République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 10 octobre 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 11e session - 39e séance
PL 7479 et objet(s) lié(s)
(PL 7479)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'encouragement aux études, du 4 octobre 1989, est modifiée comme suit:
Art. 46, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Le Conseil d'Etat assure l'indexation prévue àl'alinéa 1.
Art. 2
Entrée en vigueur et modalité
La présente loi entre en vigueur le 1er septembre 1996 et annule celle du 1er septembre 1993.
L'indice de référence pour l'indexation est celui du1er mai 1995.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le 17 décembre 1993, la majorité du Grand Conseil, déterminée à combler le déficit budgétaire le plus rapidement possible, votait la suppression de l'indexation des allocations d'études et d'apprentissage pour une durée de 4 ans (entrée en vigueur le 1er septembre 1993).
A la lecture des comptes 1995, nous pouvons constater que les montants moyens alloués, non seulement n'ont pas été indexés comme l'exige la loi du 1er septembre 1993, mais ont diminué. (Apprentis: de 6 225 F à 5 995 F par an. Etudiants: de 7 788 F à 7 608 F par an.)
A noter cependant que le nombre de bénéficiaires a augmenté.
Lors de l'établissement du budget 1995, les subventions en faveur des allocations d'études et d'apprentissage avaient été portées à 32 276 000 F. Dans les comptes 1995 apparaît une dépense de 29 580 000 F, soit environ 7% de moins que budgétisé.
Pour nombre de familles et de jeunes, les conditions de vie s'avèrent de plus en plus précaires. S'ajoutent à cela les difficultés rencontrées par les étudiants et les apprentis pour trouver de petites activités leur permettant d'assurer une partie de leur entretien durant leurs études.
Considérant que les subventions prévues l'année dernière n'ont pas été dépensées (-7%: même en indexant les allocations le montant budgétisé n'aurait pas été utilisé dans sa totalité) et surtout considérant que nous devons faciliter tant que faire se peut l'accès de nos jeunes aux études ou à une formation, il nous apparaît que la décision prise de ne pas indexer les montants d'allocations jusqu'en 1997 devrait être abrogée cette année déjà. C'est le but du présent projet de loi que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement.
(PL 7480)
PROJET DE LOI
modifiant la loi sur l'orientation, la formation professionnelleet le travail des jeunes gens
(C 2 1)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'orientation, la formation professionnelle et le travail des jeunes gens, du 21 juin 1985, est modifiée comme suit:
Art. 109, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Le Conseil d'Etat assure l'indexation prévue àl'alinéa 1.
Art. 2
Entrée en vigueur et modalité
La présente loi entre en vigueur le 1er septembre 1996 et annule celle du 1er septembre 1993.
L'indice de référence pour l'indexation est celui du1er mai 1995.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Voir l'autre projet de loi, exposé des motifs identique.
ANNEXE
Préconsultation
M. Gilles Godinat (AdG). J'interviens brièvement sur la politique actuelle d'encouragement aux études et à la formation professionnelle.
Nous pensons, par notre proposition, corriger quelque peu la tendance actuelle qui porte atteinte, selon nous, d'une part, à la démocratisation des études et, d'autre part, à l'encouragement à la formation professionnelle. Pour s'en convaincre, il suffit de considérer trois faits :
- il n'y a pas eu d'indexation des allocations depuis 1993;
- en termes réels, les allocations d'étude à la formation professionnelle ont baissé - non seulement elles n'ont pas été indexées, mais elles ont baissé !
- les plafonds - c'est-à-dire les revenus déterminants pour pouvoir bénéficier de ces allocations - ont diminué vu que l'indexation n'a pas suivi le coût de la vie, ce qui fait que le nombre de bénéficiaires potentiels est restreint.
C'est la raison pour laquelle nous vous suggérons, par le biais de ce projet de loi, de rétablir l'indexation. Par exemple, les 2,7 millions économisés en 1996 pourraient être réinjectés dans le cadre de l'encouragement aux études.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). En matière d'études et d'accès aux études, les événements qui se succèdent ont de quoi nous inquiéter. On peut relever quelques exemples :
- la participation financière des étudiants est toujours plus importante;
- la suppression des indemnités de stage pour toute une catégorie de formations;
- une augmentation des coûts de certaines formations, comme l'école de Lullier - on a appris l'autre jour en commission qu'une augmentation importante était prévue;
- la prise en charge des coûts du matériel - un projet de loi instituait, je vous le rappelle, le paiement des outils et du matériel par les apprentis.
