République et canton de Genève

Grand Conseil

M 934-B
a) Proposition de motion de Mme et M. Claire Torracinta-Pache et René Longet concernant un soutien à l'édition, à la production locale du livre et à sa diffusion. ( -)   M934
Mémorial 1994 : Annoncée, 2711. Lettre, 3017. Développée, 3739. Renvoi en commission, 3747.
Mémorial 1995 : Lettre 4527. Rapport, 4866. Le Grand Conseil a pris acte du retrait de la proposition de motion 934 le 22 septembre 1995 (page 4886).
M 1012-A
b) Motion de Mmes et MM. Roger Beer, Janine Berberat, Jacques Boesch, Liliane Charrière Debelle, Erica Deuber-Pauli, Catherine Fatio, Henri Gougler, Nelly Guichard, Janine Hagmann, Elisabeth Häusermann, Claude Howald, Gabrielle Maulini-Dreyfus, Elisabeth Reusse-Decrey, Pierre-François Unger, Pierre Vanek, Claire Torracinta-Pache et René Longet concernant un soutien à l'édition, à la production locale du livre et à sa diffusion. ( -) M1012
 Mémorial 1995 : Lettre, 4527. Développée, 4866. Adoptée, 4885.

7. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants :

Conformément aux M 934-A et M 1012 concernant un soutien à l'édition, à la production locale du livre et à sa diffusion, dont voici le rappel

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant:

- le récent colloque consacré à Genève aux défis de l'édition;

- la précarité du métier d'éditeur et du statut du livre en Suisse romande;

- que la disparition des uns et des autres mettrait en danger la pérennité de notre culture ainsi qu'une activité économique qui ne doit pas être abandonnée;

- que le livre ne peut être considéré comme un simple produit soumis aux lois du marché;

- qu'il est la base et la source de tout enseignement;

- qu'une vraie politique du livre doit être engagée, politique à laquelle les cantons doivent participer dans la mesure de leurs moyens;

- le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'encouragement à la culture renvoyé en commission pour étude,

invite le Conseil d'Etat

- à suivre les activités du groupe de travail ou de la commission consultative, réunissant des représentants de l'Etat, de l'université, de la Ville, des communes et du Cercle de la librairie et de l'édition à Genève, chargé-e d'étudier et de proposer des mesures d'encouragement et de soutien à la production locale du livre et à sa diffusion;

- à veiller à la mise en oeuvre des propositions;

- à élargir le cercle des bénéficiaires de l'aide aux jeunes créateurs à des auteurs du canton (bourse d'encouragement ou prix à la publication d'une première oeuvre, par exemple).

1. Préambule

A la suite d'un livre blanc et d'un colloque conçu par les éditeurs comme des moyens pour sensibiliser population et autorités aux difficultés et spécificités de leur domaine, des contacts se sont établis entre les professionnels du livre, la Ville de Genève et le Canton de Genève. Ces échanges ont permis de mettre en place un cadre commun de réflexions et d'initiatives. Par une première motion (934), le Grand Conseil a été amené à manifester son intérêt pour un secteur d'activité, à la fois crucial par sa dimension culturelle et vulnérable quant à son poids économique.

Dans une seconde motion (1012), adoptée le 22 septembre 1995, les députés adressaient quatre invites au Conseil d'Etat, à savoir :

a) Suivre les activités de la commission consultative (le noeud de la collaboration).

b) Veiller à la mise en oeuvre des propositions de cette commission.

c) Faire bénéficier les auteurs du canton à l'aide aux jeunes créateurs.

d) Présenter un rapport au Grand Conseil.

Le présent texte fait le point sur le dispositif mis en oeuvre et sur les actions concrètes lancées pour valoriser le livre et la lecture, aux différentes étapes de leur pratique.

2. Le dispositif

La collaboration entre les professionnels du livre, la Ville de Genève et l'Etat de Genève repose sur deux piliers: une convention signée par les deux autorités publiques et une commission consultative. Datée du 29 septembre 1997, l'accord énonce la volonté des partenaires publics de collaborer à la mise en oeuvre d'une politique d'encouragement et de soutien à la production locale du livre, à sa diffusion et à sa promotion auprès du public en général et des jeunes en particulier. D'une durée de quatre ans, la convention désigne les organismes de coordination et mentionne les ressources financières.

