République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 janvier 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 2e session - 1re séance
IU 283
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai reçu récemment une enveloppe de cette couleur et de ce format, comme nous en recevons tous des dizaines. Je l'ai ouverte, et je me suis aperçu ensuite qu'elle ne m'était pas adressée à moi, mais à mon fils qui a 16 ans et demi...
Une voix. C'est pas poli !
M. Pierre Vanek. C'est une maladresse de ma part dont je me suis excusé !
Cette enveloppe n'était pas cantonale, mais fédérale contenant - et il y a une certaine continuité avec le sujet de mon interpellation précédente - une invitation d'un certain nombre de sociétés cantonales de tir à s'inscrire pour une formation d'une vingtaine d'heures ou de huit demi-journées, je crois, au fusil d'assaut. Je trouve assez incroyable qu'une telle invitation soit adressée à des mineurs de ce canton, dans le but de les former avec des engins de mort, avec du matériel de guerre, tout cela avec la caution officielle de la Confédération... Mesdames et Messieurs, cela me fait gentiment sourire que l'on discute dans ce parlement de prévention de violence à l'école et de toutes sortes de choses intéressantes, alors même qu'on légitime la violence en envoyant de telles convocations à des mineurs !
Pour les justifier, on dit que ces cours sont destinés à initier les jeunes à la pratique d'un sport. Mesdames et Messieurs, franchement... (L'orateur est interpellé.) Une activité saine, me dit-on en face ! Franchement, s'il s'agissait de faire de la propagande en faveur du sport en tant que tel, j'oserais espérer que l'éventail offert serait un peu plus large... (Exclamations.) ...que d'apprendre à se servir d'un fusil d'assaut !
Une voix. Plus bas !
M. Pierre Vanek. Je vais me faire tout doux !
S'il s'agit de sport, alors il y a là une discrimination scandaleuse, parce que cette offre de sport n'est adressée qu'aux jeunes filles et jeunes hommes de nationalité suisse, et je ne vois pas pourquoi les résidents de ce canton - des jeunes gens d'autres nationalités établis ici et qui fréquentent nos écoles - seraient privés d'une telle activité sportive !
Mais, assez plaisanté, il est clair que le but de ces cours est une préparation militaire. Et il est à mes yeux inadmissible que l'on propose une préparation militaire à des mineurs sachant le nombre d'enfants de par le monde qui doivent porter les armes par la contrainte. Des scènes horribles, actuelles et passées, me viennent à l'esprit. Des écoles de recrues existent pour la formation des militaires; un service civil existe pour ceux qui ne veulent pas y aller - service qu'il vaudrait mieux promouvoir que les cours de tir !
Ma question, Monsieur le conseiller d'Etat, est la suivante :
Qu'entendez-vous faire pour faire cesser ce scandale consistant à adresser des courriers «obscènes» à des mineurs ? (Rires.) Je pèse mes mots; pour faire de la sémantique, «obscène» signifie : qui blesse la pudeur, c'est-à-dire une réserve qui évite de choquer le goût des autres et de les gêner moralement. La morale et le goût d'un certain nombre d'entre nous sont choqués d'un tel état de fait. Si vous êtes impuissant, Monsieur le conseiller d'Etat... (Remarques et rires.) ...parce que c'est du ressort fédéral, à faire cesser ce scandale, alternativement, quel contrepoison pourrions-nous utiliser ?