République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 22 janvier 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 4e session - 2e séance
M 1105-A-I
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La motion 1105, déposée le 20 novembre 1996, a été traitée les 22 mai, 28 août et 4 septembre 1997 par la commission judiciaire présidée parM. Michel Halpérin.
Les travaux se sont déroulés en présence de M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat, et de M. Nicolas Bolle, secrétaire adjoint au département de justice et police et des transports.
Introduction
Il est nécessaire de rappeler dans quel contexte cette motion a été déposée.
En automne 1996, une manifestation paysanne à Berne avait été contenue par la police au moyen, entre autres, de l'arrosage des manifestants avec de l'eau mélangée à un produit irritant. Certaines personnes, qui avaient conservé toute la journée leurs vêtements mouillés, avaient subi de très graves brûlures et en garderont toute leur vie des séquelles.
Les motionnaires ont alors demandé que les produits chimiques soient supprimés des canons à eau à Genève.
La commission judiciaire, après avoir écouté les auteurs de la motion, a souhaité auditionner le commandant de la gendarmerie, puis a reçu deux représentants de l'Union du personnel du corps de police du canton de Genève qui avaient demandé à être entendus.
Auditions
Audition de M. Guy Baer, commandant de la gendarmerie
M. Baer confirme que la gendarmerie genevoise utilise aussi des gaz sous forme liquide dans ses canons à eau et dans ses lance-eau portatifs.
Les conditions de mise en oeuvre de ces moyens de contrainte sont codifiées, et on apprend qu'il existe une véritable «science des barrages». La police genevoise applique les principes d'opportunité et de proportionnalité. Elle professe qu'il faut savoir «attendre, subir puis sommer» avant d'entrer en action contre les manifestants. Car, lorsqu'un barrage cède, les policiers se trouvent alors en contact direct avec les manifestants, et ce corps à corps peut occasionner de graves lésions aux uns comme aux autres. Il est donc essentiel de parvenir à l'éviter.
Pour maintenir les manifestants à distance, la police est parfois contrainte d'utiliser les canons à eau. Rappelons qu'à Genève les balles en caoutchouc ne sont pas utilisées.
Dans le canton de Genève, les manifestations sont un moyen d'expression reconnu, et il y en a environ 120 par an. Une vingtaine d'entre elles seulement donnent lieu à des craintes de débordements violents.
Ce sont celles-là que la police essaie de cadrer en mettant en place des tonnes-pompes et des lance-eau portatifs. Avant tout usage d'un moyen de contrainte, comme la matraque, ou les gaz liquides, la police est tenuede procéder à une sommation par mégaphone. Ensuite elle tente de limiter de l'usage de la force contre les responsables de troubles.
Pour ce qui est de l'eau mêlée de produits chimiques, elle n'est jamais directement giclée sur les manifestants, mais au-dessus d'eux, en arrosage, ou vers le sol, pour les faire reculer.
Les policiers utilisateurs des canons à eau et des lance-eau sont spécialement formés et régulièrement entraînés.
La nature de la manifestation (violente ou non), la présence de femmes, d'enfants ou non, déterminent donc l'usage des moyens de tenir à distance les manifestants. L'utilisation des gaz lacrymogènes mêlés à l'eau évite donc l'usage de la matraque dans des contacts directs.
Lors du défilé militaire de novembre 1995, le mélangeur de produit chimique est tombé en panne. Il ne sortait que de l'eau de la tonne-pompe. C'est ce qui, selon le commandant Baer, a provoqué les violences qui se sont déroulées pendant une heure, car les manifestants n'ont pas pu être tenus à distance des forces de police.
Finalement, l'usage des divers moyens de contrainte est tributaire des circonstances et dépend de la bonne évaluation de la situation par les responsables de la police.
M. Baer précise que, dans certains Länder allemands, la police n'utilise que de l'eau dans ses canons à eau. Mais elle la gicle sous forte pression directement sur les manifestants, ce qui leur inflige des blessures quelquefois graves, ou qui provoque leur chute, et entraîne aussi des lésions qui peuvent être graves.
Le sentiment de M. Baer est que, si le mélange eau-gaz était interdit, il faudrait se rabattre sur le gaz lacrymogène seul, ou les balles en caoutchouc, ce qu'il voudrait éviter.
Audition de l'Union du personnel du corps de police du canton de Genève (UPCP), représentée par MM. Roger Golay, président, et Pierre-Alain Laurent, vice-président
M. Golay exprime ses craintes de voir supprimer le mélange eau-gaz dans l'arsenal des moyens à disposition de la police lors des manifestations. En effet, il considère que ce mélange, qui est assez rarement utilisé (environ à 5 reprises depuis 10 ans), est un moyen préventif extrêmement efficace. Il permet d'éviter les corps à corps, toujours dangereux, et pour les manifestants et pour les policiers.
Il indique d'ailleurs que la police genevoise ne dirige jamais les jets du canon à eau directement contre les manifestants, comme cela s'est fait à Berne, ainsi que l'attestent les images vues à la télévision.