La Commission consultative, convoquée pour la première fois le 5 octobre 1995, rassemble outre les représentants des deux autorités et de l'Université, les porte-parole des différents maillons de la chaîne du livre (auteurs, éditeurs, libraires, critiques littéraires). Cet organe clé s'est réuni, une vingtaine de fois, en 1996 et 1997 pour remplir sa tâche qui consiste à :

- Etablir et proposer les mesures d'encouragement à la production genevoise de livres et à leur diffusion dans le Canton et à l'extérieur.

- Proposer des actions pour favoriser l'écriture et les écrivains genevois.

- Veiller à la cohérence des moyens existants et des initiatives nouvelles.

- Mieux faire connaître le réseau des libraires et bibliothèques.

- Favoriser la présence des livres et les rencontres avec les auteurs dans les écoles, l'Université, les bibliothèques, les médias.

- Imaginer des moyens pour stimuler la lecture.

- Favoriser l'émergence de nouveaux écrivains.

- Proposer des mesures d'appui pour la présence à l'étranger de l'édition genevoise.

Présidée en alternance annuelle, tour à tour par la Ville et le canton de Genève, la Commission consultative est secondée dans son travail par deux groupes interfaces. L'un réunit des représentants des bibliothèques de la Ville de Genève, des éditeurs et un libraire. L'autre est composé de représentants de l'enseignement public, de l'Université, des éditeurs et d'un libraire. Le rôle que jouent ces interfaces consiste à aborder des questions spécifiques à deux univers privilégiées du livre (les écoles et les bibliothèques) et à proposer à la commission des projets à développer dans ces institutions. De manière schématique, le dispositif se présente donc ainsi :

3. Travaux

Au terme de chaque année, la Commission consultative est tenue de rendre compte de son travail et de formuler des propositions aux deux magistrats, la Cheffe du Département de l'instruction publique et le conseiller administratif en charge du Département des affaires culturelles. De la lecture des deux premiers rapports, il ressort que la commission a rédigé son règlement, dressé un état des lieux des prix littéraires, établi un inventaire des formes existantes de soutien au livre, auditionné des personnalités, enquêté sur les pratiques d'achat des pouvoirs publics et surtout dessiné les contours d'actions (voir ci-dessous).

Il est nécessaire de relever, qu'au-delà des objets étudiés, la Commission consultative a permis aux partenaires réunis de faire l'apprentissage du partage de critiques et d'idées dans un esprit constructif.

4. Actions

Passant à une phase de concrétisation, la commission a lancé, ce printemps 1998, cinq actions de mise en valeur du livre. Partant de l'idée que l'écriture, l'édition, la promotion et la diffusion sont des moments charnières dans la carrière d'un livre, les opérations suivantes ont été lancées :

a) Une bourse "; Nouvel auteur ". Le but de cette aide est de faciliter l'émergence d'écritures nouvelles. D'un montant de F 2 000.-, la bourse sera attribuée à un auteur exerçant son talent dans le roman, la poésie, l'essai, la nouvelle ou le théâtre.

b) Une bourse "; Auteur confirmé ". L'objectif est ici de proposer à un écrivain confirmé un soutien financier (F 24 000.-) pour faciliter la poursuite de son oeuvre. A l'exception de l'art dramatique, les mêmes domaines que ci-dessus sont concernés. Cette bourse est une manière de reconnaissance d'un auteur qui bâtit une oeuvre.

c) Une bourse "; Illustration du livre ", s'applique aux genres précédemment cités et au livre pour la jeunesse. Cette contribution de F 12 000.- sera réservée à un illustrateur présentant un projet convaincant.

Dans ces trois cas, l'octroi d'une aide devrait permettre à des créateurs qui, par nécessité ou par goût, exercent un second métier, de dégager du temps et de se consacrer pleinement à un texte ou des dessins en travail. Les bourses seront accordées à la fin du mois de juin 1998 par la Ville et le canton de Genève sur la base d'un préavis formulé par deux jurys de trois experts, l'un étant chargé de sélectionner les projets d'écriture, l'autre de distinguer un dossier d'illustrateur. Les réactions, suscitées par les annonces dans la presse (270 appels téléphoniques), donnent la mesure de l'attente et des besoins auxquels ces bourses répondent.

