République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1101
6. a) Proposition de motion de Mme et MM. Nicolas Brunschwig, Barbara Polla, Jean-Claude Vaudroz et Hervé Dessimoz concernant les mesures pratiques de responsabilisation collective en faveur de l'emploi. ( )M1101
M 1102
b) Proposition de motion de Mme et MM. Nicolas Brunschwig, Barbara Polla, Jean-Claude Vaudroz et Hervé Dessimoz pour la coopération intercantonale et interrégionale entre les bureaux de placement, notamment lémaniques. ( )M1102

(M 1101)

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que l'emploi reste une préoccupation primordiale des politiques actuelles;

- que s'il est vrai que l'Etat n'est pas le principal maître de l'emploi, il est cependant utile d'explorer les pistes grâces auxquelles il peut favoriser la prise d'emploi plutôt que de pérenniser le chômage,

invite le Conseil d'Etat

- à considérer la possibilité de faciliter, pour les chômeurs qui trouveraient un emploi dans un autre canton, leur déménagement et leur installation, cela en collaboration avec la Confédération, et dans un contexte de réciprocité et de collaboration intercantonale;

- à considérer la possibilité d'une participation de l'Etat, en collaboration avec la Confédération, pour le financement de stages pour jeunes chômeurs dans un autre canton ou à l'étranger;

- à améliorer la formation des chômeurs non seulement en fonction de leurs qualifications mais en fonction de leurs possibilités de réinsertion.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le chômage est le mal socio-économique actuel majeur des pays occidentaux et européens en particulier. Nous sommes convaincus que la meilleure façon de résoudre le problème du chômage à terme est d'investir tous les efforts possibles dans la relance économique et donc la création d'emplois. Cependant, à Genève, il paraît probable que le chômage restera un problème de longue durée, un chômage qui découle aujourd'hui de dysfonctions avant tout structurelles, plus que conjoncturelles. Ces dysfonctions justifient que les moyens pour y remédier bénéficient de l'appui équilibré de tous les intervenants. La solidarité et l'ouverture vis-à vis d'une politique de l'emploi doivent donc inclure tous les partenaires impliqués: les entreprises, l'Etat et les citoyens; chacun doit être prêt à contribuer à la mise en oeuvre de mesures aptes à créer des emplois et toutes les mesures susceptibles de contribuer à la prise d'emploi doivent être considérées. De nombreuses mesures ont été récemment mises en place par le Conseil d'Etat; les propositions faites ici ont pour but d'optimiser encore cet ensemble de mesures.

En ce qui concerne tout d'abord la possibilité que l'Etat, en collaboration avec la Confédération, facilite le déménagement et l'installation de chômeurs qui trouveraient un emploi dans un autre canton, il s'agit ici d'adapter les systèmes mis au point avec succès par certaines sociétés multinationales pour leurs collaborateurs expatriés. Il ne s'agit bien sûr pas d'«expatrier» les chômeurs, mais de favoriser la mobilité intercantonale, à l'intérieur de nos «micromarchés», et cela non seulement par une meilleure coopération entre les bureaux de placement, mais aussi par des mesures incitatives, telle une aide financière ponctuelle, pour le chômeur lui-même qui trouverait un emploi répondant à son attente dans un autre canton. Le marché local du travail n'est pas en mesure d'offrir immédiatement à toutes les personnes à la recherche d'un emploi un poste adéquat. Il faut donc valoriser la mobilité géographique, car l'extension du bassin potentiel d'employeurs et d'employés et la maximalisation des possibilités de déplacement, y compris l'installation, le cas échéant, dans un autre canton, ne peuvent que favoriser la prise d'emploi du plus grand nombre.