Les policiers spécialisés dans les moyens chimiques (M. Golay en fait partie) sont dûment et régulièrement entraînés et connaissent les proportions eau/gaz à respecter. Ils possèdent d'ailleurs des instructions, dont un exemplaire se trouve en annexe.
La police, quand elle se voit forcée d'utiliser les canons à eau, en fait d'abord un usage défensif, en dirigeant le jet vers le sol. Le jet offensif, toujours au-dessus de la foule, s'effectue ensuite, si nécessaire. Il est précisé que la proportion de gaz est plus forte dans les lance-eau portatifs que dans la tonne-pompe.
M. Golay ajoute enfin que des manifestations qui promettaient d'être violentes, donc dangereuses, ont été maîtrisées grâce à l'usage des produits chimiques sans que jamais il n'y ait eu de plaintes pour lésions corporelles.
La mise en oeuvre des lance-eau se fait sur ordre d'un officier de police, après appréciation soigneuse de la situation.
M. Laurent ajoute que le mélange eau-gaz constitue un moyen de disperser la foule, mais n'est pas une arme. Il ne voit pas quelle méthode de remplacement on pourrait appliquer pour éviter les corps à corps. C'est en tout cas une excellente façon de protéger la police lors de manifestations violentes. Le jet d'eau pure n'aurait pas du tout le même effet dissuasif. Car le gaz se diffuse partout, tandis que l'on peut facilement éviter un jet d'eau en se réfugiant derrière un obstacle quelconque. De plus, pour obtenir des jets d'eau assez violents pour éloigner les manifestants, il faut une forte pression qui ne peut être obtenue que par des machines lourdes. Or, les manifestations ont souvent lieu dans des espaces restreints qui ne permettent que l'usage des lance-eau portatifs.
M. Golay précise que les personnes qui participent régulièrement à des manifestations connaissent très bien les effets des produits chimiques mélangés à l'eau et s'éloignent avant que la police ne commence à gicler. Par ailleurs, il pense qu'on ne pourrait pas diminuer les proportions de gaz dans l'eau sans diminuer aussi l'effet dissuasif des lance-eau. Du reste,3 sommations sont faites par mégaphone avant la mise en oeuvre des moyens chimiques. Chacun a donc l'opportunité de s'éloigner.
Selon M. Golay, la police, dans ses interventions, respecte la propor-tionnalité des moyens mis en oeuvre, et elle agit graduellement.
Discussions de la commission
Plusieurs membres de la commission judiciaire sont des familiers des manifestations de rue et connaissent par expérience personnelle les effets du mélange eau-gaz sur les participants. Un des députés a même subi des brûlures à la suite de la manifestation paysanne de 1996 à Berne.
Rappelons d'abord que le but de l'usage du mélange eau-gaz est de maintenir à distance des forces de l'ordre les manifestants violents et de les disperser afin d'éviter les affrontements directs.
Il a donc bien fallu considérer que deux sortes d'intérêts, par forcément opposés, d'ailleurs, étaient en présence: l'intérêt des manifestants à exercer leur droit de manifester sans récolter de blessures, et l'intérêt des policiers à assurer leur propre sécurité physique tout en protégeant les personnes et les biens menacés, comme ils en ont le devoir. Car si les policiers disposent de matraques et de lance-eau, les manifestants sont parfois armés de pierres, barres à mine ou cocktails Molotov. Dans ces conditions, il faut absolument éviter les corps à corps, qui entraîneront fatalement des lésions gravissimes, dans les deux camps du reste.
Quelques solutions ont été proposées.
D'abord, l'instauration d'un moratoire de deux ans, pendant lesquels la police n'aurait pas fait usage de produits chimiques irritants mélangés à l'eau des canons à eau.
Ensuite, la diminution de la proportion de produits chimiques dans l'eau.
Enfin, l'établissement d'une réglementation très précise quant à l'usage des gaz liquides, l'opportunité et le moment de leur mise en action et la façon de les employer. Certains députés proposaient que les produits chimiques ne soient mis en oeuvre qu'après les premiers actes de violence des manifestants.
Moratoire: si l'on considère que le but de l'utilisation de gaz lacrymogènes mélangés à de l'eau lors de certaines manifestations est de maintenir les éléments violents à distance pour éviter les corps à corps dangereux, on est obligé de constater que l'instauration d'un moratoire à l'usage des gaz empêcherait ce but d'être atteint. Les manifestants agressifs simplement arrosés d'eau pure en viendraient vite aux mains avec les policiers.
Pour les mêmes raisons, la diminution du dosage des produits chimiques n'a pas été retenue.
La proposition de proscrire l'usage des produits chimiques dilués dans l'eau pendant deux ans (moratoire) a été repoussée par 6 voix (2 DC, 3 L,1 R) contre 4 (3 AG, 1 Ve) et 2 abstentions (S).
