République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8034
22. Projet de loi de Mmes et MM. Armand Lombard, Juliette Buffat, Nelly Guichard, Janine Hagmann, Bernard Lescaze, René Longet, Véronique Pürro et Alberto Velasco proposant un concordat-type réglant le rôle et la participation du Grand Conseil dans les organismes régionaux. ( )PL8034

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Application

Le présent concordat-type tient lieu de règlement de procédure pour gérer le rôle et la participation du Grand Conseil dans les organismes régionaux dont l'importance est égale ou supérieure à celle d'un service public ou d'une entreprise moyenne de 250 salariés ou de 50 millions de budget annuel de fonctionnement.

Article 1 Réponses aux besoins

Le concordat intercantonal répond notamment aux besoins suivants :

Article 2 Objectifs

Le concordat poursuit les objectifs suivants :

Article 3 Commission interparlementaire

1 La Commission interparlementaire est formée des député-e-s des différents Grands Conseils cantonaux désignés par leur Grand Conseil, pour prendre en charge, dans le cadre de ses compétences, une problématique régionale, un projet ad hoc, ou un organisme intercantonal.

2 La commission désigne pour la durée de la législature un bureau de 3 à 5 membres. Elle se dote d'un règlement de fonctionnement et organise son agenda.

3 La commission dispose d'un secrétariat actif et autonome. Son budget est soumis aux bureaux des Grands Conseils concernés qui s'en répartissent la charge.

4 Ses votes sont pris à la majorité simple des membres présents En cas d'égalité des voix, celle du président prime.

5 Les votes ne sont valables que si le quorum est atteint. Il l'est dès que la moitié des membres est présente ainsi que deux membres au moins par délégation.

6 En tout temps, la commission, par ses délégations, peut proposer aux Grands Conseils d'inviter les Conseils d'Etat à négocier un projet de concordat.

7 La commission peut demander en tout temps aux Grands Conseils concernés la désignation d'une Commission interparlementaire ad hoc, qui prend alors en charge une problématique spécifique.

Article 4 Compétences

La Commission interparlementaire est compétente :

dans la phase d'élaboration, avant la signature du concordat, pour étudier et faire rapport, pour amender et enfin pour donner son préavis à chaque Grand Conseil, par l'intermédiaire de sa délégation concordataire, sur le contenu et l'acceptation des concordats ;

avant la ratification, pour donner son préavis sur la ratification des concordats intercantonaux ;

annuellement, pour donner à chaque Grand Conseil son préavis sur le budget, les comptes ainsi que sur d'autres engagements financiers cantonaux de l'organisme concerné ;

pour faire rapport aux Grands Conseils concernés de son contrôle, annuellement et lorsque cela s'avère nécessaire ;

annuellement, pour effectuer un contrôle de gestion, évaluer et approuver le suivi des contrats de prestations, des objectifs à long terme et des budgets et comptes, globaux et analytiques, et en faire rapport à chaque Grand Conseil . Le contrôle de l'organisme intercantonal est effectué par la Commission interparlementaire et porte sur :

en tout temps, pour proposer aux Grands Conseils concernés des modifications aux concordats de son ressort ;

pour proposer aux Exécutifs, représentés par le chef de département concerné, de participer à des réunions partenariales et à chercher un consensus pratique aux problèmes posés. Les Exécutifs peuvent également demander l'organisation de telles rencontres :

lorsque le concordat est en phase d'élaboration, tout conflit entre la commission et les Exécutifs est renvoyé aux Grands Conseils respectifs pour discussion et vote, puis retour à la commission ;

lorsque le concordat a été ratifié, en cas de conflit, la commission, après la recherche vaine d'un accord, peut demander aux Exécutifs l'application de ses décisions.

Article 5 Négociations des concordats

1 Les concordats intercantonaux sont exclusivement négociés par le Conseil d'Etat de chaque canton.

2 Les autorités législatives et exécutives cantonales peuvent en tout temps soumettre au vote du Grand Conseil cantonal un projet de concordat intercantonal.