Toujours à l'instigation de la Commission consultative, une autre initiative produira ses effets l'hiver prochain, à savoir :

d) Deux aides à l'édition octroyées par la Ville de Genève (F 20 000.- chacune). La finalité de ces aides est de distinguer deux maisons d'édition genevoises qui développent un projet éditorial de qualité. Pour prétendre à un soutien, les entreprises doivent exister depuis trois ans et publier au minimum douze ouvrages par année.

5. Les chantiers

Outre les bourses et les soutiens à l'édition, la Commission consultative a ouvert plusieurs chantiers :

• La création d'un prix des Deux-Rives (titre provisoire) qui serait attribué par les jeunes de 17 à 22 ans sur la base d'une présélection d'ouvrages. Le mérite de cette distinction serait d'inciter les élèves et étudiants à lire, de leur faire découvrir des auteurs suisses romands, et de les amener à exercer leur esprit critique et leur capacité de choix.

• Une promotion auprès des bibliothèques de la région Rhône-Alpes. L'idée consiste à sélectionner, chaque année, les titres les plus marquants de l'édition genevoise afin d'en distribuer un certain nombre d'exemplaires dans treize grandes bibliothèques de lecture publique et BDP de Rhône-Alpes. La remise de ces livres serait accompagnée d'un catalogue et d'une délégation des éditeurs.

• La création de résidences qui permettraient à des auteurs d'être hébergés à Genève pour s'adonner entièrement à leur travail d'écriture ou à des auteurs genevois de séjourner à l'étranger. L'accueil d'un écrivain pourrait se faire sur un principe de réciprocité avec une autre ville/région.

D'autres pistes sont encore explorées par la Commission consultative : création d'un site WEB, mise à disposition d'espaces au Salon du Livre, utilisation des bibliothèques de la Ville de Genève comme vitrine de présentation des titres parus, etc.

Ces différentes perspectives peuvent devenir des réalités en 1999 ou 2000 pour autant qu'un financement privé vienne compléter les engagements de la Ville et de l'Etat de Genève. Des démarches dans ce sens sont entreprises auprès de fondations.

6. Conclusion

La collaboration Ville-Etat-professionnels du livre est un exemple réussi de mise en commun d'idées, d'intérêts et de ressources entre les autorités et le secteur privé. Elle manifeste la reconnaissance du rôle essentiel du livre pour notre culture et notre identité. Elle marque la volonté d'élargir la pratique de l'écriture et de la lecture qui sont affaire de goût et de transmission. Elle montre, enfin, que des mesures ciblées et inventives peuvent utilement promouvoir la chose imprimée, le livre restant l'irremplaçable reflet et interprète de notre société.

Débat

M. Jean-François Courvoisier (S). Je retire l'amendement que j'ai déposé, parce qu'on ne peut pas déposer un amendement sur un rapport du Conseil d'Etat. Mais je regrette que l'édition musicale n'ait pas été abordée dans cette motion. C'est un problème que je reprendrai ultérieurement, en attendant je retire mon amendement... (Brouhaha.)

Le président. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je vous demanderai un peu de silence car on n'entend rien du tout. J'invite ceux qui, malgré l'heure ou à cause de l'heure, ont envie d'aller prendre l'apéro, à se rendre à la buvette.

Poursuivez, Monsieur le député.

M. Jean-François Courvoisier. J'ai terminé!

Une voix. On n'a rien entendu !

M. Albert Rodrik (S). Notre collègue essaie de nous dire qu'il perçoit une lacune dans le rapport, qu'il avait le souhait de déposer un amendement, ce qui ne se fait pas sur un rapport du Conseil d'Etat; mais il rend ses collègues attentifs à ce qu'il perçoit comme une lacune à propos de l'édition musicale.

Le président. Je vous remercie de ces précisions.

M. René Longet (S). Ce rapport du Conseil d'Etat fait le bilan sur l'avancement de quelques années de travaux qui ont été puissamment stimulés par le cri d'alarme des éditeurs genevois d'il y a quelques années. Je dis stimulés puisqu'une partie de ces travaux étaient déjà en route avant que les éditeurs ne s'inquiètent de leur situation. Ensuite, avec notre ancienne collègue, Mme Torracinta-Pache, nous nous sommes fait ici l'écho de cette préoccupation.