Par contre, la commission, soucieuse de préserver l'intégrité physique des policiers et des manifestants, a souhaité que les directives du corps de police quant à l'usage des moyens lacrymogènes liquides (en annexe) soient complétées et précisées de la façon suivante:
Sous le no 1 - Principes, il faudrait ajouter à l'opportunité et la proportionnalité, la gradation.
A la page 4, 2e paragraphe «... avec des produits lacrymogènes. A la suite de l'usage de ces moyens, des informations devraient être données par mégaphone concernant les précautions à prendre en cas de contact avec les gaz liquides.»
Les commissaires estiment qu'il ne faut pas attendre les premiers actes de violence pour utiliser le mélange eau-gaz, destiné justement à prévenir les violences.
Rappelons qu'il n'y a, à la disposition de la police genevoise, pas de moyens alternatifs aux produits chimiques. Si on retire à la police son seul moyen de dissuasion à distance, on ne pourra éviter les corps à corps. Simplement, la commission veut être sûre que le mélange eau-gaz ne sera utilisé qu'en cas d'extrême nécessité.
Finalement, la majorité de la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter la motion 1105 par 6 voix (3 L, 2 DC, 1 R) contre 4 (3 AG, 1 V) et 2 abstentions (S).
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Cette proposition de motion, refusée du bout des lèvres par une majorité de circonstance de la commission judiciaire, a eu un mérite certain. Elle a permis de débattre de la proportionnalité des moyens d'intervention utilisés lors des manifestations de rue à Genève.
Alors qu'au départ, en préconsultation, on pouvait imaginer un débat léger, il fut au contraire de haute tenue et toutes les questions ont pu être posées. Est-ce cela qui a incité les groupes signataires (R, S et PDC) à rejeter finalement la motion? Ou l'absence, lors du vote, des députés les plus concernés? La question reste en suspens .
Cette motion, autant le reconnaître d'emblée, a été déposée à la suite de l'indignation ressentie lors des événements survenus à Berne à l'occasion de la manifestation des paysans, corroborée par les déclarations de l'un des manifestants, par ailleurs conseiller national et député, j'ai nommé M. John Dupraz.
S'il est vrai que l'attitude de la police genevoise ne peut être comparée à celle de la police bernoise, la violente répression lors de la manifestation contre le défilé militaire est encore dans toutes les mémoires. Et comme dit l'adage: «Mieux vaut prévenir que guérir».
Comme on l'a entendu lors des auditions - sur lesquelles je ne reviendrai pas, leur contenu étant développé dans le rapport de majorité - pendant les manifestations, la police répond à des ordres, ordres donnés par un chef, présentement le commandant de la gendarmerie Guy Baer, lui-même subordonné au chef de la police, lui-même appliquant la politique mise en oeuvre par le conseiller d'Etat, responsable du département de justice et police et des transports (DJPT).
Certains, dans ce parlement, se rappelleront du conseiller d'Etat Schmidt, surnommé «Schmidt la matraque» par les manifestants. C'est avec un certain soulagement que nous l'avons vu remplacé par le conseiller d'Etat Fontanet, puis par le conseiller d'Etat Ziegler. L'on doit reconnaître que depuis lors, à quelques exceptions près, le droit de manifester est reconnu, largement employé et que lesdites manifestations ne dégénèrent que rarement, la collaboration entre les services d'ordre des manifestants et ceux de la police étant possible.
Il a donc semblé aux motionnaires que le moment était particulièrement bien choisi pour se débarrasser d'un moyen de répression, aussi violent et dangereux que l'usage de l'eau additionnée de produits chimiques, servant à disperser les manifestants. Il n'est, en effet, pas besoin d'être un grand chimiste pour pâlir à la lecture des composants utilisés, vous pouvez d'ailleurs en prendre connaissance dans le document annexé au présent rapport. Et même si la concentration des produits est minime, les accidents ne sont pas exclus, tant dans les rangs de la police lors de leur manipulation que dans ceux des manifestants lors de leur utilisation, le seuil de tolérance pouvant être très différent d'une personne à l'autre. Notons au passage que bon nombre de ces manifestations se font en famille et qu'il n'est pas rare d'y rencontrer des enfants.
Le principal débat de la commission a donc été celui de la proportionnalité et de la gradation des moyens employés. Si l'on pouvait résumer ce débat en deux questions, nous pourrions le poser comme ceci: Faut-il employer des produits chimiques pour disperser les manifestations? la réponse est non. Faut-il garder ce moyen en réserve au cas où la manifestation tournerait mal et que les représentants de la police ou la population pourrait être mise en danger? la réponse de la majorité est oui.
Une fois ces deux réponses apportées, la discussion s'est portée sur les bons et les mauvais moyens de disperser une manifestation, certains d'entre nous pensant que des jets d'eau sont amplement suffisants sans avoir besoin de leur adjoindre un gaz dangereux pouvant causer des lésions irréversibles, d'autres pensant au contraire que l'eau n'a pas d'effet dissuasif, mais suggérant tout de même une diminution du dosage de gaz dans l'eau.
