République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 13 septembre 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 10e session - 34e séance -autres séances de la session
No 34/V
Vendredi 13 septembre 1996,
soir
Présidence :
M. Jean-Luc Ducret,président
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : MM. Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi, Olivier Vodoz, Philippe Joye, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Florian Barro, Claude Basset, Nicolas Brunschwig, Claire Chalut, Hervé Dessimoz, Jean-Claude Dessuet, Marlène Dupraz, Laurette Dupuis, René Ecuyer et Pierre Meyll, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Le président. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence :
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Yasmine Djabri, présentée par les Verts.
Mme Yasmine Djabri est élue tacitement.
Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Jean-Maurice Reverchon, présentée par les Verts.
M. Jean-Maurice Reverchon est élu tacitement.
6. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur :
Les deux objets qui font l'objet du présent rapport ont ceci en commun qu'ils visent à assurer la sécurité des jeunes sur les routes de notre canton. C'est donc naturellement que notre Conseil répond conjointement à ces deux objets.
1. Rappel des invites des deux objets
1.1. Rappel des invites de la motion 623-A
Cette motion invite le Conseil d'Etat:
1. à imaginer et utiliser tous les lieux et moyens possibles pour sensibiliser les jeunes aux risques qu'ils encourent: ex. salon du cycle, diffusion de vidéo, jeux de simulation, etc.;
2. à rappeler régulièrement aux parents des élèves, par le biais de circulaires, la responsabilité qu'ils portent dans la prévention des accidents (surveillance de l'état du véhicule de leurs enfants, apprentissage du respect des mesures de protection passive, etc.);
3. à rendre les conducteurs attentifs au fait qu'ils sont des «exemples» sur lesquels les jeunes calquent leur comportement;
4. à chercher d'éventuelles mesures éducatives complémentaires aux pénalités;
5. à poursuivre avec détermination la mise en place des mesures de séparation du trafic.
1.2. Rappel des invites de la pétition 827-A
La pétition 827-A demande au Conseil d'Etat:
«La mise en oeuvre urgente d'un réseau efficace de pistes cyclables recouvrant entièrement les zones de circulation dangereuses, et notamment les voies d'accès aux établissements scolaires».
2. Analyse de la situation actuelle
Depuis 1990, la situation en matière de sécurité des jeunes cyclomotoristes s'est sensiblement transformée et certaines mesures évoquées ci-dessus ont été mises en place.
En outre, selon les renseignements de la Brigade d'éducation et de prévention (BEP), les cyclomotoristes sont de moins en moins nombreux dans notre canton. Les statistiques sont les suivantes:
Permis délivrés
Immatriculations
Cours théoriques suivis
1991
1 315
15 056
732
1994
1 077
11 878
420
1995
1 315
10 465
380
Les raisons qui motivent cette diminution tiennent à la limitation de vitesse, au port du casque et au catalyseur qui augmente sensiblement le prix des cyclomoteurs.
Les jeunes qui roulent en cyclomoteur y sont généralement contraints par le trajet domicile-école et retour. Ils considèrent beaucoup moins leur véhicule comme un jeu.
Il faut signaler également que le nombre de vélomoteurs maquillés a beaucoup diminué, le nombre d'accidents également.
En un mot, l'engouement pour le cyclomoteur s'est estompé. Il s'est tourné vers d'autres moyens de locomotion: VTT, planches et patins à roulettes.
3. Campagnes de sécurité et mesures éducatives
Les cours donnés par des gendarmes éducateurs routiers ou par des enseignants spécialisés dans le domaine de la sécurité ont toujours lieu dans les écoles. Le programme est adapté aussi bien à l'âge qu'à l'école, au quartier.
Par ailleurs, des événements ponctuels sont utilisés pour rappeler les règles de sécurité et l'importance de la responsabilité personnelle de chacun. Ainsi, par exemple, lors d'accidents dans les environs d'une école et sur la base d'un rapport de police constitué spécialement à cet effet, les enseignants peuvent illustrer de manière concrète les dangers que courent les élèves.
En outre, des campagnes, du Touring Club Suisse (TCS), du Bureau de prévention des accidents, de l'Association des transports et environnement, en collaboration avec la Brigade de prévention et d'éducation, sont régulièrement organisées.
Un classeur «cyclocode» a été élaboré par le TCS et envoyé dans chaque bibliothèque des cycles d'orientation. Il est mis à jour régulièrement.
En ce qui concerne la demande des motionnaires visant à mettre en place des mesures éducatives complémentaires aux pénalités qui peuvent être infligées aux cyclomotoristes, la Brigade de prévention et d'éducation routière a examiné cette possibilité mais l'a écartée.
En effet, certains cantons ont organisé des cours obligatoires (type «retenues») le mercredi destinés aux adolescents contrevenants. Ces condamnations effectuées par le juge des mineurs sont accueillies de diverses manières et souvent ressenties comme une punition vexatoire. Après analyse la Brigade d'éducation et de prévention routière a donc décidé de ne pas suivre cette voie. En effet, la cause des infractions ne réside le plus souvent pas dans la méconnaissance des règles mais plutôt dans l'inattention, la banalisation, l'inconscience, voire la provocation. En outre, la base légale qui permettrait cette pratique n'existe pas à Genève.
Comme décrit plus haut, les personnes concernées par ce problème à Genève préfèrent renforcer les notions de responsabilité et de partenariat lors d'événements relatés dans les journaux ou sur la base de rapports de police. Ces moments de réflexion, très actualisés, sont très bien acceptés par les élèves et jouent un rôle préventif bien plus important.
4. Rappels réguliers à l'ensemble des usagers et aux parents
Pour sensibiliser les usagers, des actions préventives sont entreprises régulièrement par la police sur les grands axes routiers du canton (opérations PÉGASE). Cette surveillance renforcée a prouvé son efficacité. On constate en effet que ces actions de prévention/répression permettent de réduire sensiblement les accidents sur ces axes.
Elles permettent également de déceler les infractions (limitation de vitesse non respectée, ceinture non attachée, circulation sans casque, feux non respectés, etc.) et d'en établir les statistiques. Les infractions les plus souvent constatées déterminent les thèmes des campagnes de sécurité à mener.
En ce qui concerne plus particulièrement les parents, ils sont fréquemment sensibilisés à ce problème dans le cadre du journal du département de l'instruction publique «L'Ecole». Les enseignants le sont quant à eux par le biais des journaux des ordres d'enseignement.
Au chapitre de l'information toujours, il faut également signaler la parution en 1995 d'un plan des pistes cyclables du canton et d'un bulletin d'information «Vélo-info» qui annonce les nouveaux aménagements. Ces documents ont été publiés conjointement par le département de l'aménagement, des constructions et de la voirie de la Ville de Genève et par le département de justice et police et des transports où ils peuvent être obtenus gratuitement.
5. Développement des pistes cyclables: réponse aux pétitionnaires
5.1. Préambule
Lors de l'audition du 17 avril 1989 de M. Christian Grobet, alors conseiller d'Etat, par la commission des pétitions, la politique du département des travaux publics sur la mise en place d'un réseau de pistes cyclables avait été présentée. Il avait notamment été précisé qu'un vaste programme avait été élaboré dès 1983, ce qui avait permis de construire plus de 30 kilomètres de pistes réservées aux deux-roues et que les études en cours portaient sur plus de 70 kilomètres (voir Mémorial n° 46/93 pages 6594 et suivantes).
Par ailleurs, et pour répondre au souhait des pétitionnaires, élèves du collège de Saussure, qui demandaient un réseau efficace de pistes cyclables recouvrant entièrement les zones de circulation dangereuses, et notamment les voies d'accès aux établissements scolaires, il avait été précisé que leurs propositions relatives à la création de nouveaux itinéraires sur les routes de Chancy (RC 4), de Bernex à la rue des Deux-Ponts, du Pont-Butin (RC 38), du cimetière de Saint-Georges jusqu'à Etoile-Palette et du Grand-Lancy (RC 29), du village au pont des Acacias, faisaient partie intégrante du programme quinquennal 1988-1992.
Au surplus, il convient de rappeler que si le Grand Conseil a globalement adopté, lors de sa séance du 10 novembre 1989 (voir Mémo-rial n° 46/93, page 6601), le rapport de la commission de pétitions, cet objet a toutefois été renvoyé au Conseil d'Etat suite à l'amendement de M. Georges Cardinaux, alors député et rapporteur de la majorité, libellé comme suit : «La majorité de la commission des pétitions vous propose Mesdames et Messieurs les députés, par 8 oui (pdc, rad, lib et 1 vig) 1 abstention (vig) et 4 non (soc et peg) le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, en le priant d'encourager la création de pistes cyclables sûres sans qu'elles soient réalisées au détriment de la circulation automobile.»
5.2. Situation du réseau des pistes cyclables du réseau routier cantonal en 1994
Depuis 1989, le département des travaux publics et de l'énergie a construit, sur la base des programmes établis, 69 kilomètres de pistes cyclables, ce qui représente au total 99 kilomètres, soit plus du tiers du réseau routier cantonal qui totalise 279,6 kilomètres.
Ce réseau a été construit principalement et prioritairement sur les axes routiers empruntés par les élèves qui se rendent dans des établissements scolaires et constitue un ensemble d'itinéraires cohérents et complets.
5.3. Réalisations sollicitées par les pétitionnaires
RC 4 - Route de Chancy
Tronçon: Bernex, jusqu'à la rue des Deux-Ponts.
D'emblée il doit être relevé que l'Etat intervient sur le réseau routier cantonal exclusivement.
Dès lors, le tronçon à retenir pour ce qui le concerne est compris entre Bernex et la limite avec la ville de Genève qui aujourd'hui est équipé d'itinéraires réservés aux deux-roues de la route d'Aire-la-Ville (RC 74) à la croisée de Confignon, de l'avenue des Morgines à la rue des Grand-Portes, à la place des Ormeaux et enfin, à la rampe de Saint-Georges / Tivoli. Un projet est en outre prêt à être réalisé entre la rue des Grand-Portes et la croisée de Confignon.
RC 38 - Route du Pont-Butin
Tronçon: cimetière de Saint-Georges jusqu'à Etoile-Palette.
Entre le cimetière de Saint-Georges et la route de Chancy (RC 4) des pistes cyclables ont été construites dans le cadre de la mise en place d'une glissière médiane de sécurité. Cependant, au-delà, soit en direction du sud, la circulation doit être réorganisée en tenant compte du gabarit du pont de Lancy. Ce projet est actuellement à l'étude mais sa réalisation n'est pas encore programmée.
RC 29 - Route du Grand-Lancy
Tronçon: village de Lancy jusqu'au pont des Acacias.
Ce tronçon de route a été équipé, entre la place du Château et la rampe du Pont-Rouge, de pistes cyclables bilatérales unidirectionnelles en 1992.
Il faut noter que le prolongement de ces pistes en direction du carrefour de l'Etoile est différé en raison du projet de tramway (ligne 13 bis) et que celles envisagées le long du parc de la mairie n'ont pu être retenues en raison de l'atteinte qu'elles auraient porté au site (arbres).
5.4. Pistes cyclables et circulation automobile
Il convient de rappeler que le département des travaux publics et de l'énergie, en accord avec la commission des pistes cyclables, a pris l'option de ne plus proposer au département de justice et police et des transports le marquage de bandes cyclables, qui relève de sa compétence, si ce n'est dans des situations exceptionnelles ou provisoires.
Les critères d'aménagements retenus sont les suivants:
· créer des itinéraires indépendants sur des artères peu fréquentées par les véhicules automobiles;
· construire des pistes sur les routes d'accès aux différentes écoles;
· équiper les axes principaux d'accès à la ville;
· étudier systématiquement les possibilités de réalisation.
Au vu de ce qui précède, il peut être procédé à la différenciation qui suit:
1. Pistes cyclables en site propre situées en dehors de l'espace routier existant.
Ces dernières ne bordent pas le réseau des artères cantonales, n'occasionnent aucune gêne à la circulation, mais bien au contraire, soulagent le trafic des deux-roues légers.
2. Aménagements cyclables directement implantés en bordure des chaussées.
Bien que ne pouvant pas toujours être implantés dans le gabarit routier existant, ces aménagements ne sont pas réalisés au détriment de la circulation automobile puisque, même dans les cas où une diminution du nombre de voies de circulation automobile a été décidé, ce rétrécissement de chaussée a, grâce à une forte diminution des conflits potentiels entre les différents usagers, apporté une augmentation notable de la sécurité et de la fluidité en général.
Il convient en effet de relever l'exemple de l'aménagement réalisé en 1986 sur la T 104 / RC 38 - route du Pont-Butin, tronçon situé entre les routes de Vernier (RC 5) et de Saint-Georges (RC 30), qui est certainement celui que beaucoup se plaisent à considérer comme un des ouvrages les plus satisfaisants et efficaces malgré le fait qu'il ait nécessité la suppression d'une voie de circulation.
Cette condition particulière n'a pas été ressentie, malgré quelques réticences spécifiques, comme une décision prise au préjudice de la circulation automobile. En effet, la glissière de séparation du trafic a pu être posée dans l'espace libéré et a quasiment supprimé les graves accidents de la circulation que connaissait cette artère.
6. Conclusion
Notre Conseil tient à rappeler que la commission consultative d'éducation routière a pour mandat l'étude de toute question touchant la sécurité routière et la coordination de l'enseignement dispensé dans les écoles et collèges. Cette commission comprend:
· des représentants du département de l'instruction publique;
· des représentants du département de justice et police et des transports;
· d'un représentant des autorités communales;
· des représentants des associations professionnelles d'enseignants;
· des représentants des associations de parents d'élèves;
· des spécialistes de l'éducation routière.
En outre, le département des travaux publics et de l'énergie veille à offrir des conditions optimales de sécurité aux divers usagers. Il continue de planifier selon un programme quinquennal (1995-1999) un système cohérent et complet d'itinéraires réservés aux deux-roues, étant observé que le réseau genevois représente le plus important pourcentage de routes cantonales équipées de pistes cyclables de Suisse.
Compte tenu de ce qui précède, notre Conseil espère avoir démontré l'importance qu'il accorde à la sécurité des jeunes sur les routes de ce canton et répondu aux attentes des motionnaires et des pétitionnaires.
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M 623-B et P 827-B
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le 26 juin 1995, la commision des pétitions a pris connaissance d'une pétition déposée par devant le Grand Conseil en date du 16 juin 1995, par la Coordination genevoise pour la défense du droit d'asile. La teneur en est la suivante:
(P 1079)
PÉTITION
Droit d'asile: à l'aéroport aussi !
Depuis des années, des abus de pouvoir sont régulièrement signalés dans le traitement des demandes d'asile à l'aéroport de Genève-Cointrin. Des requérants qui demandent la protection de la Suisse en faisant état d'un risque de persécution dans leur pays et qui sont retenus en zone de transit ont été renvoyés en dehors de toute décision exécutoire. D'une façon plus générale, et malgré certaines améliorations, le droit de ces requérants à l'assistance d'un mandataire n'est pas garanti, faute d'une information adéquate et en raison de la difficulté de communiquer avec l'extérieur depuis la zone de transit. Enfin, il arrive que ces requérants, qui ne sont en rien des délinquants, soient traités comme des détenus, enfermés dans les locaux de police de l'aéroport, soumis à des fouilles humiliantes ou à des mesures injustifiées. Ces pratiques sont injustifiables, et les autorités cantonales genevoises ne sauraient se retrancher derrière l'office fédéral des réfugiés (ODR), dès lors qu'elles sont elles-mêmes compétentes pour ce qui touche aux dispositions pratiques entourant le séjour en transit de requérants d'asile, en attente d'une décision de cet office, ainsi que pour l'exécution concrète des décisions devenues exécutoires.