Notre deuxième proposition de considérer la possibilité d'une participation de l'Etat, en collaboration avec la Confédération, pour des montants de l'ordre de 33 à 50% et pour une période déterminée d'environ 3 à 6 mois, pour les jeunes chômeurs qui trouvent un stage dans un autre canton ou à l'étranger. Cette proposition rentre dans le même cadre de préoccupations de maximaliser les possibilités de prise d'emploi grâce à la mobilité géographique et au multilinguisme. Il existe d'ores et déjà la possibilité d'effectuer des stages pratiques en Suisse alémanique, d'une durée de 6 mois, stages pratiques qui ont pour objectif de pallier le manque d'expérience professionnelle. Le succès est exemplaire: 55% des jeunes qui effectuent un stage sont engagés directement par l'entreprise concernée. La généralisation de ce type de stage, son extension à l'étranger, la contribution de l'Etat dans un concept de partenariat pour l'emploi, devraient permettre de généraliser ses effets positifs.

Finalement, l'amélioration de la formation des chômeurs devrait encore maximaliser les possibilités de prise d'emploi. Cette formation devrait être conçue non seulement en fonction des qualifications des chômeurs mais surtout en fonction de leur possibilités de réinsertion. En effet, quelles que soient les qualifications des chômeurs, elles ne leur permettent pas nécessairement de retrouver un travail, et ils devraient pouvoir bénéficier d'une formation le plus en rapport possible avec les besoins du marché de l'emploi. Le Conseil économique et social pourrait être impliqué dans les choix et les définitions des formations à offrir aux chômeurs, afin d'assurer que ce type de formation se fasse au mieux en fonction des besoins réels de l'économie, et cela en particulier pour les chômeurs de longue durée. Certaines entreprises pourraient ainsi accueillir des chômeurs (en particulier de longue durée) pour des formations spécifiques, ce qui contribuerait à leur intégration et favoriserait la solidarité. En effet, l'emploi des chômeurs de longue durée pose des problèmes spécifiques qui, s'ils ne sont pas résolus, sont susceptibles d'entraîner l'exclusion individuelle et de mettre en cause la cohésion sociale. Il y a donc lieu de fournir un effort particulier dans ce domaine, car l'augmentation des prestations dans la durée ne peut être en tant que telle une solution au problème de chômage de longue durée. La qualité de la formation des chômeurs ne peut que compléter efficacement les autres mesures incitatives déjà proposées par le Conseil d'Etat pour l'emploi de cette catégorie de chômeurs.

Pour tous les motifs exposés ci-dessus, les proposants de la présente motion vous invitent, Mesdames et Messieurs les députés, à lui réserver bon accueil.

(M 1102)

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que l'emploi reste une préoccupation primordiale des politiques actuelles;

- que le marché de l'emploi local n'est pas en mesure d'offrir immédiatement un poste adéquat à toutes les personnes à la recherche d'un emploi;

- que l'extension du bassin géographique concerné par les recherches d'emploi augmente les chances de trouver un tel poste;

- que la nouvelle législation sur le chômage implique, le cas échéant, que le chômeur accepte un poste de travail justifiant un déplacement quotidien potentiellement important

invite le Conseil d'Etat

à développer rapidement un système de collaboration performant entre bureaux de placement publics par-dessus les frontières cantonales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le chômage est le mal socio-économique actuel majeur des pays occidentaux et européens en particulier. En Suisse romande, il paraît probable que le chômage restera un problème de longue durée, et le marché local du travail n'est pas en mesure d'offrir immédiatement à toutes les personnes à la recherche d'un emploi un poste adéquat. Il faut donc favoriser la mobilité géographique. La nouvelle loi sur le chômage va dans ce sens, puisqu'elle prévoit, le cas échéant, que le chômeur accepte un poste de travail justifiant un déplacement quotidien potentiellement important. Mais encore faut-il favoriser l'applicabilité de la loi en augmentant la qualité de l'information de l'ensemble des acteurs concernés, personnels des services de l'emploi et chômeurs. Il semble fort possible que Genève compte parmi ses chômeurs la personne qui a la qualification précise recherchée par un employeur dans le canton de Vaud par exemple, et réciproquement. L'extension du bassin potentiel d'employeurs et d'employés et la fluidité de l'information ne peuvent que favoriser la prise d'emploi du plus grand nombre.

Pour les motifs exposés ci-dessus, les proposants de la présente motion vous invitent, Mesdames et Messieurs les députés, à lui réserver le meilleur accueil.