Ces deux propositions ont été rejetées par les représentants de la police, de même qu'une proposition de moratoire de deux ans sur l'usage des produits chimiques, le temps de faire le point sur leur utilité.
Finalement, ce sont sans doute les représentants de la police qui ont convaincu la majorité de la commission. D'abord en assurant qu'il ne s'agissait d'un moyen utilisé que lorsqu'il n'y avait pas d'autres alternatives, mais surtout en annonçant qu'en l'absence de recours aux gaz des moyens plus violents seraient utilisés, tels que le corps à corps ou le tir de balles en caoutchouc.
C'est d'ailleurs cette dernière intervention qui a incité les motionnaires à déposer le présent rapport de minorité. Comment, en effet, céder à cette pression, par ailleurs totalement ambiguë, puisqu'il s'agit de renoncer à un moyen peu ou pas utilisé. Cela revient à dire que les politiciens qui prendraient aujourd'hui la décision de supprimer un gaz dangereux prendraient la responsabilité de voir les manifestations dégénérer et des moyens plus dangereux être utilisés (dixit les représentants de la police lors de leur audition du 28 août 1997).
Nous pensons quant à nous et en conclusion que l'usage de produits dangereux pouvant porter atteinte à l'intégrité physique pour réprimer une manifestation n'est pas digne d'un Etat démocratique et que les moyens mis à disposition de la police pour disperser les manifestants sont suffisants, que la proportionnalité doit toujours être de mise et qu'il n'y a qu'à penser au fort déploiement des forces de police, lors des manifestations pacifiques devant le consulat de France, pour se convaincre que cette proportionnalité n'est pas toujours respectée.
Cette motion aura également permis de constater que la limitation des dosages utilisés ne fait partie d'aucun règlement écrit, mais de la seule instruction orale, ce qui n'est en aucun cas acceptable s'agissant de l'utilisation de produits pouvant mettre en danger la vie d'autrui.
C'est grâce à l'insistance des députés et surtout à la persévérance du président de la commission Michel Halpérin que nous avons pu avoir accès, lors de la dernière séance, au manuel de formation au maintien de l'ordre et que l'on a pu savoir que celui-ci contenait un chapitre sur l'usage des moyens lacrymogènes liquides.
Lequel président a annoncé que la motion ne serait rejetée qu'à la condition que les directives mentionnées soient adaptées en fonction du débat de la commission et sur la base des amendements proposés, les amendements en question figurant dans le rapport de minorité.
Bien que ce débat ait permis un peu plus de transparence et engagé la police à intervenir avec plus de retenue dans les manifestations qui nécessiteraient une dispersion, la minorité de la commission persiste à penser que la police peut renoncer à l'usage des produits chimiques dans les canons à eau et elle vous prie donc, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter la présente motion en la renvoyant au Conseil d'Etat.
ANNEXE
Débat
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Ce rapport est excellent et met bien en évidence le problème posé. Les incidents bernois notamment, dont tout le monde a eu connaissance, surtout le conseiller national John Dupraz - qui en a eu une intelligence presque physique et intime... (Rires.) - ont révélé un véritable problème : celui des moyens mis à disposition de la police, dont la principale mission est tout de même la défense de l'ordre public.
Cette motion semblait véhiculer des idées généreuses, mais, en réalité, les conséquences qu'aurait l'acceptation de cette dernière seraient totalement désastreuses, comme l'ont expliqué, d'ailleurs, le commandant de la gendarmerie et divers représentants de la police qui ont été auditionnés. Mme Wavre met cela particulièrement bien en lumière. Il s'agit de savoir si de deux maux on préfère le moindre.
Il s'agit d'une petite morale extrêmement connue et facile. Aujourd'hui, alors que les événements douloureux qui ont suscité cette motion se sont estompés, il en va du bon sens, de l'évidence et, disons-le, d'une certaine pesée d'intérêt. C'est pourquoi, au nom de ce qui fut la majorité - et qui, j'espère, le restera sur ce sujet - le rapport de Mme Wavre doit être approuvé.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de minorité. Cette motion a été déposée dans un contexte particulier, à la suite des images particulièrement violentes de la manifestation des paysans à Berne. A l'époque, notre révolte était partagée par le groupe radical, qui l'avait contresignée, et par le PDC, également signataire.
Les travaux en commission ont été très complets. De notre côté, nous avons pu réaffirmer que nous ne comparions pas l'attitude de la police genevoise à celle de la police bernoise, mais que, par contre, nous partagions l'inquiétude des manifestants victimes des gaz lacrymogènes. La violente répression, lors de la manifestation contre le défilé militaire, est encore dans les mémoires.
Les produits utilisés dans ces canons à eau sont dangereux. Même si les personnes auditionnées se sont voulues rassurantes, je me suis permis d'annexer la liste des composants. Il n'est pas besoin d'être un grand chimiste pour constater qu'une erreur de dosage, même minime, pourrait se révéler catastrophique, aussi bien, d'ailleurs, pour ceux qui utilisent ces gaz que pour ceux qui les reçoivent.
