République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 mai 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 9e session - 22e séance
I 1996
M. Walter Spinucci (R). Les Téléréseaux genevois se sont associés au sein de l'Artemo - Association régionale pour des télécommunications modernes. L'Association des communes genevoises en est aussi membre.
L'Artemo s'est préoccupée, à juste titre, de l'avenir des Téléréseaux genevois dès l'annonce, par le Conseil d'Etat, de la constitution d'un groupe de travail chargé d'évaluer l'opportunité de la création d'un réseau à large bande pour le canton de Genève.
M. le conseiller d'Etat Guy-Olivier Segond à titre individuel - confère la «Feuille d'avis officielle» du 10 novembre 1997 - et M. le président du Conseil d'Etat Gérard Ramseyer, lors du discours de Saint-Pierre du 8 décembre 1997, ont confirmé la volonté du gouvernement genevois de réaliser le programme connu aujourd'hui sous le nom de «Smart Geneva».
La préoccupation légitime des Téléréseaux genevois peut se résumer ainsi : «Quel avenir réserve «Smart Geneva» aux Téléréseaux ?».
En date du 13 novembre 1996, s'exprimant au nom du Conseil d'Etat, M. Guy-Olivier Segond informait l'Artemo de son accord de l'associer au débat devant précéder la mise en oeuvre du programme «Smart Geneva».
Après les investissements consentis pour l'établissement de leurs réseaux et une première étape de modernisation, les Téléréseaux désirent poursuivre cette modernisation dont les coûts sont extrêmement élevés, et ce pour faire face à la concurrence des paraboles notamment.
L'opportunité de ces nouveaux investissements est dépendante de la décision du Conseil d'Etat d'associer les Téléréseaux à l'étude, à la réalisation et à l'exploitation du programme «Smart Geneva».
Au nom et en ma qualité de président de l'Artemo, je prie le Conseil d'Etat :
- de communiquer le programme relatif à l'étude et à la réalisation de «Smart Geneva»;
- de préciser le rôle réservé aux Téléréseaux dans ledit programme.
Je remercie le Conseil d'Etat des précisions qu'il voudra bien nous fournir.
M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. L'interpellation de M. le député Spinucci, président de l'Association genevoise des téléréseaux, annoncée et inscrite à l'ordre du jour depuis le mois de janvier - c'est la première fois que l'on traite un de mes points depuis le début de l'année ! - permet au Conseil d'Etat de vous informer de l'état d'avancement du projet «Smart Geneva».
Le Conseil d'Etat est convaincu que les emplois, les activités, les richesses du XXIe siècle dépendront, en bonne partie, des technologies de l'information et de la communication qui investissent tous les domaines de l'activité humaine.
Entendant que Genève entre de plain-pied dans le XXIe siècle et dans la société de l'information, le Conseil d'Etat a lancé, à la fin de la précédente législature, le projet «Smart Geneva» qui doit doter Genève et tous ses habitants d'un véritable réseau d'autoroutes de l'information.
Techniquement, «Smart Geneva» n'a rien de romantique: c'est un réseau numérique à intégration de services, à large bande passante et haut débit, termes que l'ingénieur Spinucci saisira immédiatement. Ce réseau est destiné aux utilisateurs professionnels, c'est-à-dire les entreprises, de même qu'aux utilisateurs résidentiels - foyers, logements. C'est là son originalité.
La réalisation de «Smart Geneva» est conduite sur la base de l'expérience acquise avec «Geneva Man», un prototype imaginé, étudié et réalisé par l'OMS et par l'UIT, en collaboration avec Swisscom, lequel a permis à plusieurs institutions internationales et genevoises d'échanger des images, des sons, des textes, à la vitesse de 68 millions de caractères/seconde, une vitesse sans aucune mesure avec le débit limité de quelques milliers de caractères/seconde des réseaux actuels.
