République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7527
27. Projet de loi de MM. Pierre Vanek, René Ecuyer et Christian Ferrazino modifiant la loi sur les constructions et les installations diverses (ascenseurs et monte-charge) (L 5 1). ( )PL7527

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, est modifiée comme suit:

Art. 125 A (nouveau)

1 Le règlement d'application édicte les dispositions relatives aux ascenseurs et monte-charge, plus particulièrement en ce qui concerne les prescriptions de sécurité.

2 Les propriétaires d'ascenseurs et monte-charge existant au moment de l'entrée en vigueur du présent article sont tenus de faire adapter leurs installations aux prescriptions de sécurité édictées par le règlement d'application dans un délai d'un année à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. Ce délai peut être prolongé si un propriétaire démontre qu'il n'a pu effectuer l'adaptation prescrite, du fait de la surcharge de travail des entreprises spécialisées.

3 Le département est tenu d'aviser les propriétaires d'immeubles du contenu du présent article et de l'obligation qui leur est faite de lui adresser dans le délai précité une attestation du service d'entretien de leurs ascenseurs et monte-charge confirmant que ceux-ci répondent aux exigences de sécurité du règlement d'application.

4 Le département fait apposer dans les ascenseurs non conformes des mises en garde illustrées sur le danger que présente l'absence de porte intérieure.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 28 août 1995 les auteurs du présent projet de loi avaient déposé le projet de loi 7283. Celui-ci visait à fixer un délai de six mois aux propriétaires d'immeubles dont les ascenseurs présentent un danger pour les utilisateurs pour qu'ils fassent adapter leurs installations.

Ce projet de loi était consécutif à plusieurs accidents dramatiques. Chacun a pu prendre connaissance par la presse des détails douloureux de ces accidents auxquels nous nous devons de mettre un terme une fois pour toutes.

Lors de l'examen du projet de loi en commission, le département des travaux publics et de l'énergie a insisté pour qu'un règlement soit adopté pour régler cette question, cela en lieu et place d'une loi, avec un délai de cinq ans accordé aux propriétaires, délai présenté comme nécessaire pour adapter tous les ascenseurs hors normes.

Une telle disposition réglementaire était adoptée en octobre 1995.

Or, de nouveaux accidents sont malheureusement survenus de manière répétée depuis lors et démontrent l'urgence de faire adapter les installations hors normes. Le règlement, en vigueur depuis près d'une année, n'a eu pour effet que l'adaptation d'un nombre très réduit d'ascenseurs, soit 80 installations sur 5 000, c'est-à-dire moins de 2% des installations à assainir, selon les informations fournies par M. Philippe Joye lors de la séance du Grand Conseil du 19 septembre 1996 suite aux questions que nous lui avons adressées.

S'il est clair que l'adaptation de l'ensemble des installations prendra un certain temps, il semble aujourd'hui particulièrement évident que de fixer à cinq ans le délai pour procéder à ces travaux conduira de nombreux propriétaires à attendre le dernier moment - soit la fin de l'an 2000 ! - pour décider de procéder aux adaptations requises. Cela est inadmissible!

Par ailleurs, si les propriétaires attendent en grand nombre l'ultime moment pour exécuter les travaux requis, non seulement il se sera écoulé un délai bien trop long, mais encore il faudra sans aucun doute un nouveau délai supplémentaire, assez long lui aussi, pour atteindre enfin le résultat souhaité.

Il est dès lors indispensable de fixer un délai raisonnable maintenant, pour la mise en conformité des ascenseurs afin d'éviter une nouvelle série d'accidents.

C'est là le but essentiel visé par ce projet de loi. Nous proposons un délai d'une année qui devrait, selon les renseignements dont nous disposons, être suffisant pour assurer l'adaptation de l'ensemble du parc d'installations à modifier. Si tel ne devait cependant pas être le cas nous avons prévu une disposition permettant de prolonger ce délai, mais cela à la seule condition que le propriétaire n'ait pas pu réaliser l'adaptation prescrite du fait de la surcharge des entreprises spécialisées.

