République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 mai 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 9e session - 23e séance
M 1188
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- la nécessité de procéder à la rénovation des ouvrages de génie civil, notamment des ponts situés sur le réseau des routes cantonales ;
- les dégâts inquiétants provoqués par la carbonatation et la chloration sur un nombre considérable d'ouvrages ;
- l'obligation de la mise en conformité aux nouvelles normes de certains ouvrages ;
- la préoccupation engendrée par les coûts très importants de ces rénovations ;
invite le Conseil d'Etat
- à établir une évaluation des coûts inhérents aux dégâts constatés sur les ouvrages de génie civil ;
- à établir une chronologie de réfection de ces ouvrages avec les coûts correspondants sur une période minimum de 10 ans.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Les projets de loi 7819 et 7820 demandant l'ouverture au conseil d'Etat des crédits extraordinaires d'investissement de 6,18 et 7,5 millions. pour effectuer des travaux de gros entretien, de protection contre le bruit et de renforcement des structures, nous interpellent par l'importance des montants sollicités. Il y a fort à craindre qu'il ne s'agit là que de la pointe de l'iceberg. En effet les dégâts provoqués par le phénomène maintenant bien connu de la carbonatation, ainsi que ceux provoqués par la chloration vont inévitablement obliger d'entreprendre des travaux de réfection extrêmement coûteux sur nombre d'ouvrages du réseau routier cantonal. En outre pour certains d'entre eux, s'ajoute encore l'obligation de se conformer aux nouvelles normes de charges et de dimensionnement. Ceci en particulier pour les ouvrages situés sur les itinéraires d'approvisionnement, devant permettre le passage de convois exceptionnels.
Il est primordial d'établir un catalogue d'évaluation des coûts de réfection pour pouvoir apprécier à sa juste valeur l'ampleur des travaux à entreprendre à court et à moyen terme. Nous vous rappelons que l'état catastrophique de nos finances cantonales ont obligé le plafonnement des investissements annuels à 250 millions. Dans l'hypothèse où il faudrait rénover un grand nombre d'ouvrages dans un laps de temps très court, on ne pourrait alors plus investir dans d'autres secteurs de la construction.
Au vu de ce qui précède nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous accueillerez favorablement cette motion.
Débat
M. Walter Spinucci (R). Le dépôt de cette motion est la suite logique du débat qui vient d'avoir lieu. Il est motivé par l'importance que revêt, à nos yeux, la problématique de la réfection et de la mise aux normes des ouvrages de génie civil tels que les ponts situés sur le territoire genevois.
Je citerai deux chiffres pour illustrer mon propos : il existe sur notre territoire environ 580 ponts, soit 290 sur le domaine cantonal et 290 sur les domaines communaux et fédéral. La commission parlementaire des travaux a été saisie et a examiné deux projets de loi devant ouvrir deux crédits de respectivement de 7,5 et 6,18 millions, qui viennent d'être votés. C'est dire que le montant total qui devra être consacré à ces ouvrages ces prochaines années est extrêmement important et absorbera une grande part du budget cantonal des grands travaux.
Une planification chiffrée est dès lors indispensable. Sachant par ailleurs que nombre de ces ouvrages appartiennent aux communes, il est indispensable qu'elles connaissent bien à l'avance les engagements à considérer et à introduire dans leur planification des grands travaux. C'est pour ces raisons que nous vous invitons à accepter cette motion et à la renvoyer à la commission des travaux.
M. Christian Grobet (AdG). Nous nous félicitons du dépôt de cette motion par les députés de la fraction radicale. M. Spinucci a fort bien développé les raisons qui justifient l'adoption de cette motion...
M. Daniel Ducommun. Mais, mais...
M. Christian Grobet. Rassurez-vous, il n'y a pas de mais restrictif ! Nous ne voudrions pas toutefois que cette motion, qui insiste essentiellement sur les ponts, soit interprétée d'une manière restrictive et qu'on exclue les routes des ouvrages de génie civil. Je sais notamment que certaines routes, comme la route de Chêne, qui a une infrastructure en béton relativement ancienne, doit être entièrement refaite entre Grange-Canal et Chêne-Bougeries. Ces travaux n'ont pas pu être engagés en son temps en raison des priorités d'investissements concernant l'autoroute de contournement. De même, il y a peut-être d'autres routes dont l'infrastructure a été atteinte. Nous suggérons donc de compléter la première invite de la motion ainsi : «à établir une évaluation des coûts inhérents aux dégâts constatés sur les ouvrages de génie civil, y compris les routes». Nous savons notamment que, dans le cas de la route de Chêne, une dépense très importante est en cause et doit être programmée pour les mêmes raisons rappelées par M. Spinucci précédemment.