D'accord en cela avec la Coordination genevoise pour la défense du droit d'asile, les soussignés demandent dès lors au Grand Conseil d'intervenir par voie législative, par motion ou résolution auprès du Conseil d'Etat ou par toute autre démarche utile, pour préserver le droit d'asile à l'aéroport de Cointrin. Ils demandent notamment que des dispositions précises soient prises et rendues publiques:
1. Pour qu'aucune obstruction administrative ne vienne empêcher le dépôt d'une demande d'asile à l'aéroport de Cointrin et qu'aucune mesure de renvoi ne soit exécutée en l'absence d'une décision définitive de l'autorité fédérale. (Il est à souligner à ce propos que, même après une décision de renvoi prise par l'ODR, la loi sur l'asile(art. 47 LA) prévoit un délai utile de 24 heures pour solliciter la suspension du renvoi par l'autorité de recours, laquelle dispose elle-même d'un délai utile de 48 heures pour répondre à cette requête).
2. Pour que les requérants retenus en zone de transit puissent exercer pleinement leurs droits dans la procédure, il importe que ceux-ci soient informés clairement et complètement de ces droits et qu'ils ne se heurtent pas à des obstacles pratiques pour prendre contact avec une oeuvre d'entraide ou tout autre mandataire. (Le cas échéant, une aide concrète - mise à disposition d'un téléphone pour des appels régionaux, recours à un interprète, voire assistance juridique - doit être envisagée.)
3. Pour que le séjour en zone de transit, dans l'attente d'une décision, et l'exécution éventuelle du renvoi, se déroulent dans le respect de la dignité humaine, sans que ces requérants ne soient assimilés abusivement à des délinquants. (S'agissant de la détention en vue du refoulement, celle-ci paraît a priori injustifiée, dès lors que la personne est déjà retenue en zone de transit et ne peut donc s'échapper. L'exécution du renvoi, même en cas d'opposition, doit par ailleurs exclure le recours à des moyens disproportionnés.)
N.B. : 1467 signatures
Coordination genevoise
pour le droit d'asile
MM. Michel Ottet
et Yves Brutsch
Case postale 110
1211 Genève 7
Cette pétition a été traitée les 18 septembre, 9 et 23 octobre 1995 sous la présidence de Mme Liliane Johner, ainsi que les 11 décembre 1995, 7 février, 25 mars, 15 et 29 avril 1996 sous la présidence de Mme Janine Hagmann.
Audition des pétitionnaires
MM. Brutsch, du Centre social protestant, Ottet de l'association Elisa, et Gardiol, responsable de l'aumônerie de l'aéroport, souhaitent que le droit d'asile soit pleinement garanti à l'aéroport de Genève-Cointrin sous l'angle:
- du droit à demander l'asile et à ne pas être renvoyé avant une décision définitivement exécutoire de l'autorité fédérale compétente;
- du respect des droits de procédure, dont les requérants doivent être valablement informés et qu'ils doivent pouvoir exercer sans se heurter à des obstacles pratiques;
- de la nécessité de respecter la dignité et la liberté personnelles des intéressés durant leur séjour et d'éviter des mesures de force excessives en cas de renvoi.
Il est du ressort de l'Office fédéral des réfugiés à Berne, (ODR) respectivement de sa délégation à Genève, de prendre toute décision en matière d'asile. La pétition concerne les conditions pratiques, d'information, d'accueil, de séjour, qui entourent une demande d'asile. Cet aspect logistique incombe aux autorités cantonales. Et c'est là que le bât blesse.
A leur arrivée et avant leur interrogatoire, les demandeurs ne sont pas informés de leurs droits et devoirs - notamment sur la possibilité de faire appel à un mandataire. Ensuite ils sont livrés à eux-mêmes, dans la zone de transit dont ils ne peuvent pas sortir. S'ils n'ont pas d'argent, impossible de téléphoner à un ami, un avocat, alors que ce droit est accordé sans difficulté à tout détenu arrivant à Champ-Dollon. Faute de locaux adéquats, les conditions d'hébergement en dortoir sont rudimentaires, les portes fermées à clé de 22 heures à 7 heures, ce qui devient difficilement supportable quand le séjour se prolonge au-delà d'un jour ou deux. Enfin des renvois abrupts, c'est-à-dire avant décision de l'ODR, auraient eu lieu.
Il n'existe pas de législation écrite sur les conditions de «transit» entre la demande d'asile et la décision de l'ODR. Ce flou, sur lequel les pétitionnaires aimeraient attirer l'attention du Grand Conseil, engendre des difficultés qu'on pourrait réduire, voire supprimer. Par ailleurs, c'est aussi pour les policiers de l'aéroport un surcroît de travail, qui plus est, dans un domaine pour lequel ils ne sont pas préparés. Des discussions ont été entamées avec le département de justice et police et des transports, des directives sont en préparation, qui pourraient améliorer la situation. Il faudrait pouvoir ancrer ces modalités dans un texte législatif.
Les pétitionnaires résument en indiquant qu'il ne s'agit pas de remettre en cause la procédure de demande d'asile mais bien d'une part de savoir comment l'attente de la décision de l'ODR est vécue à Cointrin - lieu où le séjour ne devrait pas dépasser 24 heures, respectivement 72 heures en cas de recours - et d'autre part de fournir au requérant, avant son interrogatoire, tous renseignements sur ses droits et devoirs.
Audition de M. Gut, secrétaire adjoint du département de justice et police et des transports
M. Gut, responsable du Service de la population/asile et secrétaire de la délégation aux réfugiés du Conseil d'Etat, est conscient des difficultés qui sont relevées à l'aéroport. Elles proviennent de ce que le traitement des candidats à l'asile dépend d'une instance fédérale, l'Office fédéral des réfugiés, et de deux instances cantonales: le DJPT pour l'hébergement et le DEP pour les locaux. Jusqu'au moment du lancement de la pétition, ce sont des policiers qui, en plus de leur travail habituel, ont procédé aux interrogatoires des requérants. Dorénavant, ce rôle devrait être dévolu à des fonctionnaires de l'Office de la population, davantage préparés à ce genre d'auditions.
Quant aux conditions d'hébergement, elles ont un aspect policier auquel on voudrait remédier. Les locaux ne sont pas grands, ils jouxtent le poste de police qui en est responsable. Jusqu'à récemment, on enfermait les gens à partir de 18 heures, limite qui a été reportée à 22 heures. Selon M. Gut il serait préférable de pouvoir disposer de locaux qui ne dépendent pas de la police.
En ce qui concerne les renvois et compte tenu des délais de recours, ils ne devraient donc pas être exécutés avant 72 heures. Depuis février 1995, une liste des mandataires à disposition est remise à chaque candidat à l'asile.
Enfin à propos des méthodes de renvoi, le DJPT tient à ce qu'elles soient correctes et est intervenu auprès des fonctionnaires concernés pour le leur rappeler.
Les requérants ont des droits, ils doivent en être informés. Le département de justice et police et des transports a décidé d'émettre un aide-mémoire à leur intention en vue d'améliorer la situation. On envisage la possibilité de remettre ce texte aux candidats à l'asile avant leur interrogatoire.
Ensuite de ces deux auditions, la commission décide de se rendre sur place, à l'aéroport de Cointrin pour se faire une opinion in situ.
Visite et parcours du requérant
Le 26 mars 1996, sous la conduite de M. J.-C. Ducrot, officier de police, chef de la police de l'aéroport, et de M. B. Gut, la commission suit le cheminement du requérant qui s'annonce comme tel en se présentant aux guichets de contrôle des passeports, dans la zone internationale de transit. Le rôle de la police se limite à accueillir, héberger et parallèlement informer l'autorité compétente, l'Office des réfugiés. Cas échéant elle devra aussi assurer le refoulement.
Durant la journée, les candidats à l'asile peuvent circuler librement dans la zone de transit, accéder aux boutiques (pour autant qu'ils en aient les moyens et ce n'est pas souvent le cas). Ils n'ont aucune possibilité d'aller à l'air libre, ni, bien sûr d'accéder au tarmac. Les dortoirs, corrects, sont d'un déouillement nonacal, avec prises de jour fixes en haut des parois. Ouverts dès 8 heures du matin, ils sont en principe fermés dans la journée. Mais si quelqu'un a besoin de se reposer, il peut en faire la demande auprès du SARA, Service administratif des refoulements à l'aéroport, organe interne de la police des lieux. Comme le précise la directive récemment mise à disposition, «les douches ont lieu dans le local sanitaire prévu à cet effet et le nécessaire de toilette est fourni».
Pour se nourrir, le requérant reçoit un bon qui lui permet de prendre trois repas journaliers au restaurant de la zone de transit (Ces frais devraient être rembourés par la Confédération qui, pour le moment fait la sourde oreille...).
Une des demandes des pétitionnaires a trait aux informations dont doit pouvoir disposer tout requérant dès l'instant où il dépose sa demande, notamment à propos des diverses procédures et d'autre part quant aux conditions de séjour à l'aéroport.
C'est chose faite depuis peu puisque M. Ducrot remet aux commissaires un exemplaire de deux textes très récents (janvier-mars 1996) disponibles en plusieurs langues (voir annexes):
1. Un «Aide-mémoire pour les étrangers ayant déposé une demande d'asile à l'aéroport de Genève», émanant du département de justice et police et des transports, et accompagné d'une liste de services juridiques à même de conseiller le requérant.
2. Une circulaire «Informations - directives aux occupants des dortoirs», émise par le Corps de police de l'aéroport.
Les responsables tant de la police que du service de la population ne souhaitent pas voir ancrer ces directives dans des textes légaux, ce qui leur conféreraient un caractère trop rigide, inadapté à une situation en évolution.
Quant à l'aspect délicat du baillon, de la fouille au corps, qui auraient été infligés à certains requérants, la police de l'aéroport réfute ces accusations et déclare, au contraire, faire de nombreux contrôles pour que les choses se passent correctement. Personne n'est refoulé sans avoir eu la possibilité de s'exprimer et notamment de déposer une demande d'asile. La police veille scrupuleusement à ce qu'il n'y ait pas de débordement en la matière. Cas échéant, le/les responsables seraient dûment réprimés.
Cependant vivre en zone de transit de l'aéroport, désoeuvré, parfois désorienté, dans un milieu très différent de celui d'où l'on vient, n'a rien d'un séjour de vacances. Théoriquement, l'Office fédéral des réfugiés devraient prendre une décision très rapide. Le requérant disposant de 24 heures pour faire recours et l'autorité fédérale compétente de 48 pour rendre son verdict, la décision finale devrait tomber dans le 72 heures suivant la demande, délai tolérable. Les difficultés proviennent du fait que l'Office fédéral des réfugiés tarde à rendre sa réponse et que des séjours se prolongent plusieurs jours, voire jusqu'à deux semaines. On imagine combien la situation peut se dégrader, les rapports se tendre, ce d'autant plus lorsqu'il s'agit de familles avec des enfants, parfois en bas âge, qu'on ne sait comment occuper, qui ne peuvent pas sortir se promener, qu'il faut changer, etc. Zurich a, semble-t-il, résolu la question à sa manière: si le cas nécessite une instruction supplémentaire, on laisse entrer après 72 heures.
Discussion
Depuis le dépôt de la pétition, la commission constate avec satisfaction que la situation a évolué dans le bon sens. L'autorité genevoise concernée a répété à plusieurs reprises sa volonté de voir s'améliorer les conditions d'accueil et d'hébergement des requérants d'asile. Les deux circulaires (aide-mémoire et conditions d'hébergement) devraient permettre d'arrondir les angles. La création du SARA, Service administratif des refoulements à l'aéroport (dont l'appellation nous semble quelque peu malheureuse...) va dans le même sens. Quatre fonctionnaires de police, choisis pour leurs qualités d'écoute, sont chargés entre autres tâches, de faciliter tant l'accueil que le séjour, voire le départ, des requérants. S'il y a eu une des bavures antérieurement, elles ont été sanctionnées et l'officier de police responsable veille tout particulièrement à ce que l'accueil des requérants soit respectueux de la personne et des droits de gens qui ne sont pas des prévenus.
Il n'en reste pas moins que le confinement dans la zone de transit, l'attente, le désoeuvrement, le dépaysement, l'angoisse, le manque de contacts avec des compatriotes, etc. sont des éléments perturbants. D'autre part, les policier du SARA, tout dévoués qu'ils soient, ne sont pas des assistants sociaux. Les dortoirs, tout corrects qu'ils soient, n'ont rien d'un lieu de séjour où on aurait envie de s'attarder.
La conclusion est simple: tout requérant a droit à ce que sa demande soit enregistrée. La police assure que c'est le cas sans exception. Par ailleurs, il serait hautement bénéfique que l'Office fédéral des réfugiés rende ses décisions dans les délais impartis, soit au plus tard 72 heures. Bien que cela ne soit pas de sa compétence, la commission se permet d'insister pour que les autorités genevoises interviennent auprès de Berne dans ce sens. Il s'agit aussi de soulager le travail des gens de Cointrin.
Conclusion
Considérant que les demandes des pétitionnaires pour la part qui incombe aux autorités genevoises aéroportuaires sont en très grande majorité satisfaites, c'est à l'unanimité que la commission des pétitions vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de déposer le présent rapport sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
ANNEXE I
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ANNEXE II
ANNEXE III
Débat
Mme Liliane Charrière Urben (S), rapporteuse. J'ai malheureusement quelque chose à rajouter à mon rapport.
Déposé le 7 mai 1996, c'est la quatrième fois que ce rapport apparaît à notre ordre du jour. C'est probablement dommage. En tout cas, il est certain que si ce point avait été traité la première fois où il a été présenté je n'aurais eu aucun commentaire supplémentaire à faire.
Je me sens plutôt perplexe, voire mal à l'aise; mal à l'aise parce que j'ai l'impression que le courant n'est pas passé entre les décisionnaires en matière d'accueil des demandeurs d'asile et les exécutants. A moins que, naïfs, les députés qui ont étudié ce sujet délicat s'en soient trop laissé conter, bref qu'on les ait quelque peu endormis avec de bonnes paroles et des accents de sincérité.
En effet, tant lors de l'audition du responsable du service de la population et de l'asile que lors de la visite sur place à Cointrin du service administratif des refoulements à l'aéroport, organe interne de la police, la commission a eu le sentiment que si des maladresses, voire des bavures, avaient eu lieu dans le passé la barre avait été redressée et la manière de faire et de donner des directives avait été assouplie. Le responsable de Cointrin nous a affirmé avec grande vigueur vouloir veiller personnellement à ce que tout ce qui se passe à Cointrin le soit correctement, en respectant la loi, bien sûr, mais en tenant compte de la dignité des requérants d'asile.
Il y a loin de la coupe aux lèvres, ce qui me rend perplexe ! En effet, la presse a fait état - je n'ai pas pu vérifier le fait, car j'étais absente - d'un fait qui s'est déroulé le 17 juin. Un ressortissant zaïrois dépose une demande d'asile. En date du 20, l'Office fédéral des réfugiés rejette la demande et ordonne le renvoi immédiat. Puis ce requérant dépose un recours et le 3 juillet son mandataire fait appel au Tribunal administratif.
En principe d'après la loi fédérale, lorsque septante-deux heures sont écoulées, tout requérant doit être remis en liberté. Mais cela n'a pas été le cas : pendant quinze jours ce requérant a été retenu à Cointrin. On joue beaucoup sur les termes «rétention» et «détention» : en réalité c'est bien de «détention» dont il faut parler.
Durant ces quinze jours - période chaude où l'on a besoin d'air - ce requérant n'a pu sortir s'aérer qu'une seule fois. Il a été suspecté de trafic de drogue, ce qui me semble plutôt naïf de la part des employés, car l'on sait très bien que les personnes qui transportent de la drogue, y compris sur eux et dans leur corps, ne vont pas demander l'asile : ceux qui le font essayent de passer le plus possible inaperçus. Or cette personne a été fouillée au corps à plusieurs reprises et tous les soirs avant d'aller au dortoir. Il a été enfermé, surveillé pendant les douches et fouillé à chaque sortie. Bref, ses conditions de détention ont été tout à fait différentes de ce que nous attendions.