La situation prévalant actuellement à Genève en matière de répression des manifestations est, à l'exception près de celle du défilé militaire, plutôt basée sur la collaboration entre les autorités et la police d'ordre des manifestations, et nous nous en réjouissons. Cela n'a pas toujours été le cas et je fais référence, dans mon rapport, à quelques précédents historiques.
Le moment nous a donc paru particulièrement bien choisi pour se débarrasser d'un moyen de répression dangereux et fort peu utilisé. Les débats en commission, que ce soit lors des travaux ou durant les auditions, ont été ceux de la proportionnalité et de la gradation des moyens utilisés.
Pour nous, minorité de l'époque et, j'espère, majorité de ce soir, l'usage de jets d'eau paraît suffisant pour disperser une manifestation qui tournerait mal, tenant compte du fait que la quasi-totalité de celle-ci se disperse sans l'intervention de la police.
Les différentes autorités policières que nous avons entendues ont demandé le maintien de l'usage de ces produits, faute de quoi le recours à d'autres types d'interventions plus violentes devrait être envisagé. On parle ici de corps à corps ou de tirs de balles en caoutchouc.
Cette affirmation - oserais-je le dire - était presque une menace, alors que, par ailleurs, on venait de nous dire que les gaz n'étaient pratiquement jamais utilisés. Elle n'a pas convaincu la minorité de la commission.
Faire porter aux députés qui prendraient une telle décision la responsabilité d'une escalade de la violence n'est tout simplement pas acceptable. Nous estimons que l'usage de gaz pouvant provoquer des lésions irréversibles est à bannir et que l'usage de produits dangereux pouvant porter atteinte à l'intégrité physique pour réprimer une manifestation n'est pas digne d'un Etat démocratique. C'est le sens de notre rapport que nous vous demandons de soutenir, en renvoyant la motion initiale directement au Conseil d'Etat.
Enfin, en prenant cette décision ce soir nous ne créons pas un précédent, puisque dans un pays voisin et pas trop éloigné - l'Allemagne - dans les Länder du nord où une majorité rose-verte gouverne, la police a renoncé à ce moyen de répression et que les manifestations ne sont pas devenues pour autant plus violentes.
M. John Dupraz (R). Je suis à l'origine de cette motion, et, dans ces circonstances, je ne participerai pas au débat et je m'abstiendrai de voter. (Quelques députés expriment leur déception.)
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Les travaux en commission ont été menés selon deux approches :
- Premièrement, celle exprimée par la police. Cette dernière nous a expliqué - Mme Fabienne Bugnon vient de le dire - que les produits chimiques étaient l'unique moyen pour elle de disperser des manifestants lorsque cela devenait nécessaire. Si elle devait renoncer à l'usage de ces produits chimiques, la matraque, les balles en caoutchouc, le corps à corps les remplaceraient. Ces méthodes impliquent des blessés éventuels.
En commission, nous n'avons pas compris pourquoi les canons à eau ayant une certaine pression non dirigée sur les gens mais à leurs pieds n'étaient pas un moyen suffisant pour disperser des manifestants. La réponse qui nous a été donnée n'était pas très claire.
- Deuxièmement, celle des dangers bien réels. Les événements qui se sont déroulés lors de la manifestation de Berne nous ont été confirmés par des documents, dont l'un d'eux figure dans les annexes du rapport de Mme Bugnon. Il y est dit que ces substances sont dangereuses. Si le produit atteint les yeux, il faut les rincer abondamment avec de l'eau jusqu'à l'arrivée du médecin. Si des vêtements sont salis par le produit, il faut les enlever immédiatement et laver la peau avec du savon et de l'eau.
Que faire avec ces deux approches tout à fait antagonistes ? A Genève - nous dit-on - le risque est minime. Le produit est dosé grâce à des mélangeurs fort bien réglés. De toute façon, il existe les sommations d'usage. Mais on nous informe, lors de la même audition, que si la manifestation a mal tourné lors du défilé militaire, c'est en raison d'une panne du mélangeur, et les canons à eau ne contenaient donc plus de produits chimiques.
La mécanique peut donc avoir des failles ! Lorsqu'elles mettent en danger des personnes, notre devoir est de faire d'autres choix. Dès lors, ce soir, le parti socialiste dira non aux produits chimiques dans les canons à eau de la police genevoise et oui à cette motion.
Par contre, si la police est en grand souci de se voir privée d'un moyen essentiel pour gérer les manifestations, nous ne serons pas opposés, à l'avenir, à étudier d'autres propositions sur ce thème soumises par le Conseil d'Etat.
M. Rémy Pagani (AdG). Quelle ne fut pas ma surprise, lors de la lecture de ce projet de motion, en relevant qu'il n'y avait plus de majorité... J'ai participé à de nombreuses manifestations...
Une voix. Ah, voilà !