Bref, la liste s'allonge. Les projets de lois se sont succédé, grignotant de ci de là - ils sont toujours présentés comme étant mineurs, bien entendu - la gratuité des études et entraînant, de fait, une limitation de l'accès à la formation pour certains jeunes sans revenus ou issus de familles modestes.
Il y a trois ans, comme l'a dit M. Godinat, la majorité de ce Grand Conseil a voté la suppression de l'indexation tant des allocations d'études que de celles d'apprentissage.
Que constate-t-on aujourd'hui ?
D'abord, les difficultés financières pour les petits budgets s'aggravent de plus en plus. Ensuite, il devient très difficile aux étudiants de trouver des petites activités annexes pour leur permettre de boucler leur fin de mois. Enfin, les montants prévus dans les budgets de ces dernières années n'ont pas été dépensés, malgré l'augmentation du nombre de bénéficiaires. Je vous rappelle que les apprentis ont perdu une somme d'environ 230 F et les étudiants un peu moins de 200 F.
C'est pourquoi nous souhaitons que l'indexation des allocations d'études et d'apprentissage soit réactivée. Même si ces montants sont peu conséquents, ils représentent, pour celles et ceux qui suivent des études dans une situation financière précaire, un petit plus qui a son importance. Et puis, c'est aussi, comme l'a dit M. Godinat, une question de principe, car l'accès aux études ne doit pas être fermé pour des questions d'ordre économique : le pauvre comme le riche a le droit de suivre la formation de son choix, et la société doit lui donner les moyens de ce choix.
Je vous propose donc de renvoyer ce projet de loi en commission des finances, qui avait traité le projet de loi sur la suppression de l'indexation.
Mme Nelly Guichard (PDC). A un an de l'échéance du blocage des allocations d'études et d'apprentissage que mentionnent les projets de lois, nous ne voyons pas l'opportunité d'en modifier le cours maintenant, alors, précisément, que les prestations de l'Etat sont bloquées : pas d'indexation des salaires, ni des rentes OCPA ni du RMCAS.
Il est vrai que l'on peut s'interroger en voyant apparaître un montant inférieur dans les compte 95 en regard du budget. Mais, comme l'a dit Mme Reusse-Decrey, le nombre de bénéficiaires des allocations d'études et d'apprentissage a augmenté, ce qui est également un aspect positif qu'il convient tout de même de relever.
Comme vous, nous sommes évidemment conscients de la situation plus précaire de nombreuses familles et de la plus grande difficulté qu'ont les jeunes à trouver de petits emplois. Mais, comme vous, nous connaissons aussi les barèmes liés aux allocations et nous savons que ceux qui ont droit aux prestations ne seront pas prétérités.
Nous renverrons néanmoins vos projets de lois en commission; nous suggérons la commission de l'enseignement, pour en débattre plus précisément.
M. Bernard Lescaze (R). La position du groupe radical est la même que celle de la préopinante.
Quels que soient l'intérêt et la nécessité éventuels de pouvoir assurer aux apprentis et aux étudiants les meilleures allocations possibles, le groupe radical est convaincu de trois choses :
- d'une part, ces allocations sont très sensiblement supérieures à Genève à celles d'autres cantons - ceux qui en bénéficient à Genève sont donc déjà favorisés;
- d'autre part, comme l'a rappelé la préopinante, le blocage de toutes les prestations de l'Etat doit s'appliquer à tout le monde;
- alors même que le nombre des étudiants est en diminution, nous constatons que le nombre des bénéficiaires est en augmentation. De ce point de vue, la loi - et son application - est un succès. Il conviendra peut-être d'examiner plus précisément en commission les raisons de cette augmentation des bénéficiaires et de cette stabilisation des comptes en 1995.
C'est pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que le groupe radical accepte le renvoi en commission de ces projets de lois, tout en se déclarant d'ores et déjà très réservé quant à leur contenu.
