République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 10 octobre 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 11e session - 39e séance
IU 242
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Lorsque M. Lescaze intervient sur des sujets comme celui-ci concernant les archives, j'ai l'impression - et même un peu plus que cela - d'être l'intermédiaire entre lui et la personne à laquelle nous pensons tous deux.
Alors, vous ne serez pas surpris si je vous dis très honnêtement que la note que j'ai entre les mains a été préparée par «qui vous savez»... (Rires.) ...dont c'est précisément le métier. Compte tenu de la qualité de vos relations, je dois simultanément me livrer à une lecture - comment dirais-je - «anticipative» pour enlever quelques adjectifs qui pourraient vous faire bondir ! En effet, je m'exposerais à des réactions que j'aimerais mieux que vous dirigiez directement à la personne en question !
S'agissant du «fichier juif» à Genève, je fais une remarque préliminaire. Il ne s'agit pas d'un fichier juif, mais d'un fichier de toutes les personnes qui se sont présentées à la frontière, accueillies ou non, et de tous les réfugiés en provenance d'autres cantons, qui ont été rapatriés en France, à la fin des hostilités. Les juifs ne forment pas la majorité de ce fichier. L'interpellateur sait certainement que les archives d'Etat ont reçu, entre 1984 et 1990, plusieurs milliers de mètres linéaires de versement d'archives en provenance des divers départements, qu'il a fallu nettoyer, reconnaître, reclasser, inventorier.
Le versement du département de justice et police a fait l'objet d'un inventaire plus complet que les autres; un inventaire pièce par pièce étant exclu. Quant à l'étude approfondie, c'est le travail des historiens, non des archivistes ! Les archives d'Etat savaient parfaitement qu'elles possédaient des documents en abondance sur la question de l'asile aux frontières genevoises. Elles l'ont fait savoir aux archives fédérales, dès que la question leur a été posée. Si les archives fédérales n'ont pas réagi plus tôt, ce n'est pas notre problème ! La loi sur les archives publiques ne dit rien sur les délais. Le règlement d'application, quant à lui, prévoit un délai de trente-cinq ans pour tous les dossiers de caractère général ou purement administratif et un délai de cent ans pour les dossiers personnels sensibles.
Il y a lieu, en outre, de tenir compte de la loi fédérale sur la protection des délais, qui est extrêmement stricte à cet égard. Pour les études sérieuses et d'intérêt général, il y a toujours des possibilités de dérogation : il n'y a qu'à relire le règlement sur les archives publiques pour s'en convaincre.
Les archives seront mises à la disposition de l'instance chargée par le Conseil fédéral de faire les recherches en question. Il n'y a pas lieu, dans le cas particulier, de modifier la loi qui, d'ailleurs, ne prévoit rien en matière de délais. Il n'existe aucun monopole d'accès sur les dossiers en question. De même, l'enquête effectuée dans les dossiers des archives fédérales s'est déroulée de manière interne. Le Conseil d'Etat estime que l'étude complète du fonds de l'arrondissement territorial doit être d'abord effectué de manière interne.
Pour accélérer le travail, le professeur Favez a bien voulu proposer à des étudiants de préparer leur mémoire de licence sur un sujet en relation avec la politique et la pratique de l'asile aux frontières. Ces étudiants sont soumis aux mêmes règles de discrétion que les collaborateurs des archives permanents ou temporaires. Si le Grand Conseil veut bien nous voter un crédit supplémentaire - cette proposition relève de la responsabilité de l'archiviste cantonal - nous serons heureux d'engager plus d'historiens pour accélérer encore ce dépouillement; mais il faudrait aussi augmenter le nombre de places de travail aux archives, autant de choses qui ne sont pas envisageables dans un proche avenir, vous l'avez bien compris !
Cette interpellation urgente est close.