République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 17 décembre 1998 à 17h
54e législature - 2e année - 2e session - 56e séance
PL 7948
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'exercice des professions de la santé, les établissements médicaux et diverses entreprises du domaine médical, du 16 septembre 1983, est modifiée comme suit :
Art. 3, lettre b (nouvelle, les lettres b et c anciennes devenant les lettres c et d)
Art. 11, al. 3, lettre b (nouvelle teneur)
Art. 15, al. 1, lettre c (nouvelle teneur)
Art. 19A Professions de psychologues exerçant dans le domaine de la santé (nouveau)
1 L'exercice des professions de psychologues exerçant dans le domaine de la santé est réservé aux titulaires d'une licence en psychologie d'une université suisse ou d'un titre jugé équivalent par le médecin cantonal et d'un certificat de formation spécifique postgraduée délivré par le médecin cantonal.
2 Pour chacune des professions de psychologues exerçant dans le domaine de la santé, le Conseil d'Etat définit les conditions et les modalités de la formation spécifique postgraduée qui comprendra notamment un stage en institution, la pratique clinique, des enseignements théoriques et la supervision de la pratique. Il consulte la commission consultative de la psychologie de la santé ainsi que les associations professionnelles.
Art. 22, al. 1 Interdiction (nouvelle teneur)
1 Il est interdit aux médecins, aux médecins-dentistes, aux vétérinaires, aux chiropraticiens, aux psychologues exerçant dans le domaine de la santé, aux physiothérapeutes et aux masseurs-kinésithérapeutes de faire, dans le canton et hors du canton, de la réclame dans les journaux, par circulaires, prospectus, affiches et toutes espèces d'annonces autres que celles qui ont pour objet d'annoncer leur installation, leur changement de domicile professionnel, leur absence et leur retour.
Art. 31, al. 2 Archives médicales - Cessation d'activités (nouvelle teneur)
2 Les médecins, les médecins-dentistes, les vétérinaires, les chiropraticiens et les psychologues exerçant dans le domaine de la santé qui cessent d'exercer leur profession peuvent remettre leurs archives à l'association professionnelle dûment constituée dont ils font partie. Si ces praticiens ne sont pas membres d'une telle association, ou si l'association n'est pas en mesure de recevoir ces archives, celles-ci sont remises au médecin cantonal.
Art. 40 Exceptions (nouvelle teneur)
Les cabinets installés par les médecins, les médecins-dentistes, les chiropraticiens, les psychologues exerçant dans le domaine de la santé et les physiothérapeutes, en vu de l'exercice à titre indépendant et individuel desdites professions, ne sont pas des établissements médicaux au sens de l'art. 39, les cas particuliers prévus aux art. 58, 72, 88 et 116 étant réservés.
Art. 79A Champ d'activité (nouveau)
Les psychologues exerçant dans le domaine de la santé inscrits ont le droit d'évaluer et de décrire le fonctionnement mental et les comportements du sujet, notamment à l'aide de tests psychologiques, de prévenir les dysfonctionnements mentaux et du comportement et d'aider à la restauration d'un fonctionnement mental et du comportement sains là où ils ont été perturbés par des causes sociales, relationnelles ou propres au sujet.
Art. 79B Spécialisations (nouveau)
1 Les professions de psychologues exerçant dans le domaine de la santé au sens de la présente loi sont les psychologues spécialisés en psychologie clinique, en psychothérapie et en neuropsychologie. Ces spécialisations ne sont pas exclusives les unes des autres.
Art. 79C Inscription (nouveau)
L'inscription dans le registre des psychologues exerçant dans le domaine de la santé est accordée aux personnes remplissant les conditions de l'art 19A. Elle mentionne la ou les spécialisations choisies.
Art. 79D Pratique de la profession (nouveau)
Les psychologues exerçant dans le domaine de la santé peuvent exercer leur profession à titre indépendant ou dépendant.