M. Rémy Pagani. A plusieurs reprises, j'ai été gazé, matraqué... (Protestations dans la salle.) En lisant cette motion, j'ai consulté mes fiches de police, afin de situer les dates auxquelles nous - qui sommes assis sur ces bancs - avions été gazés et matraqués.
Une voix. Arrête !
M. Rémy Pagani. Je vous passe la liste de ces nombreuses manifestations. Toutefois, je désire apporter le témoignage de ceux qui y ont participé et pourquoi ils l'ont fait. Je ne prendrai qu'un seul exemple : j'avais 16 ans et je me suis battu pour un centre autonome à la maison des jeunes. Depuis de nombreuses années, un centre autonome existe à l'Usine et il ne pose aucun problème. Pourtant, à l'époque, nous nous étions fait gazer et matraquer par M. Schmitt que nous appelions «Schmitt-la-matraque».
Lors de ces trente dernières années, la police a eu une attitude manichéiste envers les manifestants en les maintenant à distance. Aujourd'hui, elle a modifié son comportement, en ce sens qu'elle envoie le chef de la police discuter avec les manifestants lors des manifestations. Nous devons cette remarquable innovation à M. Baer.
Lors de la venue des étudiants dans la cour de l'Hôtel-de-Ville, nous avons montré qu'il ne fallait ni les repousser ni les maintenir à distance, mais qu'ils avaient aussi le droit, en montant à la tribune, de s'exprimer et de dialoguer avec nous.
Je ne prétends pas avoir de solutions, mais il convient de chercher des pistes pour entrer en contact avec les manifestants, afin qu'ils expriment leurs opinions qui, bien souvent, sont rapidement suivies. De ce point de vue, je trouve inadmissible l'usage de gaz lacrymogènes et l'utilisation des tonnes-pompes. Dans d'autres pays, et en Angleterre notamment, la police utilise d'autres moyens, dont le dialogue avec les manifestants, afin d'apprécier la validité de leurs revendications. Notre groupe soutiendra cette motion.
M. Olivier Vaucher (L), rapporteuse. Comme Mme la rapporteuse Bugnon l'a dit, fort justement, une erreur de dosage pourrait être dramatique. C'est pour cette raison que la police - ayant pris conscience de ce problème - a nommé des équipes spécialisées pour ce genre d'activité extrêmement rare, et qui s'entraînent sous l'ordre d'un officier supérieur. A l'intérieur du corps de police, n'importe qui ne peut pas manipuler ces produits. Ces équipes sont parfaitement bien entraînées et tout à fait aptes à cette manipulation. Mais il est vrai qu'un risque subsiste.
Madame la députée, vous avez cité l'exception - j'ai remarqué que dans vos rangs, on sait citer l'exception et non la généralité. En Allemagne - ce pays est l'un des rares en Europe à procéder ainsi - certains Länder n'utilisent plus les produits chimiques mélangés à l'eau ni les gaz lacrymogènes. Par contre, ils se sont munis de canons à eau beaucoup plus puissants et plus coûteux que les nôtres. Si un jour nous voulons pourvoir aux besoins de la police en achetant un tel matériel, il faudra revoir le budget affecté à ce département.
Mme Reusse-Decrey a dit que nous n'avions pas donné de réponse sur la manipulation et les effets exacts de ces gaz. La police a décrit les moyens utilisés et dans quelles circonstances ils l'étaient à Genève, de façon extrêmement rare. Cela pour répondre aux différentes interventions.
A ce jour, l'usage de substances lacrymogènes n'a été prohibé dans aucun canton suisse. Généralement, dans les pays européens, la règle est d'avoir recours à ces produits. Dans le rapport - que j'ai lu attentivement - il est démontré que la police genevoise sait utiliser ces procédés avec discernement. Cependant, si l'on tient à remplacer l'usage des gaz lacrymogènes, il faut revoir les moyens de répression à utiliser dans les manifestations. Le point fort de cette réorganisation est d'augmenter l'effectif actuel de la police. Le non-recours aux moyens lacrymogènes impliquerait un accroissement important des effectifs, dont nous ne disposons pas à Genève. En effet, aujourd'hui, la police ne peut pas répondre aux manifestants avec des hommes.
Les manifestations qui ont eu lieu à Genève auraient pu être beaucoup plus violentes si la police n'avait pas utilisé les gaz lacrymogènes, dans les rares cas où ils ont été utilisés. D'ailleurs, le canton de Genève est celui dans lequel se déroulent le plus de manifestations. En effet, à Genève, cent vingt-cinq manifestations ont eu lieu en 1997, contre quarante-quatre à Zurich, durant la même période.
Les députés sur les bancs d'en face ont évoqué les problèmes rencontrés par la gauche et liés à cette motion. A Zurich, lors de la manifestation extrêmement violente du 1er mai 1996, le Conseil municipal a nommé une commission, dont la présidente était une personne de l'Alliance de gauche qui a finalement conclu, dans son expertise, au maintien des gaz lacrymogènes dans le cas de manifestations de ce genre.