Débat

Mme Barbara Polla (L). Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je souhaite vous proposer, dans le but d'être concis, que nous traitions dans un même temps les motions 1101 et 1102, dans la mesure où les considérants sont de la même veine et leurs invites complémentaires.

La présidente. Je mets aux voix la proposition de traiter ces deux motions ensemble.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

Mme Barbara Polla (L). Le chômage, comme nous le savons tous, est un des problèmes majeurs des pays européens, et du nôtre en particulier.

Plus que jamais, nous sommes convaincus que la meilleure façon de résoudre ce problème à long terme est la relance économique. Cela ne nous empêche pas de contribuer, dans la mesure du possible et par les moyens les plus divers, à la prise d'emploi.

Nous ne pouvons pas espérer régler les problèmes du chômage par nos actions seules, mais nous sommes convaincus que nos propositions d'action, en corrélation avec celles mises en place par le Conseil d'Etat en général, et par le département de l'économie en particulier, indiquent des pistes complémentaires pour la prise d'emploi.

Les propositions sur lesquelles nous travaillons appartiennent à quatre domaines différents :

Premièrement, il s'agit des actions fiscales. A ce titre, l'Entente a déposé plusieurs projets de lois devant ce parlement, actuellement à l'étude à la commission de l'économie. Deuxièmement, des actions favorisant la formation et sur lesquelles nous reviendrons avec les motions 1096 et 1103. Troisièmement, celles en faveur d'une meilleure gestion interne du problème du chômage - ces deux motions se situent dans ce cadre. Quatrièmement, les actions concernant la création, l'innovation, le crédit, la promotion, le financement et la pérennité des entreprises, sujets dont nous avons abondamment parlé hier, et sur lesquels nous reviendrons.

Pour revenir aux propositions de motions 1101 et 1102, il nous paraît évident que le marché local du travail n'est pas en mesure d'offrir immédiatement un poste adéquat à toutes les personnes à la recherche d'un emploi. Par contre, le poste recherché existe peut-être dans un autre canton. Dans ce cas, nous proposons que le Conseil d'Etat prenne en considération la possibilité de faciliter le déménagement et l'installation des chômeurs désirant se déplacer et trouver un emploi ailleurs. Par voie de conséquence, leur prise d'emploi serait facilitée. Naturellement, ce procédé serait réalisable dans un contexte de collaboration intercantonale et de réciprocité.

S'agissant de la motion 1102, nous proposons une meilleure collaboration entre les bureaux de placement publics intercantonaux, en particulier dans la région lémanique. L'extension du bassin potentiel d'employeurs et d'employés, le développement d'un système performant de communications et d'interactions entre ces bureaux de placement devraient favoriser la prise d'emploi du plus grand nombre. Cette mobilité n'est pas seulement importante pour rendre maximales les chances des chômeurs de trouver un emploi, elle est aussi essentielle pour la qualité de la formation des jeunes. Nous y reviendrons.

Nous désirons que le Conseil d'Etat considère la possibilité de financer partiellement des stages, dans d'autres cantons, en Suisse alémanique ou à l'étranger, pour les jeunes. L'adaptabilité et le multilinguisme qui découlent de cette mobilité favoriseront la prise d'emploi des jeunes. Il est établi que ce type de démarches, par exemple en entreprise, favorise leur prise d'emploi. Dans un contexte de partenariat, nous souhaitons généraliser les effets positifs de ce type de stages en vue de favoriser l'emploi.

Finalement, la dernière invite de la motion 1101 concerne la formation des chômeurs et, plus spécifiquement, celle des chômeurs de longue durée. Nous proposons que cette formation se fasse au moins autant sur la base des besoins du marché que sur celle de la formation antérieure des chômeurs.

Le Conseil économique et social pourrait contribuer à définir les besoins et les formations à offrir à cette catégorie de chômeurs, de façon qu'elles soient le plus possible en rapport avec les besoins du marché de l'emploi et que les occupations temporaires deviennent plus souvent des occupations définitives et, à proprement parler, un travail.

