République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7943
Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application du code civil et du code des obligations (E 1 05). ( )PL7943

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981, est modifiée comme suit :

Art. 47A Champ d'application (nouveau)

1 Les dispositions du présent chapitre s'appliquent dans la mesure où la matière qu'elles régissent ne fait pas l'objet d'une réglementation fédérale ou de lois spéciales.

2 Les restrictions de droit public cantonal d'une durée indéterminée ou supérieure à une année, peuvent être mentionnées à titre déclaratif au registre foncier (art. 962 du code civil).

Art. 55 à 62 abrogés

Art. 63A Droit public cantonal (nouveau)

Demeurent réservées les restrictions de droit public, notamment celles résultant de la législation sur l'aménagement du territoire et la police des constructions, telles :

Art. 63B Droit transitoire (nouveau)

Les jours et vues construits avant le 20 avril 1929 demeurent régis par l'ancien droit en vigueur au 1er janvier 1998.

A. Plantations

I. Distances et hauteurs minimales

Art. 64, al. 1, 2 et 3 (nouvelle teneur)

1 Il ne peut être fait aucune plantation de souche ligneuse à moins d'un mètre de la limite parcellaire.

2 Entre un et deux mètres de la limite, les plantations ne peuvent dépasser la hauteur de deux mètres.

3 Au-delà, leur hauteur doit s'inscrire dans un gabarit tracé à 60°.

Art. 64A (nouveau)

1 Les arbres fruitiers et autres plantes grimpantes peuvent être plantés en treille ou en espaliers jusqu'à la limite de chaque propriété, mais sans qu'ils puissent dépasser la hauteur de 2 m.

2 S'ils sont appuyés à un mur plus élevé, leur hauteur a pour limite la crête du mur. Si le mur n'est pas mitoyen, son propriétaire a seul le droit d'y appuyer ces plantations.

3 S'il existe une clôture entre deux fonds contigus, la distance légale n'est applicable qu'aux plantations dépassant la hauteur de la clôture.

4 Les conventions contraires sont réservées.

Art. 64B (nouveau)

Les législations sur les routes, du 28 avril 1967, la protection générale des rives du lac, du 4 décembre 1992, la protection des monuments, de la nature et des sites, du 4 juin 1976, et la viticulture, du 26 mai 1972, sont notamment réservées.

Art. 64C (nouveau)

II. Calcul

1 La distance se calcule du centre du pied de la plante perpendiculairement à la limite la plus rapprochée.

2 La hauteur des plantations se calcule à la limite du fonds voisin, la hauteur légale autorisée étant calculée depuis le niveau du terrain naturel en limite.

III. Voies de droit

Art. 65 (nouvelle teneur)

1 Le propriétaire d'un fonds peut exiger :

2 Ces facultés cessent toutefois si le propriétaire a laissé s'écouler 30 ans après l'établissement des plantations, sous réserve des alinéas 4 et 5.

3 Mention de la déchéance peut être faite au registre foncier sur le vu de la reconnaissance écrite du propriétaire ou d'un jugement définitif.

4 Celui qui tolère à bien plaire les plantations qui dérogent aux prescriptions de distance et de hauteur peut exiger du propriétaire voisin qu'il reconnaisse la précarité du droit.

5 Mention de la précarité du droit peut être faite au registre foncier sur le vu de la reconnaissance écrite du propriétaire ou d'un jugement définitif.

Art. 65A (nouveau)

1 Sauf acquisition par un tiers de bonne foi, chaque propriétaire est présumé avoir renoncé à se prévaloir des distances et hauteurs qui ne sont plus respectées en cas de modifications cadastrales volontaires.

2 Le renoncement inséré dans l'acte de modification cadastrale et mentionné au registre foncier devient opposable à tout tiers acquéreur.

Art. 65B (nouveau)

IV. Disposition transitoire

Les plantations existantes lors de l'entrée en vigueur de la présente section 2A demeurent régies pas l'ancien droit dans sa teneur au 1er janvier 1998.

Art. 66, al. 1 (nouvelle teneur)

B. Clôtures

1 Tout propriétaire peut clore son fonds sous réserve du passage nécessaire prévu à l'article 694 du code civil.

Art. 69 (abrogé)

Art. 71 (abrogé)

Article 2

La présente loi entre en vigueur le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation.

p. 6

EXPOSÉ DES MOTIFS

Introduction

Les sections 1 à 5 du chapitre IV, titre II de la loi d'application du code civil et du code des obligations du 7 mai 1981 (E 1 0,5 - ci après LACCS), ont été adoptées par le législateur genevois en 1911 déjà, et sont entrées en vigueur le 1er janvier 1912 simultanément au code civil fédéral (CC).

Cette législation découle d'une réserve attributive du législateur fédéral, permettant au canton de légiférer dans un domaine où il n'existe aucune norme de droit civil fédéral, et se traduit, dans le code civil, par des réserves expresses en faveur du droit civil cantonal (cf. notamment les art. 686, 688, 695, 697 et 709 CC).

