République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 5 décembre 1997 à 17h
54e législature - 1re année - 2e session - 56e séance
IU 399
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Mon collègue, M. Ramseyer, répondra en ce qui concerne les actions de la police. Je répondrai donc à la première partie de l'interpellation.
A la suite des incidents lors du premier ordre de démolition, voilà deux ans, j'en ai ordonné l'arrêt. M. Dormond, mon directeur, qui avait agi de façon intempestive a démissionné, tellement il était opposé à cette décision.
Contrairement à ce que vous dites, Monsieur Vanek, nous avons ordonné des mesures de «confortation» pour un montant de 37 500 F. Elles sont encore visibles.
Cet été, nous avons demandé à deux ingénieurs, M. Dal Busco et M. Guscetti, d'établir des expertises séparées, afin d'être renseignés de façon exacte sur l'état des bâtiments et les dangers potentiels. La partie arrière, c'était visible sur les photos publiées par la «Tribune de Genève», étant dans un état extrêmement grave.
Selon les conclusions de M. Guscetti, il fallait faire des travaux de «confortation», pour s'assurer que des matériaux ne s'écroulent pas sur le tram ou des passants, spécialement côté route.
Selon le rapport de M. Dal Busco, ces mesures ne pouvaient pas aller au-delà du mois d'octobre 1997.
J'ai suivi le conseil des experts et ordonné à la commune de Chêne-Bougeries d'entreprendre ces travaux pour un montant d'environ 200 000 F. Cette dernière a interjeté recours auprès de la commission de recours en demandant l'effet suspensif pour se soustraire à l'obligation de procéder à des travaux qu'elle estime inutiles.
Dans un tel cas, l'Etat doit se substituer à la commune, ou à une collectivité, ou à un particulier, lorsque ces derniers n'entendent pas entreprendre les travaux demandés. La responsabilité, la «patate chaude» se trouvait donc en main de l'Etat.
Nous avons procédé à une évaluation de situation et réuni tous les partenaires pour une discussion. Selon un deuxième train d'expertises produites par deux bureaux d'ingénieurs, M. Moser et MM. Amsler et Bombeli, il n'était pas possible de procéder aux réparations proposées par M. Guscetti. Cela impliquait de pénétrer à l'intérieur des bâtiments et ces deux bureaux déclinaient toute responsabilité.
Lorsque la démolition de ces deux immeubles a été évoquée, j'ai demandé à la commune de Chêne-Bougeries et aux propriétaires, les hoirs Gouzer-Waechter, s'ils seraient disposés à rénover ou reconstruire à l'identique les bâtiments au cas où on les démolirait et où, pour des raisons légitimes, des décisions émanant d'une votation populaire ou d'un tribunal entraîneraient le maintien de ces immeubles.
Comme il y avait une procédure de classement en cours, j'ai consulté mes collègues du Conseil d'Etat qui m'ont autorisé à demander la démolition. Nous avons également demandé l'avis du procureur général qui a donné son accord, avant que nous ne prenions les dispositions légales pour le faire.
Nous avons réuni toutes les personnes concernées. Le travail a été préparé en toute légalité, je tiens à le dire, et non de façon illégale comme le dit M. Vanek. Les travaux de démolition ont donc commencé. Nous basant sur les rapports des ingénieurs, les conditions atmosphériques causant des surcharges aux bâtiments qui pouvaient faire craindre un effondrement partiel des façades, l'impossibilité de réparer que M. Guscetti a reconnue lui-même, la prise de responsabilité de l'Etat et, enfin, les réparations pour maintenir la substance de ces immeubles qui coûteraient beaucoup plus que les 200 000 F annoncés, nous avons décidé d'ordonner la démolition.
Où en sommes-nous maintenant ? La commune de Chêne-Bougeries a déposé un nouveau recours pour demander la démolition, et, ce matin, nous sommes allés en commission LCI. Les diverses parties ont été longuement entendues, et les trois experts, séparément, afin que M. le juge Rey puisse se faire une idée objective de la situation et décider en connaissance de cause s'il voulait ou non autoriser la reprise de la démolition, maintenir l'effet suspensif ou prendre d'autres mesures. Entre autres, un rapport d'experts neutres supplémentaire a été demandé.
Pour le moment, je n'en sais pas plus. Nous sommes sortis de séance à 13 h 30. La décision du juge devrait tomber de façon imminente. Je vous la communiquerai dès que j'en serai informé.
Pour conclure, je laisse la responsabilité à certains de penser que c'était un coup de force que j'aurais voulu réaliser avant mon départ. Je ne parle pas polémique mais sécurité. On ne peut certes jamais dire quand un immeuble va s'effondrer. Cependant, les rapports des experts, ce matin, m'ont convaincu que le risque existait, qu'il était évalué comme important. Dans cet esprit-là, j'ai ordonné la démolition. Pour le surplus, il va de soi que le département s'en remet au juge et que, la démolition ayant été interrompue, la «patate chaude» est passée dans d'autres mains.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. A quoi jouait M. Ramseyer vers 22 h à Chêne-Bougeries ? (Rires.) Je réponds à cette question !
M. Joye a informé le Conseil d'Etat, le 1er décembre, qu'après examen en son département de la situation des immeubles 13-15, rue de Chêne-Bougeries, il décidait, sur la base de rapports d'experts alarmants, la démolition de ces deux immeubles pour raison de sécurité publique.
Cette décision a été communiquée, par une lettre datée du 1er décembre, à la commune de Chêne-Bougeries et aux propriétaires. Elle a également fait l'objet d'une communication aux médias. Il n'est donc pas exact de prétendre que le département des travaux publics et de l'énergie aurait agi de manière confidentielle.
La police genevoise a été requise pour assurer la sécurité de ce chantier au niveau des nuisances sur le trafic. Une trentaine de gendarmes se sont donc rendus sur place.
En soirée, des incidents ont bloqué la circulation et la ligne de tram. Aussi, des renforts de police ont été envoyés. La police tient à faire remarquer l'action positive de vos deux collègues, MM. Grobet et Ferrazino face à des manifestants agressifs.
Par souci d'objectivité, vous auriez pu, Monsieur le député, leur poser néanmoins la même question qu'à moi ! La situation s'est rétablie en début de nuit; seul est resté un piquet de sécurité.
A question précise, réponse précise : à quoi jouais-je vers 22 h à Chêne-Bougeries ? A rien ! Je donnais une conférence à l'hôtel de la Réserve pour les membres du Centre d'études économiques de Genève, depuis 19 h 30.
Je pourrais m'arrêter là, mais je ne résiste pas à l'envie de dire que personne n'est dupe de la comédie qui se joue à Chêne-Bougeries. Pendant que des politiciens et des juristes manoeuvrent, tergiversent et discutent, nous mesurons deux conséquences : on inflige une dépense d'un quart de million aux contribuables de la commune de Chêne-Bougeries pour des frais totalement inutiles et on joue avec la sécurité publique. Seul ce dernier point relève de mon département, mais je dis à titre personnel que ce n'est pas admissible. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.