République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 mai 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 7e session - 23e séance
PL 7868-A
La Commission de l'enseignement supérieur a examiné ce projet de loi au cours de ses séances des 12 novembre 1998, 14 et 28 janvier 1999, sous la présidence respectivement de M. Bernard Lescaze et de M. René Longet avec l'assistance de M. Eric Baier, secrétaire-adjoint du Département de l'instruction publique. Les procès-verbaux ont été dressés par les soins de M. Jean-Luc Constant, que je remercie particulièrement.
Rappel de l'exposé des motifs
L'obtention d'une thèse de doctorat est un élément essentiel tant pour l'étudiant qui l'obtient que pour l'Université qui la décerne. De plus, chaque thèse est un témoin de la qualité de la formation que dispense un établissement universitaire.
Cependant, actuellement, seuls 18 % des assistants achèvent une thèse de doctorat à l'Université de Genève. Une augmentation de ce pourcentage serait sans doute bénéfique pour les étudiants/assistants ainsi que pour l'Université, mais elle paraît surtout indispensable pour assurer une relève de qualité sans avoir systématiquement recours à des universitaires formés ailleurs.
L'Université de Genève travaille actuellement à améliorer les conditions d'encadrement des étudiants de 1er, 2e et 3e cycle. Il est néanmoins apparu utile aux auteurs de ce projet de loi d'apporter des propositions complémentaires afin de créer les conditions les plus favorables possibles à une augmentation des thèses de doctorat.
Travaux de la commission
Audition de M. Jacques Weber, doyen de la faculté des sciences et de M. Eddy Roulet, professeur à la Faculté des lettres
Selon M. J. Weber, le but du projet de loi semble intéressant et il s'agit en effet d'encourager les étudiants à réaliser une thèse en leur en donnant les moyens. Il précise que 40 % des étudiants diplômés de la Faculté des sciences poursuivent leurs études jusqu'à la thèse. Parmi les 500 assistants que compte la faculté, il y a environ 30 % de femmes. Par ailleurs, il se dit quelque peu surpris par la distinction entre l'enseignement et l'encadrement (art. 25, al. 1) dans la mesure où les deux aspects se confondent en sciences. Concernant l'art. 57B, al. 2, il souhaiterait voir figurer la conjonction « ou » au lieu de « et » : en effet, la faculté accueille aussi des assistants qui viennent préparer des publications sans aller jusqu'à la thèse. Il estime enfin que l'élément principal incitant les étudiants à faire une thèse est la possibilité d'avoir un poste d'assistant.
M. M. E. Roulet n'ayant pas de responsabilité au sein de sa faculté, il déclare s'exprimer à titre personnel. Selon lui, la situation s'est nettement améliorée dans les domaines où des écoles doctorales ont été mises en place. Il rappelle que les écoles doctorales ont été créées il y a trois ans et que la Faculté des lettres en compte actuellement trois. Il insiste ensuite sur le rôle des professeurs : c'est à eux qu'il incombe d'identifier les étudiants susceptibles de faire une thèse et de les encadrer. Sur la question du manque de postes d'assistants, il mentionne qu'une faculté peut aussi recourir à des collaborateurs financés par le biais de crédits du Fonds national. Il s'agit d'une autre façon d'inciter des jeunes doctorants à s'engager sur des projets de recherche.
Concernant la longueur des thèses, M. Roulet estime qu'elles ne devraient pas excéder cinq ans. Un allongement de ce temps retarde évidemment l'entrée des universitaires sur le marché du travail et les met en concurrence avec des personnes étrangères plus jeunes. S'agissant des femmes, la problématique des enfants rentre en ligne de compte et il y aurait lieu de prévoir des mesures d'accompagnement comme la mise à disposition de crèches. Enfin, il explique qu'une thèse de doctorat n'a pas la même valeur partout. En effet, à Genève, le doctorat es lettres permet à son titulaire de devenir professeur alors qu'à Zurich, l'intéressé doit encore préparer une thèse d'habilitation. Il ajoute qu'une forte pression européenne s'exerce sur la Suisse pour l'introduction du double système.