Il est enfin indispensable qu'une mise en garde claire, sous forme d'illustration, soit apposée dans tous les ascenseurs hors normes pour attirer directement l'attention des enfants sur les dangers que posent ceux-ci. Il est évident qu'un texte supplémentaire aux règlements affichés dans les ascenseurs ne répond pas de façon adéquate à cette préoccupation de mise en garde, c'est le sens du quatrième alinéa de l'article unique de notre projet.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les député-e-s, à réserver un bon accueil au présent projet de loi.

Préconsultation

Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). N'en déplaise à certains, nous reparlerons des ascenseurs !

Rien n'est plus important que la sécurité de nos enfants et pourtant certains ne semblent pas en être conscients; pour preuve, les adaptations ralenties, par manque de diligence, des ascenseurs dangereux pour les utilisateurs.

A croire que les enfants sont eux-mêmes responsables de ce qui peut leur arriver, qu'ils doivent faire attention et que leurs parents doivent mieux s'en occuper ! Nous avons entendu : «Ces ascenseurs existent depuis quarante ans, et ces accidents ne surviennent que maintenant ! Les enfants sont indisciplinés, les parents n'ont qu'à être là. Ces ascenseurs étaient utilisés quand nous-mêmes étions des enfants.»

Et alors ? La peine infligée à ces «petits voyous» a été terrible : un mort et plusieurs mutilés. Que dire aussi du chagrin de leurs parents ? Quel a été le crime de cet enfant qui a eu un bras et la main de l'autre arrachés, alors qu'il tentait de rattraper son ballon dans un ascenseur hors normes ? Celui de n'être accompagné que de sa grande soeur, qui n'a pas eu le temps de réagir ?

Le monde change et les enfants aussi. Tout va plus vite, tout s'exacerbe.

Le rôle des parents est d'aimer et d'éduquer leurs enfants, afin qu'ils comprennent les dangers et les limites. Nous ne pouvons pas faire leur travail, mais nous devons faire le nôtre qui est celui de légiférer, d'adapter les lois par rapport aux demandes et aux changements.

Dans le cas présent, notre rôle est d'éviter d'autres accidents. Nous devons agir très vite. Comme le soulignent les auteurs du projet de loi, il est indispensable qu'une mise en garde claire, sous forme d'illustration, soit apposée dans tous les ascenseurs hors normes pour attirer directement l'attention des enfants sur les dangers encourus.

Il urge de ramener à un an le délai accordé aux propriétaires pour adapter les installations hors normes. Cinq ans, c'est beaucoup trop long, car nous savons que les propriétaires attendront le dernier moment - comme le démontrent les informations fournies par M. Philippe Joye, lors de la séance du Grand Conseil du 19 septembre 1996 - pour procéder aux adaptations requises.

Ce projet de loi est réaliste, parce qu'il tient compte de la possibilité de surcharge des entreprises spécialisées.

Imaginez, Mesdames et Messieurs les députés, que ce soit un enfant de votre famille qui soit tué ou mutilé dans l'un de ces ascenseurs. Vous pourrez toujours dire qu'il n'avait pas à y jouer, ni à y entrer avec ses patins à roulettes, que ses parents auraient dû le surveiller, mais vous penserez, j'en suis convaincue, que cet ascenseur n'aurait plus dû exister.

Il faut réduire le délai imparti à une année, comme le demande le projet de loi, afin que ces accidents ne fassent plus jamais l'objet de nos débats.

C'est pourquoi les socialistes vous demandent d'accepter ce projet de loi.

M. Pierre Vanek (AdG). En tant que coauteur de ce projet de loi, j'estime que Mme Castioni-Jaquet a dit l'essentiel.

Je rappelle que nous avions déjà déposé un projet de loi dans ce sens, et je ne reviendrai pas sur le parcours du combattant suivi devant ce Grand Conseil.

Je me concentrerai sur le présent projet de loi qui demande l'assainissement des installations défectueuses dans un délai d'un an. Ce délai est plus restrictif que la disposition réglementaire datant d'octobre 1995. En revanche, il est plus long que celui prévu dans la première mouture de ce projet de loi.