La preuve est que le Tribunal administratif a rendu un jugement très sévère - je l'ai en main - contre le département de justice, police et des transports et contre l'Office fédéral des réfugiés. Le Tribunal relève notamment que les conditions de détention - et non pas de rétention - ne sont pas conformes aux exigences de la loi; en particulier le fait que ce requérant ait été enfermé dans sa chambre pendant la nuit apparaît dépourvu de tout fondement légitime dans la mesure où s'il avait de l'argent il pourrait louer une chambre et en disposer à volonté.
On ne fournit aucune occupation ni aucun travail aux personnes détenues dans la journée. Pourtant une loi fédérale prévoit qu'autant que possible, s'agissant de détenus administratifs, une occupation leur soit donnée. Je pourrais transmettre le dossier à qui le désire. Il est long aussi je ne veux pas vous imposer cette lecture. Mais tout de même il semble bien que la procédure utilisée à Cointrin ne corresponde pas à celle qui nous a été promise et qu'elle est beaucoup plus restrictive qu'il n'est nécessaire pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre.
Dans ces conditions, les personnes qui administrent la prise en charge des requérants d'asile ont-elles véritablement pris conscience des recommandations données ou tout du moins de celles dont on nous a dit qu'elles l'ont été ? On nous a dit que ces personnes étaient choisies pour leur qualité d'écoute. Alors on frémit à l'idée de ce qu'aurait pu être la situation si tel n'avait pas été le cas ! Mon impression n'est pas uniquement émotive ou émotionnelle; elle s'appuie sur les considérants et sur l'arrêt rendu par le Tribunal administratif.
Je me demande s'il ne faudrait pas que nous entendions à ce sujet le responsable du département de justice et police, dont je veux bien croire que ce sujet a retenu son attention cet été, malgré les multiples occupations qui sont les siennes. Mais je remarque tout de même que lorsque les pétitionnaires demandaient que tout ce qui concerne les structures d'accueil des requérants d'asile, leur gestion et les mesures fasse l'objet d'un règlement il nous a été rétorqué que nous ne devions pas avoir la maladie de la réglementation ni des lois. C'est vrai, mais dans le cas particulier il semble bien que les craintes des pétitionnaires étaient justifiées. En réalité avec un règlement digne de ce nom - et non une directive - les choses se passeraient mieux.
En matière de fouilles, je tiens à vous faire savoir - ce qui en tant que femme me fait froid dans le dos, mais je n'ai pas pu le vérifier - que des fouilles au corps sont effectuées sur des femmes. Je trouve cela parfaitement scandaleux compte tenu des conditions dans lesquelles elles se pratiquent.
Le président. Madame la députée, vos conclusions modifient-elles votre rapport ?
Mme Liliane Charrière Urben, rapporteuse. Ecoutez, la difficulté dans le cas particulier réside dans le fait qu'au moment où le rapport a été rédigé nous avions tous, en commission, le sentiment que les mesures avaient été prises pour que tout se passe mieux. Les entreprises étant humaines, elles peuvent tout à fait être susceptibles de déraper une fois ou l'autre, et il fallait redresser la barre. Trois mois se sont écoulés depuis, et je ne maîtrise pas suffisamment la pratique de ce Grand Conseil pour pouvoir dire ce qu'il faut faire de ce rapport. Je vous ai rapporté les informations en ma possession depuis le dépôt de ce rapport, notamment le jugement du Tribunal administratif qui est assez sévère, pour ne pas dire très sévère.
C'est donc au responsable des procédures du Grand Conseil et peut-être également au chef du département que je demande comment je dois faire pour bien faire, afin que les choses aillent mieux dorénavant, comme on nous l'avait assuré.
Le président. Vous avez la possibilité de demander au Grand Conseil le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Est-ce ce que vous désirez ?
Mme Liliane Charrière Urben, rapporteuse. Ce n'est pas ce qui correspond aux conclusions de la commission ! Que se passe-t-il lorsqu'un élément nouveau intervient entre le dépôt d'un rapport et son traitement en séance plénière ?
Le président. Il faut le renvoyer en commission !
Mme Liliane Charrière Urben, rapporteuse. Je ne sais pas s'il faut le renvoyer à la commission des pétitions... Il y a peut-être d'autres instances...
Le président. Nous allons donc voter sur les conclusions de votre rapport, soit le dépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. J'interviens tout d'abord sur le rapport qui nous occupe actuellement. J'évoquerai ensuite le cas dont nous a parlé Mme la députée Urben...
Mme Liliane Charrière Urben, rapporteuse. Charrière Urben !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. ...Charrière Urben ! (Rires.)
Je précise tout d'abord qu'il y a quatre mois... (L'orateur répète ces derniers mots.) ...avant que vous vous préoccupiez de ce problème, les inspecteurs de sûreté avaient déjà été remplacés par des fonctionnaires de l'OCP. Ce n'est donc pas cette pétition qui a fait changer quoi que ce soit. C'est mon département qui en a pris l'initiative !
Je tiens à faire remarquer en deuxième lieu que l'aide-mémoire évoqué dans cette pétition est déjà remis aux requérants d'asile.
Troisièmement, le requérant ne dispose pas de vingt-quatre heures pour interjeter recours, mais pour demander la restitution de l'effet suspensif du recours.
Quatrièmement, ce n'est pas l'ODR qui tarde à prendre des décisions, mais la commission de recours. Je précise que la loi n'impartit aucun délai à l'ODR pour rendre ces décisions.
S'agissant du nouveau cas dont vous parlez - je vous le dis tout de suite, vous pourrez renvoyer cette pétition à chaque session du Grand Conseil, car il y aura toujours un nouveau cas ou quelque chose qui ne vous plaira pas (Remarques.) - un arrêt du Tribunal fédéral a été rendu. Eh bien je vous prie d'intervenir sur le cas de ce Zaïrois qui sera traité indépendamment !
Depuis quelque temps je constate que de manière régulière il n'y en a jamais assez : il faut prendre de nouvelles mesures, il faut construire un «Club Med'» pour requérants d'asile dans un canton qui s'est clairement prononcé pour des mesures de contrainte. (Exclamations.) Si vous voulez parler d'un nouveau cas sur la base d'un jugement du Tribunal administratif, déposez un autre texte, mais je ne vois pas l'utilité de renvoyer ce rapport en commission. Si vous le voulez, faites-le ! Nous vous renseignerons sur le cas de ce Zaïrois dont vous parliez à l'instant.
M. Christian Ferrazino. Vous avez été aussi lamentable que d'habitude !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Mais oui, cher Monsieur !
Une voix. Ta gueule !
Le président. S'il vous plaît, s'il vous plaît ! Monsieur Ferrazino, arrêtez ! Demandez la parole et je vous la donnerai ! (Exclamations.)
Mme Liliane Charrière Urben (S), rapporteuse. Monsieur le président du département de justice et police, je trouve votre réponse un peu courte, voire un peu légère !
Si vous nous dites que le contenu de l'arrêt rendu par le Tribunal administratif n'a aucune importance...
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit !
Mme Liliane Charrière Urben, rapporteuse. C'est pourtant ce que j'ai cru comprendre !
Le Tribunal administratif est tout à fait clair en disant que : «Force est de constater que la détention ne peut excéder septante-deux heures, durée citée dans la LAL...». Si vous vous moquez des délais impartis par la loi, alors à quoi sert-il de parlementer et de discuter en séance plénière ? Dans le cas particulier, mais de manière générale, nous n'avons pas inventé ce délai de septante-deux heures qui ne doit pas être dépassé en cas de recours ! Ce sont vos propres fonctionnaires qui nous ont expliqué ce fonctionnement. On nous a même dit - c'est écrit noir sur blanc dans le rapport - que, à Zurich, lorsque les septante-deux heures sont échues on relâche les détenus quitte à devoir les rechercher et à les retrouver avec difficulté.
Je vous demande simplement pourquoi les conditions de détention sont plus sévères à Cointrin que celles prescrites par la loi et pourquoi les personnes responsables de cette détention n'appliquent pas exclusivement ce que la loi leur intime de faire tout en nous disant qu'elles le font alors que ce n'est pas le cas. Ma question est simple !
M. Bernard Lescaze (R). Je suis surpris de la tournure que prend cette discussion, puisque la commission des pétitions n'a pas consacré moins de huit séances à ce sujet et que c'est à l'unanimité que ses conclusions ont été déposées.
D'autre part, la commission judiciaire a approuvé un projet de loi qui modifie la procédure de recours en matière d'asile - projet qui sera traité prochainement par ce Grand Conseil - pour qu'elle soit davantage conforme à certaines exigences du Tribunal fédéral. Dans ces conditions, il n'est pas question de changer les conclusions de la commission, s'agissant de cette pétition qui date déjà de plus d'une année. Je propose que l'on vote le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, étant donné que par ailleurs nous avons d'autres motions sur le droit d'asile à traiter, notamment celle de Mme Reusse-Decrey que nous ferons examiner en temps voulu.
M. Christian Ferrazino (AdG). Merci, Monsieur le président, de me donner l'occasion de répondre à M. Ramseyer qui n'a manifestement pas très bien compris les propos tenus par la rapporteuse.
En effet, tout le monde s'accordait à reconnaître, il y a quelques mois, que les promesses faites par le Conseil d'Etat dans ce rapport étaient satisfaisantes et allaient donc permettre à ce Grand Conseil de les accepter par le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil. Or ce qui s'est passé depuis la rédaction de ce rapport - Mme Charrière Urben l'a rappelé tout à l'heure - démontre uniquement que si les promesses étaient belles elles n'ont toutefois pas été tenues.
Par conséquent, le Conseil d'Etat, en nous faisant croire qu'il allait adopter une certaine politique en la matière, nous prouve dans les faits, trois mois après avoir déposé ce rapport, qu'il fait précisément le contraire de ce qu'il s'était engagé à faire ! Alors, Madame Charrière Urben, je ne crois pas qu'une solution meilleure que celle-là sera trouvée en renvoyant cette pétition en commission.
Je tiens à dire, au-delà de ce rapport, que vos propos, Monsieur Ramseyer, démontrent que votre attitude vis-à-vis des candidats réfugiés - permettez-moi de vous le dire - est totalement inacceptable, à moins que vos propos ne vous aient à nouveau échappé, puisque je sais que ces temps vous faites des déclarations intempestives sur à peu près tout et n'importe quoi. Comparer les conditions de détention de ces personnes à celles des clubs Méditerranée, Monsieur Ramseyer, c'est indigne d'un magistrat qui occupe la fonction qui est la vôtre : chef de la police ! Votre manière de traiter des candidats réfugiés qui sont des êtres humains comme vous et moi, Monsieur Ramseyer, démontre de façon peu glorieuse pour vous le peu de respect que vous portez à ces personnes !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je renonce à m'exprimer, car je voulais dire la même chose que M. Ferrazino. Je trouve le discours de M. Ramseyer à la limite du racisme !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. S'agissant du Club Med' je ne parlais pas de Cointrin, mais de la construction qui est en train d'être réalisée. Je me réjouis de vous montrer le dossier, car vous parlez visiblement de quelque chose que vous ne connaissez pas, Monsieur le député Ferrazino !
Madame, vous avez allégué que je ne me préoccupais pas de ce problème, alors que je viens de vous démontrer que mon département avait anticipé votre demande de quatre mois en prenant les dispositions nécessaires, en remplaçant les inspecteurs de sûreté par des fonctionnaires et en communiquant aux requérants leurs droits sous forme d'aide-mémoire. Cela a été effectué par mon département à son initiative. Aussi je n'accepte pas, Madame, une telle affirmation.
Vous m'avez par ailleurs demandé si j'étais à disposition en faisant allusion à mes devoirs d'été. Je suis tout le temps à la disposition des commissions pour venir déposer et je me déplacerai comme vous le souhaitez pour vous parler du droit d'asile. Mais alors je tiens à ce que l'on évoque le problème dans sa globalité, parce qu'il est trop facile de passer d'un sujet à un autre : une fois Cointrin, ensuite la prison, une autre fois Favra. Cette «guéguerre» a assez duré ! Et je ne suis pas le seul à dire que la coupe commence à être pleine. Je le répète, je suis à votre disposition pour répondre à vos questions à ce sujet, mais je vous en prie ne dites pas que nous ne nous préoccupons pas des problèmes que vous soulevez, alors que nous vous avons précédé de quatre mois en la matière !
Mme Liliane Charrière Urben (S), rapporteuse. Monsieur Ramseyer, j'ai l'impression que nous ne sommes pas tout à fait sur la même longueur d'onde. Cela ne m'étonne pas d'ailleurs !
Vous dites que la coupe est pleine. Eh bien moi j'entends : «La barque est pleine.» ! Peut-être mes références sont-elles mauvaises ?
Je n'ai pas dit que vous ne vous préoccupiez pas de ce dossier. J'ai simplement émis l'hypothèse - je veux bien reconnaître que je me suis trompée - qu'il y a une déperdition entre les ordres que vous donnez et ceux qui les exécutent. Or vous dites qu'il n'y en a pas; donc vous devez parfaitement savoir ce qui s'est passé au mois de juin et vous êtes au courant des conclusions de l'arrêt du Tribunal administratif. Chacun en conclura ce qu'il voudra ! Vous savez donc parfaitement ce qui s'est passé à Cointrin, ce qui est encore pire ! Moi, je pensais que vous n'étiez pas tout à fait au courant et qu'on ne s'en était pas trop vanté auprès de vous.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
En date du 27 juin 1995, M. Serge Paquier, assistant à l'université de Genève, adressait tant aux autorités cantonales que communales une pétition pour se plaindre des nuisances sonores de son quartier. Le Grand Conseil l'enregistra le 29 juin et la renvoya à l'examen de la commission des pétitions lors de sa séance de septembre. Cette dernière reçut le pétitionnaire le 2 octobre 1995, puis interrogea à ce sujet M. Jean-Pierre Dulon, directeur administratif du département des travaux publics et de l'énergie (DTPE) et M. Jean-Pierre Christen, chef de service de la signalisation routière de l'office du trafic et de la circulation (OTC), avant d'écrire à la Ville de Genève pour s'informer de la liste et de la fréquence des concerts se déroulant dans les Bastions, comme la présidente de la commission en informa cette dernière le16 octobre 1995. Après trois lettres et trois appels téléphoniques, la réponse de la ville de Genève put être lue en commission le 20 mai 1996 et le vote de la commission put enfin avoir lieu.
1. Audition du pétitionnaire
Lors de son audition, M. Serge Paquier, après avoir rappelé le texte de celle-ci:
(P 1083)
PÉTITION
concernant les nuisances sonores(rue du Conseil-Général, rue Général-Dufour, place René-Payot)
Mesdames et
Messieurs les députés,
Même si nous ne sommes pas opposés aux travaux et aux activités culturelles, le soussigné et, avec lui, les habitants et professionnels du quartier, vous informent que les diverses nuisances sonores ont atteint dans leur durée et leur intensité un niveau insupportable. Nous vous écrivons pour vous demander d'intervenir.
Premièrement, les riverains de la rue De-Saussure, de la rue du Conseil-Général et de la place René-Payot subissent depuis deux ans au moins les travaux extrêmement bruyants de la ligne du tram 13. Dès le début d'avril de cette année, ils se sont intensifiés sans interruption. Ceux de l'aiguillage rue De-Saussure-rue du Conseil-Général ont été particulièrement pénibles, avec plusieurs perforatrices et machines de chantier. A plusieurs reprises, des travaux assourdissants, de l'aveu même des organisateurs, ont été effectués de nuit et chaque fois, malgré les bonnes intentions des Transports publics genevois, nous avons été prévenus seulement le jour même des travaux, ce qui nous a empêchés de «prendre nos dispositions», comme le veut la formule consacrée.
