République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 20 février 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 5e session - 7e séance
PL 7810
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites, du 4 juin 1976, est modifiée comme suit :
Art. 56, al. 4 (nouveau)
4 En dérogation à l'article 17 de la loi pénale genevoise, la poursuite des contraventions mentionnées à l'alinéa 1 se prescrit par 5 ans. Les articles 71 et 72 du code pénal suisse, du 21 décembre 1937, sont applicables par analogie, la prescription absolue étant de 7 ans et demi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le règlement sur la protection des arbres, du 28 décembre 1976, a pour base légale la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites, du 4 juin 1976 (ci-après LPMNS).
Les infractions à ce règlement sont ainsi réprimées conformément à l'article 56 de la LPMNS, disposition qui ne comporte aucune précision relative à la prescription.
C'est donc le code pénal suisse, auquel renvoie la loi pénale genevoise, du 20 septembre 1941, applicable en la matière selon l'article 37, chiffre 47, qui s'applique.
L'article 109 du code pénal suisse et l'article 17 de la loi pénale genevoise prévoient un délai de prescription de l'action pénale d'un an.
Le Tribunal fédéral a eu l'occasion d'examiner ces problèmes de prescription, en relation avec la loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, notamment dans un arrêt de 1991. Il a relevé que seule une base légale expresse peut imposer à l'administré un délai plus long que celui d'une année, et a admis que les dispositions générales du code pénal ne tenaient pas suffisamment compte des besoins spécifiques du droit pénal administratif. Les considérations de cet arrêt s'appliquent également aux problèmes des arbres. Il sied en effet de souligner que les infractions au règlement sur la protection des arbres ne sont parfois découvertes que bien après leur réalisation - un contrôle permanent et systématique de l'ensemble de la végétation du canton n'étant pas envisageable - et, une fois l'infraction constatée, il faut encore instruire le dossier afin de déterminer les responsabilités et infliger des amendes.
Ces dernières étant souvent contestées par des recours, d'abord devant la Commission de recours en matière de construction, puis, devant le Tribunal administratif, il arrive que la prescription soit atteinte en cours de procédure avant que ce tribunal ait tranché.
Dans deux arrêts récents, le Tribunal administratif, tout en déboutant l'administration uniquement pour un problème de prescription, a rappelé que si cette dernière est interrompue par tout acte d'instruction d'une autorité chargée de la poursuite et si à chaque fois, un nouveau délai recommence à courir, "; la poursuite est en tout état prescrite à l'expiration d'un délai du double de la durée normale en ce qui concerne les contraventions, soit 2 ans " (ATA du 18 février 1997 et du 22 avril 1997).
Le Tribunal administratif a ajouté que la LPMNS, base légale de la sanction litigieuse, ne contient pas de disposition prévoyant un délai de prescription plus long que celui prévu par le code pénal.
Il s'impose dès lors d'introduire un nouvel alinéa à l'article 56 LPMNS prévoyant des délais respectifs de 5 ans pour la poursuite des infractions et de 7 ans et demi de prescription absolue, délais s'inspirant de ceux prévus, par exemple, dans la loi sur la profession d'avocat, du 15 mars 1985, ou la loi sur le notariat, du 25 novembre 1988, et qui peuvent s'appliquer à la problématique de la protection de la végétation.
En effet, seuls des termes relativement longs sont de nature à permettre une protection efficace de la végétation de notre canton, déjà fortement urbanisé.
Tels sont, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous vous remercions d'accueillir favorablement le présent projet de loi.
Préconsultation
M. Bernard Lescaze (R). En préambule et sans déposer de motion d'ordre, je regrette que l'on essaie de nous faire avancer dans l'ordre du jour à marche forcée, alors que des pauses bien prévues permettraient une évolution plus sereine.
Hier soir, Monsieur le président, il a fallu grandement insister pour qu'enfin vous acceptiez de différer et qu'à la demande des chefs de groupe vous vouliez bien terminer la séance à 23 h; décision qui, à mon sens, a satisfait la plupart des députés de ce Grand Conseil. Il est regrettable de commencer à traiter les points concernant le département de l'aménagement à 19 h 15, alors que, visiblement, nous ne pourrons nous occuper que d'un ou deux objets. Il eût été préférable d'accomplir ce travail après la pause, mais, puisque vous n'avez pas jugé bon de le faire, je vais développer ma petite intervention... (Protestations.) M. le président souhaite que nous continuions l'ordre du jour, je lui obéis !