Ce délai d'une année est fixé pour inciter les régies et les propriétaires immobiliers à procéder rapidement à cet assainissement. M. Joye a indiqué que 2% seulement des ascenseurs défectueux avaient été normalisés. A ce rythme, il faudrait attendre des décennies pour que l'ensemble soit conforme.

Prétendre ne pas pouvoir fixer un délai plus court que cinq ans, c'est arguer que les entreprises n'ont pas la capacité d'effectuer les travaux dans ce laps de temps. Aucune obligation n'est d'ailleurs faite aux propriétaires de commencer les travaux avant l'échéance de ce délai de cinq ans. Nous nous retrouverons avec des demandes de dérogation, des blocages, au terme de ces cinq ans, ce qui reportera bien au-delà de l'an 2000 le jour où le canton sera entièrement doté d'ascenseurs conformes.

Notre disposition consiste donc à fixer ce délai d'un an, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, mais à prévoir aussi d'éventuelles dérogations pour les entreprises qui prouveraient n'être pas en mesure de faire leur travail dans ledit délai.

En d'autres termes, cela signifie mettre la machine en marche immédiatement et énergiquement.

Comme ce projet figure pour la quatrième fois à notre ordre du jour, les régies et propriétaires concernés ont déjà bénéficié d'une prolongation de quatre mois.

Notre projet de loi apporte une solution sensée, et nous vous demandons de l'accueillir avec tout l'intérêt qu'il mérite.

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Je félicite le département des travaux publics d'avoir bien voulu exaucer le voeu de certains commissaires en diffusant l'affichette «Attention, danger !».

Cette affichette, aux couleurs de Genève, est visible et très didactique. Elle dissuadera les enfants de faire des gestes malencontreux, le temps que les ascenseurs soient remplacés dans le délai légal.

Néanmoins, le parti radical propose de renvoyer ce projet de loi à la commission de la LCI.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. J'ai eu l'occasion de dire à quel point l'objet du projet de loi 7527 préoccupe notre département.

Ce projet de loi comporte trois volets. Le premier demande l'abaissement du délai de cinq ans à deux, voire un an. Les travaux d'assainissement peuvent être effectués par douze sociétés environ. En effet, si vingt et une sont connues pour faire des réparations d'ascenseurs, neuf d'entre elles ne sont responsables que d'une ou deux montées. Cinq mille cinq cents ascenseurs sont en cause, et nous avons beaucoup de peine à obtenir les réfections. Notre loi est entrée en vigueur l'année passée et seulement trois cents ascenseurs environ - excusez-moi de ne pouvoir vous donner le chiffre exact - ont été réparés à ce jour.

J'ai demandé à l'ensemble des régies d'établir des soumissions et de les envoyer à toutes les sociétés propriétaires des immeubles. Cela suit, mais encore faut-il que ces sociétés procèdent aux transformations et en acceptent le financement.

J'ai averti les régies que je serai obligé d'envisager des mesures contraignantes si elles ne rattrapaient pas, à fin 1997, le retard qu'elles ont pris par rapport au délai de cinq ans. Ce délai permet de réparer environ mille cent ascenseurs par an, soit trois ou quatre par jour, ce qui est beaucoup.

Le travail est plus complexe qu'il n'en a l'air, et les sociétés spécialisées ne seront pas en mesure d'exécuter toutes les transformations nécessaires en une année - et j'en suis certain - pas plus qu'en deux.

J'ai écrit à tous les propriétaires pour leur faire part de ce que je viens de vous dire. J'ai adressé les mises en garde que vous avez sous les yeux et je tiens les affichettes à disposition.

Je ne m'oppose absolument pas à ce que ce projet soit renvoyé à la commission de la LCI. J'insisterai encore auprès des régies pour connaître les décisions récentes des propriétaires.

La transformation d'un ascenseur coûte de 30 000 à 60 000 F, ce qui ne saurait, en aucun cas, constituer un prétexte pour ne pas y procéder. Néanmoins, ce financement doit être trouvé.

Ce projet est renvoyé à la commission LCI.