Art. 79E Interdictions (nouveau)
1 Les psychologues exerçant dans le domaine de la santé ne sont pas autorisés à formuler un diagnostic médical.
2 Il leur est interdit de prescrire, d'administrer et de dispenser des médicaments.
Art. 79F Avis médical (nouveau)
Les psychologues exerçant dans le domaine de la santé doivent attirer l'attention du patient sur l'opportunité ou la nécessité de consulter un médecin lorsque son état nécessite un examen ou un traitement médical; le cas échéant, il prend l'avis du médecin. Ces démarches sont consignées dans le dossier du patient.
Art. 79G Respect de la personnalité des patients (nouveau)
Dans l'exercice de leur profession, les psychologues exerçant dans le domaine de la santé doivent respecter les droits de la personnalité des patients, notamment lorsqu'ils recourent à des enregistrements sonores ou visuels à des fins thérapeutiques ou didactiques.
Art. 79H Commission consultative de la psychologie dans le domaine de la santé (nouveau)
1 Le département nomme une commission consultative de cinq membres représentant les associations professionnelles, les patients et l'administration.
Art. 142, al. 2 (nouveau; l'al. 2 ancien devenant l'al. 3)
2 Ont droit à l'autorisation prévue à l'article 4 les psychologues exerçant dans le domaine de la santé qui, au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, possèdent la formation complète prévue à l'article 19A, alinéa 1 ainsi que ceux qui, sans avoir accompli l'intégralité de cette formation, peuvent justifier d'une expérience professionnelle ininterrompue, dépendante ou indépendante, s'étendant sur une période de cinq ans au moins et d'une formation spécifique postgraduée équivalente à celle prévue l'article 19A, alinéa 2, reconnue par le médecin cantonal.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de loi vise à réglementer au niveau genevois les professions de psychologie dans le domaine de la santé, à savoir la psychothérapie exercée par des psychologues, la psychologie clinique et la neuropsychologie.
Considérations générales
Le projet de modification de la loi genevoise sur les professions de la santé qui vous est soumise est principalement motivé par des exigences de police sanitaire. Les pratiques psychologiques peuvent s'avérer préjudiciables aux patients si elles ne sont pas effectuées dans les règles de l'art, par des professionnels confirmés. Parmi les risques encourus, on peut citer l'apparition d'états pathologiques, ou une aggravation d'états pathologiques préexistants, des erreurs de diagnostics psychologiques conduisant à l'adoption de stratégies de traitement erronées ou inefficaces, le fait de ne pas correctement identifier des troubles organiques, notamment cérébraux, etc. Les risques d'abus sexuels sont aussi à mentionner. Au demeurant, même des personnes répondant à des critères de formation exigeants sont susceptibles de commettre des erreurs.
Or, en l'absence de toute réglementation, un patient s'estimant lésé par le praticien qu'il consulte n'a d'autre possibilité de faire valoir ses droits qu'une plainte pénale ou une action en responsabilité, à quoi s'ajoutent des procédures disciplinaires auprès des associations professionnelles pour autant que le praticien concerné en soit membre. Mais dans la plupart des cas, compte tenu des obstacles liés aux procédures pénales dans ce type de préjudice, les plaintes ne sont même pas formulées par les patients. Et il va de soi que les praticiens qui ne répondent pas aux conditions de formation des associations n'en sont pas membres.
Une réglementation des pratiques permet de garantir à la population que les personnes les exerçant en cabinet privé répondent à des critères de formation stricts ; elle garantit à la population, en cas d'erreur professionnelle avérée, que des sanctions administratives seront prononcées. Le fait de réglementer ces pratiques dans la loi sanitaire genevoise soumet leur exercice à la surveillance du médecin cantonal et de la Commission de surveillance des professions de santé, instances auprès desquelles les procédures de plainte sont traitées confidentiellement. Cette surveillance s'exerce à l'égard de tous les praticiens, qu'ils soient ou non membres d'une association professionnelle.