Avant les travaux de la ligne 13, c'était la construction du refuge, le renforcement des voies, le rabotage des trottoirs, l'installation de poteaux et de nouvelles signalisations. Vous pouvez vous rendre sur les lieux et compter vous-mêmes les incessantes réouvertures subies par les trottoirs rue du Conseil-Général, rue De-Saussure, ces dernières années. La semaine précédente, on nous dit que les travaux du 13 sont achevés et c'est le début, sur ces mêmes trottoirs, de nouveaux travaux, cette fois pour construire une nouvelle ligne électrique qui devrait amener de l'énergie supplémentaire à la Banque Darier Hentsch & Cie. Il y a trois semaines environ, des travaux ont été effectués le vendredi soir et le samedi dans la journée en face du Landolt par les Services industriels. Et encore, de nouveaux travaux viennent de débuter rue du Général-Dufour, en face d'Uni II.
A quand les prochains travaux? Il est question de refaire la façade d'Uni II à l'occasion du bicentenaire de la Banque Darier Hentsch & Cie et de construire un parking à la place Neuve. Sachez qu'il y a des limites à ne pas franchir.
Deuxièmement, et c'est beaucoup plus grave, le jardin des Bastions est depuis quelque temps continuellement le lieu de concerts bruyants, avec amplificateurs. Ceux-ci, souvent rock, ont lieu toutes les fins de semaine. Souvent, celui du samedi, les premiers «réglages» débutent vers midi et le concert se prolonge souvent après minuit. Celui du dimanche qui débute l'après-midi se termine aussi, souvent, après minuit. Presque chaque jour, lorsque les conditions climatiques le permettent, des concerts (rock, jazz, fanfares) ont lieu jusque vers 11 heures du soir, souvent plus tard. C'est sans parler des nombreuses manifestations qui se passent dans le quartier de l'université. Quand ce n'est la Fête de l'université avec une dizaine de lieux de concerts, c'est la Fête des fanfares, la Fête de la musique et bien d'autres encore. Par ailleurs, l'année précédente, en fin de semaine, le vendredi ou le samedi soir, des concerts de type folklorique avaient encore lieu sur la terrasse du Landolt et ces restaurateurs recommenceront peut-être durant cet été.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, estimant que nous, habitants et professionnels du quartier, avons le droit, comme tous les citoyens genevois, à un minimum de tranquillité, nous vous demandons donc instamment d'intervenir pour supprimer les nuisances sonores dans le quartier.
Dans l'attente de votre réponse, je vous prie d'agréer, Mesdames et Messieurs les députés, mes salutations distinguées.
N.B. : 40 signatures
Serge Paquier
6, rue du Conseil-Général1205 Genève
... signale d'emblée que la situation s'est encore aggravée durant l'été puisque les travaux de la ligne 13 se sont poursuivis jusqu'au 15 août avec aiguillages posés entre minuit et 3 h du matin. A peine une tranchée refermée on l'ouvre à nouveau prétextant d'autres travaux. Il y a là un véritable gaspillage à une époque où l'on prêche les économies.
Habitant à la rue De-Saussure, en face du Landolt, le pétitionnaire, qui enseigne à l'université tout en préparant une thèse ne se plaint pas du trafic du tram, mais bien des continuels travaux qui ont lieu depuis cinq ans, régulièrement de mars à septembre. Quand ce n'est pas les transports publics genevois (TPG), ce sont les services industriels (SI), puis les DTPE qui ouvrent et ferment trottoirs et chaussées. De plus, il y a toujours davantage de concerts l'été, à tel point qu'on ne peut plus travailler la fenêtre ouverte à l'université. Le pétitionnaire souhaiterait une meilleure coordination des travaux, un contrôle sonore des concerts et la diminution de leur nombre.
La commission entame une discussion avec le pétitionnaire, lui faisant remarquer qu'à proximité des Bastions, il est inévitable que les riverains participent involontairement aux promotions, aux fêtes de l'Uni, aux concerts d'été. Pour le pétitionnaire, tout bruit devrait cesser dès 22 h.
Il est souligné que le problème est délicat. En principe, les concerts organisés dans le parc des Bastions se terminent vers 23 h. D'autres habitants du quartier se plaignent des arroseuses municipales circulant dès 6 h du matin. Le pétitionnaire relève que le bruit cesse lorsque la police intervient, mains on ne peut pas recourir sans arrêt à ses services. Lorsqu'il a demandé à l'administrateur de l'université de réclamer un contrôle des décibels, celui-ci a préféré dire qu'il était sourd.
Suite à l'audition du pétitionnaire, la commission décide de demander la liste des concerts organisés dans les Bastions.
2.0Audition de représentants du DTPE et de l'OTC
Le 9 octobre 1995, la commission entend M. Jean-Pierre Dulon, directeur administratif du DTPE et M. Jean-Pierre Christen, chef de service de la signalisation de l'OTC au sujet de l'ouverture fréquente de la rue et du manque de coordination des travaux.
Sans avoir fait de recherche particulière à ce sujet, M. Dulon sait que pour le tram 13, des autorisations ont été délivrées pour deux nuits. S'il y a eu des travaux de nuit supplémentaires, ils l'ont été sans autorisation. Les travaux de génie civil sont maintenant terminés.
M. Dulon précise que c'est parfois pour ne pas déranger trop longtemps la population que l'on referme provisoirement une chaussée alors que tous les travaux nécessaires ne sont pas encore effectués. Les chantiers dans les rues de la ville dépendent de plusieurs administrations: SI, PTT, égouts, etc. Ils ne disposent pas tous des budgets idoines au même moment. S'il y a une fuite d'eau ou de gaz, il faut intervenir immédiatement. Il y a pourtant une commission de coordination qui fonctionne à satisfaction. On ne saurait imaginer qu'une route ne soit ouverte qu'une seule fois tous les quinze ans.
3.0Lettre de la Ville de Genève
4.0Discussion et vote
Au vu de la lettre du conseiller administratif André Hediger qui indique que la police est intervenue à deux reprises contre les nuisances sonores et qui montre que la Ville est parfaitement consciente du problème, la commission des pétitions, constatant de sucroît l'achèvement de la ligne 13, vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, par 12 voix contre 1 abstention, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Débat
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. Je n'ai rien à dire pour l'instant, Monsieur le président. J'espère que cela ne fera pas trop de bruit, puisque cette pétition est contre les nuisances sonores ! (Rires.)
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
La commission des pétitions, sous la présidence de Mme Janine Hagmann, a reçu la pétition suivante :
PÉTITION
Les soussignés demandent aux députés du canton de Genève et aux conseillers municipaux de la Ville de Genève d'intervenir auprès de leurs représentants au conseil d'administration des TPG pour que l'arrêt du minibus de la Vieille-Ville soit maintenu à la place Franz-Liszt.
Cet arrêt est vital pour beaucoup de personnes âgées et handicapées ayant de la peine à se déplacer qui habitent le secteur sud de la Vieille-Ville.
N. B.: 134 signatures
Audition des pétitionnaires, Mmes Babel, Soutter et M. Gallet
Les personnes présentes expliquent que cet arrêt n'est plus desservi depuis le changement de trajet dû à la construction du parking de Saint- Antoine.
Les TPG ont effectué un comptage et ont décrété que peu de gens étaient concernés par cet arrêt. Les pétitionnaires y voient une tromperie dans la mesure où le comptage a été fait alors que le minibus ne circulait plus place Franz-Liszt.
Les TPG ont prévu de supprimer la boucle Franz-Liszt - Croix-Rouge et de faire passer le minibus par Théodore-de-Bèze - Bourg-de-Four - Hôtel-de-Ville. Les pétitionnaires le verraient plutôt faire le tour par les musées (Art et histoire, Petit Palais et Cabinet des estampes) afin de desservir un tissu urbain plus grand.
Beaucoup de personnes âgées habitent près de la place Franz-Liszt et se trouvent démunies de moyens de transport et comptent sur ce trajet pour retrouver leur autonomie. De plus, un arrêt à cet endroit se trouverait juste à la sortie piétonne du parking de Saint-Antoine et pourrait emmener les automobilistes garés dans ce parking au centre-ville.
Audition de M. Grasset représentant les TPG
M. Grasset dit que le circuit a subi plusieurs perturbations notamment à cause de la construction du parking de Saint-Antoine. Les TPG voudraient passer par la rue des Chaudronniers - Bourg-de-Four dans le nouveau tracé, mais ils ne prendront pas de décisions sans en référer à la Ville de Genève et à l'Etat de Genève, puisque ces collectivités financent cette ligne chacune pour moitié.
Il relève que pour que cette ligne soit attractive elle doit remonter rapidement des rues Basses et ne pas diminuer de cadence. En ce qui concerne le boulevard des Tranchées, M. Grasset relève que cet axe est déjà desservi par les TPG.
Discussion et vote
Les conseillers municipaux de la Ville de Genève qui ont reçu cette même pétition accèdent aux demandes des pétitionnaires.
Lors de la discussion il est relevé
• que la cadence des bus doit être maintenue;
• que le Bourg-de-Four doit être préservé du trafic;
• et qu'il est possible d'étudier un tracé par la promenade de Saint-Antoine qui réhabiliterait l'arrêt place Franz-Liszt.
Au vu de ce qui précède la commission des pétitions vous propose, avec 8 voix pour, 4 abstentions (lib.) de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
Préambule
Le 9 septembre 1994 était déposée, à titre de renseignements, sur le bureau du Grand Conseil la pétition 1035-A «Pour la création d'une commission consultative en faveur de la tolérance et du respect des libertés religieuses». Cette pétition, émanant des milieux de la scientologie, était ainsi classée.
Le 5 octobre 1994, était transmise au Conseil d'Etat la pétition 1027 du GPFI demandant des mesures contre la scientologie. Il faut d'emblée remarquer que cette pétition est ambiguë dans la mesure où elle est intitulée «Contre la scientologie», que sont but vise les personnes «victimes de sectes poursuivant le culte de l'argent» et que l'exposé des motifs ne traite que de la scientologie. Le rapport de la commission des pétitions invitait le Conseil d'Etat à prendre diverses mesures.
Le Conseil d'Etat, à l'instar de la commission des pétitions, admet que la pétition 1027 vise la scientologie et non l'ensemble des sectes comme pourraient le laisser croire nombre de déclarations à ce sujet intervenues par la suite, y compris celles émanant des auteurs de la pétition, ultérieurement au drame de Saint-Pierre-de-Chérennes (secte du Temple solaire) en décembre 1995.
Le Conseil d'Etat peut répondre de la manière suivante aux différentes invites telles que contenues dans le rapport de la commission des pétitions dans ses conclusions.
1. 1re invite: mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour éviter tout prosélytisme et toute utilisation de données administratives à des fins de propagande et de recrutement, notamment auprès des mineurs
1.1 Eviter tout prosélytisme
Cette invite bute fondamentalement sur le fait que notre constitution garantit la liberté de culte, d'opinion, de croyance, de conscience ou de religion. Cette liberté s'étend à la possibilité de faire connaître ces diverses notions à des tierces personnes par tout moyen d'information et de publicité existant.
En dehors de la notion de sécurité de l'Etat, il n'est pas du ressort de l'autorité cantonale d'intervenir en la matière, et cela en amont, faute de base légale. Il en va évidemment différemment en aval, en cas de plaintes et dans la mesure où des délits réprimés par le droit sont commis ou sont susceptibles d'avoir été commis ou encore de pouvoir être commis avec vraisemblance. Enfin, il est inconcevable d'instaurer une police des consciences et des âmes.
En conclusion, on ne peut pas - a priori et de manière générale - interdire toute forme d'information ou de publicité de la scientologie en la déclarant hors la loi. On peut tout au plus contrecarrer son prosélytisme sur plaintes relatives à d'autres éléments que le seul prosélytisme.
1.2 Eviter toute utilisation de données administratives à des fins de propagande et de recrutement
Les différents textes légaux et réglementaires en vigueur à l'Etat de Genève, particulièrement en matière informatique, donnent sur le plan du principe les garanties souhaitées par la commission des pétitions.
Il demeure que cette utilisation abusive pourrait être le fait de membres de la scientologie faisant partie des personnes habilitées à traiter ou utiliser ces données. Un abus en la matière serait alors sanctionné par la loi sur les informations traitées automatiquement par ordinateur, du 17 décembre 1981, pour autant qu'il puisse être décelé. Il faut cependant remarquer qu'un membre du personnel de l'Etat ne pourrait pas être sanctionné par le simple fait qu'il appartiendrait à la scientologie mais seulement du fait qu'il aurait utilisé abusivement des données qu'il détient, comportement qui n'est pas aisé à prouver.
2. 2e invite: favoriser une étroite collaboration entre les associations d'information et de soutien aux victimes des sectes et les départements de l'Etat de Genève
On pourrait se référer, par analogie du moins, à la loi sur l'aide aux victimes (LAVI). Cette dernière loi n'entre cependant pas en ligne de compte pour le motif qu'elle ne s'applique qu'en cas de commission d'une infraction réprimée par le code pénal.
De plus, cette référence ne permettrait pas d'éviter l'obstacle dirimant d'une intervention en aval faute de pouvoir s'exercer en amont.
Le Conseil d'Etat cependant est sensible à la suggestion visant à une meilleure collaboration et à une meilleure information. Il entend intégrer dans sa réflexion la dimension régionale, voire internationale. Les départements concernés s'occupent de créer un outil dans ce domaine, tout en relevant l'extrême sensibilité du contexte et donc l'extrême difficulté de rédiger une documentation qui soit précise et correcte et qui ne soit, de surcroît, pas contestable sur le plan juridique.
3. 3e invite: étudier la nécessité de faire intervenir le médecin cantonal ou le pharmacien cantonal dans le contrôle de prestations médicales apportées par des sectes, notamment de la distribution de vitamines par l'Association pour une église de scientologie
Le médecin cantonal et le pharmacien cantonal surveillent l'exercice des professions de la santé. A ce titre, ils peuvent intervenir si des pratiques s'avèrent contraires à l'art médical ou pharmaceutique.
S'ils constatent des pratiques contraires à la déontologie professionnelle ou aux règles de l'art, ils saisissent la commission de surveillance des professions de la santé qui peut proposer des sanctions, voire recommander l'interdiction de l'exercice de la profession au délinquant.
Il demeure que les personnes exerçant une activité non définie dans la loi sanitaire échappent à cette commission. S'il s'agit d'une pratique illégale de la médecine, le département, sur proposition du médecin cantonal ou du pharmacien cantonal, dénonce les faits au procureur général.
En ce qui concerne la distribution de vitamines, il est rappelé que certaines préparations vitaminées doivent être enregistrées à l'office intercantonal de contrôle des médicaments avant d'être commercialisées. La vente de tels produits non enregistrés est donc illicite et est interdite. La législation sanitaire actuelle prévoit, pour toute infraction à la loi, des sanctions administratives ou pénales.
D'autres préparations vitaminées ne sont, en revanche, pas soumises à enregistrement, n'étant pas considérées comme médicaments mais comme aliments de complément. Elles doivent, quant à elles, être déclarées à la division exécution du droit sur les denrées alimentaires de l'office fédéral de la santé publique. Le chimiste cantonal veille à l'exécution de la loi sur les denrées alimentaires et peut aussi, pour sa part, interdire et sanctionner la vente de produits non déclarés.
Conclusion
De manière particulière, le Conseil d'Etat est sensible aux problèmes posés par la scientologie. C'est sur le plan de l'information du public, des mineurs en particulier, que doit s'exercer en première analyse son action.
Pour les autres, et graves, problèmes, l'action du Conseil d'Etat en ce qui concerne la scientologie est englobée dans celle qu'il entend conduire à l'égard des sectes en général.
De manière générale, les drames de Salvan et Cheiry en 1994 et deSaint-Pierre-de-Chérennes en 1995 ont mis en lumière, de manière tragique, les issues auxquelles conduit l'activité de certaines sectes.
Le Conseil d'Etat peut, à ce propos, apporter les informations suivantes:
Secte du Lotus d'or/Mandarom (Castellane/France)
Par décision du 14 juillet 1995, le département de justice et police et des transports (DJPT) a prononcé la caducité de l'autorisation d'exploiter l'agence de sécurité privée UNIT SÉCURITÉ SA en raison de la menace pour la sécurité et l'ordre publics résultant de la totale inféodation des dirigeants de l'agence au gourou de cette secte. Cette décision fait présentement l'objet d'un recours au Tribunal administratif.