Article 6 Plan d'information/consultation informelle

Dans la phase de négociation, chaque Conseil d'Etat informe et consulte les instances concernées du Grand Conseil.

Article 7  Délégation concordataire cantonale

1 Chaque Grand Conseil désigne, pour la durée de sa législature, une (ou des) délégation(s) concordataire(s) cantonale(s) chargée(s) de siéger au sein de la (ou des) Commission(s) interparlementaire(s) compétente(s).

2 Chaque délégation concordataire cantonale est composée de trois députés par canton, plus un député pour 100 000 habitants (dès 50 001 le nombre est arrondi au chiffre supérieur).

3 Chaque Grand Conseil veille à ce que les diverses tendances politiques soient représentées dans chaque délégation.

Article 8 Délégation et contrôle

1 Durant la phase d'élaboration et jusqu'à la ratification du concordat proposé par les autorités cantonales d'un canton ou par la (les) Commission(s) interparlementaire(s), le Grand Conseil reste l'organe de décision suprême.

2 Dès la ratification du concordat, la délégation cantonale concordataire, dans le cadre de la Commission interparlementaire, gère de plein droit le contrôle de l'entité régionale. Le vote des montants cantonaux, des comptes et budgets annuels restent de l'autorité de chaque Grand Conseil. Il en va de même des modifications du concordat.

Article 9 Mise en forme

1 Lorsqu'il dispose d'un projet d'organisme intercantonal, le Conseil d'Etat de chaque canton soumet le projet de concordat, avant sa signature, à son Grand Conseil. Le Grand Conseil envoie le projet auprès de la délégation concordataire qui le discute, l'amende et l'accepte dans le cadre de la Commission interparlementaire. La délégation concordataire cantonale soumet le résultat de ses travaux au Grand Conseil.

2 En cas de désaccord d'un Grand Conseil, le projet est renvoyé à la Commission interparlementaire qui se réunit pour traiter des divergences. La décision doit intervenir dans les trois mois après deux navettes au maximum.

3 Si un des Grands Conseils concernés refuse un concordat tel que proposé, il est réputé s'en dissocier.

4 Lorsqu'un canton désire adhérer au concordat préexistant, il en fait la demande aux cantons signataires qui, s'ils en décident positivement, mettent la procédure définie à l'alinéa 1 du présent article en vigueur.

5 Chaque Grand Conseil ratifie le concordat selon les différentes procédures cantonales.

Article 10  Modification d'un concordat existant

Toute modification à un concordat ratifié est proposée par le Conseil d'Etat ou par une majorité d'un Grand Conseil et envoyée par le truchement de la  délégation concordataire cantonale concernée, à la Commission interparlementaire y relative.

Article 11 Comptes annuels

1 Le Grand Conseil approuve annuellement le budget et les comptes de l'organisme intercantonal géré par un concordat. Il approuve, sur la base du préavis de la Commission intercantonale, les autres engagements financiers des organismes intercantonaux.

2 Chaque Grand Conseil donne décharge à l'organisme intercantonal, sur la base des rapports de la Commission interparlementaire. Dans ce cas, ces derniers lui sont soumis à nouveau dans un délai de six mois.

Article 12  Dispositions transitoires

Le présent concordat est établi pour une durée de 5 ans à la suite desquels il fera l'objet d'une évaluation par les Grands Conseils. Sa reconduction fait l'objet d'une décision formelle de ces derniers.

Article 13 Modification à une autre loi (B 1 01)

La loi portant règlement du Grand Conseil de la Répubique et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit :

Art. 2, lettre f (nouvelle teneur)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet est présenté par les députés signataires qui siègent régulièrement dans le Forum interparlementaire romand. Le texte qu'ils déposent l'est également dans les différents cantons romands par des députés, membres du FIR. C'est ainsi qu'il a une chance de prendre force législative pratique, un seul canton ne pouvant prétendre à une coordination solitaire, mais plusieurs cantons disposant alors d'un instrument réaliste leur évitant à chaque projet régional d'avoir à créer une procédure nouvelle. L'expérience de la HESSO et des procédures du RHUSO, elle-même issue en grande partie des travaux du FIR, a grandement aidé et inspiré la rédaction de ce projet.

