République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 décembre 1997 à 17h
54e législature - 1re année - 3e session - 60e séance
PL 7699-A
Préambule
Le projet de loi 7699 est daté du 2 septembre 1997. Il a été envoyé à la commission fiscale le 25 septembre 1997. Cette dernière a consacré deux séances à l'examen de ce projet en tout début de législature soit les 2 et 9 décembre 1997, sous la présidence de M. Bernard Clerc. Ont assisté successivement à ces séances M. le conseiller d'Etat Olivier Vodoz et Mme la conseillère d'Etat Micheline Calmy-Rey. Lors des deux séances, nous avons bénéficié de l'appui de M. Pietro Sansonetti, de la direction de l'administration fiscale cantonale. Lors de la dernière séance, s'est joint aux travaux de la commission M. Georges Adamina, également de la direction de cette même administration. Les procès-verbaux étaient tenus par Mme Myriam Berkati. Qu'ils en soient toutes et tous remerciés.
I. Caractéristiques du projet
L'exposé des motifs du projet de loi 7699 décrit de la manière suivante les obligations dites à intérêt unique: «Il s'agit des obligations à coupon zéro (discount bonds), des obligations à intérêt global, par exemple de type Migros, des obligations à rémunérations périodiques annuelles se situant au-dessous du taux du marché et assorties d'un agio de remboursement fixe, d'emprunts à double monnaie, de papiers monétaires à court terme (créances comptables de la Confédération, des cantons et des communes) et éventuellement aussi de certaines obligations à option et d'instruments financiers dérivés».
En peu de mots, il s'agit de tout ce qui n'est pas l'usuelle obligation qui sert des intérêts à intervalles fixes, réguliers et prédéterminés; les bons vieux coupons de nos grands-parents.
Ces valeurs, d'une nature particulière, ont commencé à se développer il y a une vingtaine d'années. Elles ont attiré l'attention des administrations fiscales au début de la précédente décennie. C'est ainsi qu'une première directive, datée du 16 juillet 1982, émane de l'administration fédérale des contributions (annexe 1), répercutée par une directive n° 170 de notre administration fiscale cantonale, du 28 juillet de la même année (annexe 2). Cette dernière directive se termine par des instructions précises sur le mode de taxation, au point 3 intitulé «Directives pour l'imposition» (page 3 de la circulaire), que le rapporteur vous invite à lire. Ce texte se termine par la phrase: «Ces principes sont également valables sur le plan cantonal». Phrase clé de cette méthode: «Les intérêts afférents aux obligations à intérêt global et aux discount bonds doivent être imposés en tant que revenus à l'échéance de l'emprunt». Ainsi que deux phrases significatives en fin de parcours:
a) «Est réservé le cas particulier des personnes astreintes à tenir des livres, qui sont soumises aux règles fiscales relatives à l'imposition des bénéfices en capital»
et surtout
b) «En cas d'aliénation d'obligations à intérêt global ou de discount bonds peu avant le remboursement des titres, à un contribuable astreint à tenir des livres, il convient de déterminer la question sous l'angle de l'évasion fiscale».
Ces deux phrases figurent dans la même teneur dans la circulaire fédérale et la circulation cantonale.
Enfin, soulignons ce que ces circulaires n'évoquent pas, c'est-à-dire l'aliénation de ces obligations, peu avant le remboursement à des personnes qui ne sont pas contribuables en Suisse!
Au terme d'une dizaine d'années les inconvénients du système apparaîtront, au point d'entraîner la révision de la loi fédérale sur l'imposition directe, soit son article 20, alinéa 1, lettre b, libellé comme suit:
b) «Les revenus résultant de l'aliénation ou du remboursement d'obligations à intérêt unique prépondérant (obligations à intérêt global, obligations à coupon zéro) qui échoient au porteur».
Dès le 15 décembre 1992, une très longue circulaire n° 6 de l'administration fédérale des contributions (annexe 3) revenait sur le sujet avec exemples à l'appui, pour illustrer le passage du principe de l'échéance au principe de la plus-value. Ce nouveau principe s'appliquera pour la première fois à la période 1995-1996, prenant en considération les revenus de 1993 et 1994.
En simplifiant, on peut résumer en disant qu'au lieu d'attendre l'échéance du papier-valeur et tous les aléas qui vont avec cette méthode, l'on taxe la plus-value dès qu'elle se réalise, dès lors qu'elle est réelle et effective et chaque fois qu'elle se matérialise, ainsi de suite jusqu'à l'échéance. Cette méthode est conçue pour mieux cerner la substance fiscale et éviter que des ressources n'échappent à la taxation et à la perception.
