République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 mai 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 7e session - 23e séance
P 1221-A
Dans ses séances des 4 et 11 janvier 1999, la Commission des pétitions, sous la présidence de M. Louis Serex, a traité la pétition 1221 concernant une nomination au sein du directoire des Transports publics genevois (ci-après TPG) dont voici le texte :
Pétition(1221)
Mesdames etMessieurs les députés,
Les événements reflétant l'activité socio-économique genevoise sont parfois susceptibles d'amplifier la perplexité des citoyennes et citoyens face à ses édiles.
A l'instar, la nomination au sein du directoire des Transports publics genevois d'un spécialiste français des transports nous laisse pantois.
En l'espèce, notre intervention n'est nullement motivée par l'origine étatique de cette personne.
La motivation du présent courrier a pour composantes plusieurs éléments concomitants qui nous paraissent d'importance, à savoir :
aucune trace informative accessible au grand public de la possible présentation de candidature pour le poste à repourvoir ;
la qualité, nullement surfaite, de l'enseignement dispensé dans nos instituts de formation supérieure ne peut-elle pas aboutir pour un diplômé, à la possibilité légitime de se présenter au concours d'entrée pour un engagement professionnel de ce niveau.
De toute évidence, un anachronisme choquant entache cette nomination. Le permis de travail octroyé en l'occurrence, partie intégrante des prestations offertes, interpelle et alarme les 15 000 (environ) demandeurs d'emplois, malheureusement dénombrés à Genève.
En vous remerciant de l'attention que vous ne manquerez pas d'apporter à ces lignes, nous vous laissons le soin de donner la suite qui convient au sujet évoqué.
N.B. : 2 signatures
Alliance des citoyens-contribuables
M. Richard Palatier, M. Christian Page, case postale, 1211 Genève 3
Audition des pétitionnaires
MM. Jeremy Arroum, Pascal Junod et Jacques Pajan, représentant les pétitionnaires et tous membres du comité de l'Association des citoyens contribuables (ci-après l'ACC), ont présenté le problème soulevé par leur pétition. Ils estiment que l'Etat n'a pas tout entrepris pour trouver un candidat national au poste de directeur au sein des TPG. Ils sont d'autant plus sensibles à la nomination d'un Français qu'il ne s'agit pas du premier cas. Ils citent le poste à la direction des HES qui a été repourvu par un étranger.
L'ACC espère, par cette pétition, attirer l'attention des pouvoirs publics afin de ne plus engager d'étrangers au détriment des milliers de chômeurs genevois et invite les députés à être vigilants.
M. Arroum, citoyen genevois, fait part de sa situation particulière de chômeur en fin de droit, porteur d'un diplôme d'analyste, polyglotte et à qui le Conseil d'Etat aurait fait des promesses d'embauche. On lui aurait fait comprendre qu'il fallait favoriser les frontaliers afin de maintenir une bonne entente avec la France. Il s'est efforcé de suivre divers stages dans l'espoir de retrouver un emploi et se sent, aujourd'hui, manipulé par ceux qui gouvernent Genève.
Audition du conseil de direction des TPG
En l'absence de M. Etter, en déplacement à l'étranger, M. Michel Jacquet, vice-président du conseil de direction a donné le point de vue des TPG.
Pour lui, la pétition 1221 pose 3 questions :
Pourquoi engager un Français ?
Pourquoi n'y-a-t-il pas eu d'offre publique ?
Pourquoi choisir une personne formée à l'étranger, alors que la formation en Suisse est excellente ?
En préambule, M. Jacquet précise que les TPG sont une régie autonome qui essaye d'être la plus performante possible, avec une approche entrepreneuriale des problèmes.
Le cas soulevé par les pétitionnaires concerne le poste du directeur de l'exploitation, ce dernier partant à la retraite. Cette charge représente la direction de 850 personnes et des compétences techniques dans un domaine très spécialisé. Lorsqu'un poste se libère, la recherche d'un candidat s'effectue d'abord au niveau interne. Au sein des TPG, personne ne s'est avéré être suffisamment compétent pour occuper le poste vacant.
Dès lors, ils ont mandaté un chasseur de têtes qui a prospecté dans le milieu local, en Suisse puis à l'étranger. La procédure de recherche de candidats a commencé au printemps 1998 ; les dossiers ont été présentés en août ; le dossier du candidat retenu a été examiné par la commission tripartite qui, après une suspension des travaux liée à une demande de complément d'information, a approuvé cette nomination en octobre.
Selon M. Jacquet, le candidat choisi bénéficie d'une formation exceptionnelle : ingénieur diplômé, détenteur d'un diplôme supérieur de mathématiques, d'un diplôme de gestion d'entreprise, ingénieur des Ponts et Chaussées, docteur ès sciences. Il a enseigné dans différentes universités. A Montréal, il a restructuré tout le réseau de la ville. Il a dirigé des entreprises de plus de 5000 personnes. En dehors de ses qualités professionnelles, le conseil de direction des TPG a été très intéressé par son expérience vécue durant 3 ans en Haute-Savoie. Il connaît ainsi la sensibilité française en matière de transports, ce qui permettra aux TPG de se développer aussi à l'extérieur du canton.
Aux questions des députés, il précise encore que ce monsieur habitera Genève sous peu, qu'il a reçu un permis B et, étant homme de terrain, a déjà pris contact avec le personnel.
Quant à une offre publique, il répond que les TPG n'y sont pas tenus. Ils n'ont pas voulu occulter ce poste. Celui-ci était très important et spécialisé : ils estiment qu'ils ont trouvé la personne la plus adéquate.
Discussion de la commission
Les députés ont regretté l'absence d'offre publique tout en reconnaissant le statut de régie autonome des TPG.
L'existence de la commission tripartite rassure : chaque dossier est étudié afin de savoir si un chômeur, ayant les compétences requises, existe avant d'engager un étranger sans permis.
Certains commissaires sont étonnés de la nomination de hauts fonctionnaires choisis à l'extérieur du canton.
Pour d'autres, la présence d'éminents professeurs étrangers participe au rayonnement de Genève.
Enfin, à l'heure où l'on parle d'entrer dans l'Europe, chacun estime qu'il faut davantage de mobilité et que les Genevois peuvent aussi bénéficier d'une réciprocité, exportant ainsi leur savoir acquis par une formation de qualité.
Conclusion
Même si la situation de M. Arroum, comme celle malheureusement de plusieurs milliers de personnes, est préoccupante, les députés constatent que l'engagement concerné n'a pas été fait au détriment d'un citoyen genevois.
En effet, le profil de la personne choisie correspondait à un cahier des charges très précis. Si la commission tripartite a donné son accord, les députés lui font confiance. De plus, même s'il existe des imperfections, l'Etat de Genève offre aux personnes sans emploi des possibilités de recyclage, de stage et des prestations afin de les réintégrer dans le monde du travail. Tous ne peuvent retrouver un emploi au sein de l'administration cantonale, ceci d'autant plus qu'en fonction de l'état des finances publiques, de nouveaux postes ne peuvent se créer.
Enfin, les députés estiment, que dans ce cas particulier, ils ne peuvent s'immiscer dans une procédure d'engagement concernant une régie autonome.
C'est pour toutes ces raisons que la Commission des pétitions, unanime, vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.