Mme Claude Howald (L). Pour compléter les propos de M. Godinat, j'aimerais préciser que les conditions d'octroi d'une allocation, d'une bourse, d'un prêt d'études sans intérêts, ne sont pas seulement liées à la notion de revenu déterminant. Que les choses soient bien claires ! D'autres conditions cumulatives, dont il n'y a pas lieu de débattre ici, peuvent partiellement expliquer ce que disait M. Lescaze tout à l'heure - j'emprunte de nouveau au projet de budget 1997 du département de l'instruction publique, page 42 - à savoir que le nombre des bénéficiaires est en augmentation alors que les montants globaux dépensés ont diminué.
S'agissant du fonctionnement général de cette loi sur l'encouragement aux études qui, je le rappelle, offre de bonnes conditions d'études sur le plan financier à tous les ordres d'enseignement, qu'ils soient universitaire, secondaire ou professionnel, certaines questions doivent être posées, mais seulement sur les montants financiers accordés.
Sans vouloir répéter les propos de M. Lescaze, j'indique que le groupe libéral n'est pas prêt à envisager sur le fond les propositions de ces deux projets de lois, même s'il est d'accord de les renvoyer à la commission de l'enseignement et de l'éducation, ne serait-ce que pour avoir l'occasion, au moins une fois, d'examiner de plus près ce que sont exactement les allocations et les prêts d'études. C'est un domaine compliqué à maîtriser. Le renvoi en commission nous permettra certainement de comprendre les raisons de la différence qui existe entre le montant prévu au budget et le montant dépensé.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'imagine que le renvoi de ces projets de lois en commission des finances permettrait de fournir un certain nombre d'éléments, mais vous me permettrez tout de même de faire deux remarques, dont l'une est un peu ironique.
Un certain nombre de députés de ce parlement ont voté avec enthousiasme la dernière loi sur les allocations familiales. Ce faisant, ils ont également voté la suppression des allocations familiales à partir d'un certain âge et donc ainsi privé un certain nombre de jeunes et leurs parents d'un appui financier qu'ils ont eux-mêmes approuvé dans ce parlement. Alors, en fait de loi votée qui péjore parfois la situation, l'exemple est choisi ! Pour ma part, je n'avais pas approuvé cette loi, votée par ce parlement, qui - je le répète - péjore véritablement la situation. Pourtant, je n'ai pas entendu se manifester beaucoup de résistance pour l'éviter !
Madame Reusse-Decrey, s'agissant des montants prévus au budget des comptes et les dépenses réelles, il faut penser que nous essayons, au plus près de nos estimations et en fonction de la conjoncture, de prévoir des sommes suffisantes pour éviter de vous demander des crédits supplémentaires. Il est parfois difficile, à 1 ou 2 millions près, d'estimer ce qui relève du domaine de l'aléatoire; en effet, la situation financière des parents, dont le sort des étudiants et des jeunes dépend, peut se péjorer à n'importe quel moment de l'année scolaire. Il est parfaitement normal, dès lors, qu'il y ait une différence entre le montant prévu et le montant dépensé.
Vous constaterez, par ailleurs, que le nombre des étudiants est en diminution, que le nombre des bénéficiaires est en augmentation et que les montants globaux dépensés ont diminué. Mais cela ne touche en aucun cas celles et ceux qui doivent payer une taxe, à l'université, mais bien plutôt celles et ceux qui sont au postobligatoire, en vous rappelant que l'enseignement du postobligatoire est gratuit et le restera, je tiens à le préciser.
Il faut tout de même être honnêtes par rapport aux modifications acceptées par le peuple et par le parlement ! La seule modification qui a été introduite en matière de coût par rapport aux études est celle qui concerne les taxes universitaires. Cette modification a fait l'objet d'un référendum, d'un vote populaire; aussi il me semble qu'il n'y a pas lieu de revenir sur ce point !
Les autres éléments ont été votés. L'un d'entre eux, je vous le signale, est proposé aujourd'hui : au rapport de minorité de s'y opposer ! Vous aurez la possibilité de vous exprimer tout à l'heure à ce sujet, mais je ne suis pas d'accord de laisser croire que nous essayons de grignoter, par ci par là, la gratuité des études.
Dernière chose : que ce soit en postobligatoire ou dans les cursus de formation professionnelle du niveau tertiaire, pour les professions de la santé ou pour l'école d'ingénieurs, ceux qui ont bénéficié de la gratuité jusqu'à présent continueront à en bénéficier.
Ces projets sont renvoyés à la commission de l'enseignement et de l'éducation.