Audition de M. Andreas Bucher, président du sénat de l'Université
M. M. A. Bucher souhaite faire part de quelques recommandations à propos de ce projet de loi. Il trouve tout d'abord utile l'idée de favoriser le nombre de thèses. Cependant, il constate que le projet de loi ne propose pas de mesures concrètes afin de réaliser les objectifs préconisés.
Il estime qu'il faudrait placer sur un même niveau les formations postgrades et les thèses. Le projet de loi se centre sur les thèses mais à son sens, il conviendrait d'affirmer la nécessité d'une formation des assistants au-delà de la licence.
M. M. A. Bucher regrette que le projet de loi ne tienne pas compte de la pétition des étudiants relative au nombre insuffisant d'assistants. Il pense à ce sujet que l'on pourrait avoir recours à des moniteurs, rémunérés à l'heure, pour encadrer les étudiants et décharger ainsi les assistants.
Il s'interroge enfin sur l'opportunité de l'intervention des députés à travers ce projet de loi. Il pense qu'il conviendrait d'établir une collaboration plus étroite entre le pouvoir politique et les organes de l'Université et il craint que ce projet de loi ne soit finalement interprété comme une critique à l'égard de l'Université et des professeurs. A son sens, il faudrait intégrer cette réflexion à une réforme plus générale (revoir les procédures universitaires, améliorer la compétitivité de l'Université, approfondir la coopération entre les Universités de Genève et Lausanne, etc.).
Discussion
Le vote d'entrée en matière est effectué à l'unanimité.
Discussion des articles
Article 2, lettre a (nouvelle teneur)
Accepté à l'unanimité.
Article 25, al. 1 (nouvelle teneur)
Accepté à l'unanimité.
Article 26B (nouvelle teneur)
- alinéa 1 : à la 5e ligne, le terme « étudiants » est ajouté.
- alinéa 2 : l'alinéa est modifié comme suit : Par un encadrement et un suivi appropriés, notamment des écoles doctorales, les facultés et les écoles contribuent à créer les conditions optimales pour l'obtention de doctorats.
- alinéa 3 : nouveau.
Cet article rappelle que pour l'obtention de thèses de doctorats comme de tout autre diplôme universitaire, il est nécessaire de tendre vers une représentation équitable des deux sexes. Pour l'ensemble de l'Université de Genève, en 1996, 33,5 % de femmes ont obtenu le grade de docteurs contre 66,5 % d'hommes.
Parmi les mesures appropriées, on a évoqué quelques pistes, à savoir l'augmentation du nombre de postes d'assistant-es, l'allongement de la durée de la thèse pour les femmes, l'assouplissement de l'âge maximum des assistant-es pour débuter une thèse, la mise à disposition de crèches, la motivation des professeurs pour favoriser la promotion des femmes, etc.
On propose d'amender cet article comme suit :
Par des mesures appropriées, les facultés et écoles s'attachent notamment à favoriser l'obtention de doctorats par le sexe sous-représenté.
Cet article est adopté à l'unanimité.
- Alinéa 4 : pas de changement.
L'article 26B (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté à l'unanimité.
Article 57B, al. 2 (nouvelle teneur)
L'article tel que rédigé pose le problème soulevé par Mme L. Rieben, à savoir que la conjonction « et » de la dernière ligne rend la thèse et les publications scientifiques obligatoires. Or, on peut avoir trois catégories d'assistants : ceux qui préparent une thèse sans publications, ceux qui rédigent des publications sans préparer de thèses et ceux qui font les deux.
Afin de tenir compte de ces différentes catégories d'étudiants et dans la mesure où les exigences ne sont pas identiques dans toutes les facultés, la commission propose d'amender cet article en ajoutant « et/ou ».
Les membres de la commission soulignent néanmoins que malgré cet assouplissement, ils considèrent que les doctorants devraient être incités à publier des articles scientifiques.
L'article ainsi amendé a la teneur suivante :
A l'exception de celui qui exerce son activité en médecine clinique, l'assistant consacre au moins 40 % de son temps à la préparation d'une thèse de doctorat et/ou d'autres publications scientifiques.