Je suis heureux de constater que le soutien du Grand Conseil et la prise de conscience qui s'est développée à plusieurs niveaux ont permis à notre canton de prendre la mesure de la situation. De même, je suis heureux de souligner qu'un certain nombre d'efforts sont en route. Je souhaite qu'ils puissent porter leurs fruits et je pense que nous savons maintenant, les uns et les autres, que l'édition est à la fois un bien précieux, un interface entre l'emploi et la culture et que nous devons y porter soin, puisque les conditions économiques font que l'édition en Suisse romande d'une manière générale est extrêmement difficile pour les éditeurs. Il s'agit donc d'un cas typique de partenariat durable entre l'Etat et le secteur privé.

Monsieur le président, je ne sais s'il est possible d'avoir un moment d'attention de Mme Brunschwig Graf sur ces questions... Excusez-moi, Madame la présidente, mais mon commentaire devrait vous faire plaisir puisqu'il est très largement positif. J'aimerais en revanche revenir à un point qui, à mon avis, est resté en souffrance. Et j'aimerais avoir votre opinion sur ce point. Il me semble qu'il y a un département, à savoir le vôtre, qui joue un rôle important dans l'édition et dans lequel je ne perçois pas encore à ce stade - mais peut-être allez-vous me dire le contraire - un concept clair par rapport à l'édition scolaire.

Quand un enseignant a une matière à traiter et c'est le cas de tous les enseignants, il y a en gros, deux possibilités. Il s'adresse au marché du livre francophone et acquiert, selon les directives ou les possibilités, du matériel qui est souvent très orienté vers la France et on sait que nos voisins et amis français ont l'habitude de voir le monde sous l'angle de la francophonie. Quand on enseigne les sciences humaines, l'histoire ou la géographie, le matériel français est très bien fait mais souffre de ce rétrécissement de perspective. Si l'enseignant n'utilise pas ce matériel, il produit le matériel lui-même dans le cadre prévu par le département. Il y a donc toute une kyrielle de brochures plus ou moins coordonnées qui servent de matériel pédagogique.

Cela étant, on se rend compte à l'évidence qu'il y a une coopération à trouver entre l'offre des éditeurs et leur capacité d'édition, à Genève et en Suisse romande, et les besoins des enseignants, et qu'il y a quelque chose à faire pour un partenariat durable entre les éditeurs et l'Etat. Il ne s'agit donc nullement de subventions mais de voir s'il y a effectivement une coopération possible au sens économique du terme, une possibilité de répondre à la fois à l'existence des éditeurs et à leur offre, ainsi qu'au besoin des enseignants d'avoir un matériel suffisamment bien présenté, à jour et adapté à notre situation en Suisse occidentale.

Je voulais vous rappeler ce dernier point qui est peut-être le plus difficile. Ce concept d'édition du département de l'instruction publique est quelque chose que nous souhaiterions encore bien comprendre. Je vous remercie de nous répondre aujourd'hui, ou une autre fois, sur ce dernier point, cela tout en vous soutenant et en vous encourageant par rapport aux démarches qui sont entreprises de concert avec la Ville de Genève pour entretenir ce bien précieux qu'est l'édition genevoise, qui se bat tous les jours pour exister.

M. Armand Lombard (L). Après tous ces discours intéressants à propos de ces motions, j'aimerais simplement rappeler une chose et m'adresser, moi aussi, au Conseil d'Etat ou à Mme Brunschwig Graf.

Le partenariat qui a été créé entre l'Etat et les éditeurs me paraît tout à fait positif et utile. Je crois qu'il serait bon et même assez ironique de la part de l'Etat de rappeler - par le biais des contrats de prestations ou sous forme de simple rappel -à ces éditeurs un des éléments dont M. Longet a parlé tout à l'heure, à savoir que pour un vendeur de livres il s'agit de vendre et que, pour ce faire, il faut trouver son marché. Or, lorsqu'on est à côté du marché de la francophonie, qui compte 80 millions de francophones, il est regrettable de voir des éditeurs genevois qui restent concentrés sur un marché de 400 000 personnes, ou de 1,2 million quand un éditeur a le courage monstrueux de franchir la Versoix et d'aller jusque dans le canton de Vaud !