Mise en perspective

Le présent projet a été établi au cours des discussions du FIR en 1996 et 1997 sous la présidence de Mme Micheline Calmy-Rey (S, GE) et M. Pascal Broulis (R, VD) puis finalisé à Neuchâtel les 1er et 2 mai 1998 sous la présidence de MM. P. Broulis et Armand Lombard (L, GE). Il a été accepté sur le principe par le FIR lors de sa réunion du 10 juin 1998 sous réserve de modifications et d'ajouts des buts à confirmer au mercredi 9 septembre 1998.

Le premier projet issu des travaux du FIR, a contribué de manière importante à la rédaction et à la construction de l'accord entre les bureaux du Grand Conseil des cantons de Vaud et de Genève pour la création d'un contrôle parlementaire partagé dans le projet du réseau hospitalier universitaire de Suisse occidentale. Ce projet a été refusé en référendum populaire par la population genevoise le 7 juin 1998.

Pour sa part, ayant profité des discussions consensuelles de la Commission interparlementaire Vaud-Genève et ayant débattu du projet modifié lors de ses assises les 1er et 2 juin 1998, le FIR a mis au point le présent projet législatif.

Le Forum interparlementaire romand

Le Forum interparlementaire romand est un cercle de réflexion composé des députés des Grands Conseils romands désireux de suivre ses travaux. Tous les parlementaires romands y sont conviés. Septante, particulièrement intéressés, sont inscrits à ce jour. Trente participent régulièrement à ses réunions toutes les six semaines, provenant des différents cantons romands (GE, VD, VS, NE, FR). Ni les Jurassiens, ni les Bernois sont actuellement représentés.

Un cadre régional

Les organismes régionaux, réseaux, coordinations, grappes, mises en commun, voient désormais fréquemment le jour en Suisse occidentale. Nous traversons une période d'histoire :

où la qualité des services publics doit, pour rester de première excellence, quitter un carcan trop étroit ;

où le contenu socio-économique d'une communauté doit, pour être durable, se diversifier et être d'une dimension plus large que celles d'un seul canton ;

où la pression du coût des équipements et des spécialistes de haute technologie nécessite des coopérations étroites et des partages des compétences.

La région n'est plus un concept de visionnaire éclairé. Elle s'impose lorsqu'une autoroute doit être tracée, quand des formations pointues doivent être assurées, quand la création d'emplois devient un problème épineux.

Face à ces exigences, plusieurs voix s'expriment :

celles qui préfèrent les statu quo et les coordinations minimes,

celles qui proposent de fusionner des cantons pour aplanir d'un coup des bureaucraties et des conservatismes bloquants.

Les signataires du présent projet de loi proposent une voie médiane. A long terme, dans les 10 ans, ils peuvent envisager la création d'un échelon régional subsidiaire dans le système politique suisse avec des scrutins populaires régionaux pour les objets régionaux, les cantons restant des pôles forts du pays. A moyen terme, ils s'en tiennent à des moyens nouveaux mais rattachés à une institution en place, principalement autour des Commissions interparlementaires. Ces dernières, avant la ratification d'un concordat, agissent avec une règle de majorité simple comme des commissions parlementaires cantonales. Pour le contrôle des organismes régionaux, après ratification, alors elles disposent d'une véritable délégation de pouvoir des Grands Conseils.