En conclusion, ces différentes mesures sont susceptibles de contribuer à améliorer la prise d'emploi. Je vous remercie de bien vouloir renvoyer les deux motions à la commission de l'économie où elles pourront certainement être améliorées et concrétisées par ses excellents commissaires.

Mme Claire Chalut (AdG). En prenant connaissance de cette motion, on se souvient d'un passé pas si éloigné. J'ai l'impression que l'on veut instaurer une sorte de marché, je ne dirai pas «d'esclaves» pour être polie, mais tout de même... Dans les années 70, au début de la crise économique, la première action de la Suisse fut de renvoyer les étrangers. Elle pensait résoudre ainsi le problème du chômage. Malheureusement, tel n'a pas été le cas.

Ces deux motions me font penser que, si Genève veut résoudre son problème de chômage, elle demandera au canton d'accepter ses chômeurs ou, sinon, elle les invitera à aller chercher du travail ailleurs...

On se demande si les chômeurs auront l'obligation de se livrer à cette opération, car, si tel était le cas, on se poserait la question de la libre circulation, du libre choix de prospecter d'abord ici avant d'aller ailleurs.

Je ne sais pas si vous voulez renvoyer ces motions en commission, mais, pour ma part, je les mettrais bien ailleurs !

Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Madame Polla, je n'aime pas vos motions !

Une voix. Oh !

Mme Fabienne Blanc-Kühn. Je ne les aime pas, car elles me rappellent un débat en commission de l'économie où vous nous avez fait un grand laïus pour nous expliquer que les chômeurs étaient comme des cellules biologiques qui manquaient de stimulation et qu'une des stimulations possibles était, notamment, de couper les indemnités. Alors, Madame Polla, je n'aime pas vos motions, et je vais vous expliquer pourquoi !

Vous défendez la mobilité professionnelle, l'ouverture sur d'autres horizons et vous nous proposez des mesures qui sont pour le moins discutables. C'est ainsi, selon vous et les autres motionnaires, qu'une aide ponctuelle pourrait être envisagée si la personne, préalablement au chômage, trouve un emploi dans un autre canton.

Le problème majeur n'est pas celui du déplacement - pour cela, on pourrait demander à votre collègue Balestra de procéder au déménagement ! - mais bien de trouver un emploi. Hélas, si je me réfère aux statistiques suisses, je suis bien obligée de remarquer qu'une personne francophone souhaitant travailler dans l'arc lémanique aura bien peu de chances.

Je vous renvoie aux dernières statistiques suisses de chômage, en ce qui concerne les cantons : Vaud : 8,3% de chômage; Valais : 8,9%; Neuchâtel : 6,3% et Jura : 7,4%... J'imagine que vous connaissez le taux de chômage à Genève qui est de 7,8% !

A mon avis, Madame Polla, si, en plus, vous voulez développer les échanges linguistiques, il ne vous reste plus qu'Appenzell Rhodes-Extérieures avec 2,7% ou Appenzell Rhodes intérieures où vous ferez réellement une percée, car le taux de chômage ne s'élève qu'à 2%. Voilà pour l'échange linguistique !

La difficulté rencontrée par ces personnes est donc bien de trouver un poste de travail, et cette difficulté est bien réelle. Quant aux stages dans les entreprises, auxquels vous faites allusion, je vous renvoie à une lecture attentive de la loi fédérale sur l'assurance-chômage, dans laquelle vous trouverez toutes les réponses aux questions que vous posez dans cette motion.

En ce qui concerne la formation, là encore, même si les motionnaires invoquent des raisons structurelles à la crise, les moyens qu'ils nous proposent restent ponctuels et inadéquats. Bien entendu, une bonne formation professionnelle et un solide perfectionnement favorisent l'emploi, mais - et les statistiques de chômage, encore elles, le démontrent - il manque des postes de travail. Le travail existe, bel et bien, mais, par contre, les postes manquent.

Donc, la politique incitative doit aussi être menée par le patronat en engageant du personnel. Le seul moyen possible est certainement de diminuer le temps de travail, afin de garantir à chacun le droit au travail et à l'existence, le droit à la stimulation, direz-vous !