Une partie de «Smart Geneva» existe déjà sous la forme des réseaux primaires en fibres optiques - c'est-à-dire de la tête de réseau au quartier - qui, pour l'essentiel, appartiennent à Swisscom pour les réseaux à l'usage public et aux Services industriels pour leur propre entreprise.
Le programme «Smart Geneva» consiste à amener en cinq ans la fibre optique dans les réseaux secondaires, c'est-à-dire du quartier à l'immeuble, et dans les réseaux tertiaires, c'est-à-dire de l'immeuble à l'appartement. Aujourd'hui, ce travail est effectué en partie par Swisscom, pour les utilisateurs professionnels et en fonction de leurs besoins. Ce travail doit encore être fait pour les utilisateurs résidentiels, soit pour Monsieur et Madame Tout-le-Monde, dans leur appartement ou dans leur villa.
Le coût maximum de «Smart Geneva» est estimé à 300 millions pour le réseau secondaire (du quartier à l'immeuble) et à 200 millions pour le réseau tertiaire (de l'immeuble à l'appartement). Ces coûts sont importants, même si les progrès technologiques font qu'ils diminueront constamment. Ils s'élèveront toujours à quelques centaines de millions.
Ils devront être supportés, pour l'essentiel, par des investisseurs privés, conformément à la lettre et à l'esprit de la libéralisation des télécommunications en Europe et dans notre pays.
Pour procéder à un investissement aussi important, les investisseurs ont besoin d'un cadre juridique clair, sûr et stable, définissant les règles du jeu. Ce cadre juridique existe dans notre pays depuis le 1er janvier 1998, date de l'entrée en vigueur de la nouvelle législation fédérale sur les télécommunications. Les premiers recours, principalement des concurrents de Swisscom, et les premières décisions de l'autorité fédérale permettent de connaître les détails d'application de ces textes légaux et réglementaires.
Que manque-t-il pour prendre les décisions nécessaires ? La connaissance exacte des différents acteurs intéressés et des liens existant entre eux. Swisscom est évidemment un acteur connu. Ses concurrents le sont plus ou moins, mais le rôle d'autres acteurs genevois est en train d'évoluer. Par exemple, les Services industriels de Genève, actionnaires de diAX, qui vient d'être désigné comme opérateur du deuxième réseau de téléphonie mobile, pourraient prochainement étendre leurs activités au domaine des télécommunications : vous serez prochainement saisis d'un projet de loi du Conseil d'Etat qui consacre cette évolution de l'activité des Services industriels.
En outre, le rôle des téléréseaux et les liens qu'ils ont entre eux et d'autres acteurs possibles doivent être attentivement examinés. Actuellement, ces liens sont fluctuants. La plupart des téléréseaux ont, dans leur actionnariat, la société Coditel et, par son intermédiaire, des liens avec Rediffusion, Cablecom et Swisscom.
Afin d'éviter un verrouillage du marché, le Conseil d'Etat lancera un appel d'offres, conformément aux règles de l'OMC, pour la réalisation de «Smart Geneva», en laissant la concurrence s'établir, conformément au nouveau droit fédéral, entre les différents opérateurs - Téléréseaux, Services industriels, Swisscom et ses concurrents.
Dans ce cadre, les Téléréseaux pourront présenter leurs propres offres ou des offres communes en s'alliant à d'autres acteurs de leur choix.
Dès que nous saurons qui est qui dans ce bal masqué des acteurs des télécommunications, le Conseil d'Etat vous présentera un rapport d'orientation faisant le point sur la procédure, la réalisation et les modalités d'intervention, notamment financières, de l'Etat de Genève qui, pour des raisons évidentes liées à sa situation budgétaire, doivent demeurer limitées.
M. Walter Spinucci (R), conseiller d'Etat. Je remercie M. le conseiller d'Etat Guy-Olivier Segond de sa réponse.
Cette interpellation est close.
Le président. Nous arrêtons ici nos travaux. Nous les reprendrons à 14 h, au point 38 de notre ordre du jour.
La séance est levée à 12 h 5.