J'aimerais encore faire deux observations. Premièrement : il est clair qu'il est absolument essentiel de faire rapidement des travaux de remise en état de ces ouvrages; plus on attend, plus cela coûte cher. Deuxièmement : il s'agit de travaux qui prennent peu de temps à adjuger par rapport à des projets nouveaux qui sont controversés. Or, au moment où l'on parle de relance dans le domaine du génie civil, le moyen de relance le plus approprié consiste précisément à faire des travaux de réfection indispensables.
En outre, l'Alliance de gauche aimerait adresser une demande formelle au Conseil d'Etat, à savoir de surseoir maintenant à des projets routiers nouveaux et coûteux tant que nous ne connaissons pas le résultat de cette motion, compte tenu du nombre d'ouvrages en cause, comme l'a rappelé M. Spinucci, qui n'a d'ailleurs donné que la liste des ponts sans faire allusion au problème des routes. En dix ans, les coûts seront considérables. Il ne sera pas possible d'engager à la fois des travaux de remise en état de notre réseau routier et des travaux routiers coûteux en plus du réseau des transports publics. Pour être à même de se prononcer en toute connaissance de cause sur des projets routiers nouveaux et coûteux, il est indispensable de connaître au préalable le coût de la remise en état de notre réseau routier. C'est absolument prioritaire par rapport aux désirs de telle ou telle commune de faire financer par les contribuables du canton des ouvrages routiers nouveaux dont l'utilité n'est absolument pas démontrée.
M. Alberto Velasco (S). Bien qu'étant d'accord avec la proposition qui est faite, le groupe socialiste considère que, dans le cadre de cette évaluation, il conviendrait également de se pencher sur les moyens préventifs à mettre en place dans le but d'éviter ce type de détérioration, en l'occurrence la carbonatation. Le Conseil d'Etat devrait aussi examiner l'opportunité de créer un fonds permettant de financer ces travaux. Je rappelle à ce sujet le débat que nous avons eu précédemment. Ce fonds pourrait être alimenté par un impôt sur les voitures, par exemple.
M. Chaïm Nissim (Ve). Notre groupe trouve lui aussi cette motion très opportune, comme nous l'avons remarqué précédemment au cours du débat. J'aimerais toutefois nuancer quelque peu le discours de M. Spinucci, qui estimait que l'argent devait être pris sur le budget des grands travaux qui est en fait le budget des investissements. Je pense, pour ma part, que les sommes à consacrer à l'entretien de notre réseau routier - surtout si nous y ajoutons encore certaines routes, comme vient de le dire M. Grobet, mais même en ne considérant que la réfection des ponts - couleraient définitivement notre budget des investissements pour plusieurs années. La seule solution serait donc d'appliquer le principe du pollueur payeur et d'augmenter l'impôt auto.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Après tout le bien qui a été dit de cette motion, je ferai de même. Je pense qu'il est effectivement nécessaire de disposer d'un inventaire des travaux à effectuer en matière de génie civil. A ce titre, M. Grobet a raison car il s'agit non seulement des ponts mais de l'ensemble du réseau. Il nous faudrait également une estimation des coûts qui nous permettrait ensuite de discuter du programme des travaux, de leur financement et de leur priorité, compte tenu des limites des finances publiques à l'heure actuelle. J'ose espérer pouvoir revenir rapidement devant vous avec le rapport du Conseil d'Etat sur cette motion car, son acceptation ne faisant aucun doute, j'ai d'ores et déjà demandé à la direction du génie civil de s'atteler à cette question.
Le président. Je mets aux voix la proposition d'amendement déposée par M. Grobet, qui consiste à ajouter, à la fin de la première invite:
«y compris les routes».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mise aux voix, la motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion
(1188)
demandant une évaluation des coûts de restauration et de mise aux normes des ouvrages de génie civil situés sur le territoire genevois
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- la nécessité de procéder à la rénovation des ouvrages de génie civil, notamment des ponts situés sur le réseau des routes cantonales ;
- les dégâts inquiétants provoqués par la carbonatation et la chloration sur un nombre considérable d'ouvrages ;
- l'obligation de la mise en conformité aux nouvelles normes de certains ouvrages ;
- la préoccupation engendrée par les coûts très importants de ces rénovations ;
invite le Conseil d'Etat
- à établir une évaluation des coûts inhérents aux dégâts constatés sur les ouvrages de génie civil, y compris les routes ;
- à établir une chronologie de réfection de ces ouvrages avec les coûts correspondants sur une période minimum de 10 ans.