Près d'un siècle après leur adoption, certaines de ces normes ont perdu tout intérêt juridique, soit parce que la matière est désormais régie de façon exhaustive par du droit public cantonal adopté en vertu de l'article 702 CC, soit en raison de leur inadéquation face aux exigences d'une urbanisation que le législateur de 1911 n'avait pu envisager.

Cette inadéquation fut d'ailleurs à la base du dépôt au secrétariat du Grand Conseil, le 2 août 1996, d'une pétition P 1105-A, traitée dans l'intervalle par la Commission des pétitions, demandant expressément la modification de la LACCS en ce qu'elle concerne les haies entre deux propriétés sur fonds privés. Les pétitionnaires soulignaient en effet que le rétrécissement des parcelles d'implantation de villas en vue d'encourager l'habitat groupé, se voit confronté au problème lié à l'absence de hauteur maximale pour les plantations éloignées de plus de 2 mètres de la limite séparative, avec pour conséquence un manque de dégagement qui se traduit économiquement par une dépréciation certaine de ces nouveaux lotissements.

Cette réforme procède donc d'une réactualisation du droit civil genevois réservé, et tend parallèlement à bien séparer ce domaine de celui relevant du droit public cantonal, dont l'importance n'a cessé de s'accroître ces 50 dernières années.

Commentaire des modifications

a) Il a tout d'abord semblé opportun d'intégrer un article 48 nouveau qui rappelle que les dispositions du présent chapitre consacré au droit réel sont applicables sous réserve des restrictions de droit public édictées par la Confédération, les cantons et les communes, conformément à l'article 702 CC.

L'ancienne section 2 a ensuite été subdivisée en 2 nouvelles sections, à savoir une section concernant les constructions (b), et une autre ayant trait aux plantations et clôtures (c).

b) La nouvelle section 2 a été amputée des anciennes dispositions 55 à 62, dont le champ d'application est couvert de façon exhaustive par la loi sur les constructions et les installations diverses (ci-après LCI), du 14 avril 1988 (L 5 1), et ce depuis le 19 avril 1929. Toutefois, afin de justifier des situations non conformes à la LCI, parce que antérieures à cette dernière, un article 58 nouveau a été introduit, lequel stipule que les jours et vues construits avant le 20 avril 1929 demeurent régis par l'ancien droit en vigueur au 1er janvier 1998.

c) La section 3 nouvelle a été profondément remaniée en ce qui concerne les plantations, afin de tenir compte, d'une part de la pétition P 1105-A susmentionnée, et d'autre part des Directives et recommandations sur les arbres édictées par le service des forêts, de la faune et de la protection de la nature.

Ainsi, les principales innovations sont-elles les suivantes :

- la distance à la limite en-delà de laquelle aucune plantation de souche ligneuse ne peut être faite est portée de 50 centimètres à 1 mètre ;

- corollaire de ce qui précède, c'est désormais entre 1 mètre et 2 mètres de la limite que les plantations ne peuvent dépasser la hauteur de 2 mètres ;

- au-delà, leur hauteur devra impérativement s'inscrire dans un gabarit tracé à 60 degrés, ce qui devrait permettre de résoudre le problème posé par la pétition précitée.

Pour le surplus, les termes d'arbres, arbustes et haies vives ont été remplacés par le terme équivalent mais plus générique de plantations de souche ligneuse (art. 59), la façon de calculer la distance à la limite a été décrite (art. 62), et une disposition transitoire a également été introduite, qui prévoit que les plantations existantes lors de l'entrée en vigueur de la présente section 3 demeurent régies par l'ancien droit dans sa teneur au 1er janvier 1998 (art. 67).

Enfin, la novelle présume le renoncement des propriétaires concernés à se prévaloir des distances et hauteur légales en cas de modifications cadastrales volontaires (art. 65).

d) L'ancienne section 4 a été supprimée et remplacée par l'insertion dans les sections concernées de dispositions spécifiques (cf. art. 57, 61 et 66).

e) La section 5 a été réduite de moitié, l'ancien art. 71 relatif à l'irrigation des propriétés ayant été abrogé.

L'alinéa 1 est en effet contraire au droit fédéral depuis l'entrée en vigueur, le 1er novembre 1992, de la loi sur la protection des eaux du 24 janvier 1991, qui prévoit à ses articles 29 à 36 que l'utilisation de l'eau (publique ou privée) qui dépasse l'usage commun, est en principe soumise à autorisation.

L'alinéa 2 est pour sa part en contravention tant avec la loi fédérale sur l'utilisation des forces hydrauliques du 22 décembre 1916, qu'avec la loi cantonale sur les eaux du 5 juillet 1961 (L 2 05), qui soumettent toutes deux à autorisation ou concession l'utilisation de la force d'un cours d'eau.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.

Ce projet est renvoyé à la commission LCI sans débat de préconsultation.