Actuellement, plus de 250 praticiens ou groupements de praticiens s'intitulant psychologues et/ou psychothérapeutes pratiquent en cabinet privé à Genève. Une minorité de ces personnes ne répondent pas aux conditions de formation exigées par les associations professionnelles et ne répondraient probablement pas, du moins pour ce qui concerne celles d'entre elles qui s'intitulent psychothérapeutes, aux conditions imposées dans les réglementations des cantons qui ont réglementé cette pratique spécifique dans leur loi sanitaire. Ces conditions, posées entre autres en termes d'exigences de formation, constituent, au sens du droit de ces cantons et des prescriptions des associations professionnelles, les exigences minimales pour exercer ces pratiques dans le respect de la personne qui consulte. Le fait que dix-neuf cantons aient réglementé la pratique de la psychothérapie, dont deux ont également réglementé la pratique de la psychologie au sens générique, prouve, s'il en était besoin, que le danger créé par un exercice anarchique de ces pratiques est jugé réel.
Selon la jurisprudence, le législateur cantonal qui réserve aux seuls médecins l'exercice de la psychothérapie viole la Constitution fédérale qui garantit le libre choix et le libre exercice de la profession de psychothérapeute (Arrêt du Tribunal administratif du canton de Zurich du 21 août 1991, confirmé par le Tribunal fédéral). Les cantons sont donc tenus de réglementer au minimum l'exercice de la psychothérapie par des non-médecins, notamment en instituant l'exigence de l'autorisation, en définissant les conditions d'octroi de cette autorisation, en précisant le champ d'activité de la profession et en indiquant les différences avec celle de médecin. Le Tribunal fédéral a encore précisé que cette réglementation doit en principe figurer dans une loi formelle. Le projet de loi a donc pour but de mettre la législation genevoise en harmonie avec le droit constitutionnel fédéral.
A l'appui de ce projet de loi, on peut aussi mentionner les conclusions du rapport de la commission sur les sectes instituée par le Conseil d'Etat genevois qui recommande une réglementation plus stricte des professions de santé comme l'un des moyens de lutter contre les abus sectaires. Or le titre de "; psychologue " ou des pratiques présentées comme "; psychologiques " (telles que des tests) sont souvent revendiqués par des organisations sectaires dans des buts de recrutement ou comme paravent à leurs activités réelles.
Etat actuel du droit fédéral et des cantons
1) Protection du titre et du public
Il n'existe pas pour l'heure de protection fédérale du titre de psychologue, ni d'aucun des titres correspondants aux pratiques spécialisées mentionnées dans ce projet. La situation actuelle des psychologues est de ce point de vue similaire à celle de la plupart des autres professions académiques en Suisse, hormis les professions médicales. Le Conseil fédéral a renoncé, fin août 1998, à introduire la psychologie comme nouvelle profession dans le cadre de la révision en cours de la loi fédérale sur les professions médicales. Il a toutefois estimé que cette profession devait faire l'objet d'une réglementation fédérale. mais nul ne sait sous quelle forme et surtout dans quels délais une telle réglementation pourrait voir le jour. Une réglementation cantonale portant sur les professions de la psychologie de la santé en devient d'autant plus nécessaire, même si elle ne constitue pas une véritable protection du titre.
2) Réglementation de la pratique et protection des patients
A ce jour, dix-neuf cantons ont réglementé la pratique de la psychothérapie dans leur loi sanitaire et deux cantons (Tessin et Saint-Gall) celle de la psychologie au sens générique en plus de celle de la psychothérapie. Ces réglementations soumettent toutes la pratique indépendante de ces professions à inscription dans un registre des professions de santé. Cette inscription n'est accordée qu'aux personnes satisfaisant, entre autres, à des conditions de formation définies dans la loi et dans des règlements d'application. Les conditions de formation diffèrent d'un canton à l'autre en ce qui concerne le détail, mais les cantons se sont inspirés de l'ordonnance-type de la Conférence des directeurs des affaires sanitaires (1982), du moins en ce qui concerne la structure de leurs lois. Les dénominations utilisées dans ces lois sont celles de psychologue-psychothérapeute ou de psychothérapeute non-médecin. La première de ces réglementations a été adoptée en 1976 par Bâle-Ville, la dernière en date au début des années 90 sauf erreur par le Jura.
