Je vous prie de laisser les orateurs s'exprimer.
Mme Martine Brunschwig Graf. Comme certains députés dans cette salle, je pense que la durée des travaux de commission aurait dû permettre de régler ce type de problèmes. Cela dit, j'aimerais que l'on prenne acte de l'interprétation qui est faite de ces dispositions et que l'on s'en souvienne lorsqu'il s'agira de régler les cas litigieux dans les établissements et institutions privés. Cela me paraît extrêmement important, faute de quoi le coût du projet de loi risque de renchérir encore, du fait des conditions que l'on veut introduire ici.
Mesdames et Messieurs, vous pouvez évidemment accepter tous les amendements que vous souhaitez, mais je tiens à dire que celui-ci ne tient probablement pas la route sur le plan juridique et qu'à la première occasion il y aura des conflits pour réclamer au minimum les conditions de l'Etat. Et ensuite, on viendra se plaindre du coût de la formation !
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Puisqu'on souhaite pouvoir faire référence, à juste titre, à nos interventions de ce soir pour bien comprendre cette notion, je tiens à porter à la connaissance du parlement le fait qu'il existe aujourd'hui des conditions de travail en usage dans l'enseignement. Pour ne rien cacher, je précise que les conditions de travail en usage dans les métiers de l'enseignement, telles qu'admises par les commissions tripartites, sont arrêtées à 45 F l'heure, représentant respectivement l'heure d'enseignement et la préparation - ce qui n'est en rien comparable aux salaires de la fonction publique. Pour information également, j'ajoute que le salaire minimum pratiqué dans le cadre de l'IFAG est de 56 F l'heure et aux alentours de 68 F l'heure à l'Université ouvrière.
Ne voyez donc pas dans cet amendement quelque putsch qui viserait à étatiser la formation et à renchérir des coûts que vous avez d'ores et déjà trouvés extravagants, mais simplement la volonté de lutter contre les pratiques de certaines écoles qui offrent des salaires de 25 F l'heure, et qui semblent avoir la sympathie de quelques-uns dans cette salle !
M. Armand Lombard (L). J'ai bien entendu M. Beer et je le remercie de ses explications, qui pourraient me rassurer mais ne me rassurent pas tout à fait quand même !
Je ne comprends pas bien qui fait référence, s'agissant des salaires. Bien sûr, il y a les salaires publics et les salaires privés. Dans le domaine de l'enseignement que nous discutons, comme dans celui de la santé, la majorité des salariés travaillent dans le secteur public et cela pousse sans doute la norme à la hausse. Mais si, par hasard - pour prendre un exemple tout à fait hypothétique - un département comme celui du département de l'économie publique se lançait dans le secteur de la création d'entreprises et crée de nouveaux emplois chers, est-ce que leurs concurrents du privé pourraient conserver leurs salaires, relativement normaux ? Ou bien, frappés par un amendement de ce type, seraient-ils obligés de les relever parce qu'ils ne seraient pas dans la norme du service public ? Dans un tel cas, ce serait - je pense au secteur que je connais - le massacrer directement et faire une place superbe à l'Etat, avec ses compétences mais aussi ses incompétences, avec ses salaires mais surtout ses gros salaires ! Pouvez-vous continuer à me rassurer un peu ?
Le président. Je crois que tout le monde est suffisamment rassuré pour voter cet amendement ! Je rappelle que nous sommes en deuxième débat, avec un amendement à l'article 4, visant à introduire un alinéa 3 nouveau :
«3 L'ensemble des établissements mentionnés aux alinéas 1 et 2 ont l'obligation de respecter les conditions de travail en usage dans la branche.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Nous avons reçu un autre amendement à l'article 4, déposé par M. Charles Beer, qui vise à modifier l'aliéna 2 ainsi :
«... que l'enseignement proposé s'inscrive dans les buts définis par la présente loi, pour autant...»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 4 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 5 est adopté, de même que les articles 6 à 18.
Mis aux voix, l'article 19 (souligné) est adopté.
M. Christian Brunier (S). Nous sommes au terme de cette deuxième lecture. J'aimerais juste adresser un message à la présidente du département. En commission, Madame, vous avez fait de l'obstruction, c'était votre droit. Aujourd'hui, vous allez refuser le troisième débat, vous montrant mauvaise joueuse, ignorant la majorité parlementaire, c'est encore votre droit. En septembre, lorsque nous aurons voté le troisième débat, vous allez certainement mettre les pieds contre le mur pour appliquer cette loi, ce sera toujours votre droit. Mais je peux vous annoncer qu'au débat budgétaire 2000 nous vous imposerons ce projet de loi à travers le budget, et cela c'est notre droit ! (Exclamations et applaudissements.)