En conséquence, nous devons laisser à notre police le choix des moyens adéquats pour juguler la violence, ceci aussi bien dans son intérêt que dans celui de la population.
Pour terminer, il est mentionné dans le rapport que ces produits chimiques sont quasiment inopérants lors de températures extrêmement basses... En guise de boutade, je conseille aux manifestants d'organiser les manifestations par des températures inférieures à zéro !
Le président. Certains membres du Bureau me prient de vous faire part de leur regret de ne pas disposer, lors de certains débats, de canons à eau, précisément pour les abréger...
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Je m'étonne de l'angélisme de ce Grand Conseil et du nombre de spécialistes en manifestations publiques et en maintien de l'ordre qui s'y trouvent.
Pour ma part, je n'ai pas les souvenirs d'ancien combattant de M. Dupraz ou de M. Pagani. D'ailleurs, ce dernier ne semble pas en avoir gardé des séquelles irréversibles... (Manifestation de doute dans la salle.) ...vu l'agilité intellectuelle, dont il fait preuve ! En tout cas, sa recette pour le maintien de l'ordre ne devrait pas nous coûter très cher, puisque, à son avis, il faudrait supprimer la police et n'en garder que le chef qui viendrait arrêter la manifestation avant qu'elle ne se déroule. Malgré tout, cela me paraît un petit peu simpliste...
Certes, il ne fait jamais bon prendre ce genre de produits chimiques dans les yeux. N'oublions pas que, à la base de ces produits se trouve le chlore qui sert à la purification de l'eau des piscines et qui a commencé sa carrière de produit chimique pour soigner les blessés à la fin de la première guerre mondiale.
Puisqu'on en est aux souvenirs historiques, et pour le Mémorial, je ne puis m'empêcher de dire qu'il existe de véritables légendes. En effet, Mme Fabienne Bugnon, qui cite : «M. Schmitt conseiller d'Etat», Schmitt-la-matraque, n'orthographie même pas correctement son nom ! (Protestations.)
Malgré son surnom, si les manifestations de 1968 et 1969 n'ont pas dégénéré à Genève - bien qu'elles fussent assez vives - à une époque où l'on avait moins le souci du maintien de l'ordre avec des mesures plus apaisantes comme celles employées ensuite - car même dans les techniques de maintien de l'ordre on fait des progrès - M. Schmitt ne méritait certainement pas le surnom dont il a été affublé.
Pour en revenir au thème du débat, je dis, au nom de Mme Michèle Wavre, qu'une pesée d'intérêts est à faire. Vous ne pouvez pas vous contenter d'être angéliques. Il s'agit d'avoir un principe de proportionnalité, de gradation, tel qu'il a été développé dans la motion.
La police a souligné que - mais chacun et chacune d'entre vous peut penser que c'est exact - le pire des dangers serait la mise en contact direct, «corps à corps» des manifestants et des forces de l'ordre. En effet, au moment du «corps à corps», il est beaucoup plus difficile de maîtriser ses pulsions que lorsque l'adversaire est à 10 ou 20 mètres. (Huées. Rires.) C'est vrai dans une chambre à coucher, également dans la rue !
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de minorité. Je remercie l'excellent remplaçant de la rapporteuse de majorité pour ses paroles.
Si j'ai estropié le nom de M. Schmitt, qui, lui, a failli m'estropier au moment de la défense du Prieuré, je m'en excuse, mais uniquement d'avoir estropié son nom. Pour le reste, je ne regrette pas d'avoir fait référence à l'histoire.
Par rapport à notre cher et impayable ami Vaucher... L'erreur est humaine, Monsieur Vaucher ! Je n'ai jamais dit que les gens qui utilisaient ces appareils n'étaient pas qualifiés. Simplement, l'erreur est humaine, comme pour chacun d'entre nous, et nous avons pu constater - chose assez grave - qu'il n'existait même pas de directives écrites. C'est suite aux demandes du président de la commission, M. Halpérin, que nous avons obtenu des directives écrites. Il n'est pas question de remettre en cause les qualifications des gens utilisant ces produits, mais il ne faut jamais oublier que l'erreur est humaine et que le risque existe.
M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Vous ne m'en voudrez pas de dire, en préambule, que, dans ce débat, il y a huit cents gendarmes dont tout le monde se fout.
Mon problème est de savoir, en fonction de la mission qui incombe à la police genevoise, si je peux admettre des mesures qui ont pour conséquence de mettre en danger les policiers genevois.
On pourrait dire aussi que ce débat est surréaliste, car il s'agit d'un non-problème. A Genève, il n'y a jamais eu un seul problème avec les gaz lacrymogènes. Notre politique est exactement la même que dans tous les cantons suisses, y compris ceux qui, comme à Genève, ont une majorité de gauche. Tout à l'heure, allusion a été faite à Zurich où même les membres de la commission qui a traité les incidents du 1er mai nous recommandent de conserver nos moyens. Chaque année, c'est rebelote ! Je peux vous annoncer que le 1er mai 1998 vous aurez une bagarre à Zurich qui coûtera quelques dizaines de milliers de francs en réparation des dommages. Chaque année, cela recommence et, néanmoins, la commission indique qu'il faut au minimum conserver nos moyens. Notre système est le même que partout en Suisse et presque partout en Europe, à part un Länder que vous avez cité, au nord de l'Allemagne.