Groupe d'étude
Par mandat du 12 janvier 1996, le DJPT a chargé un groupe d'étude, présidé par Me François Bellanger, avocat, en substance:
- de faire un état des lieux complet sur les bases légales dont nous disposons en matière de sectes;
- d'examiner dans quelle mesure on peut faire un usage plus approfondi, plus direct et élargi des bases légales existantes dans le sens d'une intervention non plus seulement en aval mais en amont des problèmes;
- d'examiner quelle modification législative pourrait être conduite, sur les plans fédéral et cantonal, toujours dans la volonté d'agir en amont, de manière plus directe et plus approfondie à l'égard des sectes.
Le rapport préalable de ce groupe d'étude est attendu pour l'été 1996 et le rapport final pour l'automne 1996, à la suite de quoi le Conseil d'Etat examinera quelles sont les dispositions qu'il entend prendre et dont il fera part au Parlement.
Débat
Mme Evelyne Strubin (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord permettez-moi de vous dire que, selon moi, la loi du silence me paraît en la matière être assimilable à un cautionnement, voire à une protection; c'est la raison pour laquelle je m'exprime ce soir.
Pour commencer, j'apporterai une petite rectification qui a son importance et qui a été demandée par courrier par le Groupement pour la protection de la famille et de l'individu. Le titre du rapport dont j'étais l'auteur comportait une erreur dans son titre qui doit se lire comme suit : «Rapport de la commission des pétitions sur la pétition visant à prendre toutes mesures légales et autres pour protéger, porter assistance à toute famille ou individu victime de sectes, poursuivant le culte de l'argent par la pratique des manipulations mentales de ses adeptes».
Cette correction faite, je parlerai ici de la scientologie plus particulièrement, car il en a été beaucoup plus question devant la commission.
Permettez-moi donc un brin d'histoire :
Cette pétition a été reçue le 28 mars 1994 par la commission des pétitions qui travailla très sérieusement sur ce sujet et renvoya le 9 septembre 1994 un rapport unanime au Conseil d'Etat après avoir procédé à de nombreuses auditions. Depuis, silence... Au bout des six mois prescrits par le règlement, je me suis renseignée discrètement sur l'avancement de ce dossier, et il m'a été répondu que cela n'était pas une priorité du Conseil d'Etat. Il aura fallu les tristes événements que l'on sait, impliquant une autre secte, diverses interventions de députés à ce sujet et environ deux ans d'attente pour recevoir aujourd'hui le rapport du Conseil d'Etat, qui comporte quatre pages et demie, dont une ne représente que le simple rappel des faits. Néanmoins, ce rapport est-il intéressant, comporte-t-il des réponses et des solutions ?
Personnellement, je ne suis pas satisfaite :
A l'invite N°1 qui demandait au Conseil d'Etat de mettre tous les moyens nécessaires en oeuvre pour éviter tout prosélytisme et toute utilisation des données administratives à des fins de propagande et de recrutement, notamment auprès des mineurs, voilà ce que l'on nous répond en résumé :
La liberté de religion laisse à la scientologie la possibilité de faire connaître ses convictions par la publicité et l'information. Mise à part la sécurité de l'Etat, il n'est pas possible d'intervenir sauf s'il y a plainte. Il n'est pas concevable d'instaurer une police des consciences et des âmes. Les textes légaux, à l'Etat notamment, concernant l'informatique donnent toutes les garanties. Mais il demeure que des membres de la scientologie habilités à traiter et utiliser des données informatiques seraient sanctionnés, si tel était le cas, pour prosélytisme, pour autant qu'une telle utilisation puisse être prouvée. Merci, mais cela on le savait déjà ! De plus, rien n'est mentionné concernant la protection des mineurs et la fin de la réponse laisse entrevoir qu'en fait une utilisation des données de l'Etat par la scientologie demeure possible et qu'elle serait difficile à prouver.
A l'invite N°2 : favoriser une étroite collaboration entre les associations d'information et de soutien aux victimes des sectes et les départements de l'Etat de Genève, il nous est répondu ce qui suit :
Les départements créent un outil dans ce domaine tout en relevant la difficulté de rédiger une documentation précise et correcte qui ne soit pas contestable juridiquement. Très bien, mais si, comme cela est dit en début du rapport, le Conseil d'Etat se borne à parler de la scientologie, la nombreuse documentation versée au dossier et les conseils juridiques dont le Conseil d'Etat dispose devraient permettre d'établir cette documentation assez aisément. De plus qu'en est-il de la collaboration proposée ? Nous n'en savons pas plus !
Enfin, à la troisième invite demandant d'étudier la nécessité de faire intervenir le médecin cantonal ou le pharmacien cantonal dans le contrôle des prestations médicales apportées par des sectes, notamment la distribution de vitamines par l'Association pour une église de scientologie, il est répondu ce que nous savons déjà également : que le médecin et le pharmacien cantonal surveillent l'exercice de la médecine et que s'ils constatent des pratiques contraires à la déontologie ils saisissent la commission de surveillance des professions de la santé qui prend des sanctions et que les préparations vitaminées doivent être inscrites à l'OICM sous peine d'être interdites. Pas un mot sur Narconon, malgré les interventions de notre collègue Gossauer sur le sujet; aucune information sur les sanctions prises contre les ventes de vitamines amaigrissantes pratiquées par la société Trimlines, filière de la scientologie; rien ne nous est dit non plus sur les cures de purification à base de vitamines pratiquées durant les cours de la scientologie elle-même.
Bref, il semblerait que ce sujet n'inspire pas le Conseil d'Etat, bien qu'il dise y être sensible. Ces deux ans d'attente n'auront pas servi à grand-chose. Alors, si je peux me permettre de tenter de vous remotiver, je vous citerai, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, un texte remis par la scientologie à ses membres sous le titre : «Ce que nous attendons de la scientologie». «Un scientologue entraîné est quelqu'un qui a une connaissance spéciale du maniement de la vie; c'est un être qui se tiendra un mètre derrière la tête de la société. Un scientologue professionnel est un être qui se sert de la scientologie de façon experte dans n'importe quel domaine de la société. Une épouse dont le niveau de compétence en scientologie n'est pas celui d'un professionnel ne pourrait s'attendre à s'occuper de sa famille avec succès. Le président d'une entreprise sans certificat de scientologie échouera un de ces jours. La personne à la tête d'un pays s'effondrerait si elle ne connaissait pas la scientologie. Certains d'entre nous doivent diriger des centres, des écoles simplement pour donner des services au reste d'entre nous quand c'est nécessaire. C'est pour cette raison que nous avons des organisations sur tous les continents. Nous sommes les solutions aux fauteurs de troubles du monde. Nous attendons de vous que vous touchiez les points clés par n'importe quel moyen pour créer une meilleure planète. Nous ferions bien d'envahir avec succès toutes les activités qui existent et de faire sentir notre influence sur les lignes de communication du monde. La scientologie est le seul jeu sur terre où tout le monde gagne. Lorsque vous quittez le pouvoir, donnez les pleins pouvoirs à vos amis et partez les poches pleines de munitions, de preuves compromettantes et d'adresses de tueurs à gages chevronnés.»
Cette longue citation pour vous démontrer que le seul but de la scientologie est d'isoler ses membres en les motivant à se préparer à une nouvelle perception du monde, pour finir par le changer. Ils s'immiscent dans les affaires de l'Etat - et j'en veux pour preuve l'événement que j'ai appris récemment : bon nombre d'assurances de la place ont reçu un volumineux dossier envoyé par la scientologie qui leur demandait de prendre des mesures contre ce qu'ils appellent les abus des psychiatres à l'hôpital de gériatrie. On voit bien qu'ils se mêlent de tout !
Le but de la scientologie est de créer un Etat dans l'Etat en grignotant peu à peu les postes clés. Pour créer cette structure, il faut de l'argent, argent qui échappe à la collectivité pour tomber dans les poches des dirigeants de la scientologie; argent dont personne jusqu'à présent au monde n'a réussi à savoir quelle était sa destination ou son utilisation.
Concernant ce point, voici quelques chiffres qui font dresser les cheveux sur la tête :
En 1992, la Suisse était en tête des pays européens, par rapport à sa population, avec cent cinquante et un patrons de la scientologie sur son territoire; patrons dont cent vingt et un ont payé plus de 40 000 $, quinze plus de 100 000 $ et quinze plus de 250 000 $, contre trente-sept patrons en France. Faites le calcul; cela représente 3 825 400 $ au bas mot, pour le seul cas des patrons, qui échappent à la société pour aller engraisser la scientologie. On voit bien ici que le bien-être et le développement de l'adepte n'ont jamais été que la carotte qui permet de s'enrichir en prétextant donner un enseignement secret, qui n'est en fait que l'appropriation d'un savoir universel utilisé à des fins personnelles et partisanes, avec comme moteur l'argent et le pouvoir. Agir contre une telle organisation relève bien, à mon sens, de la sécurité de l'Etat.
Je rappelle ici que selon les spécialistes trois conditions sont nécessaires pour qu'une secte soit qualifiée de «dangereuse» :
1) l'omniprésence d'un chef omnipotent : Ron Hubbard en l'occurence;
2) les pressions financières : no comment !
3) les pressions psychologiques : elles ont bien lieu. François Lavergnat, pétitionnaire en est témoin pour avoir été menacé par téléphone, diffamé et avoir vu les scientologues le dénigrer auprès de sa fille à la sortie de l'école, et M. Paul Ranc, entendu par la commission des pétitions et bien connu pour son action et ses divers livres contre les sectes, en est témoin également pour avoir été menacé de mort, et j'en passe.
Tous ces faits sont des délits réprimés par la loi, mais, bien qu'ils aient été portés à la connaissance du public, il n'y a eu aucune sanction. La scientologie a été condamnée à Genève pour escroquerie, contrainte et extorsion, à Milan pour association de malfaiteurs, extorsion et abus sur incapables; elle a été mise en redressement judiciaire à Paris où on lui a réclamé 60 millions dont 20 au titre de bénéfices et 30 millions pour taxes professionnelles impayées sur plus de dix ans et on l'a mise sous tutelle d'un administrateur juridique.
En France Mme Barzach, MM. Barre et Fabius eux-mêmes se sont fait piéger en signant une pétition visant les psychiatres et demandant une réglementation contre les abus de tranquillisants, pétition lancée par la «Commission des citoyens pour les droits de l'homme», nom trompeur qui cache une fois de plus la scientologie. C'est dire si l'action de cette secte peut être perfide et trompeuse et je ne parle même pas du pseudo enseignement religieux prodigué par la scientologie, qui n'est bien évidemment destiné qu'à appâter plus de personnes.
Quand on voit l'activité développée par la justice française : entre autres perquisitions, mises en examen, redressements judiciaires, redressements fiscaux et autres, on peut s'inquiéter de l'immobilisme de la Suisse et notamment de Genève en la matière et on est en droit d'attendre mieux que les trois pages et demie qui nous sont proposées.
Pourtant il y a des pistes :
- prévention tout public;
- subvention aux associations d'aide aux victimes de sectes;
- création d'une structure d'Etat de soutien aux personnes ayant quitté ou désirant se plaindre d'une secte;
- étude de la situation fiscale;
- information dans les écoles pour que les jeunes ne se laissent pas piéger par les tests de QI et autres appâts;
- intervention du médecin ou du pharmacien cantonal;
- création d'un observatoire cantonal des phénomènes religieux;
- modification de la législation et j'en passe...
Monsieur Ramseyer, vous avez annoncé il y a quelque temps que vous en aviez assez de ces histoires de sectes et que vous alliez prendre les choses en main. J'ai été très heureuse de cette déclaration, mais encore faut-il qu'elle se concrétise par une action réelle. Je compte donc sur vous pour entraîner vos collègues par la motivation que vous avez annoncée et j'attends impatiemment l'automne 1996 pour savoir enfin ce qui va sortir des réflexions du Conseil d'Etat et de son groupe d'étude sur le problème des sectes en général.
Je rappelle que je ne suis d'ailleurs pas la seule à attendre. Les personnes dont certains membres de la famille ont disparu, se sont suicidés, sont ruinés, désemparés ou persécutés par la scientologie, attendent aussi, et elles depuis encore bien plus longtemps, des réponses à leurs questions et des mesures contre la scientologie. Cette attente se transforme en angoisse. Ces gens ont besoin de vous. Ne les laissez pas tomber. Ils n'ont personne d'autre vers qui se tourner.
Pour finir, je propose que ce rapport soit renvoyé au Conseil d'Etat pour être complété et étoffé et qu'on en prenne acte, mais seulement comme rapport intermédiaire sur la pétition 1027.
M. Roger Beer (R). J'aimerais tout d'abord remercier le conseiller d'Etat pour son rapport. Rassurez-vous je serai beaucoup plus bref que Mme Strubin qui a fait un exposé très détaillé de la situation assez dramatique dans laquelle nous nous trouvons, notamment avec la scientologie. Ce rapport est daté du 26 avril 1996 et, normalement, on devait avoir le rapport du groupe de travail pour l'automne 1996. Cela me réjouit, car c'est pour bientôt.
Monsieur le conseiller d'Etat, la plupart des députés sont tout à fait conscients du problème posé par les sectes dans la mesure où en matière de religion il est extrêmement difficile d'intervenir. La création de ce groupe de travail a un peu duré à mon avis, et on aurait pu attendre du Conseil d'Etat une réaction plus rapide. Dans ce sens, je suis d'accord avec Mme Strubin.
J'espère que ce groupe aura profité de l'été pour avancer et proposer des solutions qui permettent d'éviter l'embrigadement d'adolescents, des adultes jeunes ou moins jeunes par des mouvements que l'on peut qualifier de «sectaires». Ce problème de sectes est le reflet de notre société qui laisse tomber tout l'enseignement de la religion. Je crois qu'une motion présentée par des députés figure à l'ordre du jour; elle propose, précisément, d'étudier la possibilité de revenir à l'enseignement de la religion dans le cadre de l'enseignement public. En comblant cette lacune, on tiendrait une des solutions à ce problème; les jeunes auraient ainsi une culture religieuse et ne succomberaient pas à n'importe quel discours leur faisant miroiter des paradis qui n'existent pas.
En fait, Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez vous-même déjà retiré ce rapport une première fois. Ensuite, la capacité d'avancement de notre Grand Conseil fait qu'il n'arrive qu'aujourd'hui. On aurait presque pu imaginer que le rapport du groupe de travail arrive quasiment en même temps. Il est vrai que ce rapport est une suite au rapport sur la pétition. J'ose simplement espérer que le délai demandé n'est pas fait pour «jouer la montre» - je parle en sportif - mais pour proposer des solutions, afin de résoudre le problème dramatique de la liberté de pensée qui est parfois exploitée à des fins criminelles.
Le groupe radical acceptera le rapport.
M. René Longet (S). Notre groupe prend ce sujet très au sérieux et il s'agit - nous le savons tous - d'un fait de société qui doit être discuté, comme l'a dit Mme Strubin. Il doit être discuté et non occulté. Nous sommes donc heureux que ce rapport soit commenté et que nous puissions indiquer au Conseil d'Etat quels sont les éléments sur lesquels nous souhaiterions que l'accent se poursuive.
Comme M. Beer, nous analysons la situation en termes de lutte contre les abus. Je rappelle que ce Grand Conseil a voté, voici deux ans environ, l'excellent rapport très documenté de notre collègue Strubin, suite à la pétition. J'insiste également sur le fait que cette pétition ainsi que ce rapport ne doivent aucunement se limiter à l'activité de la scientologie, mais être étendus à l'ensemble des phénomènes visés.
Notre groupe est relativement déçu - nous le disons d'emblée - du rapport du Conseil d'Etat rédigé sur trois pages «mincelettes» et relativement en retrait de ce que vous avez dit vous-même, Monsieur Ramseyer, à plusieurs reprises au début de l'année à la presse - et tout récemment encore. Ces articles allaient à notre avis nettement plus loin que les constats que vous faites dans le rapport qui nous est soumis.