Par ailleurs, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que les réglementations cantonales en la matière doivent respecter un certain nombre de principes et de règles d'ordre constitutionnel. Ainsi, dans un arrêt Winter contre Tessin, du 3 octobre 1980, le Tribunal fédéral a reconnu que les professions de psychologue et de psychothérapeute constituent des professions libérales au sens de l'art. 33 Cst. dont les cantons peuvent soumettre l'exercice à autorisation, celle-ci devant cependant limiter, dans l'intérêt des patients, le champ d'activité de son bénéficiaire au secteur de sa compétence. Six ans plus tard, il a annulé, pour violation de la liberté économique, une disposition légale vaudoise qui interdisait aux psychothérapeutes non médecins d'exercer leur activité professionnelle sans prescription médicale (arrêt ASP contre Vaud du 28 mai 1986). Dans cet arrêt, les juges ont relevé notamment que le fait que la législation vaudoise donne compétence aux médecins de poser un diagnostic et de prescrire le traitement adéquat n'entrave en rien l'activité propre de s psychothérapeutes. Ils se sont mêmes demandés si, compte tenu de l'exigence d'une formation étendue en psychologie et en psychothérapie pour l'obtention de l'autorisation, "; le psychothérapeute est plus qualifié pour juger si une personne a besoin d'un traitement de nature psychologique qu'un médecin qui n'est pas spécialisé en psychiatrie ". Dans un arrêt SPV contre Valais, du 18 mars 1988, le Tribunal fédéral a jugé que l'exigence d'une formation de trois ans auprès d'une institution spécialisée sous contrôle professionnel était disproportionnée, dans la mesure où elle excluait la reconnaissance d'une expérience dans un cabinet privé. Quant au Tribunal administratif du canton de Zurich, il a jugé, dans un important arrêt du 21 août 1991, que les cantons ne peuvent pas réserver aux seuls médecins l'exercice de la profession de psychothérapeute et que la réglementation cantonale de la psychothérapie par des non médecins nécessite une modification formelle de la loi sanitaire.
Le projet de loi tend à adapter la législation genevoise à cette jurisprudence.
Particularité du projet, les pratiques qu'il vise à réglementer
Le présent projet de loi est plus ambitieux que les réglementations cantonales existantes puisqu'ils vise à réglementer au niveau genevois la pratique de la psychothérapie par des psychologues et celles de deux autres pratiques spécialisées de cette profession, la psychologie clinique et la neuropsychologie. Ces trois spécialisations constituent, pour l'heure, les pratiques usuelles des psychologues spécialistes exerçant à Genève une activité indépendante. Une forte majorité d'entre eux pratiquent la psychothérapie. Certains psychologues cumulent deux de ces pratiques. Le nombre des psychologues s'installant en privé à Genève va croissant et leur offre dans le domaine de la santé se diversifie. De plus en plus de praticiens proposent en cabinet privé des prestations de psychologie clinique ou de neuropsychologie.
Toutefois, dans la mesure où d'autres spécialisations de la psychologie dans le domaine de la santé pourraient apparaître en pratique indépendante ces prochaines années, le présent projet de loi réserve le droit au Conseil d'Etat de compléter cette liste, sur recommandation de la commission consultative (art. 79B, al. 2).
Les pratiques que le présent projet réglemente consistent, en résumé :
- pour ce qui concerne la psychologie clinique, en l'usage d'entretiens et de tests psychologiques visant à décrire le fonctionnement mental de l'individu, à poser des diagnostics psychologiques et à conseiller le patient par rapport à des démarches ou adaptations qu'il pourrait souhaiter entreprendre en fonction des résultats de l'examen ; la demande de consultation est formulée par le patient lui-même ou par un médecin ;
- pour ce qui concerne la psychothérapie, en le traitement, par des psychothérapies individuelles, de groupe, de couple ou de famille, effectuées selon un modèle scientifiquement reconnu, des affections psychiques, à l'exclusion des affections qui relèvent d'un traitement médical ; la demande de psychothérapie peut être formulée par le patient, mais elle résulte souvent d'une consultation préliminaire chez un médecin, en général le médecin traitant ;
- pour ce qui concerne la neuropsychologie, en le dépistage, le diagnostic et le traitement des altérations du fonctionnement psychologique, cognitives et affectives, liées à des lésions cérébrales, notamment corticales ; la demande d'examen et/ou de prise en soins neuropsychologiques est le plus souvent émise par le médecin traitant du patient ou par un neurologue ou un psychiatre.