Pour animer une structure helvétique au caractère très conservateur et lourd, il est bon de proposer des améliorations qui ne soient pas des révolutions ou des mises en cause destructrices d'un passé chargé d'expérience et somme toute de réussite. La mise en place d'une structure ponctuelle de concordat est décidée chaque fois qu'une gestion régionale est jugée nécessaires par les Parlements ou les Exécutifs. Elle permet une gestion régionale dans le cadre des cantons, et laisse la porte ouverte à des modifications ultérieures si le besoin s'en fait ressentir. C'est une étape, et elle paraît d'importance dans des communautés dont les Etats et leurs services publics traversent de fortes turbulences.

Importance du concordat

Les concordats soumis à la présente législation sont d'une importance organique régionale. Ils ne recouvrent pas des accords entre deux ou plusieurs cantons coordonnant moins de 250 personnes salariées ou des budgets inférieurs à Fr. 50 millions par an. Dans ces cas, les exécutifs cantonaux sont responsables de leur bonne application.

Les grandes lignes du projet

Comme mentionné dans ses articles 1 et 2, le présent projet de concordat répond notamment aux besoins suivants :

clarification des organisations publiques ;

critères d'évaluation des prestations offertes ;

rationalisation des équipements conforme à un bassin de population raisonnable ;

résolution des problèmes d'infrastructure.

Il poursuit par ailleurs les objectifs suivants :

résoudre des problématiques dépassant le strict cadre des cantons ;

établir des instruments propres à gérer de manière convenable des projets durables, tant sur le plan financier, organisationnel, social qu'environnemental ;

mettre à disposition de chaque Grand Conseil cantonal concerné un instrument démocratique propre d'élaboration, de ratification et de contrôle.

Les options principales retenues sont les suivantes :

1. Une Commission interparlementaire chargée des problématiques régionales est élue par le truchement de chaque Grand Conseil. La Commission interparlementaire peut demander aux Grands Conseils de désigner des délégations cantonales chargées d'une problématique spécifique et

2. des délégations cantonales composent la (ou les) Commission(s) interparlementaire(s). Le nombre de délégués par canton conserve à la Commission interparlementaire une dimension raisonnable tout en tenant compte de l'importance des bassins de population. La clef de répartition est de 3 députés de base auxquels s'ajoute un député par 100 000 habitants.

Estimation 1998 du nombre de représentants dans une Commission interparlementaire

Base

Par 100 000 habitants

Vaud

3

6

Valais

3

2

Neuchâtel

3

2

Genève

3

5

Fribourg

3

2

Jura

3

1

Berne

3

10

TOTAL

21

28

TOTAL GÉNÉRAL 36

(TOTAL AVEC BERNE 49)

3. Un vote à la majorité de l'ensemble des délégués en un seul collège intercantonal.

Une simple délégation est faite à la Commission interparlementaire pour préavis avant la ratification. Cette phase reste donc sous la pleine responsabilité des Grands Conseils.

Une délégation complète est faite à la Commission interparlementaire pour le contrôle de l'institution régionale créée. Les Grands Conseils délèguent ainsi leurs pouvoirs de contrôle à la commission qui devient un véritable contrôle régional. Les Grands Conseils conservent leurs prérogatives au travers du vote des comptes et budgets annuels, des rapports périodiques de la Commission interparlementaire et de la présence des députés délégués en plénum.

Ces deux mesures assurent une gestion efficace de l'institution sans empiéter sur les autonomies cantonales.

4. Une initiative parlementaire est prévue à l'art 5, al. 2, qui permet au Grand Conseil d'introduire la mise en oeuvre d'un concordat. Ce pouvoir nouveau élargit considérablement le potentiel d'une gestion régionale. Le Parlement peut ainsi engager l'Exécutif sur une voie de coordination régionale.

Entre la voie régionale et la voie cantonale pure, un espace supplémentaire est ainsi créé qui, à l'expérience, devra être testé et analysé sur une période de trois à cinq ans.

L'application concrète de ces procédures pourra compléter le contrôle concordataire de la HES.

Ce projet est renvoyé à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil sans débat de préconsultation.