République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 12 juin 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 9e session - 28e séance
I 2003
M. Jean-François Courvoisier (S). Il y a quelques mois, j'ai lu dans la presse que pour faire renouveler sa carte de conducteur invalide - laquelle donne le droit de stationner sur les places réservées aux invalides et de prolonger la durée du stationnement limité dans les parkings - il ne suffisait plus d'avoir un certificat médical de son praticien habituel, mais qu'il fallait passer une visite médicale chez un médecin spécialisé, désigné par le bureau des autos.
Cette mesure est destinée à lutter contre l'abus des cartes de conducteurs invalides.
Pour m'assurer de la véracité de ce renseignement, je me suis enquis auprès de la brigade du trafic qui m'a confirmé que cette décision avait bien été prise et qu'elle entrera en vigueur dans un proche avenir.
Je suis persuadé qu'il faut lutter contre les abus de toutes sortes, mais je ne pense pas que cette mesure soit judicieuse. Nous pouvons faire confiance à tous les médecins qui pratiquent dans notre canton et je ne vois pas en quoi l'avis d'un médecin désigné par le bureau des autos serait supérieur à un autre.
Pour avoir le droit de repasser le permis de conduire après mon attaque cérébrale, je me suis rendu au service des autos, avec un certificat médical délivré par un chef de la clinique de neurologie de l'hôpital cantonal. Ce médecin avait examiné ma vue, mon ouïe, mes réflexes, la force de mon bras droit, puisque je devais conduire d'une seule main.
Au bureau des autos, on m'a dit que ce certificat ne valait rien et que je devais passer une visite chez un spécialiste du permis de conduire. A l'époque, il y en avait dix à Genève parmi lesquels je pouvais choisir. Je suis allé chez celui dont le cabinet était le plus proche de mon domicile et je suis tombé... sur un gynécologue ! Il m'a examiné la vue en me faisant lire, depuis une fenêtre, les numéros d'immatriculation des voitures qui passaient. Il a contrôlé la force de ma jambe droite pour s'assurer que je pouvais freiner d'un seul pied. Quand je lui ai demandé s'il connaissait beaucoup de modèles automobiles où il fallait freiner des deux pieds, il m'a répondu que son examen médical était sérieux et que si je me moquais de lui il refuserait de signer mon autorisation de conduire.
Comme je désirais ce document, je me suis platement excusé de ma mauvaise plaisanterie et je suis ressorti muni d'un certificat signé en bonne et due forme.
Si tous les médecins spécialisés désignés par le bureau des autos ont ce niveau de compétence, je vous laisse juger de l'utilité de cette nouvelle mesure concernant les facilités de stationnement.
Autant je comprends la nécessité d'un contrôle régulier de l'aptitude à conduire des invalides pour qu'ils ne mettent pas en danger les autres usagers de la route, autant je juge cette visite inutile.
Par contre, il serait utile de demander au médecin signataire des certificats en vue de l'obtention des cartes de conducteurs invalides d'indiquer la durée présumée de l'invalidité. Certains sont provisoirement invalides à la suite d'une opération ou d'un accident. D'autres, comme moi ou comme les personnes atteintes de sclérose en plaques et dont la santé va se détériorant au fil des années, devraient pouvoir bénéficier d'une carte facilitant définitivement le stationnement sans même qu'ils aient à la demander.
Il serait possible aussi de demander à la police d'effectuer quelques contrôles pour s'assurer que l'automobiliste muni d'une carte de conducteur invalide en est bien le titulaire.
De grâce, Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, renoncez à cette nouvelle mesure administrative, contraignante, onéreuse et superflue ! Je vous remercie de l'attention que vous voudrez bien porter à mon interpellation.
Le Le président. Vu l'absence du conseiller d'Etat Gérard Ramseyer, il sera répondu cette interpellation lors d'une prochaine session.