L'article unique faisant l'objet du projet de loi 7868 est adopté à l'unanimité des membres présents de la commission, à savoir 2 AdG, 2 S, 2 V, 2 L, 2 R et 1 DC.
Au vu des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.
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Premier débat
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Ce projet de loi est très intéressant, car il exprime une volonté politique claire de soutenir les doctorants et plus précisément l'activité de recherche et d'enseignement à l'université. Néanmoins, le succès de cette modification de loi dépendra de la mise en oeuvre des principes généraux qui y figurent. Nous sommes dans un contexte universitaire, où l'on parle de plus en plus d'excellence de la recherche et de l'enseignement. Or, il faut être conscient que l'excellence a un prix ; plus spécifiquement, l'excellence présuppose des places d'assistants et de maîtres assistants, des possibilités de synergie entre recherche et enseignement, et des formes de coopération féconde entre professeurs, corps intermédiaire et étudiants. Ces effets ne se répercuteront pas uniquement sur la carrière personnelle du doctorant, mais aussi sur la qualité de l'enseignement, car des assistants motivés, encadrés, stimulés, feront certainement un meilleur travail d'accompagnement pour leurs congénères.
Ce projet de loi est important pour l'image de marque de l'université et il mérite d'être évalué dans ses implications, dans les deux ans qui suivront son entrée en vigueur, afin que l'objectif soit parfaitement atteint. Le groupe radical vous propose de voter inconditionnellement ce projet de loi.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7868)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'Université (C 1 30), du 26 mai 1973, est modifiée comme suit :
Art. 2, lettre a (nouvelle teneur)
L'Université a la responsabilité :
a) de permettre à ceux qui en ont la capacité et la volonté d'accéder à une culture et à une formation de haut niveau et de leur offrir la possibilité d'obtenir les diplômes prévus par ses règlements, notamment le grade de docteur ;
Art. 25, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les membres du corps enseignant partagent, en règle générale, leur temps entre l'enseignement, la recherche, l'encadrement des étudiants et les tâches administratives liées à leur fonction.
Art. 26B (nouvelle teneur)
1 Par des mesures appropriées, les facultés et les écoles incitent et encouragent les étudiantes licenciées ou diplômées et les étudiants licenciés ou diplômés à poursuivre une formation postgrade et à s'engager dans des travaux de recherche susceptibles de déboucher sur une thèse de doctorat ; elles assurent également la qualité du suivi des étudiantes et étudiants tout au long de l'élaboration de la thèse.
2 Par un encadrement et un suivi appropriés, notamment des écoles doctorales, les facultés et les écoles contribuent à créer les conditions optimales pour l'obtention de doctorats.
3 Par des mesures appropriées, les facultés et écoles s'attachent notamment à favoriser l'obtention de doctorats par le sexe sous-représenté.
4 Les facultés et écoles s'efforcent d'introduire des charges d'enseignement et de cours pour permettre à un certain nombre de titulaires d'un doctorat de développer leurs aptitudes pédagogiques et de maintenir des liens étroits avec l'Université tout en assumant d'autres tâches hors de celle-ci.
Art. 57B, al. 2 (nouvelle teneur)
2 A l'exception de celui qui exerce son activité en médecine clinique, l'assistant consacre au moins 40 % de son temps à la préparation d'un thèse de doctorat et/ou d'autres publications scientifiques.
Le président. Nous poursuivons nos travaux... Monsieur Ferrazino, vous avez la parole.
M. Christian Ferrazino (AG). Monsieur le président, nous avions demandé en début de séance que soit abordé ce soir le point 58, concernant l'aéroport. Si nous voulons terminer ce point ce soir, il faudrait peut-être l'aborder dès maintenant, car il risque de nous prendre un peu de temps.
Le président. Je mets aux voix la proposition de M. Ferrazino, soit de traiter maintenant le point 58.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
L'adjoint du sautier compte les suffrages.
Cette proposition est adoptée par 33 oui contre 29 non.