La collaboration des psychologues exerçant dans le domaine dans le domaine de la santé avec les médecins, notamment des généralistes, internistes, psychiatres, pédiatres et neurologues est en générale étroite et satisfaisante.
Toutes ces pratiques s'adressent tant à des adultes qu'à des enfants et à des adolescents. Elles correspondent dans l'ensemble aux tâches confiées aux psychologues employés dans la fonction publique, notamment aux Hôpitaux Universitaires de Genève, dans les départements de psychiatrie, de gériatrie et des neurosciences, ainsi qu'au Service médico-pédagogique, au Cycle d'orientation pour une partie des prestations de ce dernier service, et dans des institutions de droit privé subventionnées par les autorités sanitaires, sociales ou éducatives du canton. La recherche et l'enseignement font partie des tâches requises des psychologues dans certaines de ces institutions. Ces tâches contribuent au développement de la connaissance psychologique et des outils cliniques.
Les auteurs du projet de loi ne souhaitent pas réglementer la pratique globale de la psychologie au sens générique dans la loi sanitaire genevoise, car il existe des pratiques de la psychologie, y compris indépendantes, qui n'ont pas de rapport avec la santé, notamment dans le domaine de l'orientation scolaire et professionnelle, des ressources humaines, de la publicité, du conseil en entreprise, etc.
Les critères de formation
Le présent projet respecte la structure usuelle des réglementations existantes en ce qui concerne les exigences de formation posées pour l'inscription au registre des professions de la santé. Il soumet l'obtention d'un droit de pratique à l'achèvement d'une formation de base, définie à l'art. 19A, al. 1, la même pour toutes les pratiques réglementées, et d'une formation spécifique postgraduée, c'est-à-dire de 3e cycle, qu'il appartiendra au Conseil d'Etat de définir, dans le cadre tracé à l'art. 19, al. 2 et en collaboration étroite avec les associations professionnelles.
1) La formation de base (art. 19A, al. 1)
La formation de base exigée dans le projet de loi pour ces trois spécialisations est "; une formation universitaire en psychologie ou un titre jugé équivalent par le médecin cantonal ". L'Université de Genève forme des psychologues universitaires en quatre ans, cette formation donnant droit à une licence en psychologie dite licence généraliste car elle ne contient plus, depuis 1981, de spécification en fonction d'un début de spécialisation en deuxième cycle. Les programmes actuels à Genève sont basés sur le système des certificats. Certaines des licences de l'Université de Lausanne portent mention d'une spécialisation (orientation professionnelle, ressources humaines, psychologie scolaire). L'Université de Neuchâtel ne dispense que des cours de deuxième cycle qui donnent accès à une licence spécialisée en psychologie du travail.
En Suisse alémanique et à Fribourg, les études en psychologie sont organisées sur le modèles des études de lettres (Philosophie II), soit en trois branches, une branche principale et deux branches secondaires.
La Fédération suisse des psychologues (FSP) considère comme un titre universitaire en psychologie un titre universitaire ayant la psychologie en branche principale (standard FSP). Les licences romandes sont de facto reconnues comme des titres universitaires en psychologie par la FSP.
Ces titres universitaires concluant le deuxième cycle donnent accès à un programme de troisième cycle aboutissant à un doctorat en psychologie.
Rappelons qu'il existe, notamment à Zurich, des instituts privés ou assimilés à des écoles techniques par les autorités cantonales (c'est le cas de l'Institut de psychologie appliquée (IAP) de Zurich) qui dispensent des formations non universitaires en psychologie. La formation à l'IAP par exemple est de trois ans et ne donne pas accès à un programme de doctorat. Ces formations ne sont pas reconnues par la FSP.
