République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 7 novembre 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 12e session - 43e séance
GR 148-1 et objet(s) lié(s)
4. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :
M. A. R. , 1954, France, restaurateur, recourt contre le solde de l'amende.
Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. M. A. R., né le 18 septembre 1954, est français et restaurateur. Il a été condamné à 2 000 F d'amende pour infractions à la loi fédérale sur le séjour des étrangers. Ayant versé un acompte, il doit encore 1 500 F. Il demande la grâce pour ce solde, en tout ou en partie.
Son épouse s'occupait d'un restaurant à l'avenue du Mail, qui a fait faillite. C'est dans ce cadre d'activité que le couple a engagé des travailleurs non déclarés. M. et Mme A. n'ont pas contesté les faits. Il faut relever que Mme A. R. a été graciée pour une partie de l'amende dont elle avait été sanctionnée.
Au vu de la situation financière très précaire du couple, la commission de grâce vous propose de ramener le montant du solde de l'amende à 700 F.
Mis aux voix, le préavis de la commission (réduction du solde de l'amende à 700 F) est adopté.
Mme C. A. , 1964, Vaud, dessinatrice en bâtiment, recourt contre le solde de la peine de réclusion, soit 2 ans, 9 mois et 21 jours.
M. Henri Gougler (L), rapporteur. Mme C. A., née le 15 novembre 1964 à Genève, originaire de Montreux/Vaud, célibataire, a été condamnée, le 28 août 1992, par le Tribunal de police de Genève, à quatre ans de réclusion pour détention et commerce de stupéfiants. En date du 7 décembre 1992, cette peine a été ramenée à trois ans de réclusion par la Chambre pénale de la Cour de justice - du fait que l'inculpée n'avait aucun antécédent judiciaire - ceci sous déduction de deux mois et dix-sept jours de détention préventive. Le 18 décembre 1991, elle avait d'ailleurs été libérée provisoirement après la détention préventive susmentionnée, sous condition de se soumettre à des analyses d'urine et à des visites régulières chez un psychologue ou un psychiatre.
Depuis lors, elle a trouvé un emploi stable et, grâce à sa volonté de s'en sortir et aux traitements des docteurs M. P. et P. S., elle a pu suivre une cure de substitution à la méthadone, puis un sevrage de cette substance, chose particulièrement difficile. Depuis près de trois ans, elle ne consomme plus d'héroïne ni de méthadone. Elle semble être sortie définitivement de cet engrenage, ainsi que l'attestent les certificats de ses médecins et les analyses d'urine effectuées en laboratoire.
Pratiquement, elle paraît définitivement stabilisée. Elle travaille à plein temps dans un bureau et donne toute satisfaction à son employeur.
Amenée à la drogue par un ami, Y.-P. B., lors d'un séjour en Inde en 1985, elle a aidé celui-ci en vendant pour lui de l'héroïne et de la cocaïne à quelques reprises, ce qui permettait au couple de s'en procurer pour lui-même. Son ami, incarcéré à Champ-Dollon pour les mêmes raisons, est mort accidentellement le 1er juin 1995, à 33 ans, le lendemain de sa sortie de prison.
Actuellement, Mme C. A. vit dans l'angoisse de devoir subir le restant de sa peine. Elle est sevrée et sortie de l'engrenage de la drogue depuis trois ans. Elle travaille régulièrement et mène une vie normale. Une incarcération serait pour elle un traumatisme susceptible de causer une rechute. Elle a eu la volonté de s'en sortir et fait partie du petit contingent des 2 à 4% des toxicomanes guéris.
Dans ces conditions, à vrai dire médicalement assez exceptionnelles, la commission s'est prononcée à l'unanimité - malgré le préavis négatif du Procureur général - pour l'acceptation de son recours en grâce, soit la remise de la peine de deux ans, neuf mois et vingt et un jours de réclusion. Je vous propose d'en faire autant.
M. Bernard Clerc (AdG). Je n'interviendrai pas sur le préavis de la commission de grâce. Je désire simplement manifester ma surprise de voir cité, dans le compte rendu, le nom d'une personne qui n'a rien à voir avec la requérante et qui, de plus, est décédée. Le devoir de discrétion exigeait que l'on taise le nom de cette personne.
Mis aux voix, le préavis de la commission (remise du solde de la peine de réclusion) est adopté.
M. M. J.-F. , 1964, France, technicien en téléphonie.
Mme Claire Chalut (AdG), rapporteuse. M. M. J.-F., de nationalité française, est né le 15 juin 1964. Il vit à Arbusigny et travaille à Saint-Genis pour le compte d'une entreprise intérimaire. Lors d'un contrôle, le matin du 17 juillet 1996, M. M. J.-F., en conduisant sa moto pour se rendre à son travail, a enfreint la loi sur la sécurité routière. En retard et, par conséquent, pressé de se rendre à son travail, il a fait ce qu'il ne fallait pas : il a roulé à plus de 100 km/h, sur la route Blanche où la vitesse est limitée à 60 km/h. Le 6 août 1996, il a été condamné à 1 700 F d'amende. Il est à noter que M. M. J.-F. n'a pas d'antécédents judiciaires et a reconnu, par ailleurs, les faits pour lesquels il a été condamné.
Il ne demande pas la radiation de son amende, mais, vu sa situation pécuniaire - il est employé dans une maison de travail intérimaire - il sollicite notre Grand Conseil pour que cette amende soit revue à la baisse.
Néanmoins, à la majorité de la commission, nous vous proposons le rejet de ce recours.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. R. D. , 1965, France, aide-décolleteur.
Mme Claire Chalut (AdG), rapporteuse. Je suis gênée par les commentaires tenus derrière mon dos, plus exactement à la gauche de mon épaule. Si du moins on les faisait à voix basse pour que je n'entende rien !
M. R. D., de nationalité française, est né le 23 septembre 1965. Il vit à Amancy et travaille à Morlaz, France. L'après-midi du 26 juin 1996, au volant de sa voiture de marque BMW, il s'est rendu, à l'appel de son frère, au chevet de sa mère qui souffrait d'une crise de spasmophilie. Cette dame vit dans le Jura français. Le contrôle radar a enregistré une grave infraction à la loi sur la circulation routière : M. R. D. roulait sur la route de Malagnou à la vitesse de 125 km/h, alors qu'elle y est limitée à 60 km/h.
M. R. D. a été condamné à une amende de 2 000 F. Aujourd'hui, il sollicite l'indulgence de notre Grand Conseil en raison de sa très grande inquiétude concernant la santé de sa mère. M. R. D. n'a pas d'antécédents judiciaires, et il a reconnu les faits susmentionnés.
Cependant, la commission vous propose, à la majorité, le rejet de ce recours.
Mme Micheline Spoerri (L). J'ai été lente à réagir... Pour la deuxième fois, la commission préconise le rejet du recours sans donner ses motifs. La commission peut-elle s'en expliquer ?
La présidente. Voulez-vous fournir un complément d'information, Madame Chalut ?
Mme Claire Chalut (AdG), rapporteuse. La question est pertinente. Je viens de préciser que les rejets ont été proposés à la majorité de la commission. Personnellement, j'avais opté, dans les deux cas, pour la diminution de la peine, et pas sa suppression. Par exemple, la première personne aurait certainement souhaité la suppression totale de son amende, même si elle ne l'a pas exprimé ouvertement. Il n'en reste pas moins que ces deux personnes ont roulé à des vitesses excessives et que la majorité de la commission de grâce a refusé leur recours.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.