République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 10 octobre 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 11e session - 39e séance
M 892-A
Cette proposition de motion, annoncée le 27 janvier 1994, a été développée le 18 février 1994 et renvoyée à cette date par le Grand Conseil à sa commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil. La commission s'est saisie de cette proposition de motion lors de ses séances des 13 septembre et 25 octobre 1995 sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, députée. Assistaient aux travaux MM. Claude Haegi, conseiller d'Etat, chef du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIER), Patrick Ascheri, chef du service votations-élections du DIER, et René Kronstein, directeur de la division Intérieur du DIER.
Le problème posé
L'élaboration puis le vote du budget représentent l'acte essentiel qui concrétise les choix politiques effectués tant par le Grand Conseil que par le Conseil d'Etat. C'est en effet à travers l'élaboration et l'adoption du budget que sont décidées les priorités dans les domaines sociaux, économiques, éducatifs, culturels, de l'aménagement du territoire ou fiscaux, pour n'en citer que quelques-uns.
Or, l'élaboration du budget se fait patiemment tout au cours de l'année avant d'aboutir à son vote ou son rejet en fin d'année.
Tous les quatre ans, le parlement et le gouvernement sont renouvelés à l'occasion d'élections qui ont lieu respectivement en octobre et en novembre. En fonction du nombre de nouveaux députés, respectivement du nombre de nouveaux conseillers d'Etat, la situation actuelle est susceptible de mener à l'adoption ou au rejet d'un budget par un parlement dont une majorité n'a pas suivi les travaux qui ont présidé à son élaboration.
Travaux de la commission
Le problème exposé par les auteurs de cette motion est bien connu des députés genevois qui l'ont vécu et tous perçoivent son incongruité. Le département précise également que, enquête faite, il se révèle qu'aucun autre parlement cantonal ne procède de cette façon bizarre. M. Claude Haegi déclare que le Conseil d'Etat partage le point de vue des auteurs de la motion et que, s'il y a consensus sur les objectifs de cette motion parmi les députés, le reste n'est qu'un problème pratique et d'organisation technique.
Personne ne semblant envisager sérieusement de décaler les exercices comptables de la République du calendrier civil, les solutions évoquées passent par la modification:
- de la date des élections législatives et exécutives;
- des dates de début de législature et d'entrée en fonction du Conseil d'Etat en tenant compte du moment de l'approbation du budget.
Les dates retenues par les autorités fédérales pour les consultations populaires traditionnellement fixées à septembre et décembre compliquent considérablement le travail de l'administration genevoise chargée d'organiser votations et élections cantonales dans la mesure où:
- les échéances fédérales ont tout naturellement la priorité pour le choix des dates;
- la constitution et la législation spécifient des délais entre les opérations électorales cantonales;
- il ne semble pas judicieux d'organiser à la même date une votation fédérale et une élection cantonale;
- les contraintes pratiques de l'acheminement (par exemple postal) des pièces nécessaires aux citoyens électeurs ne sont pas infiniment compressibles.
La complexité technique du problème posé que la commission souhaite soumettre au Conseil d'Etat ressort bien des annexes à ce rapport, soit :
- Annexe 1 - Lettre de M. Claude Haegi à la commission des droits politique et du règlement du Grand Conseil, du 23 octobre 1995.
- Annexe 2 - Lettre de M. René Kronstein au chef du DIER, du 26 septembre 1995.
- Annexe 3 - Lettre de M. Patrick Ascheri à M. René Kronstein, du 17 octobre 1995.
L'aspect technique évoqué dans les pièces citées ci-dessus et la conviction du chef du DIER, transcrite plus haut, que le problème posé se ramènerait à un simple problème technique ne doivent cependant pas masquer la dimension plus politique de la question posée qui correspond au souci de nombreux députés de rendre le parlement plus efficace dans ses travaux. Un tel souci s'apparente à un courant plus large de réflexions fréquemment évoquées devant la commission.
Evocation de quelques réflexions politiques sur les institutionset les élections genevoises
Le problème posé par les auteurs de la motion 892 se situe comme un point spécifique dans la mouvance générale des réflexions de plusieurs partis et groupements politiques genevois qui s'interrogent sur le (bon) fonctionnement de nos institutions cantonales et en particulier sur le caractère traditionnel ou moderne, inefficace ou adéquat, de nos moeurs électorales, exécutives et parlementaires genevoises. Ces réflexions sont considérées par les député(e)s de la commission comme de plus en plus actuelles et urgentes.
Ce problème de calendrier électoral et d'efficacité parlementaire, évoqué par la proposition de motion 892, se situe aussi au carrefour des réflexions conduites par de nombreux responsables, dans les partis politiques, les groupes parlementaires et au-delà, sur la réalité de la séparation des pouvoirs dans la République, l'efficacité en termes concrets d'un parlement cantonal de milice comme le nôtre, son indépendance réelle face à un pouvoir exécutif professionnel flanqué d'une administration publique multiple et colossale.
Toutes ces réflexions, reflétées par des propositions parlementaires nombreuses dans l'agenda de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil, ou en gestation dans les têtes politiques de chez nous, comportent au moins les volets suivants :
- simultanéité de l'élection du Grand Conseil et du Conseil d'Etat;
- élection du Conseil d'Etat en 1 ou 2 tours;
- quorum pour le 1er tour de l'élection du Conseil d'Etat (33% ou 50%);
- élection du Conseil d'Etat selon le mode proportionnel ou majoritaire;
- capacité d'autosaisine des commissions parlementaires;
- relations du parlement avec l'administration cantonale;
- nécessité, possibilité et opportunité pour le parlement d'avoir sa propre administration;
- légitimité constitutionnelle, utilité et efficacité réelle de divers conseils de création récente (économique et social, de l'environnement, de l'évaluation des politiques publiques, etc.);
- relations du parlement genevois avec d'autres parlements cantonaux et contrôle parlementaire des entités administratives supra-cantonales;
- capacité documentaire du parlement;
- relations du parlement avec la presse et les médias;
- etc.
Conclusions
Pour diverses raisons, dont certaines évoquées sommairement ci-dessus et presque pour mémoire, la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil renonce à préconiser sur le point précis évoqué par les auteurs de la motion 892, sans examen plus approfondi, une solution plutôt qu'une autre. Elle souhaite que le Conseil d'Etat pousse ses études sur ce sujet (et ceux évoqués dans son sillage) que la commission considère comme importants. Elle vous recommande à l'unanimité, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer la motion 892 au Conseil d'Etat, afin qu'il puisse évaluer les avantages et inconvénients d'un déplacement des élections du parlement et du gouvernement à la fin de l'hiver et faire rapport au Grand Conseil sur cet objet.
La proposition de motion est approuvée à l'unanimité par la commission.
ANNEXE 1
ANNEXE 2
8
9
10
ANNEXE 3
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
(M 892)
motion
modifiant la date des électionsdu Grand Conseil et du Conseil d'Etat
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
- que le vote du budget est l'acte politique essentiel,
- que le vote du budget a lieu en fin d'année,
- que les élections au Grand Conseil ont lieu au mois d'octobre,
- que les élections au Conseil d'Etat ont lieu au mois de novembre,
- que le renouvellement des élus tant au législatif qu'à l'exécutif peut être quantitativement important,
invite le Conseil d'Etat
à explorer les avantages et les inconvénients d'un déplacement des élections au mois de février ou mars.