En dépit de ces péripéties fédérales, la loi cantonale et la pratique de notre administration sont restées à la méthode de 1982, taxant la même substance selon deux méthodes différentes, soit l'une pour l'IFD et l'autre pour l'impôt cantonal. L'autre avantage du projet de loi 7699 consiste à éviter un changement de pratique sur la base d'une directive interprétant autrement les lois existantes. Ce projet de loi donne une base légale au sens des définitions usuelles des bases légales, à la nouvelle méthode que l'on pourrait désormais appliquer tant pour l'impôt fédéral que pour l'impôt cantonal.
De surcroît, le renoncement à un système qui permet facilement d'éluder la loi en vigueur produirait quelques rentrées fiscales supplémentaires bienvenues que l'on estime entre 4 et 6 millions de francs par an.
II. Discussion et vote de la commission
Sur ce projet, la discussion de la commission s'est faite par «couches» successives.
Il a d'abord fallu procéder à des éclaircissements ayant trait à la nature particulière de ces obligations, à la différence entre celles-ci et les obligations courantes bien connues des petits épargnants. Il a également fallu inventorier, autant que faire se peut, les diverses variétés se cachant sous l'appellation obligations à intérêt unique prépondérant ou prédéterminant dans le langage fédéral. Il a fallu ensuite se familiariser avec le système actuellement en vigueur (soit l'ancien système fédéral) et celui introduit par la Confédération et que le projet de loi souhaite pour l'avenir.
Certains commissaires ont voulu s'assurer du fait qu'il ne s'agissait pas d'une manière déguisée d'alourdir indûment la fiscalité des personnes physiques. La crainte d'une augmentation des tracasseries administratives à l'égard des contribuables a aussi été évoquée, ainsi que la réalité même des rentrées fiscales supplémentaires à attendre, malgré les estimations de l'administration.
Enfin, l'idée qu'une telle révision légale puisse induire des comportements différents de la part de ceux qui pratiquent ces obligations rendant ainsi illusoire l'attente de rentrées supplémentaires a été avancée par certains.
Le dernier point traité par la commission a été: reportons-nous d'ores et déjà dans le budget 1998 le produit supplémentaire de cette modification légale? La conseillère d'Etat en charge du département des finances ayant répondu par l'affirmative, les commissaires de l'Entente ont indiqué que cela leur paraissait précipité et hasardeux, n'ayant comme objectif que de présenter artificiellement un budget 1998 moins déficitaire qu'il ne l'est en réalité, après les travaux post-électoraux de la commission des finances. Le rapporteur espère avoir bien compris et reflété cette appréciation de nos collègues de l'Entente.
Au vote, le projet est adopté par:
7 voix (2 S, 3 AdG, 2 Ve)
et 5 abstentions (2 L, 2 R et 1 DC).
La majorité de la commission a, dans la foulée, décidé de présenter un rapport «oral» à la séance du 18 décembre 1997 du Grand Conseil, en demandant au Bureau de notre Conseil de traiter ce point en urgence avant d'entamer le débat budgétaire.
Conclusion
Voilà un projet qui ne contenait quoi que ce soit de susceptible de provoquer l'hostilité de quelqu'un. Il était destiné, peut-on dire, à être traité par les voies ordinaires et adopté à l'unanimité. Le calendrier et les préoccupations de l'heure n'ont pas permis que cela soit. Dommage! C'est pourquoi, au bénéfice des explications ci-haut exposées, la majorité de la commission fiscale - sans voix hostile - vous prie, Mesdames et Messieurs les député(e)s, d'accepter le présent projet de loi.
Une réflexion, en guise d'épilogue. Durant cette législature, nous serons appelés à remettre sur le métier de grands pans de notre fiscalité. Il serait éminemment souhaitable et utile pour Genève, que nous puissions trouver, pour ces révisions, les plus larges convergences possibles. Nous enverrions ainsi un message de sérieux de notre travail et de stabilité de nos institutions.
Premier débat
M. Albert Rodrik (S), rapporteur. Monsieur le président, j'aimerais signaler qu'il y a une faute d'orthographe à la quatrième page. Vous voudrez bien m'en excuser !
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant la loi générale sur les contributions publiques(obligations à intérêt unique prépondérant)
(D 3 05)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:
Art. 16, al. 2, lettre l (nouvelle)
l) les revenus résultant de l'aliénation ou du rem-boursement d'obligations à intérêt unique pré-pondérant (obligations à intérêt global, obligations à coupon zéro) qui échoient au porteur.
Le président. Nous abordons maintenant les projets de lois sous point 61 de notre ordre du jour qui ont trait aux lois de fonctionnement.