République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 2 octobre 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 11e session - 47e séance
IU 396
M. Luc Gilly (AdG). Mon interpellation urgente s'adresse à M. Ramseyer, éventuellement à M. Joye.
Elle s'intitule «Nouvelle déontologie à la police ou politique électorale ?». De quoi s'agit-il, Monsieur Ramseyer ?
Vous connaissez les faits en partie, mais j'aimerais les exposer devant cette assemblée.
Vers 7 h du matin, le mercredi 24 septembre, un commando de police envahit la maison squattée de Fort-Barreau. Il arrête une vingtaine de personnes et procède à dix-sept inculpations.
Environ cent cinquante policiers armés, protégés jusqu'aux dents, bloquent une partie du quartier, l'immeuble concerné et le parc des Cropettes. Ils protègent également la voirie qui, à l'aide d'une broyeuse, détruit pratiquement tout le campement des Cropettes. Seul du petit matériel a pu être emporté par les femmes et les filles, et encore... nous avons dû insister pour que ces dernières soient autorisées à traverser les cordons de police !
J'étais sur place vers 8 h 20, Monsieur Ramseyer, et je vous conseille de ne pas relater, demain, des faits déformés.
Il semble que, dans l'immeuble même, une partie du matériel a pu être sauvée. En revanche, dans une rue adjacente, une benne «accueillait» - c'est un piètre mot ! - des objets ayant appartenu aux habitants. Ils sont devenus inutilisables parce qu'ils ont été jetés par les fenêtres. Seuls, les jouets des enfants ont été préservés, grâce à l'insistance des ouvriers auprès de vos sbires. En effet, les policiers voulaient qu'ils soient jetés dans la benne de la démolition.
Beaucoup d'insultes ont fusé sur les habitants des Grottes qui n'avaient pourtant rien à voir avec les occupants de l'immeuble bloqué par la police.
Bref, un beau gâchis, Monsieur Ramseyer !
C'est grave, et cela l'est d'autant plus que depuis septembre les occupants étaient en contact avec le département des travaux publics et de l'énergie, avec M. le procureur général Bertossa et l'Asloca. L'ordre d'expulsion du 7 septembre a été cassé par l'Asloca, l'autorisation financière n'ayant pas été signée. Le 10 septembre, M. Acquaroli, le propriétaire de la maison, a demandé la modification du nombre des pièces par rapport au plan initial, mais sans présenter un plan financier pour ce faire. Dans les deux jours qui ont précédé l'attaque de la police, la dernière autorisation a été signée de manière tout à fait confidentielle.
Monsieur Ramseyer, pourquoi n'avoir pas prévenu les habitants, annoncé leur expulsion, etc. ?
La présidente. Concluez, Monsieur le député ! Vous n'avez que trois minutes.
M. Luc Gilly. J'ai six questions et je les poserai rapidement.
1. Pourquoi, Monsieur Ramseyer, une telle démonstration de force pour arrêter une vingtaine de personnes ? J'en déduis qu'il faudra sept cent cinquante policiers pour déloger les soixante-cinq habitants du «Rhino» !
2. Pourquoi tant de gaspillage ? J'entends par là la destruction et la perte du matériel appartenant aux habitants. Ils n'ont pas eu le temps de prendre quoi que ce soit.
3. Pourquoi cette volonté permanente de criminaliser les squatters en leur mettant tout sur le dos ?
4. Demanderez-vous la levée d'inculpation des dix-sept personnes ? Cette maison, Monsieur Ramseyer, était inoccupée depuis sept ans. Des gens ont tenté de la réhabiliter durant neuf mois. Réponse : une évacuation brutale ! Les personnes chassées avaient un projet de vie, un projet de culture, un projet de partage, et vous le saviez !
5. Est-ce là votre fameuse nouvelle déontologie ?
6. Il y a pléthore de lieux vides et habitables. Vous et vos collègues du Conseil d'Etat, quelle politique entendez-vous proposer à ce sujet d'ici le 16 novembre ?