République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 27 mai 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 8e session - 25e séance
I 2012
M. Jacques Béné (L). Même si les interpellations doivent s'adresser au Conseil d'Etat en général, je me permets d'adresser celle-ci à Mme la présidente du département des finances, tout comme on le fait habituellement pour les interpellations urgentes. Cela dit, j'estime qu'il n'y a pas lieu de rassembler les interpellations au prétexte qu'elles s'adressent toutes au Conseil d'Etat. Mais le fait est que la majorité de ce parlement a décidé de les réunir et je commencerai donc, en développant mon interpellation qui s'intitule : «Squatters et société : qui exploite qui ?»
Depuis quelques mois, nous nous interrogeons sur le statut des squatters, qui semblent bénéficier de plus en plus d'un traitement de faveur, pour ne pas dire d'un traitement royal ou ministériel. Votre département, Madame, a-t-il conscience que les squats constituent de plus en plus des îlots de non-droit dans lesquels il fait bon vivre, et que le public, qui a longtemps regardé les occupants illicites «alternatifs» comme des marginaux, réalise que ceux-ci sont en fin de compte bien mieux lotis que les honnêtes citoyens ? Ces derniers doivent-ils continuer à payer mensuellement leur tribut à une société qui tolère de tels comportements illicites ?
Certains anciens squatters, constitués désormais en coopératives au nom d'un phénomène de réaction à la spéculation des années 80, bénéficient désormais de loyers dérisoires, dans des immeubles qu'ils ont rachetés avec 5% de fonds propres et, bien évidemment, le cautionnement de l'Etat, immeubles qu'ils se chargent ensuite de rénover à grand renfort de subventions et autres bonus à la rénovation. Les initiants de ces projets - citons l'exemple de la rue Plantamour - devenus propriétaires s'empressent de solliciter certaines exonérations fiscales, démontrant par là que la charge fiscale immobilière n'est pas aussi anodine que certains souhaitent le faire croire. Le Conseil d'Etat envisage-t-il de donner droit à ces requêtes ?
Au mois de mai 1998, éveillés par la négociation en cours de l'AMI, de nombreux squatters sont descendus dans la rue pour manifester et s'opposer à un ultralibéralisme économique qui, selon eux, tue l'emploi. A y regarder de plus près cependant, le laxisme des autorités - et y compris la majorité de ce Grand Conseil - le laxisme des autorités à leur égard permet à ces squatters d'appliquer jour après jour les principes du libéralisme qu'ils prétendent combattre, à savoir : défiance du pouvoir établi, non-respect du droit, des conventions collectives et des droits sociaux, y compris les droits du procureur général !
Les citoyens ordinaires qui tenteraient de contourner les lois en sollicitant l'égalité de traitement par rapport aux pratiques «alternatives» se verraient rapidement opposer une fin de non-recevoir, au motif qu'il n'y a pas d'égalité dans l'illégalité. A ce stade cependant, il devient préoccupant de constater que la notion de l'égalité n'a malheureusement pas la même portée pour tous. Pour les gouvernants, le fait d'imposer à tous des règles de comportement en société est-il donc devenu si difficile ? En sus des questions posées précédemment, nous souhaitons interpeller le département des finances à ce sujet, en lui posant les questions suivantes :
Les occupants illicites, qui ne paient aucun impôt, entraînent-ils un manque à gagner sur les rentrées fiscales ? Et si oui, dans quelle mesure ?
Les employés des bars exploités dans les squats paient-ils des impôts sur le revenu tiré de leur activité ? Les exploitants de ces bars paient-ils des impôts sur le revenu de leur exploitation et sont-ils assujettis à la TVA ? Quel contrôle de ces éléments votre département exerce-t-il ?
Enfin, les propriétaires sont taxés sur un revenu fictif, qui est considéré comme une économie de loyer et qui est également appelé «impôt sur la valeur locative». A-t-on envisagé de solliciter un impôt comparable des squatters, qui font eux aussi l'économie d'un loyer ?
Le président. L'interpellation suivante est celle de M. Koechlin... Il ne souhaite pas intervenir. MM. Vaucher et Barro non plus. Les interpellations 2009, 2010 et 2013 sont donc retirées du rôle. Je donne la parole au Conseil d'Etat pour répondre à l'interpellation de M. Béné.
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat, conformément à l'article 161, alinéa 2, lettre b) du règlement, répondra à l'interpellation de M. Béné lors d'une prochaine séance.
La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.