Il n'existe pas encore de bases de données communes des éditeurs romands sur le public ou sur leur clientèle suisse romande. Il n'existe pas non plus de dynamique sérieuse en direction du marché français. Je pense que autant un partenariat avec l'Etat est nécessaire, autant ces partenaires doivent s'entendre sur tous les moyens à mettre en place. Il ne doit pas s'agir uniquement d'une assistance de l'Etat, mais également d'une dynamisation des potentiels qui sont entre les mains des éditeurs eux-mêmes. Et puisque personne ne le leur rappelle, puisque je suis obligé de refaire ce discours que j'avais déjà fait quand on a parlé de cette motion il y a quelques mois, et que je n'en vois pas d'écho dans le rapport, je serais heureux que l'Etat rappelle aux éditeurs que, sur le plan privé et sur celui de l'entreprise, ils peuvent aussi se développer eux-mêmes avec leurs forces à eux !

M. Bernard Lescaze (R). Ce que vient d'ajouter le préopinant me paraît très important. Je constate d'ailleurs que ce rapport est effectivement lacunaire et ne tient pas non plus compte des remarques que j'avais eu l'occasion de soulever au moment du dépôt de la motion de Mme Torracinta et de M. Longet.

Dans la chaîne de la production du livre, au départ - on l'oublie trop souvent et les éditeurs ont eux-mêmes tendance à l'oublier parfois - il y a des auteurs. Or, on ne parle ici pratiquement pas des auteurs - on signale, chose intéressante, qu'on pourrait avoir des auteurs étrangers résidant en Suisse. J'avais demandé que l'Etat et éventuellement la Ville de Genève puissent mettre à disposition des auteurs un petit appartement. J'avais rappelé que, si certains écrivent volontiers dans les cafés, d'autres préfèrent jouir du silence et qu'au vu du nombre de locaux disponibles il était possible et facile, sans grands frais pour l'Etat ou la Ville, de mettre ces locaux à disposition.

Je constate par ailleurs qu'il est bien beau de dire : «Mieux faire connaître le réseau des librairies et bibliothèques», mais qu'il y a peu encore on souhaitait faire payer l'entrée des bibliothèques et, de ce point de vue, je pense qu'il s'agit aussi d'affirmer leur gratuité.

J'aimerais encore dire que j'espère que la collaboration entre l'Etat et la Ville est efficace. Dans ce rapport, l'Etat se pare un peu des plumes du paon, dans la mesure où la Ville de Genève fait beaucoup pour l'édition, pour les auteurs - peut-être un peu moins pour la lecture publique - mais je constate que s'agissant d'autres contacts qui doivent être entrepris, notamment auprès de fondations privées, ceci est pour l'instant égal à zéro.

Je suis président d'une fondation qui s'occupe de littérature. Je constate qu'il existe des disponibilités financières destinées à distribuer des prix et à accorder des subventions à titre privé à des éditeurs, mais je constate aussi que les résolutions de la page 6 n'ont en tout cas jamais été prises puisque je n'ai jamais été contacté à ce sujet.

Il s'agit en l'état d'un catalogue de bonnes intentions, mais je pense qu'il faut mieux tenir compte de la position des auteurs car si nous voulons faire des livres et soutenir les éditeurs genevois, c'est parce que nous voulons soutenir les écrivains et la production culturelle genevoise d'abord. Et dans une seconde partie de l'action qui est entreprise et qui a été initiée par M. Longet et Mme Torracinta, il faudra davantage tenir compte de cet aspect.

Je me rallie entièrement à ce qu'a dit Armand Lombard au sujet de la nécessité pour les éditeurs de trouver un public. En effet, il ne suffit pas qu'un livre soit écrit et édité, encore faut-il qu'il soit lu pour que la chaîne soit bouclée et qu'il y ait réellement ce mystérieux passage qui fait que la pensée d'un auteur illumine le cerveau et l'esprit de son lecteur.

M. Alain Vaissade (Ve). Dans ce débat qui consiste à voir les résultats de la motion déposée par M. Longet et Mme Torracinta, je voudrais tout de même apporter quelques précisions. Monsieur Longet, on est toujours fier d'avoir déposé une motion et on imagine que c'est son dépôt qui a fait avancer le travail mais, quand je vous entends, je dois préciser que le travail entrepris en collaboration avec le département de l'instruction publique a commencé bien avant le dépôt de cette motion.

Cette motion venait en quelque sorte confirmer que le Grand Conseil avait envie d'aller dans ce sens, mais il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs et il faut rendre hommage à qui de droit : en l'occurrence, ce n'est pas le secteur privé qui a fait le travail mais le département municipal des affaires culturelles et le département de l'instruction publique.