La pétition disait trois choses :
- qu'il fallait éviter que les structures de l'Etat servent de véhicule au prosélytisme. Notre collègue Beer était intervenu, à plusieurs reprises je crois, pour signaler des cas de ce type aux abords des écoles, mais la pétition allait plus loin : les structures de l'Etat ne doivent pas être utilisées pour de telles activités.
- qu'il fallait apporter un soutien aux citoyennes et citoyens, aux associations qui se consacrent à l'information et à l'aide aux victimes et naturellement au groupement pétitionnaire.
- qu'il fallait contrôler les prestations dites médicales; je n'y reviendrai pas.
Evidemment, dans l'intervalle, le drame du Temple solaire est intervenu, voici deux ans, montrant à quelle extrémité, dans ces milieux, les adeptes et malheureusement aussi des enfants pouvaient aboutir, ce qui est particulièrement choquant. La justice française a inculpé un certain nombre de personnes au titre d'association de malfaiteurs, ce qui donne aussi des pistes juridiques permettant d'aller de l'avant dans ce genre de situation.
A ces trois demandes de la pétition, nous souhaitons ajouter deux points qui nous paraissent dignes d'intérêt.
Le premier point est tout à fait essentiel - nous pensons que l'on peut aller plus loin que l'investigation juridique à laquelle, Monsieur Ramseyer, vous avez donné l'initiative - car il s'agit de suivre la situation, de l'analyser de très près moins au titre d'une observation policière qu'au titre d'une observation sociologique. En France, par exemple, un inventaire a été effectué récemment des groupements qualifiés de «sectes». On en a trouvé cent septante-deux, et ce qui est intéressant est que le nombre a augmenté de 60% en treize ans. Il faut donc bel et bien suivre cette évolution.
Naturellement la définition de la «secte» est difficile à faire, car il n'y a pas de définition scientifique. Pourtant, nous ne pensons pas que ce soit aussi difficile à faire que ne le dit le Conseil d'Etat dans son rapport. Un certain nombre de signes distinctifs sont des indicateurs : lorsqu'il y a parodie de cultes ou de symboles traditionnels, lorsqu'il y a exigence de soumission et dépendance, lorsqu'une vision totalement manichéenne du monde se fait jour et lorsque les militants sont prêts à tout pour leur foi et, aussi, lorsque les attentes sont tout à fait disproportionnées. Tous ces signes indiquent un comportement sectaire qui peut entraîner les dérives dramatiques que nous connaissons.
Mais quelle est la marge de manoeuvre, car il ne s'agit pas d'analyser les consciences ou d'intervenir en quoi que ce soit sur les choix particuliers des personnes ? Monsieur Ramseyer, je vous rappelle que votre nouveau collègue conseiller d'Etat du canton de Vaud, M. Zysiadis, avait fait une proposition aux Chambres fédérales - que je trouvais très intéressante, mais qui n'a malheureusement pas abouti - demandant un observatoire des phénomènes religieux et des phénomènes de sectes. C'est ce qu'il nous faudrait : un lieu rassemblant les informations et à partir duquel elles pourraient être rediffusées; un lieu de débat et de discussions pour mieux comprendre le problème; un lieu où les personnes qui en ont besoin pourraient trouver de l'aide. Nous aimerions aller dans ce sens, Monsieur Ramseyer.
La deuxième demande pourra intéresser M. le conseiller d'Etat Vodoz. Certains organes de presse ont signalé récemment l'aspect financier du phénomène secte. Beaucoup de ces groupes sont une véritable pompe à moyens financiers, vidant les poches par autosuggestion de leurs membres au bénéfice de destinataires dont on ne sait pas vraiment qui ils sont, mais cela porte sur des sommes faramineuses. Cet aspect très important est pourtant absent du rapport du Conseil d'Etat. Si vous lisez un mensuel bien connu, ce problème est évoqué de manière tout à fait intéressante - je ne dirai pas prometteuse, ce serait trop dire. Monsieur Vodoz, vous ne devriez pas négliger l'aspect financier et fiscal de ces milieux.
En conclusion, restons très attentifs à ce qui se passe, dans un équilibre difficile à maintenir entre la liberté élémentaire de chacun de penser, de croire et même de se livrer aux rites qui nous paraissent les plus absurdes et les plus égocentriques, en vue de son salut, et la liberté de tous de ne pas être violés dans leur identité profonde, dépossédés de leur argent par des escrocs de la spiritualité. C'est un équilibre délicat au nom de la protection de la personnalité. Nous devons ainsi imaginer une extension de notre code pénal pour réprimer le délit d'atteinte à l'intégrité psychique.
Alors, Monsieur le conseiller d'Etat, nous soutenons ce qui a été fait et nous demandons que cette action se développe dans les directions que nous avons indiquées.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Les trois préopinants s'expriment avec quatre à cinq mois d'avance, ce qu'ils ne peuvent pas ignorer s'ils s'attachent au contenu de la page 4 du rapport du Conseil d'Etat.
Je vous rappelle tout d'abord que cette pétition comporte une ambiguïté. Le titre ne traite que de la scientologie alors que la problématique, comme Mme la députée Strubin l'a souligné, porte sur les sectes en général.
C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas voulu faire un rapport uniquement consacré à la scientologie : il aurait effectivement eu quatre pages et notre travail serait terminé. Ce n'est pas ce que nous avons fait. Nous avons admis que la scientologie était une secte parmi d'autres tout aussi dangereuses et que, par conséquent, il convenait d'appréhender le problème globalement. Contrairement à votre allusion, Madame la députée, le canton de Genève est le seul canton à avoir entrepris le travail que vous appelez de vos voeux. Notre travail sera communiqué aux cantons romands qui se sont annoncés, cantons qui se sentent moins concernés, car ils n'ont pas eu de drame de cet ordre ni l'émotion que nous avons enregistrée.
J'en viens au fait. Ce rapport considère la scientologie comme étant une secte comme une autre. J'ai annoncé un rapport préalable sur l'ensemble des sectes en juin et un rapport final en automne, soit pour le 30 octobre. Le rapport préalable de juin a consisté en une entrevue que j'ai eue avec le responsable de ce groupe de travail, Me François Bellanger. En juin il avait déjà procédé, avec son groupe de travail, à vingt-deux auditions concernant aussi bien les victimes, les responsables de certains mouvements sectaires que les organisations qui s'occupent des victimes. Il a estimé que d'autres auditions étaient encore nécessaires. Je lui ai moi-même fourni certaines pistes de personnes qui se sont personnellement adressées à moi.
De manière générale, il règne le sentiment que les dispositions actuelles sont suffisantes, mais insuffisamment utilisées. Ainsi se pose le problème de la séparation des pouvoirs et d'une justice qui doit être, selon nous, encore plus sévère. Un deuxième problème nous est apparu : savoir ce qui relève de la répression et de la détection, en particulier l'aspect fiscal soulevé par M. le député Longet, qui est extrêmement délicat. En effet, pour effectuer des enquêtes en matière de fisc, faut-il encore avoir des contribuables annoncés, ce qui n'est évidemment jamais le cas !
Vous avez fait allusion à un observatoire des sectes. J'ai moi-même pris la peine de rappeler à M. le conseiller fédéral Koller notre volonté que les sectes soient incorporées dans les observatoires actuellement en vigueur à Berne. Cette proposition n'a pas été admise pour une série de raisons qui tiennent à la législation fédérale.
S'agissant de la préparation du rapport promis pour le 30 octobre prochain, nous avons travaillé l'aspect du droit de la famille et particulièrement la protection de l'enfant. Cette partie de recherche juridique technique, concrète, a été confiée à M. le professeur Stettler. En matière fiscale, nous avons chargé Me Oberson de déterminer dans quelle mesure on pouvait mieux détecter et mieux réprimer les problèmes liés au fisc.
En matière pénale, nous nous sommes adressés à Me Harari et, en droit administratif, à Me François Bellanger lui-même, qui traite de trois éléments :
- la santé. Vous avez fait allusion, avec une documentation pour laquelle je vous félicite, à toute une série de médicaments. Ce problème de la santé est étudié pour lui-même.
- l'instruction publique et l'instruction privée. Que pouvons-nous faire au niveau de la prévention des enfants en particulier ?
- l'exercice des libertés publiques. Comment peut-on s'opposer au démarchage, au racolage en faveur des sectes ? Cette question est extraordinairement complexe et ne sera évidemment pas résumée en quatre pages.
Si les quatre pages que vous avez reçues vous paraissent insuffisantes, c'est simplement parce que je vous ai informés du travail très considérable qui était conduit et que c'est sur la base du rapport du groupe de travail en commission que le parlement pourra s'exprimer. Je suis d'ores et déjà reconnaissant aux députées et députés qui possèdent une bonne documentation à ce sujet de l'apport qui sera le leur en commission.
Deux remarques en conclusion. Les contacts avec la France voisine sont non seulement réguliers mais encore se sont-ils accrus. Vous citez des statistiques, mais permettez-moi de vous dire qu'elles ne veulent rien dire du tout. En effet, vous pouvez compter soixante sectes une semaine, quarante-deux la suivante, mais nous ne savons pas si ce sont les mêmes qui ont changé de nom ou si ce sont les adeptes qui ont changé de secte. La France voisine essaye de surveiller les choses avec vigilance, comme nous le faisons en Suisse.
Les rapports entre les polices se sont également accrus. Cette question a été abordée au sein du Comité régional franco-genevois et il a été demandé à nos polices française et suisse d'augmenter leur pression sur les sectes. C'est ainsi que, tout récemment encore, on nous signalait la naissance, en France voisine, d'une nouvelle secte du même type que le Temple solaire.
En résumé, ce rapport pourrait en fait être considéré comme un rapport intermédiaire. Je préfère dire que c'est un rapport sur une pétition abordant un petit aspect du problème évoqué, mais tout de même extrêmement grave. Vous recevrez le rapport sur les sectes dans les délais prévus, après que le Conseil d'Etat l'eut vu, eut admis son contenu et donné quelques pistes de travail. Vous aurez donc l'occasion de vous mettre sous la dent un travail extraordinairement difficile, complexe mais passionnant : à savoir si on peut, dans un Etat de droit comme le nôtre, lutter efficacement contre les sectes. Je le répète : ce travail est unique en Suisse.
Mme Evelyne Strubin (AdG). Je vous remercie beaucoup, Monsieur le conseiller d'Etat, de vos explications réconfortantes. Je ne comprends pas bien pourquoi vous n'avez pas décrit l'avancement de vos travaux et intégré toutes ces informations très intéressantes dans votre rapport; il nous aurait moins déçus, bien évidemment.
Je retire donc ma proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat. Je prends note que vous êtes d'accord avec moi que ce rapport peut être considéré comme un rapport intermédiaire et j'attends impatiemment le rapport de votre groupe de travail. Mais ne tardez pas, car plus on approche de l'an 2000 plus ces sectes font d'adeptes en utilisant le millénarisme ! Je vous remercie de vos explications.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je suis saisi de onze interpellations urgentes; d'aucunes étant déjà anciennes, je vais essayer d'être bref !
Dans son interpellation urgente, Mme Vesca Olsommer demande si des menaces de mort ont été proférées à l'égard de fonctionnaires de l'office cantonal de la population, suite à un refus d'autorisation de séjour prononcé à l'encontre d'un ressortissant russe.
L'OCP n'a prononcé aucun refus d'autorisation de séjour à l'encontre d'un ressortissant russe. Seuls des refus ont été prononcés dans le cadre de la commission du marché de l'emploi - la commission tripartite - à la suite de demandes d'autorisation de travail. A ce jour, et à notre connaissance, aucune menace de mort n'a été proférée par des ressortissants russes à l'égard de fonctionnaires de notre office. Par contre, il est connu que nombre de fonctionnaires de l'OCP ont été confrontés à l'arrogance teintée d'agressivité - voire pire - de ressortissants russes. Mais il ne s'agit que de cas isolés.
Aucun cas n'a été soumis à la commission tripartite en 1990; deux l'ont été en 1991, et trente-trois, à la fin du mois de mai 1996. Les statistiques concernant les permis B indiquent une très forte progression en quatre ans : on passe de nonante-deux permis à quatre cent nonante.
Vous avez également, Madame la députée, posé une question au sujet du genre d'affaires traitées par les ressortissants russes et de la provenance des fonds. Il s'agit, généralement, d'implantations d'antennes européennes destinées au négoce international de matières premières, pétrole et sidérurgie. Le contrôle de l'apport de fonds est un des éléments permettant d'identifier la qualité des personnes qui désirent s'installer sur le territoire suisse.
Ce travail de contrôle est particulièrement long et difficile dans la mesure où l'argent recyclé l'a été au travers de multiples sociétés de façade, et il n'est pas aisé de découvrir s'il y a activité réelle ou non. Cependant, un travail de dépistage sérieux se fait également au niveau des banques lors de l'examen des dossiers.
Votre dernière question concerne la collaboration entre les services fédéraux et cantonaux. Je n'aimerais pas occulter l'ambiguïté existant entre la volonté qui se dégage de discours des autorités fédérales, dont le souhait est de lutter avec efficacité contre ce phénomène, et le fait que seules deux personnes, auprès de l'Office fédéral de la police, s'occupent de ce problème pour l'ensemble de la Suisse.
Toutefois, la collaboration qui existe dans ce domaine entre les autorités genevoises et fédérales est particulièrement étroite. L'ampleur du problème et la difficulté d'exercer un contrôle efficace résultent de l'importance prise par l'augmentation de l'octroi de visas par notre représentation consulaire à Moscou. Au début des années 90, on comptait environ huit mille demandes de visas annuellement, alors qu'elles se chiffrent actuellement à plus de soixante mille !
Je vous remercie, Madame la députée, de votre question. Vous avez raison de vous préoccuper de l'implantation d'une mafia russe potentielle dans notre pays. Ce sujet nous préoccupe également beaucoup, et nous lui accordons toute notre attention.
Cette interpellation urgente est close.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Mardi dernier, un journal a relaté des événements s'étant produits aux alentours de l'une de nos écoles. Ils ont été dénoncés pour la première fois le 3 septembre. Un enfant, attiré à l'extérieur du préau par une personne inconnue, a été invité à monter dans une voiture, mais il s'y est refusé et a averti l'école. Les précautions d'usage ont été prises tout de suite, et la police a été immédiatement mise au courant. Je tiens à souligner que le Jeûne genevois n'a été un obstacle ni au dépôt de cette plainte ni à l'intervention et à la surveillance de la police, contrairement à ce que l'on a pu entendre à la télévision.
Le même jour, tenant compte de ces événements avant même d'avoir pu les vérifier, nous avons informé tous les enseignants de cette situation et donné, en plus des consignes habituelles, des consignes de vigilance et de prudence aux enfants, renforcé la surveillance dans le préau et ses abords, averti les patrouilleuses scolaires de la rue des Charmilles. Le préau des petits a été diminué de moitié pour faciliter le contrôle des surveillantes.
La police a réagi dès vendredi en plaçant des inspecteurs de police aux alentours de l'école. Il s'agit pour l'instant de témoignages et de vérifications, mais il semble qu'un événement de même nature se soit produit vendredi. La réaction des enfants fut aussi saine que le mardi. Ce fait a été observé à l'extérieur de l'école par un adulte.
Sur ces événements, ainsi que ceux signalés par la suite, il est bien sûr indispensable qu'une enquête de police permette de vérifier l'ensemble des faits pour rechercher les individus et déterminer si, au-delà des témoignages, d'autres événements résulteraient de la panique, comme l'indiquait la «Tribune de Genève». Panique - pour ma part, je n'emploierais pas ce terme - qui pourrait s'installer dans ce quartier ou ailleurs.