Les auteurs du projet de loi considèrent que l'exigence d'un titre universitaire en psychologie se justifie parce que les connaissances de base en psychologie du développement, en psychopathologie, en psychologie différentielle (constitution et pratique des tests notamment), en théorie des névroses, en neurophysiologie, etc., nécessaires aux pratiques réglementées, sont dispensées dans le programme universitaire en psychologie.
Rappelons que la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation est l'une des facultés de l'Université de Genève qui admet à l'inscription des personnes qui n'ont pas de maturité mais qui sont au bénéfice d'une formation et d'une pratique professionnelles (comme infirmiers, assistants sociaux, etc.). Elle admet également à l'inscription de l'un ou l'autre cycle des études en psychologie des personnes au bénéfice d'un titre étranger en psychologie ou d'un autre titre en sciences humaines, en fonction des cours et examens passés par le candidat.
D'autre part, la disposition transitoire (art. 142, al. 2) autorise les personnes qui ne seraient pas au bénéfice d'un titre universitaire en psychologie mais qui justifient, au moment de l'entrée en vigueur de la loi, d'une pratique de cinq ans au moins et d'une formation spécifique équivalente à s'inscrire au registre des psychologues de la santé.
2) La formation spécifique postgraduée (art. 19A, al. 2)
Pour chacune des pratiques réglementées dans le projet, les associations professionnelles fédérales, la FSP en ce qui concerne les psychologues cliniciens et les neuropsychologues, la FSP et l'ASP en ce qui concerne les psychothérapeutes, ont défini des cursus de formation auxquels les psychologues doivent satisfaire pour obtenir la reconnaissance de leur spécialisation. En règle générale, les formations spécialisées, postgraduées, durent de quatre à cinq ans, et se constituent d'une ou de plusieurs années de pratique dans des institutions ad hoc, de cours théoriques, d'une pratique auprès des patients et d'heures de supervision de cette pratique par un spécialiste confirmé, à quoi s'ajoute, pour la psychothérapie, un travail personnel, c'est-à-dire l'exigence pour le spécialiste d'avoir lui-même accompli une psychothérapie. Les exigences de formation spécialisée en psychothérapie ne diffèrent guère entre la FSP et l'ASP.
Par ailleurs, en ce qui concerne spécifiquement la psychologie clinique, l'Université de Genève organise depuis trois ans un diplôme post-licence d'études spécialisées (DES) en psychologie clinique. Le cycle d'étude est d'une durée de deux ans. Ce diplôme peut constituer une part importante de la formation spécialisée dans ce domaine telle qu'elle est définie dans ce projet de loi.
Les formations spécialisées sont accomplies, du moins pour ce qui concerne la pratique auprès des patients, dans les institutions publiques ou au cabinet d'un praticien autorisé à pratiquer, psychologue clinicien, neuropsychologue, psychologue-psychothérapeute ou encore psychiatre psychothérapeute pour la seule pratique de la psychothérapie, et sous sa responsabilité de ce praticien (pratique dépendante).
Le présent projet de loi se contente de prescrire que la formation spécifique doit être postgraduée, c'est-à-dire de 3e cycle, et qu'elle doit respecter quatre axes, à savoir notamment un stage en institution, la pratique clinique, des enseignements théoriques et la supervision de la pratique, auxquels doit s'ajouter, pour les psychologues spécialisés en psychothérapie, une thérapie impliquant la propre personne du candidat. Pour le surplus, il appartiendra au Conseil d'Etat d'édicter la réglementation détaillée, en étroite collaboration avec les associations professionnelles.
Les charges liées à l'autorisation
Le projet de loi précise notamment que les psychologues exerçant dans le domaine de la santé n'ont pas le droit de faire de la réclame (Art 22, al. 1), qu'ils ne sont pas autorisés à poser un diagnostic médical (Art. 79E, al. 1) et qu'il leur est interdit de prescrire, d'administrer et de dispenser des médicaments (Art. 79E, al. 2). Ils doivent en outre collaborer avec les médecins (Art. 79F) et respecter les droits de la personnalité des patients (Art. 79G).
