République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 20 mai 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 7e session - 20e séance
GR 225-1 et objet(s) lié(s)
10. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :
M. B. E. , 1975, Kosovo, sans profession, recourt contre la peine d'emprisonnement dont le sursis a été révoqué.
Mme Jacqueline Cogne (S), rapporteuse. M. B. E. est né en 1975 au Kosovo. Il est sans profession. Il est arrivé en Suisse il y a trois ans dans un centre de requérants d'asile au bénéfice d'un permis «N», seul, sa famille étant restée au Kosovo. Peu de temps après son arrivée en Suisse, âgé de seulement 22 ans, il s'est très vite mis en infraction grave avec la loi sur les stupéfiants. Il est actuellement en détention, pour la deuxième fois, à Bellevue.
Voici les faits, s'agissant de la première peine. De novembre 1996 à avril 1997, date de sa première arrestation, il a vendu et trafiqué entre 180 et 230 grammes d'héroïne avec la complicité d'autres comparses. Il a prétendu avoir envoyé 5 000 F à sa famille pour rembourser ses passeurs, mais on a constaté qu'au moment de son arrestation il avait déjà envoyé la somme de 10 600 F au Kosovo...
Tenant compte de ses antécédents familiaux malheureux, de son âge, de ses aveux, de sa volonté de se détourner de la délinquance et, aussi, du fait qu'il ait dénoncé un important complice, il n'est condamné qu'à dix-huit mois avec sursis, mais expulsé sans sursis. Il ne s'oppose d'ailleurs pas à cette expulsion. Ceci est le premier jugement rendu par le Tribunal de police le 30 avril 1997 pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants : dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans, sous déduction de quatre mois et dix-sept jours subis en préventive et à cinq ans d'expulsion du territoire de la Confédération.
Deuxième période de détention. Dès septembre 1997, soit peu de temps après sa libération, il s'est remis à la vente de drogue - la cocaïne, cette fois - portant au moins sur 416 grammes, au prix de 140 F le gramme. Il a été trouvé en possession de 28 000 F sur lui, toujours avec des comparses dont certains avaient eu maille à partir avec le trafic dit «des Paccots».
Compte tenu du fait qu'après sa libération conditionnelle il n'a pas attendu longtemps pour récidiver et le fait qu'il a reconstitué son réseau très rapidement, M. B. E. est de nouveau condamné, par arrêt de la Chambre pénale de la Cour de justice du 14 juillet 1998 et sur appel du jugement du Tribunal de police du 30 avril 1998, pour infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants, à deux ans de réclusion sous déduction des deux mois et six jours subis en préventive, à la révocation du sursis octroyé le 30 avril 1997 par le Tribunal de police et à l'expulsion du territoire de la Confédération pour dix ans. Il faut noter que la Chambre pénale ne prononce plus d'expulsion à vie ; celle-ci est réduite à dix ans.
L'accusé ne recourt pas contre l'expulsion mais contre la peine d'emprisonnement, dont le sursis a été révoqué, ce qui lui permettrait de recouvrer sa liberté le 23 juin 1999, date à laquelle il aurait droit à une libération conditionnelle.
A la lecture de ce dossier, lourd aussi bien physiquement que moralement, j'ai essayé de trouver quelques éléments positifs en sa faveur. Indépendamment du rapport de bonne conduite pendant sa détention - rapport reçu par le service du Grand Conseil - j'ai contacté son avocat, Me de Lucia, qui me semblait être la seule personne à qui je puisse demander ces renseignements, les amis de M. B. E. n'étant pas vraiment recommandables... Il n'a malheureusement pas pu me dire grand-chose sinon que M. B. E. a profité de sa détention pour apprendre le français ; qu'il est très intelligent et sympathique, mais que ses contacts avec lui restent des contacts normaux d'un avocat avec son client.
Le préavis de la commission est négatif à la majorité moins une abstention. Le préavis du procureur est également négatif.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. J. B. K. , 1962, Gambie, étudiant, recourt contre la peine d'emprisonnement et contre la peine d'expulsion judiciaire.
M. Jean-Pierre Gardiol (L), rapporteur. M. J. B. K., né le 17 juillet 1962 au Liberia, est originaire de Gambie. Il est à ce jour marié à Mme J. M. F., alors qu'il ne l'était pas au moment de sa condamnation, le 19 avril 1996. C'est d'ailleurs sa femme qui fait recours pour lui par une lettre datée du 12 mars 1999, à laquelle est jointe une procuration de son mari, datée du 31 mars 1999. En effet, sa femme est suissesse et habite Genève.
M. J. B. K. a été condamné à trois mois d'emprisonnement sous déduction de quarante jours subis en détention préventive, avec un sursis de cinq ans, et cinq ans d'expulsion du territoire de la Confédération, soit jusqu'au 19 avril 2001. En effet, il a été reconnu coupable d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et d'infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers.
La grâce a été demandée sur l'ensemble des soldes de peine. Après discussion, la commission de grâce a été d'accord, à la majorité, de gracier M. J. B. K. du solde de la peine d'expulsion mais pas des trois mois d'emprisonnement avec sursis de cinq ans, auxquels il avait été condamné. En effet, la majorité de la commission a estimé qu'en fonction de son dossier, des attaches qui sont les siennes à Genève, du fait qu'il n'avait pas fait opposition au jugement au moment de sa condamnation et de son mariage depuis, il fallait lui donner une nouvelle chance et donc le gracier du solde de la peine d'expulsion.
Mis aux voix, le préavis de la commission (grâce du solde de la peine d'expulsion judiciaire et rejet du recours concernant la peine d'emprisonnement) est adopté.