Pour toutes ces raisons, nous avons tenu à prendre des mesures supplémentaires. Pour les écoles concernées et voisines, des séances d'information avec les parents sont organisées le 16 et le 17 septembre. Les parents sont convoqués non seulement pour prendre connaissance du suivi des événements, mais aussi des mesures de prévention à l'école et à la maison. Il faut qu'un dialogue s'instaure entre le service santé-jeunesse, l'institution scolaire et les parents, pour que ces derniers puissent parler de leurs préoccupations.
Nous avons d'ores et déjà envoyé une lettre à l'ensemble des enseignants de l'école primaire. Elle rappelle les principes et les consignes à appliquer et à renforcer, et, comme il est important d'écouter les enfants en étant attentif à tout signe suspect, elle encourage ces derniers à faire part de leurs inquiétudes ou de leurs observations en toute confiance. C'est un élément très important de prévention.
Lundi matin, une lettre adressée à l'ensemble des parents de l'enseignement primaire donnera des renseignements et des consignes, rappellera les devoirs et les instructions à donner et une permanence téléphonique informera, le jeudi matin, les parents inquiets.
Nous sommes vigilants et prenons ces événements au sérieux, mais sans paniquer. Si vous en avez la possibilité, essayez de calmer les esprits lorsque vous disposez d'informations, car ce genre d'affaires, compte tenu de la médiatisation des faits qui se déroulent en Belgique, suscite de l'anxiété et des angoisses.
Je serais reconnaissante aux médias - présents à la tribune - de ne pas provoquer de panique par des titres et des manchettes à sensation, et de s'en tenir strictement à l'information.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Mme la députée a lu avec stupéfaction et indignation un article terrifiant ! Certaines lectrices sont pain béni pour les quotidiens au style journalistique percutant !
Le département que j'ai l'honneur de présider n'a jamais donné «le feu vert à un type qui va transformer les Pâquis en haut lieu de prostitution». Mon département a autorisé l'implantation d'un peep-show, parce qu'il n'a pas de base légale pour l'interdire, comme M. le procureur général l'a personnellement confirmé.
L'absence de base légale découle d'une modification du code pénal fédéral qui fixe que ce genre de spectacle est soumis à deux cautèles : le spectateur doit être informé de ce qu'il va voir et ne doit pas avoir moins de 18 ans.
La base réglementaire genevoise s'attache, elle, à la notion d'ordre public qui n'est manifestement pas concerné par un établissement de ce genre n'ayant pas l'impact d'un cabaret. Il ne saurait être question «de souteneurs qui vont se multiplier à tout-va» ! Nos services de police, qui vous remercient de votre appui rigoureux, sont attentifs et particulièrement actifs dans le quartier des Pâquis. A lire les déclarations fracassantes et singulièrement irresponsables émanant de ce personnage, et connaissant l'attachement des Genevois à leur quartier des Pâquis, ils le seront encore plus !
Je vous remercie de votre interpellation qui m'a permis d'indiquer pour quelles raisons nous n'avons pas pu interdire l'installation d'un peep-show.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je cite :
«Le ministère public a décidé dès lors de renforcer la répression de ce type d'infractions en augmentant sensiblement les peines encourues en cas de dépassement de la vitesse autorisée.
A teneur de cette disposition, allusion est faite à l'article 90 de la loi sur la circulation routière. La violation grave d'une règle de la circulation constitue un délit passible non seulement d'une amende, mais aussi d'une peine d'emprisonnement.
Les services de police ont donc reçu comme instruction de dénoncer au ministère public tous les dépassements de vitesse importants, et, en cas de flagrant délit, les conducteurs fautifs doivent également s'attendre à être appréhendés sur-le-champ.»
C'est ainsi que s'exprimait par une communication à la presse, le 21 avril 1993, M. le procureur général. S'agissant, Monsieur le député, d'une décision de justice, je respecte la séparation des pouvoirs. Je remarque simplement que les faits sont qualifiés de graves au sens de l'article 9, alinéa 2, de la loi sur la circulation routière, et je mentionne, pour votre édification, qu'il s'agissait en l'occurrence d'une récidive.
Je voudrais préciser que cette interpellation n'a donné lieu à aucun incident. J'aimerais cependant vous dire combien je partage votre critique au sujet de la notion des quotités des peines. Il est en effet choquant d'enregistrer de telles peines, même si je juge légitime cette sévérité quand on entend nombre de délinquants qui ont choisi délibérément Genève pour théâtre de leurs méfaits, en arguant du fait qu'ils y sont moins punis qu'ailleurs.
Il y a inégalité de traitement et matière à réflexion pour nos juges.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. L'interpellation de Mme Reusse-Decrey est déjà ancienne et, je le regrette, dépassée par la réalité. J'y réponds néanmoins très brièvement.
Les réfugiés bosniaques avaient reçu une lettre de l'office cantonal de la population leur annonçant qu'ils allaient être, à terme, dans l'obligation de quitter la Suisse. Par la suite, cette décision a été annulée sur le plan fédéral, et la question était de savoir si nous avions rectifié l'avis de renvoi imminent.
Nous n'avons pas expédié de courrier particulier, mais, en revanche, tous les papiers des réfugiés bosniaques ont été tamponnés, de sorte qu'ils ne peuvent pas ignorer qu'ils sont toujours persona grata à Genève.
Ceux qui ont annoncé leur départ volontaire n'étaient pas concernés; c'est un problème marginal sur lequel je ne m'étends pas. La situation est donc le retour au statu quo ante. Nous aurons assurément à reparler de ce problème dans quelques mois.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Une entrevue réunissant la délégation du Conseil d'Etat au Casino, formée de moi-même qui la préside, de MM. Haegi et Joye, et d'une délégation du Conseil administratif de la Ville de Genève a eu lieu le 11 septembre dernier.
A cette occasion, nous avons rappelé que, contrairement à une assertion souvent entendue, la concession d'exploitation du Casino n'est pas en main de la Ville de Genève, mais en main de l'Etat. Par une convention, arrivant à échéance le 30 septembre prochain, elle a été sous-traitée à la Ville.
Il s'agit d'imaginer une nouvelle gestion du Casino. Nous avons informé la Ville que cette convention serait résiliée avant son échéance afin d'engager des négociations en ayant les mains libres. Je reviendrai sur le problème de l'emploi ensuite.
Mme la députée se demande s'il s'agit d'une privatisation. Ce n'est pas le cas. L'Etat et la Ville de Genève songent à avoir recours à un prestataire de services professionnels dans la mesure où il s'agira de gérer non pas un casino de dimensions réduites, comme c'est le cas actuellement, mais d'une envergure double. Dans cette perspective, la concession reste en main de l'Etat de Genève.
Après avoir reçu les offres de deux prestataires, nous avons précisé à nos interlocuteurs que l'Etat de Genève n'avait pas renoncé au système d'une gestion par la Romande des jeux, dans la mesure où cet organisme, à terme, pouvait garantir une gestion neutre, attachée uniquement au bien public, ce qui est actuellement le cas de la Loterie romande. Nous avons informé nos interlocuteurs sur le fait que la création de cette Romande des jeux allait prendre plusieurs années en raison des régimes très différents que connaissent les cantons romands. La Ville de Genève en a donc été dûment informée.
Mme la députée s'inquiète d'une atteinte à l'autonomie communale. Je rappelle que cette concession n'appartient pas à la commune de la Ville de Genève, mais à l'Etat. S'il reprend sa liberté de manoeuvre, il n'y a pas atteinte à l'autonomie.
On ne saurait parler de perte financière, quand bien même M. le conseiller administratif Hediger s'exprime différemment à ce sujet. Nous lui avons rappelé, ainsi qu'à sa délégation - composée de M. Rossetti, vice-président du Conseil administratif, et de M. Müller, ministre des finances - qu'à notre connaissance le Casino de Genève peut gagner quatre fois plus, au bas mot, avec de nouvelles dimensions. Par conséquent, les gains de la Ville seraient eux aussi multipliés par quatre.
De manière légitime, Madame la députée, vous vous êtes inquiétée du problème des licenciements. Cette convention pourrait être renouvelée de court terme en court terme pour sauvegarder l'emploi. Ce n'est ni l'intérêt de la Ville ni celui de l'Etat que le Casino cesse toute activité.
Vous faites également allusion au bail et aux relations entre propriétaire et locataire qui régissent les rapports entre la Ville et le groupe Gaon. Nous avons relevé l'énorme complexité des relations entre la Ville et l'hôtel Noga Hilton et avons admis que ce problème était propre à la Ville et à son locataire. Aussi pouvait-on imaginer que le problème du Casino soit réglé en dehors de ces problèmes auxquels il s'agira, bien sûr, de trouver une solution.
Enfin, devant l'insistance de M. Hediger, en particulier, nous avons rappelé que l'Etat n'avait aucune obligation de domicilier le Casino dans l'hôtel Noga Hilton ou dans la commune de la Ville de Genève. Il existe quarante-quatre autres communes genevoises ravies de l'accueillir, sans compter qu'un bateau ancré dans les eaux cantonales pourrait tout aussi bien régler le problème !
Nous nous sommes quittés sur une promesse d'échange de lettres, en tenant compte qu'il y avait en suspens, dans nos commissions, des projets de lois partiellement contradictoires. Mais nous avons attiré l'attention de la Ville sur les pertes, s'élevant au moins à 200 000 F par mois, qu'elle et nous subissions. Il s'agit de trouver une solution à cette situation provisoire; nous ne pouvons pas attendre la mise en place de la Romande des jeux.
Nous avons rappelé qu'il était nécessaire d'évoquer ce problème en toute sérénité, avec sérieux, et avons promis un échange d'écritures. L'Etat de Genève fera des propositions concrètes à la Ville et vice versa. Je ne connais aucun moyen de gérer différemment ce dossier. Nous sommes le 13 septembre, et la convention devant être renouvelée ou résiliée d'ici dix-sept jours nous la résilierons.
Je n'ai pas eu le temps de lire l'article d'un grand quotidien de la place, mais j'aimerais dire que, contrairement à l'excitation paraissant régner dans certains milieux, il est possible de trouver une solution à ce problème. L'Etat y trouvera son compte par augmentation de son droit des pauvres et la possibilité, soutenue par un projet de loi, de créer une taxe sur les jeux.
Nous nous sommes achoppés sur l'affectation éventuelle des profits du Grand Casino et aurions souhaité que la Ville détermine si ses profits concernent la culture. Nous avons demandé au Conseil administratif de la Ville de Genève s'il avait l'intention de négocier avec l'Etat une répartition - souvent réclamée - des charges essentielles. Nous attendons sa réponse.
En conclusion, l'Etat de Genève souhaite garder les mains libres lors d'une transaction; la Ville verra son profit multiplié par quatre; l'affectation des fonds reste à régler et nous attendons des propositions concrètes. Ce dossier n'offre pas de quoi remplir trois pages d'un quotidien ! Mais la perspective de 11 millions à gagner mérite une approche sereine, sérieuse et responsable; M. Haegi et moi-même y sommes attachés.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je remercie M. le député Büchi de son interpellation urgente qui nous rappelle nos devoirs de police et de justice.
J'ai évoqué tout à l'heure les notions d'inégalité de traitement ou de quotité des peines. Des actions doivent-elles être réprimées particulièrement sévèrement ? Faisons-nous preuve de suffisamment de sévérité et de rigueur ? M. le procureur général partage nos préoccupations. Comme c'est en l'espèce une affaire de justice, par respect pour la séparation des pouvoirs, je lui laisse gérer ce problème.
J'ai nanti la commission des visiteurs officiels d'un autre problème me tenant particulièrement à coeur, bien plus que celui des pédophiles. Il s'agit des criminels pervers, qui recouvreront la liberté dans notre pays. Je demande de manière claire et non équivoque que les juges prennent leurs responsabilités, les membres de la commission de libération conditionnelle aussi.
Si l'un de ces pervers devait récidiver, comme l'ont fait nombre d'entre eux en Europe, on se posera la question de savoir qui est responsable in fine. Je ne suis ni médecin ni juriste. Nous devons, tous, nous atteler à ce problème qui m'effraie.
Nul ne peut garantir qu'un tel individu se conduira bien ou mal. Mais les exemples existent et prouvent qu'il y a péril en la demeure. Nous devons soit légiférer soit trouver des solutions. Nous ne pouvons plus prétendre ignorer les faits de 1995 et 1996. Je ne veux pas qu'ils se reproduisent en 1997, chez nous, parce que l'on aura occulté le problème à un niveau ou à un autre.
Je vous répondrai à titre confidentiel et personnellement au sujet de ce dossier de justice dans lequel des noms sont cités. Je suis le premier à déplorer de telles impuissances. Malheureusement, il ne s'agit pas d'un cas isolé; quelque chose ne fonctionne pas dans le droit de nos sociétés, vous avez raison de le souligner.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. La famille Toussa a été renvoyée de ce canton par décision du 22 novembre 1995. Selon l'usage - il ne s'agit ni d'une loi ni d'un règlement - nous avons autorisé les deux enfants à poursuivre leur scolarité pour l'année en cours. Raison pour laquelle, en juin 1996, on a rappelé à cette famille l'obligation de quitter le territoire suisse, le permis de séjour n'étant pas renouvelé.
Cette décision a soulevé de nombreux problèmes. Je n'ai pas voulu gérer un dossier sans rencontrer les personnes concernées. Même si certains en doutent, en matière d'asile, c'est l'être humain que je considère derrière chaque dossier. Accompagné de leurs trois mandataires, le 4 septembre, j'ai donc rencontré les membres de cette famille.
Sans aucune équivoque, j'ai maintenu la décision de renvoi telle qu'elle avait été prise par les autorités de ce canton. J'ai pris l'engagement, que vous comprendrez, de ne pas agir par la force ou la contrainte tant qu'un nouveau contact n'aura pas eu lieu avec cette famille et les collaborateurs de mon département.
Cette famille séjourne en Suisse depuis douze ans, sans avoir - à ma connaissance - jamais travaillé. Cette situation est à l'origine du courrier abondant que je reçois de familles suisses qui se demandent pourquoi elles ne bénéficient pas de la même mansuétude.
Je tiens à éclaircir un point relaté par la presse : si l'on admet que la mère de famille ne parle pas le français et que les enfants ne comprennent pas la langue de leur pays, quelle langue parlent-ils alors avec leur maman ? Il s'agirait de l'albanais. Par ailleurs, il est exact que cette famille avait demandé des visas pour retourner en vacances dans leur pays et voir le père de famille, mais il ne s'agissait pas de s'y établir.
Les mandataires ont déposé un nouveau et, sans doute, ultime recours devant le Conseil d'Etat, arguant de faits nouveaux ayant trait à la nationalisation. On procède actuellement à son examen, puis il passera dans quelques semaines devant le Conseil d'Etat. La décision vous sera communiquée.
Il aurait été plus simple de régler ce genre de problèmes avec célérité, mais ce n'est pas l'usage. Nous avons toujours été ouverts au dialogue, et encore plus depuis que je suis là. Avec les organes caritatifs, les choses peuvent durer, et on constate avec regret que des délais trop longs provoquent l'accumulation d'embûches, d'obstacles et de problèmes. Comme toujours, je les assume. Cette pratique ne sera pas forcément éternelle.
Je suis sensible à la situation des deux garçons - surtout le petit - qui ont pratiquement toujours vécu en Suisse. Ils se sont bien intégrés dans leur commune où ils ont leurs copains, mais cela n'implique pas qu'il en va de même pour le reste de la famille. Il ne suffit pas qu'une partie se soit bien intégrée pour que l'autre puisse rester. Cela pose donc un problème relativement nouveau que nous n'avons pas eu à gérer à ce jour.
Ce dossier sera traité avec humanité, certes, mais également avec toute la rigueur nécessaire, vu l'incidence sur d'autres cas semblables.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Comme on fait allusion à un cas sans dire précisément de quoi il s'agit, je suis forcé de lire entre les lignes, et je n'entrerai pas trop dans les détails.
Une personne, ayant purgé sa peine, a recouvré la liberté et sollicité une autorisation pour exercer une activité la mettant en relation avec le monde de l'éducation. Nous avons beaucoup hésité, après une étude approfondie de ce dossier, à déterminer comment nous pourrions empêcher un pédophile notoire, condamné pour ses actes, de côtoyer des jeunes gens pour des raisons professionnelles.
