République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 janvier 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 2e session - 1re séance
IU 289
Mme Vesca Olsommer (Ve). Mon interpellation s'adresse à M. Gérard Ramseyer.
L'émission «Mise au point» du 19 janvier de la Télévision suisse romande a été partiellement consacrée à la pornographie dite «dure», pénalement punissable, parce que se pratiquant notamment avec des enfants.
Les journalistes ont stigmatisé une distribution de plus en plus massive, dans les boîtes aux lettres romandes, de publicités non réclamées proposant du matériel pornographique - revues et cassettes - et le rendant ainsi très accessible.
Les journalistes ont démontré que la pédophilie y est omniprésente, parce que recherchée et demandée. Ce matériel pornographique passe sans autre les frontières.
Interrogé sur les conséquences de cette large distribution, un psychologue en a dénoncé deux effets :
Premièrement, la levée partielle des interdits sociaux. La pornographie dure, c'est O.K. ! Deuxièmement, ce matériel pornographique induirait, selon certaines doctrines, le passage à l'acte. C'est extrêmement grave.
Le procureur général du canton, M. Bertossa, a été invité à s'exprimer. Or le procureur, pour qui j'ai beaucoup de respect, a déclaré : «J'admets que la lutte contre la pornographie, en tant que telle, n'est pas ma priorité.» Il a expliqué que d'autres délits, comme la corruption, mettaient davantage la démocratie en danger. Il a sans doute raison.
Je ne vous interpelle pas, Monsieur le conseiller d'Etat, sur la sphère de compétence du procureur général. Après tout, il est libre de choisir ses priorités! En revanche, j'attire votre attention sur le fait que la distribution de ce matériel suscite une inquiétude grandissante, et je vous demande comment vous entendez la calmer, en votre qualité de chef du département de justice et police en charge, du moins partiellement, de la moralité publique.
Dire que la pénalisation de la pornographie en tant que telle n'est pas prioritaire pour le Parquet ne peut que provoquer des appréhensions, car c'est ignorer le glissement de la pornographie non punissable à la pornographie punissable. C'est ignorer ce que répètent sans arrêt les associations de protection des enfants contre les abus sexuels, à savoir que le matériel pornographique sert de catalyseur et, plus grave, c'est désigner le canton de Genève comme un lieu où l'on peut faire commerce de pornographie sans grand risque et en gagnant gros.
Les paroles du procureur nous inquiètent. Dès lors, on se demande qui prend véritablement ce problème au sérieux, et l'on se tourne vers la police.
Aussi je vous demande, Monsieur Ramseyer, si la saisie de ce matériel pornographique, notamment aux frontières, s'effectue selon une politique concertée et volontariste, ou si le laxisme est bien celui que l'émission télévisée donnait à entendre.