Une voix. On vote !
M. Bernard Lescaze. Que dois-je faire, Monsieur le président ?
Le président. Poursuivez, Monsieur le député ! Nous sommes en débat de préconsultation. Un orateur par groupe s'exprime, dont l'intervention ne doit pas excéder cinq minutes.
M. Bernard Lescaze. Le groupe radical renverra ce projet de loi en commission... (Applaudissements.) Il s'étonne...(Applaudissements.)
Le président. Monsieur Lescaze, je vous prie de poursuivre et de ne pas nous faire perdre de temps, vous qui, justement, semblez attacher tant d'importance au temps ! (Rires et applaudissements.)
M. Bernard Lescaze. Je ne suis pas sûr que votre ironie ne s'applique pas plutôt à vous, car pour l'instant il me semble que c'est vous qui nous faites perdre notre temps !
Des voix. Bravo !
M. Bernard Lescaze. Malgré tout, ce projet de loi soulève un double problème. D'une part, l'allongement de la durée de prescription. Que l'on ne me prête pas ici des sentiments que je n'éprouve pas ! En effet, je n'ai aucune indulgence pour ceux qui coupent les arbres en infraction à la loi. Néanmoins, le choix d'allonger la durée de prescription de un an à cinq an ne me paraît pas être judicieux.
Sans doute, le chef du département justifiera-t-il sa décision en commission, mais, pour ma part, j'estime qu'on offre un oreiller de paresse à la justice genevoise qui n'a que trop tendance, dans de nombreux domaines, à prendre un train de sénateur. Malgré tout, les tronçonneuses font du bruit - au propre et au figuré - et je suis étonné que le délai de dénonciation concernant certaines infractions soit si long et que la durée de prescription soit aussi importante pour parvenir à punir, enfin, les éventuels coupables.
D'autre part, je m'étonne que le Conseil d'Etat juge nécessaire de modifier la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites sur ce seul point, alors qu'il y en aurait bien d'autres. D'ailleurs, notre collègue Hiler l'a fait sur un autre point. Bien d'autres questions mériteraient d'être examinées en détail, puisque, à l'évidence, le conseiller d'Etat se laisse diriger par d'autres. En plus, il n'écoute absolument pas ce que je raconte, puisqu'il est en conversation avec M. Grobet. C'est dire combien il aurait mieux valu interrompre ce débat...
Une voix. Bravo !
Le président. Monsieur le député, je vais être obligé de vous interrompre bientôt, car votre temps de parole est presque terminé !
M. Bernard Lescaze. M. Moutinot n'écoute donc pas ! Mais, au lieu de simplement suivre les avis de son département ou de son chef de service, il aurait pu proposer d'autres modifications plus utiles et plus urgentes à la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites. Comme il ne le fait pas, nous nous en chargerons.
M. Pierre Vanek (AdG). Je renonce, Monsieur le président. Je voulais - emporté par l'éloquence de M. Lescaze - proposer la motion d'ordre qu'il n'a pas proposée consistant à interrompre les débats sur ce point. Mais, dans la mesure où ils sont commencés, autant les terminer.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Monsieur Lescaze, j'apprécie beaucoup vos interventions, même lorsque vous vous en prenez à moi. Dans ce cas - mais vous ne pouviez pas le savoir - il était prévu que Robert Cramer vous réponde. Comme il n'est plus là et que vous m'avez mis en cause, je réponds que le Conseil d'Etat, en ce qui concerne ces questions de prescription, préfère avoir une durée de prescription assez longue, non pas pour punir les gens longtemps après que leurs actes ont été commis, mais afin que les punitions administratives soient effectives et que, compte tenu des recours, certains ne puissent y échapper. Si l'on n'entre pas dans cette logique, il faudrait alors recourir à des mesures plus dures, d'ordre pénal, et je ne suis pas certain que vous le souhaitiez.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
Le président. Désirez-vous que nous traitions le point 33, projet de loi 7815, avant la pause ? Bien, je mets aux voix la proposition de traiter le point 33 avant la pause.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.