Les milieux professionnels de psychologues genevois ont tenté d'obtenir que le Département de la santé réglemente la pratique indépendante, en particulier de la psychothérapie, dès le début des années 80. La première tentative, en 1982, était contemporaine de l'élaboration, par la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires, de l'ordonnance type de réglementation de la pratique de la psychothérapie. Le département avait toutefois, à l'époque, refusé d'entrer en matière sur cette ordonnance et sur un projet cantonal de réglementation de la pratique de la psychothérapie arguant "; d'une trop grande diversité et imprécision des formations requises (telles que définies dans cette ordonnance type), d'un contenu de la profession trop imprécisément défini et d'une absence de délimitation du domaine du psychologue et de celui du médecin ". On vient de voir que ce type d'arguments ne peut plus être invoqué dans l'état actuel des choses, tant au point de vue juridique qu'en ce qui concerne la définition des pratiques et celle des cursus de formation.
Ce d'autant qu'en ce qui concerne la psychothérapie toujours, domaine où le risque de confusion avec l'offre médicale est le plus souvent invoqué, l'Association genevoise des psychologues et psychologues-psychothérapeutes (AGPP) avait, en 1990, après être revenue à charge auprès du département, et à la demande de ce dernier, rencontré le comité de l'Association des médecins de Genève (AMG) qui ne s'était pas opposé à un projet de réglementation de la pratique de la psychothérapie par des psychologues. Le Département avait alors rédigé un projet de loi visant à réglementer cette pratique. Toutefois, du fait de l'opposition d'une partie des psychothérapeutes à certains des articles de ce projet, notamment l'inscription des psychothérapeutes dans le chapitre dit "; des autres professions du domaine médical " de la loi, pourtant rendue nécessaire par le droit fédéral, le département avait renvoyé la réglementation à une révision globale de la loi sanitaire, qui ne s'est finalement pas faite.
En 1996, le département a refusé d'entrer en matière à la dernière demande des associations professionnelles, pourtant formulée en commun par l'ASP et l'AGPP, disant préférer attendre la promulgation de l'ordonnance en préparation de la LAMal sur le remboursement, au titre du contrat de base d'assurance, des psychothérapies pratiquées par des non-médecins. Ce faisant, le Département mêlait deux objets, la réglementation d'une pratique d'une part, les conditions de son éventuel remboursement au titre de l'assurance maladie d'autre part, que les milieux professionnels ont toujours tenu à dissocier, étant donné qu'ils soulèvent des questions juridiques fort différentes. Notons que le projet d'ordonnance de la LAMal n'a toujours pas été mis officiellement en consultation et qu'une éventuelle mise en vigueur est menacée par la motion du conseiller national Rychen.
On peut toutefois relever, si le fait qu'une pratique soit remboursée en tout ou partie par une assurance sociale doit être compris comme une forme de reconnaissance de la validité de cette pratique et de la compétence des personnes qui l'exercent, que l'OFAS a signé un contrat avec la FSP et l'ASP aux termes duquel les psychothérapies pratiquées par les praticiens reconnus par l'une ou l'autre de ces associations sont remboursées par l'AI et l'assurance militaire. Ce contrat est appliqué par analogie par la SUVA. Les prestations de psychologie clinique et de neuropsychologie sont aussi remboursées par ces assurances. Le CAMS établit une liste des psychothérapeutes reconnus à l'usage des caisses-maladie qui prévoient des prestations pour la psychothérapie non médicale dans leurs contrats complémentaires. Certains contrats complémentaires d'assurance remboursent en partie les prestations neuropsychologiques effectuées par des praticiens reconnus.
Les milieux professionnels, notamment l'Association genevoise des psychologues et des psychologues-psychothérapeutes, ainsi que la Fédération suisse des psychologues, à laquelle elle est affiliée, soutiennent ce projet de réglementation des pratiques de la psychologie dans le domaine de la santé.
Ce projet est renvoyé à la commission de la santé sans débat de préconsultation.
La séance est levée à 19 h.