République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 mars 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 4e session - 13e séance
IU 308
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. «Genève sur l'eau» constituera le premier volume de l'inventaire des monuments d'art et d'histoire, entrepris en étroite collaboration avec la Société d'histoire de l'art de Suisse. Il y a dix ans, notre canton restait, avec celui du Jura, la dernière lanterne rouge à n'avoir jamais publié un de ces ouvrages, alors que nonante volumes sont publiés, à ce jour, dans toute la Suisse.
Le 12 juillet 1984, une convention a été établie entre le département des travaux publics et la SHAS visant à combler cette lacune. Pour sa part, la SHAS assure les frais d'expertise, d'impression et de distribution de l'ouvrage. La mise en route de l'inventaire des monuments d'art et d'histoire...
La présidente. Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. ...genevois a débuté par la constitution d'une base documentaire et la mise en place d'une équipe de travail. Comme je le relevais dans la préface du document remis au mois de décembre 1994 à tous les députés, la prise en compte de l'indispensable facteur temps et du coût final a été totalement éludée lors de l'engagement des travaux.
Par ailleurs, le départ de quelques chercheurs, en cours de route, posa abruptement le problème d'une nécessaire continuité dans la recherche et mit M. Grobet, mon prédécesseur, dans de grandes difficultés. Ces chercheurs, entre autres les historiens de l'art Armand Brulhart et Erica Deuber-Pauli, par exemple, étaient occupés respectivement à des taux d'activités de 15 à 20% et de 50%. Ils ont émargé des montants importants inscrits au budget. Ainsi M. Armand Brulhart a été défrayé d'une somme de 82 970 F en quatre ans et Mme Deuber-Pauli de 260 915 F en huit ans. Malgré leur engagement, ils n'ont laissé pratiquement aucune base de recherche réutilisable et aucun texte exploitable pour la rédaction finale.
Dès mon entrée en fonctions à la tête du département des travaux publics, j'ai cherché à remédier à ces lacunes et à cadrer efficacement ce projet. Lors d'une séance de la commission cantonale de travail, le 30 mai 1994, en présence de tous les collaborateurs, j'ai fixé les bases du calendrier nécessaire à la parution du premier volume.
A cette occasion, j'ai dû me séparer d'une collaboratrice qui n'avait pas compris que cette fois les délais étaient des délais et qu'il fallait «mettre le turbo». Lors de cette séance, j'ai constaté que pas une ligne n'avait été écrite pendant les six premières années.
Quittant l'idée d'avoir un coordinateur au rôle purement administratif et possédant peu de compétences dans le domaine scientifique traité, j'ai accordé ma confiance à M. Philippe Broillet et l'ai nommé responsable d'une équipe considérablement réduite.
Ce dernier avait pour charge d'achever la première phase de travail avec des historiens qui avaient le goût d'écrire, une véritable passion pour l'histoire et l'art et considéraient que non seulement tout travail mérite salaire mais aussi que tout salaire mérite un travail.
Cette réorganisation a impliqué une réévaluation des moyens en regard des objectifs, ceux-ci devant être perçus globalement. Cette démarche a fait l'objet d'une concertation avec le conservateur des monuments et des sites M. Pierre Baertschi et également avec le comité de la SHAS, dont le vice-président est M. Dominique Micheli, ancien président du Grand Conseil, qui a fait part des réflexions menées par la SHAS consistant à réévaluer les objectifs initiaux de l'inventaire national en assignant un terme aux travaux.
Quand l'ouvrage paraîtra-t-il ? Grâce aux efforts des divers partenaires, «Genève sur l'eau» paraîtra le 30 avril prochain. Considérant l'importance de cet événement, le DTPE a décidé d'informer la population genevoise de façon élargie en mettant sur pied avec la SHAS un stand de présentation dans le cadre du prochain Salon international du livre et de la presse à Genève et également des travaux de la Société d'histoire de l'art de Suisse.
Qui sera l'éditeur ? Les ouvrages publiés dans le cadre de cette série nationale sont actuellement confiés aux éditions VIESE de Bâle qui sont liées par contrat avec la SHAS. Le tirage de cette publication est important. Il se monte à 11 000 exemplaires, diffusés dans toute la Suisse. Cette parution genevoise contribuera à favoriser les échanges culturels avec les autres cantons et permettra de mieux faire connaître Genève à nos Confédérés.
Quel en sera le coût ? Ce prix sera-t-il comparable à celui des ouvrages du même type publiés dans toute la Suisse, puisque, comme indiqué dans la préface, seuls les cantons du Jura et de Genève n'ont pas encore rendu leur travail.
Le coût moyen d'un tel ouvrage, dont la préparation dure en moyenne six ans, est de l'ordre de 1 750 000 F. A cette somme, il convient d'ajouter la participation de la SHAS à la mise au point du manuscrit et l'édition par elle du document qui est de l'ordre de 400 000 F.
En ce qui concerne l'élaboration proprement dite des ouvrages, le coût dépend de l'état de la documentation disponible et de l'importance des dossiers d'archives qui peuvent, selon le cas, être dépouillés ou pas. Les données comparatives de «Genève sur l'eau» sont les suivantes :
- Travaux préparatoires et mise sur pied de la compilation nécessaire jusqu'en 1993, soit 2,417 millions.
- Rédaction des manuscrits et préparation de l'ouvrage, de 1994 à fin 1996 : 1,26 million.
- Coût estimé pour le volume numéro 2, consacré aux quartiers de la rive droite, environ 1,4 million.
Au vu de ce qui précède, il ressort que les phases préparatoires étendues sur huit ans ont sensiblement renchéri le coût du premier volume. Par contre, la précision scientifique des collaborateurs actuels et leur engagement, pour ne pas dire leur enthousiasme dans l'élaboration de ces ouvrages, permettront de sortir deux publications de cette série à un prix sensiblement inférieur au coût moyen assumé par les autres cantons.
Le prix de vente du volume genevois - qui sera double - se montera à 110 F. Il correspond au prix et aux normes usuelles en matière d'édition pour des ouvrages de cette catégorie. Cette société - la SHAS - diffuse ses publications à tous ses membres, ce qui assure une large audience. Grâce aux efforts consentis par les différents partenaires de ce projet, «Genève sur l'eau», premier tome de l'inventaire genevois, est donc pratiquement achevé.
Toutefois, ce projet a failli échouer dans un premier temps, par absence de discernement des objectifs et, dans une certaine mesure, par irresponsabilité.
A ce sujet, l'échec du projet - programmé - auquel nous assistions avant 1993 est révélateur du clivage effarant qui existe entre deux attitudes. L'une moralisante et puritaine - que prennent certains défenseurs de notre patrimoine - et l'autre, celle de la très petite minorité, heureusement, qui n'hésite pas à bloquer pendant des années des projets qui pourraient être réalisés - potentiel d'emplois et de salaires pour la collectivité - si ces minoritaires étaient un peu plus tolérants. Cet aspect égoïste se traduit par la manière confortable dont ils se servent des deniers de l'Etat pour s'assurer des parts de salaire, sans donner la contrepartie en travail scientifique qui est limitée au strict minimum, pour ne pas dire absente.
Cette interpellation urgente est close.