République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 17 décembre 1998 à 17h
54e législature - 2e année - 2e session - 56e séance
IU 589
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai six questions à adresser au Conseil d'Etat. Mais je ne vais pas vous demander six fois la parole, Monsieur le président, j'essayerai de les poser en deux fois, j'espère donc utiliser un peu moins de cinq ou six minutes.
Mon interpellation s'adresse donc au Conseil d'Etat, in globo, qui nous fait l'honneur d'être présent, pour une fois... (Remarques.) Ce n'est pas toujours le cas, Mesdames et Messieurs !
Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, mes questions sont les suivantes :
1. Que penseriez-vous de serviteurs de l'Etat, salariés de celui-ci, qui utilisent abusivement leur statut et leur fonction, ainsi que les deniers publics à hauteur de dizaines et de dizaines de milliers de francs, pour faire de la propagande partisane et appeler nos concitoyens et concitoyennes à se prononcer dans un sens déterminé à l'occasion de la prochaine votation populaire ?
2. N'avez-vous pas honte que les serviteurs de l'Etat en question, ce soit vous : Laurent Moutinot, Carlo Lamprecht, Guy-Olivier Segond, Martine Brunschwig Graf, Gérard Ramseyer, Micheline Calmy-Rey et Robert Cramer ? (Brouhaha.)
Une voix. Tu les connais tous ? (Rires.)
M. Pierre Vanek. Non, je ne les connais pas de mémoire, je les avais notés sur un billet. Mais je me suis servi de leur tête pour m'en souvenir !
En effet, utilisant abusivement l'institution de la proclamation officielle réservée aux commémorations ou aux événements importants, le Conseil d'Etat s'est cru autorisé à faire paraître des pages et des pages entières de propagande dans tous les journaux vendus et distribués à Genève, à faire financer par les contribuables genevois la campagne que l'on sait en faveur de son paquet d'impôts nouveaux injustes et de mesures antisociales... Mais je ne veux pas développer cet aspect-là, vous connaissez notre position.
3. Ne pensez-vous pas que cette façon de faire est particulièrement choquante et qu'elle viole le principe de retenue, consacré d'ailleurs par la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, que les autorités sont tenues de respecter lors de campagnes électorales à l'occasion d'une votation populaire, tout particulièrement lorsque le corps électoral est déjà en train de voter et qu'une réponse publicitaire, que les opposants n'ont du reste évidemment pas les moyens de se payer, arriverait trop tardivement aux électeurs ?
4. N'admettrez-vous pas que cette campagne publicitaire est d'autant plus inadmissible que le Conseil d'Etat - après les épisodes que l'on sait : après avoir tenté de publier une notice explicative pour les électrices et les électeurs totalement favorable à son paquet de mesures, et après avoir tenté de réserver les trois-quarts de cette brochure aux arguments pour le oui - a abondamment utilisé la «Feuille d'avis officielle» pour véhiculer ses arguments, tout en supprimant d'ailleurs l'édition tous ménages qui aurait eu pour effet de permettre aux groupements, nombreux, opposés à ce paquet d'exprimer leur position ?
5. Enfin, face à cet usage que nous estimons parfaitement abusif des deniers publics et à la volonté du Conseil d'Etat d'étouffer les arguments opposés aux siens, nous demandons à celui-ci de cesser, bien évidemment s'il en avait encore l'intention - Dieu sait ce que ce Conseil d'Etat est capable de faire - immédiatement cette propagande illégale par voie d'annonces payantes et d'indiquer, à cette assemblée et aux citoyens que nous représentons, combien ces annonces et les autres moyens de propagande qu'il a utilisés ont coûté à l'Etat et sous quelles rubriques budgétaires ces frais sont financés.
Ma sixième question est un post-scriptum plus personnel :
6. Ne pensez-vous pas, Mesdames et Messieurs, que ces dizaines de milliers de francs - on a parlé de 40 000 ou de 50 000 F - devraient être financées par des retenues sur les salaires de ces serviteurs de l'Etat que vous êtes ? En effet, les deniers publics n'ont pas à servir à ce genre de propagande : l'Etat en tant que tel n'a pas de position sur cette question à ce jour, seuls les politiques que vous êtes en ont une. La position de l'Etat, elle, sera définie par nos concitoyennes et concitoyens dimanche prochain !