Si nous ne giclons pas un brouillard, alors il faudra gicler de l'eau. Avez-vous déjà vu le jet sortant d'une lance de pompier ? Voulez-vous vraiment cela ? J'ai peine à le croire ! L'essentiel pour moi est de vous mettre devant votre responsabilité. Je sais que vous ne voterez jamais un accroissement des effectifs de la police, pas plus que des budgets pour remplacer les canons formant un brouillard d'eau par des canons projetant de l'eau à grande puissance. Par conséquent, vous ne voterez jamais non plus les modifications de nos véhicules. Toute cette discussion repose en fait sur le point suivant :
Lorsqu'une manifestation se déroule, il est dans l'intérêt de tous qu'une distance soit respectée entre le barrage et les manifestants.
Monsieur Pagani, vous avez fait allusion à la négociation et, venant de vous, cela me fait un plaisir très particulier. Sauf pour l'une de vos manifestations, nous n'avons jamais eu de problèmes de dialogue avec vos manifestants. J'ai dit à notre excellent collègue Vanek... - qui n'est pas là ce soir - (Protestation de M. Pierre Vanek, debout derrière les bancs de l'Alliance de gauche.) ...que, à plusieurs reprises, nous avions eu des problèmes avec ses manifestations. J'indique ici que les choses se sont bien passées en raison du fait que presque jamais il n'y a eu d'affrontements ni de contacts entre les barrages et les manifestants.
Si vous désirez supprimer cette distance et enlever à la police le seul moyen dont elle dispose pour la maintenir ou si, par hypothèse, vous voulez que l'on remplace le brouillard lacrymogène par des balles en caoutchouc - comme cela se fait dans d'autres villes de Suisse - dites-le franchement ! Mais ce n'est pas raisonnable.
Je connais les tactiques employées à Berne. Elles ont souvent des effets négatifs. Il y a des blessés. La ville de Zurich connaît le même problème, car il y a souvent des affrontements, des heurts, des blessés.
J'ai autorisé une quantité industrielle de manifestations dans notre ville de Genève, car j'estime qu'on a le droit de s'exprimer. Dans une ville internationale, on a aussi le droit de dire, dans les formes, au milieu international ce que l'on pense.
Quant au résultat de ce vote, si vous deviez priver la police d'un moyen extrêmement «soft» de maintenir l'ordre, il conviendrait de reconsidérer deux éléments :
- Premièrement, il faudra revoir le comportement de la police. Un gendarme blessé, cela ne m'amuse pas du tout. D'ailleurs, je ne suis pas certain que la révision de ce comportement soit une bonne chose pour tout le monde.
- Deuxièmement, il conviendra de revoir notre politique en matière de manifestations, car s'il y a des heurts cent vingt-cinq fois par an, ce sera un peu excessif.
A la tête de ce département, j'ai une mission d'ordre public. La police évolue et prend un virage essentiel : celui d'une police de proximité qui cherche les contacts. Vous, Monsieur Pagani, qui êtes un expert «es squats», vous savez bien que j'ai une brigade de nounous qui s'occupe des squatters, les chouchoute, les contacte, les écoute... (Rumeurs de désapprobation.) ...les avertit. C'est grâce à cette brigade qu'un seul, voire deux squats sur cent sont expulsés par la force.
A vous de choisir la politique et la police que vous voulez. Toutefois, vous devez savoir que je ne privilégierai jamais les manifestants par rapport à mes policiers, car visiter des policiers à l'hôpital est inacceptable, si c'est au nom d'un projet de loi, comme celui-ci, qui me paraît aller à l'inverse de ce que vous pourriez souhaiter. Je vous fais confiance. Je ne me fais pas d'illusions. Ne vous en faites donc aucune à mon sujet ! (Applaudissements.)
Le président. Je mets aux voix cette proposition de motion et les conclusions du rapport de majorité, à savoir le rejet de cette motion.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Mise aux voix, cette motion est adoptée par 46 oui contre 39 non.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
visant à supprimer l'utilisation des produits chimiquesdans les canons à eau de la police genevoise
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
- que la police cantonale genevoise dispose de véhicules équipés de canons à eau;
- que ces véhicules sont utilisés pour disperser les manifestations;
- que l'eau projetée sur les manifestant(e)s est mélangée à des substances chimiques pouvant entraîner des lésions corporelles graves (brûlures de la peau, des yeux, des voies respiratoires);
- que les conséquences résultant de l'usage de ces mélanges par la police bernoise en octobre 1996, ayant laissé à certaines personnes des séquelles irréversibles, sont intolérables,
invite le Conseil d'Etat
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La mémorialiste:
Françoise Chételat
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Le numéro 12 F
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