M. John Dupraz (R). Je trouve parfaitement scandaleux les propos du jeune et distingué Brunier... (Exclamations.) ...qui se conduit comme un charretier et qui insulte la présidente du Conseil d'Etat ! Il est tout à fait légitime qu'un conseiller d'Etat, chef de département, ait des points de vue et les défende. Dire que Mme Brunschwig fait de l'obstruction est malhonnête et discourtois de votre part. On est en droit d'attendre, de la part du président d'un parti gouvernemental, une conduite un peu plus élevée, un peu plus digne !
Cela dit, lorsque vous affirmez qu'elle fait de l'obstruction en ne demandant pas le troisième débat ce soir, je vous rappelle, Monsieur Brunier, que le règlement de notre Grand Conseil stipule que le troisième débat a lieu à la séance suivante, sauf si le Conseil d'Etat, ou une commission unanime, ou le bureau unanime le demande. Vos propos sont parfaitement scandaleux et j'espère qu'à l'avenir, si vous voulez faire carrière politique, vous vous conduirez un peu mieux ! (Applaudissements.)
Mme Martine Brunschwig Graf. Il me faut quand même répondre de temps en temps ! Mesdames et Messieurs les députés, il y a six mois j'ai parlé au Conseil d'Etat de la problématique posée par ce projet de loi, y compris de son financement. Suite à cette discussion et avec l'accord de tous mes collègues, je suis venue devant votre commission pour expliquer quel était le problème et pour l'aborder avec vous. J'ai passé sans doute une bonne heure à en discuter, en vous avertissant que le Conseil d'Etat n'entendait pas mettre en oeuvre le projet de loi tant qu'il n'y aurait pas de financement. Je vous l'ai dit clairement, même si tout ceci n'est fort malheureusement pas reproduit dans le rapport de majorité.
En l'état, il ne s'agit pas d'obstruction ; c'est en accord avec le Conseil d'Etat et avec ma collègue présidente du département des finances que nous avons décidé de ne pas demander le troisième débat, avant que le financement soit trouvé... (Commentaires.) Alors, vous pouvez continuer, Monsieur Brunier, à faire ce que vous avez fait toute la journée en parlant de la présidente du Conseil d'Etat. Vous tenez des propos à mon égard que je n'ai jamais entendus de mémoire de députée. Cela m'est assez égal, mais je tiens à répéter ici que c'est l'ensemble du gouvernement, en toute collégialité, qui est d'accord avec cette position. (Applaudissements.)
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Ma foi, je prends note des précisions de la présidente du Conseil d'Etat. Les intentions du gouvernement et les intentions de votre département, Madame, sont extrêmement importantes quant à la suite du débat sur la formation continue, quant aux mesures concrètes à prendre et quant au sort notamment de ce projet de loi...
M. Bernard Lescaze. Le débat est clos, Monsieur le président !
M. Charles Beer, rapporteur de majorité. Je termine, Monsieur Lescaze... (Brouhaha et protestations.)
Le président. Vous pouvez continuer, Monsieur Beer !
M. Charles Beer, rapporteur de majorité. Je termine en demandant à la présidente du département de bien vouloir, si possible, répondre à la motion votée par le Grand Conseil en 1995, appelant le Conseil d'Etat à fournir un rapport sur l'état de la formation continue dans le canton de Genève. Nous n'avons pas reçu de réponse, malgré la motion votée il y a quatre ans. Ce rapport sera l'occasion d'avoir une discussion plus large, lors du troisième débat, sur la politique qu'entend défendre le Conseil d'Etat. J'en remercie par avance la présidente... (Commentaires de M. Lescaze et brouhaha.) Et je remercie M. Lescaze de s'être tenu aussi sagement jusqu'au bout du débat !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, un peu de calme, s'il vous plaît ! (Chahut.) Nous sommes maintenant au terme du deuxième débat. M. Balestra a encore demandé la parole, je la lui donne.
M. Michel Balestra (L), rapporteur de première minorité ad interim. Je regrette le brouhaha, les insultes, les dialogues particuliers. Je crois que nous sommes tous très fatigués : il est en effet exceptionnel de traiter les comptes, le budget, plus les objets ordinaires en deux journées. Cela étant, je tiens à vous remercier parce que, pour le reste, la tenue du débat était tout à fait correcte.
Le président. La parole est à Mme Sayegh. Ensuite, je clos la liste des orateurs. Nous ferons le troisième débat lors d'une prochaine séance.
Mme Christine Sayegh (S). Monsieur le président, je voudrais simplement rappeler la teneur de l'article 133, alinéa 3, de notre règlement qui dit qu'effectivement à la fin du deuxième débat on vote article par article. Puis on passe à un autre point de l'ordre du jour, le cas échéant, s'il n'y a pas de troisième débat !
Le président. Si vous aviez tout suivi, Madame Sayegh, vous sauriez que nous venons de voter article par article... (Rires.) ...que nous venons de terminer le deuxième débat et que le troisième débat aura lieu lors d'une prochaine séance ! Nous passons au point suivant de l'ordre du jour.