République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 24 juin 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 9e session - 34e séance
I 2017
M. Florian Barro (L). Au préalable, je vous dispenserai, Monsieur Moutinot, de vous lever pour me faire la même réponse qu'à M. Koechlin... Mes questions étant relativement techniques, elles nécessiteront probablement une documentation supplémentaire !
Mon interpellation s'adresse donc au président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement. Depuis quelques mois, en effet, nous nous interrogeons sur le statut des squatters genevois - nous ne sommes pas les seuls : les députés des bancs d'en face se posent également des questions et déposent des motions de soutien à cet égard.
Dans cette perspective, le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement entend-il favoriser les squats, qui constituent de plus en plus un îlot de non-droit dans lequel il fait bon vivre ?
Estime-t-il logique que les citoyens respectueux du droit, qui ont longtemps regardé les occupants illicites alternatifs comme des marginaux, réalisent que ceux-ci sont en fin de compte bien mieux lotis ?
Ces citoyens doivent-ils continuer à payer mensuellement leur tribut à une société qui tolère de tels comportements ?
Certains anciens squatters, constitués désormais en coopérateurs au nom d'un phénomène de réaction à la spéculation des années 80, bénéficient de loyers attractifs dans des immeubles qu'ils ont rachetés avec 5% de fonds propres et rénovés à grands coups de subventions, pour certains. Au 41, rue Plantamour, par exemple, ces nouveaux propriétaires s'empressent, semble-t-il, de solliciter certaines exonérations fiscales, démontrant par là que la charge fiscale immobilière n'est pas si anodine que certains souhaiteraient le faire croire - en tout cas, ils s'acharnent à la grever davantage.
Le Conseil d'Etat envisage-t-il de donner droit à ces requêtes et, le cas échéant, d'appliquer une règle commune à tous ?
Lors de l'audition des occupants du squat RHINO à la commission du logement, il y a quelques mois, un intéressant document sur leur plan financier nous a été remis. Celui-ci démontrait que, même en abaissant le prix d'achat de l'immeuble par la future coopérative, en réalisant des travaux non conformes à la législation, notamment en matière d'isolation phonique et thermique, et en faisant exécuter certains travaux par les habitants eux-mêmes, estimés par leurs soins pour la partie main-d'oeuvre à un million, le résultat du prix à la pièce reviendrait à 3 750 F par an, soit un montant supérieur aux 3 225 F qui constituent le plafond du besoin prépondérant de la population...
Dans ce contexte, si les squatters n'arrivent même pas à respecter ce plafond, comment peut-on cautionner ce type d'opérations ?
Par rapport aux opérations ordinaires au sujet desquelles les propriétaires sont bien évidemment tenus de respecter les lois et règlements, ne craignez-vous pas de créer une inégalité supplémentaire si des dérogations à la LCI sont accordées à certains projets ?
Faudra-t-il avoir systématiquement recours à des subventions ?
Cela ne va-t-il pas créer définitivement une étatisation des loyers par l'absurdité et l'inapplicabilité d'une loi qui ne consacre plus que la dérogation pour s'en sortir ?
Les citoyens ordinaires qui tenteraient de contourner les lois, en particulier la LCI, la LDTR ou la LGL, en sollicitant l'égalité de traitement par rapport aux pratiques alternatives, se verraient opposer une fin de non-recevoir des autorités au motif qu'il n'y a pas d'égalité dans l'illégalité... A ce stade, cependant, il devient préoccupant de constater que la notion de l'égalité n'a pas la même portée pour tous...
Pour les gouvernants, le fait d'imposer à tous des règles de comportement en société est-il devenu si difficile ?
En sus des questions précédentes, je souhaite encore compléter le sujet avec les questions de détail suivantes :
Les exploitations d'atelier d'artisan et de petit commerce, par exemple, au 13, rue de l'Arquebuse ou au 41, rue Plantamour, dans des immeubles de logement, ont-elles fait l'objet d'une autorisation de changement d'affectation ?
Les déprédations souvent causées aux immeubles occupés par les squatters, comme à Villereuse, rendent ensuite, le cas échéant, les travaux de rénovation ou de reconstruction notoirement plus chers et constituent, sauf à prévoir le versement de subventions importantes, comme à la rue Leschot, un facteur de hausse importante des loyers.
Le département a-t-il prévu de contenir ce phénomène ?
La sécurité de ces immeubles est-elle satisfaisante, comme à Chêne-Bougeries ?
A partir de quel stade de délabrement commence-t-on à se soucier du risque d'effondrement couru par les occupants et le voisinage ?
Il ne s'agit pas de tout remettre dans les mains de l'Etat, mais de faire appliquer un certain nombre de règles convenues entre tous.
Enfin, la pose de certaines enseignes de décoration extérieure, telles que la corne rouge bien connue de RHINO ou sa banderole, a-t-elle fait l'objet d'une demande d'autorisation de construire, d'ordinaire exigée strictement des commerçants et des particuliers ?
Je vous remercie de votre prochaine réponse.
La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation de M. Florian Barro figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
Présidence de M. Jean Spielmann, président