Le groupe socialiste, au vu de l'inadéquation des mesures qui sont proposées, vous propose de rejeter cette motion.

M. Pierre-Alain Champod (S). Nous ne sommes d'accord qu'avec un seul des considérants, soit que le problème de l'emploi est actuellement le plus grave des problèmes sociaux et économiques.

En ce qui concerne l'invite de la deuxième motion, la 1102, nous ne serions pas opposés à une meilleure collaboration entre les bureaux de placement de Genève et ceux des cantons voisins, mais encore faudrait-il que l'office cantonal de l'emploi fonctionne de manière satisfaisante à Genève !

En revanche, comme l'a dit ma collègue, nous avons des doutes sur l'efficacité de ces mesures, compte tenu du taux élevé de chômage dans l'ensemble de la Suisse romande.

Un autre point relève d'une incohérence dans vos rangs. A travers ces motions, votre discours est d'encourager la mobilité. Il convient que, en fonction des emplois qu'ils trouvent, les gens puissent passer d'un canton à l'autre. Or, dans beaucoup de lois, votre groupe freine la mobilité en augmentant la durée des délais de séjour donnant droit à des prestations.

Par exemple, dans le domaine du logement social, vous proposez que les gens résident non plus deux ans, comme c'est le cas actuellement, mais cinq ans pour pouvoir bénéficier d'une aide au logement ou d'un logement subventionné. Imaginons le cas d'une personne au chômage, trouvant un emploi dans le canton de Neuchâtel et bénéficiant, grâce aux dispositions de la LACI, d'une aide pour son déplacement dans le canton de Neuchâtel. Cette personne y travaille une année et perd son emploi. Compte tenu des liens sociaux qu'elle a à Genève, elle décide d'y revenir. Durant cinq ans, elle n'aura pas droit à bénéficier d'un HLM ou d'une allocation logement. Idem pour les mesures cantonales d'aide aux chômeurs. Le délai est actuellement d'une année et vous proposiez, en commission, de le porter à deux ans.

Ou on est pour la mobilité, et on encourage les gens par tous les moyens à passer facilement d'un canton à l'autre, ou on est contre. Mais on ne peut pas être une fois pour et une fois contre.

Sur ce point, vous manquez de cohérence, car votre vision des problèmes de notre société n'est pas globale. C'est pourquoi le groupe socialiste ne soutiendra pas ces motions.

M. Hervé Dessimoz (R). Mesdames et Messieurs les députés...

La présidente. Je ne vous entends pas, Monsieur Dessimoz, car M. Ducommun rit trop fort.

M. Hervé Dessimoz. Je suis très déçu de la position de la gauche sur ces motions. J'ai le désagréable sentiment d'un règlement de compte par rapport au débat précédent. En effet, les choses que j'ai entendues m'étonnent de la part de personnes qui, jusqu'à ce jour, m'avaient habitué à une honnêteté intellectuelle que je respectais. (Rires.) J'ai entendu parler de «marché d'esclaves». M. Clerc, tout à l'heure, dans son discours sur la logique du profit, a parlé de «motions empreintes de nostalgie» ainsi que de «logique de survie». Comme chef d'entreprise, tous ces propos me paraissent... vraiment nostalgiques.

Aujourd'hui, il convient de veiller à la survie de l'entreprise. Le chef d'entreprise, ses collaborateurs et ses employés essaient de trouver des solutions pour assurer sa pérennité. Ils veulent sauvegarder l'emploi pour préserver la dignité de chacun dans son droit au travail. On parle du droit au logement, mais personne ne veut défendre le droit au travail.

Ce n'est pas avec des lois ou des règlements que le droit au travail sera donné, mais grâce à la volonté de chacun de prendre la responsabilité d'assumer l'engagement collectif pour faire front à des conditions qui ne sont pas dépendantes de la politique locale, mais de la compétition internationale. Dans tous les cas, nous ne pourrons pas combattre cette compétition à l'aide de ce genre de débats, ni même en votant des lois au Parlement fédéral. Il nous faut compter sur la seule volonté de survivre, car, en ce moment, on parle de «survie» !