Cela dit, M. Lescaze s'interroge sur le fait d'accueillir des écrivains. Je crois que c'est une bonne idée. Ce désir ressort du paragraphe concernant la création de résidences. Il reste à mettre des locaux à disposition et je sais que M. Moutinot, conseiller d'Etat, a énormément de locaux à disposition ! - je dis cela avec un certain humour. Il faudra trouver des solutions, de même qu'à la Ville de Genève.

Je tiens à remercier Mme la conseillère d'Etat puisque, en fin de compte, c'est la première collaboration qui aboutit à des mesures concrètes entre la Ville et l'Etat depuis sept ans, il faut le souligner ! (Rires.)

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je crois que la réponse à cette motion, le rapport qui vous est fait avait des ambitions bien modestes.

Vous nous demandiez de suivre les activités du groupe de travail ou de la commission consultative mise en place. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Par ce rapport, nous vous rendons compte d'un état et d'une photographie par rapport aux activités effectives du groupe qui a été mis en place, en l'occurrence sa commission consultative. Vous nous demandiez de veiller à la mise en oeuvre des propositions. Vous aurez constaté dans les réponses qui vous sont faites qu'un certain nombre de propositions sont déjà mises en oeuvre et que d'autres sont en voie de l'être. Enfin, vous nous demandiez d'élargir le cercle des bénéficiaires de l'aide aux jeunes créateurs à des auteurs du canton. Cela a été fait par la création des Bourses dont nous venons de remettre les premiers prix.

Ce rapport n'avait pas pour ambition de refaire l'inventaire des éditeurs et du livre à Genève mais de vous répondre très concrètement - contrairement au rapport précédent - sur des actions d'ores et déjà entreprises.

Mesdames et Messieurs les députés, je prends acte bien entendu de votre préoccupation que je partage. En effet, le marché de l'édition est aussi un marché économique dans lequel les différents acteurs doivent se comporter en conséquence et il ne peut être uniquement le fait du soutien de la Ville ou de l'Etat de Genève. Cela est évidemment sous-jacent mais ne fait pas du tout l'objet de la réponse que nous vous faisions et c'est la raison pour laquelle ne figure pas ce type d'observation.

Monsieur le député Longet, nous avons sur le plan intercantonal, avec la conférence des chefs de départements que je préside, vous le savez peut-être, une politique de plus en plus affirmée d'agir sur le plan intercantonal en ce qui concerne les moyens d'enseignement. Cela vaut pour les moyens d'enseignement d'allemand comme pour les moyens d'enseignement de mathématiques qui viennent d'être l'objet d'une stratégie commune et, à cet égard, nous avons aussi une politique concurrentielle qui vise justement à donner l'occasion à des éditeurs de pouvoir faire leurs offres et d'être opérationnels sur le marché romand pour autant qu'ils répondent aux exigences.

En revanche, nous n'avons pas la maîtrise de l'enseignement post-obligatoire et des moyens d'enseignement que les enseignants choisissent d'utiliser. A cet égard, j'aimerais dire aussi - et cela répond aux préoccupations économiques de M. Lombard - que, dans certains cas, ce qui coûte ce n'est pas simplement d'éditer, mais c'est aussi tout le travail en amont. Et il convient parfois de se demander si un livre d'enseignement de mathématique au niveau supérieur est forcément différent parce qu'il est romand plutôt que français, au sens étroit du terme. Cette réflexion est donc menée au cas par cas mais, comme vous, nous nous préoccupons de savoir s'il existe sur le marché romand, dans des domaines intéressants et à des prix corrects, des ouvrages que pous puissions acheter là plutôt qu'ailleurs. Cela dit, il est vrai qu'un marché représentant plusieurs millions de personnes est forcément capable d'offrir des prix plus intéressants dans certains domaines qu'un marché plus restreint.

Enfin, j'aimerais vous assurer que la collaboration entre la Ville de Genève et l'Etat va se poursuivre. Tout comme vous, Monsieur le député Lescaze, nous sommes sensibles au fait qu'en définitive il s'agit de se préoccuper de savoir comment on peut encourager et développer le goût d'écrire avant de savoir comment on vend les livres. Comme vous l'avez constaté, il existe des tentatives mais elles doivent être plus importantes et se manifester aussi bien à l'école que dans nos actions culturelles; nous aurons donc à nous en préoccuper encore davantage demain.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.