Mme Polla, qui s'est exprimée en premier lieu sur ce sujet, a porté le débat sur le problème de la mobilité. Dans une autre motion, qui sera traitée au chapitre du département de l'instruction publique, nous parlerons des plans de carrière pour jeunes diplômés universitaires. Cela peut paraître un peu fragmentaire - nous sommes d'accord - mais c'est une hérésie de dire aux gens sans emploi à Genève que l'Etat et les entreprises sont les seuls à pouvoir solutionner leurs problèmes.

La solution est dans la mobilité, dans la volonté de trouver, par soi-même aussi, des possibilités de travailler. D'ailleurs, cette solution n'est pas nouvelle, puisque nos ancêtres acceptaient déjà de s'expatrier. Je me rappelle que de nombreuses familles de la Suisse romande sont parties en Amérique du Sud pour y chercher des emplois, car leur dignité n'était pas garantie en Suisse.

Je ne comprends donc pas votre langage réducteur. Au fond, cette motion n'est pas du tout politique, mais montre la volonté affirmée d'un parlement d'aider des gens à trouver un emploi, même si cet emploi se trouve ailleurs que dans le petit cocon bien confortable de notre République.

Si le taux de chômage est élevé en Suisse, c'est en raison de la passivité de ses ressortissants. Ces derniers sont passifs, parce qu'on leur promet monts et merveilles : le partage du temps de travail, donc. Par expérience, je sais que le fossé s'élargit entre ceux qui ont du travail et ceux qui n'en ont pas. Les conditions économiques font que les employés doivent travailler deux fois plus qu'avant et, malheureusement, au détriment des désoeuvrés.

Mais cela, Madame Blanc-Kühn, vous ne le changerez pas ! Il s'agit d'un réseau économique international qui ne répond à aucune logique. Nous n'avons pas la capacité de lutter contre cette situation. Je ne dis pas que cette dérive est acceptable, mais je ne vois pas encore comment la maîtriser et nous réorienter.

C'est pourquoi chaque contribution apportée à la recherche d'un poste de travail, même si ce dernier se trouve à une longue distance, m'apparaît être une chose positive. C'est pourquoi, en dehors de toute appréciation politique, je vous demande d'accepter le renvoi de ces motions à la commission de l'économie.

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. C'est un bien curieux débat ! Du côté des motionnaires, on manque singulièrement d'informations, tandis que, de l'autre, on fait montre d'un bel amalgame de sophismes.

Il faut renvoyer ces objets en commission, car la première motion concernant les mesures dites de «responsabilisation collective» en faveur de l'emploi touche un dispositif existant dans la LACI, dont il faut que vous preniez connaissance. Dans sa nouvelle version, le droit fédéral prévoit l'ensemble des dispositions que vous suggérez, sauf une : celle de l'indemnité de déménagement. A ce propos, nous sommes intervenus auprès de l'OFIAMT pour savoir si l'on pouvait transformer des frais de déplacement, possibles sur une durée de six mois, en une indemnité de déplacement. Cette administration s'y refuse.

Quant à la coopération entre les offices de placement, sachez que des systèmes de communications extrêmement poussés existent entre eux ! Le vrai problème n'est pas là. Vous pouvez développer toute la coopération que vous voudrez entre les offices de placement de tous les cantons possibles et imaginables, si vous n'avez pas plus de «boulot» à offrir que ce que le nombre de chômeurs requiert, vos systèmes informatiques de coopération les plus performants deviennent limités.

Mais, au-delà de toutes ces considérations, nous pourrons approfondir ce débat en commission, de façon que vous ayez les informations nécessaires pour faire une analyse critique du système existant et déterminer s'il fonctionne. Dans le cas contraire, il conviendra de voir si on peut l'améliorer ou si nous avons la capacité, en fonction de nos compétences cantonales, de proposer un système plus performant.

M 1101

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'économie.

M 1102

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'économie.