Avec M. le procureur général, auquel nous nous référons toujours dans de tels cas, nous avons malheureusement constaté notre impuissance à empêcher ce monsieur de travailler, et la seule cautèle possible a été son engagement personnel de ne pas travailler avec des mineurs. Actuellement, il est contrôlé par feed-back, tout se déroule normalement et il a même eu les honneurs de la télévision ! Le département de l'instruction publique a été informé et exerce également une surveillance indirecte. Pour l'instant, la situation est sous contrôle, et l'avenir nous dira si nous ne nous sommes pas trompés.
Il n'y a pas de projet officiellement en cours pour modifier la loi au niveau fédéral. Mais une réflexion est en cours au sujet des criminels pervers à la commission des visiteurs officiels, à la commission de libération provisoire, à la conférence des directeurs romands des départements de justice et police.
Votre contribution sera essentielle. Je ne refuse pas la charge que représente un sujet de cette importance, mais c'est vous, Mesdames les mères de famille, et vous, Messieurs les pères, qui connaissez les problèmes d'éducation. Vous pouvez apporter un témoignage reflétant la volonté de la population. Mes collègues vaudois, neuchâtelois, fribourgeois, valaisan, partagent les mêmes soucis. A nous de trouver une parade suffisamment sûre.
Je vous remercie, Monsieur le député, d'avoir signalé ce cas. Si je me suis trompé de cas, signalez-le moi, que je puisse vous répondre de manière plus circonstanciée.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Les quatre ressortissants polonais mentionnés dans cette interpellation ont fait l'objet, à la suite du constat d'infraction établi par l'office cantonal de l'emploi le 10 juillet, d'une décision de renvoi prononcée par l'OCP, en application de l'article 12, premier alinéa, de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers.
Cette décision s'est assortie d'un délai de départ fixé au 1er août. Le départ de ces ouvriers a été dûment contrôlé par les services des douanes suisses à Bâle, le 1er août 1996.
Sur la proposition de l'office cantonal de la population, l'Office fédéral des étrangers a prononcé à l'encontre des intéressés une décision d'interdiction d'entrée en Suisse d'une durée de deux ans, en raison de la gravité des infractions commises aux prescriptions en matière de police des étrangers. Le maître d'oeuvre qui a employé ces quatre Polonais a reçu une amende de 4 000 F.
Je vous remercie d'avoir attiré l'attention du Grand Conseil sur une pratique tout à fait critiquable.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je réponds volontiers à cette interpellation qui concerne la Ville de Genève, mais je propose à M. le député de s'adresser également à ses autorités.
Le projet de zone piétonne dans la Vieille-Ville a provoqué six mille amendes en deux mois ! Je considère qu'il n'est pas possible de gérer un problème de zone piétonne à coup de présence policière et d'amendes. Mme Burnand, ma distinguée collègue de la Ville de Genève, partage cet avis.
Cette décision a provoqué cinq recours, partiellement ou complètement contradictoires, comme d'habitude. Nous avons eu une nouvelle réunion le 9 septembre avec l'Etat, la Ville, les recourants et les associations. En réponse aux préoccupations, nous avons suggéré que la zone piétonne soit transformée en zone résidentielle, dans laquelle le piéton est prioritaire et la circulation limitée à 20 km/h. Comme dans une zone piétonne, il n'y a pas de parking.
Pour pallier la présence policière - que je refuse d'organiser - l'installation d'un mobilier urbain est prévue. La Ville de Genève propose une méthode et un plan, transmis aux associations le 9 septembre. La réaction ne saurait se faire trop attendre.
Connaissant l'intérêt que vous portez à la Vieille-Ville de Genève, j'aimerais vous assurer, Monsieur le député, de notre volonté commune de rétablir une convivialité et d'obtenir un consensus, pour éviter des disputes totalement stériles. Nous travaillons à ce dossier avec une volonté de transparence et de dialogue, même si cela prend un temps fou. Les séances se multiplient, mais nous obtenons au moins le feed-back des recourants; cela reste donc constructif.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. J'en arrive au terme de mon pensum en répondant à M. Gilly qui s'inquiète de la fermeture d'une rue à la circulation et du grave accident de circulation qui s'est produit.
Son auteur ne fait pas partie de l'Amicale du garage Zénith de Sion, composée de propriétaires de Ferrari et organisatrice de cette manifestation pour laquelle l'autorisation de fermeture momentanée d'un tronçon de rue avait été accordée. Le responsable de l'accident, un Genevois, ayant donné trop de gaz pour frimer, s'est placé en travers de la rue et a grièvement blessé deux piétons.
Vous évoquez le champagne qui aurait coulé à flots, mais il ne s'agit pas - à ma connaissance - d'un problème d'alcoolémie. J'attends d'autres documents et le rapport de police. J'ai pris note de votre rigueur en matière de manifestation. J'aurai l'occasion d'y revenir, cher Monsieur, puisque nous sommes l'un et l'autre fréquemment appelés à rédiger des demandes d'autorisation pour des fermetures de rue, présentées par des manifestants qui - sans avoir des problèmes d'alcool - ne sont pas toujours très «nets».
J'aimerais m'associer à votre sentiment de sympathie à l'égard des deux blessés, auxquels je souhaite, également, un prompt rétablissement. Lorsque j'aurai reçu le rapport de police, s'il devait modifier mes propos, je vous ferai parvenir un complément d'information.
Cette interpellation urgente est close.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28768-542 dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 14 juin 1995, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Veyrier (création d'une zone sportive à Vessy - «Vers l'Usine»), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
Un exemplaire du plan no 28768-542 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En date du 23 juin 1994, le Grand Conseil renvoyait en commission d'aménagement du canton les deux projets de lois nos 7106 et 7107 relatifs à la protection générale des rives de l'Arve ainsi qu'à diverses modifications de zones dans le périmètre de protection afin de régulariser le droit avec la situation de fait.
Après de longues discussions en commission, ces projets de lois furent approuvés par le Grand Conseil lors de sa séance du 4 mai 1995 avec, toutefois, la création de deux «lucarnes» dans le secteur inconstructible, afin de ne pas réduire à néant les possibilités constructives du hameau de Vessy et des terrain du Tennis Club de Champel, situés à l'intérieur de ce périmètre, ces terrains demeurant bien entendu compris dans le périmètre général de protection des rives de l'Arve.
Lors de cette même séance du 4 mai 1995, le Grand Conseil a approuvé et renvoyé au Conseil d'Etat la motion 966 invitant celui-ci :
- à entreprendre, en collaboration avec la commune de Veyrier, l'étude d'aménagement du hameau de Vessy et à en engager la procédure de déclassement en zone 4B protégée;
- à engager, en collaboration avec la commune de Veyrier, la procédure de déclassement du périmètre occupé par le Tennis Club de Champel, afin de l'inscrire en zone sportive destinée à la pratique du tennis au sens de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (laLAT).
Le présent projet de loi répond à la deuxième partie de la motion et propose donc la création d'une zone sportive, d'une superficie d'environ 14 400 m2 de terrain sur les parcelles nos 3895 et 4456, ainsi qu'une toute petite partie de la parcelle no 3896 index 1, feuille no 3, du cadastre de la commune de Veyrier.
La réponse à la première invite de la motion (hameau de Vessy) qui concerne la création éventuelle d'une zone 4B protégée fera, le cas échéant, l'objet d'un projet séparé.
La commune de Veyrier, après consultation de sa commission de l'urbanisme et de l'environnement, a donné un préavis de principe favorable à ce projet ainsi que la commission cantonale d'urbanisme qui demande, toutefois, qu'en cas d'acceptation de cette modification de zone, il soit procédé à l'élaboration d'un plan localisé de quartier, en application de l'article 24, alinéa 4, de la laLAT.
L'enquête publique ouverte du 2 février au 3 mars 1996 n'a suscité aucune observation. Ce projet a été préavisé favorablement, par 16 oui, 1 non et 3 abstentions, par le conseil municipal de la commune de Veyrier en date du 30 avril 1996.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le projet de loi, à votre bienveillante attention.
plan
Préconsultation
Mme Sylvie Châtelain (S). Ce projet de loi nous replonge dans les discussions du Grand Conseil du 4 mai 1995 sur la protection des rives de l'Arve, où la situation du Tennis-Club de Champel avait déjà occupé l'essentiel du débat. Fallait-il ou ne fallait-il pas déclasser la parcelle du Tennis-Club en zone sportive, alors qu'elle se trouve aujourd'hui en zone agricole ?
Si la plupart d'entre nous étaient d'accord de permettre la poursuite, en tout cas momentanée, des activités de ce club, une divergence était apparue quant aux moyens d'y parvenir.
Les socialistes, pour leur part, se sont vivement opposés à la création d'une lucarne dans le périmètre inconstructible des rives de l'Arve. Nous estimions que les activités de ce Tennis-Club étaient parfaitement compatibles avec leur maintien dans cette zone.
Je rappelle qu'en effet des dérogations peuvent être accordées dans un périmètre inconstructible pour des modifications, rénovations, voire des agrandissements de peu d'importance de bâtiments existants. Procéder ainsi aurait donc constitué la solution la plus simple, dans la perspective d'un retour de la parcelle à la zone agricole, le jour où le club aurait cessé ses activités.
Une majorité de députés a cependant préféré le principe de créer une lucarne dans la zone inconstructible, ceci afin de légaliser les activités du Tennis-Club. Il était pourtant alors clairement exprimé que cette légalisation était liée aux activités tennistiques, afin de laisser la porte ouverte à un changement de zone ultérieur et un retour de la parcelle dans le périmètre inconstructible.
Dans le rapport de majorité de M. Dupraz, on peut lire que : «La commission estime que ce déclassement doit être lié à l'activité du tennis; juridiquement, cela est possible.» La commission avait même demandé un avis de droit, qui est annexé au rapport, à la page 2242 du Mémorial du Grand Conseil. Il y est dit d'une façon claire qu'il est tout à fait possible d'insérer, dans le texte d'une loi modifiant le régime des zones d'un secteur considéré, une disposition prévoyant qu'en cas de cessation de l'activité tennistique existante sur ledit secteur l'incorporation du périmètre concerné à la zone de protection des rives de l'Arve s'impose, ce qui constituera, à l'avenir, une indication utile tant pour le législateur que pour l'administration.
Et enfin, cette volonté était même explicitement contenue dans la motion 966, figurant au point suivant de notre ordre du jour, qui demandait d'engager, en collaboration avec la commune de Veyrier, la procédure de déclassement du périmètre occupé par le club de tennis de Champel, afin de l'inscrire en zone sportive destinée à la pratique du tennis.
Or, dans le projet de loi 7471 que le Conseil d'Etat nous soumet ce soir, cette intention a totalement disparu, puisqu'il y est simplement proposé la création d'une zone sportive, sans aucune autre mention. Le retour futur de cette parcelle dans le périmètre inconstructible des rives de l'Arve n'est donc même plus envisagé. Si le Tennis-Club cesse ses activités, rien n'empêchera d'autres activités sportives de se développer à cet endroit.
Il s'agira donc de voir en commission si les bonnes intentions exprimées il y a une année reviennent à la mémoire de ceux qui ont souhaité ce déclassement ou si les craintes que nous avions formulées lors de la création de cette lucarne étaient fondées.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Le projet de loi concernant les limites de zone sur le territoire de la commune de Veyrier, pour la création d'un tennis, a fait l'objet de nombreuses discussions. Je propose le renvoi devant la commission d'aménagement de ce projet de loi. Dans une première phase, la commune n'avait pas réagi à une demande que nous lui avions adressée, mais elle a donné, cette fois, un préavis positif.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
Le Grand Conseil a adopté, le 4 mai 1995, la motion citée en référence qui invite le Conseil d'Etat:
«- à entreprendre, en collaboration avec la commune de Veyrier, l'étude d'aménagement du hameau de Vessy et à en engager la procédure de déclassement en zone 4B protégée;
- à engager, en collaboration avec la commune de Veyrier, la procédure de déclassement du périmètre occupé par le Tennis Club de Champel, afin de l'inscrire en zone sportive destinée à la pratique du tennis au sens de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LALAT)».
Concernant la première invite de cette motion, notre Conseil vous rappelle tout d'abord que le Grand Conseil a modifié, le 24 mars 1995, l'article 22 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LALAT), du 4 juin 1987, relatif aux hameaux.
Cet article 22, qui fixe les conditions dans lesquelles un hameau situé en zone agricole peut être classé en zone à bâtir, soit en principe en 4e zone rurale, donne également compétence aux communes en collaboration avec le département des travaux publics et de l'énergie d'élaborer l'étude d'aménagement préalable nécessaire pour fixer les limites de la zone à bâtir.
Dans le cas d'espèce, le département, qui avait effectué une petite étude préliminaire du hameau de Vessy, a interpellé la commune de Veyrier pour connaître la suite qu'elle entendait donner à ce dossier compte tenu du fait que la demande de création d'une «lucarne» à cet endroit émanait de ladite commune.
Concernant la deuxième invite, notre Conseil vous informe que les services du département ont élaboré un projet de modification des limites de zones pour les parcelles nos 3895 et 4456 du cadastre de la commune de Veyrier sur lesquelles est implanté le bâtiment du Tennis Club de Champel.
Ce projet a été mis à l'enquête publique du 2 février au 3 mars 1996 et le conseil municipal de la commune de Veyrier l'a préavisé favorablement en date du 30 avril 1996.
Dès lors, notre Conseil vous informe qu'il dépose ce jour le projet de loi y relatif.
plan
Débat
M. René Koechlin (L). Je remercie le Conseil d'Etat d'avoir donné suite à la motion traitée dans ce rapport, en déposant le projet de loi que nous venons de renvoyer en commission. Nous l'examinerons avec tout le soin nécessaire, comme le souhaite Mme Châtelain.
En revanche, Monsieur Joye, où en sont les démarches auprès de la commune de Veyrier concernant le hameau de Vessy, puisqu'il en est aussi question dans la motion et que, dans votre rapport, vous nous dites que la question est pendante devant la commune, ainsi que l'étude qui doit conduire au projet souhaité par ce Grand Conseil ?
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Lors de l'enquête publique, il n'y a eu aucune observation, et le Conseil municipal de la commune de Veyrier a donné un préavis favorable par 16 oui, 1 non et 3 abstentions.
Concernant la première invite de la motion, les dispositions de l'article 22 donnent la compétence aux communes de proposer des hameaux, comme vous le dites fort justement, Monsieur Koechlin. La commune de Veyrier a été interpellée dans ce sens et n'a pas encore donné de suite concrète à cette demande.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
(PL 7475)
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 160, alinéa 1, lettre b, de la constitution genevoise, du 24 mai 1847 ;
vu l'article 37, lettre b, de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973,
Décrète ce qui suit :
Article 1
Gestion
Le rapport de l'organe de révision au Conseil d'administration des Services industriels de Genève ainsi que le rapport annuel de gestion des Services industriels de Genève pour l'exercice arrêté au 31 décembre 1995 sont approuvés.
Art. 2
Comptesde profits et pertes etbilan
Le compte de profits et pertes et le bilan pour l'année 1995 sont approuvés conformément aux résultats suivants :
F
a) total des produits 772 869 101,64
b) total des charges 772 065 880,68
c) résultat de l'exercice 803 220,96
d) total du bilan 1 886 837 672,50
Art. 3
Répartitiondu bénéfice
Le bénéfice de 803 220,96 F de l'exercice 1995 est attribué en totalité au fonds de constructions nouvelles, conformément à l'article 28, alinéa 2, de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octo-bre 1973.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le texte qui suit se veut refléter, dans ses grandes lignes, l'évolution de la situation financière des Services industriels de Genève en 1995 ainsi que ses principaux facteurs explicatifs.
Compte de résultat
Commentaires généraux
Suite à l'adoption par les Services industriels de Genève de nouvelles normes comptables internationales, soit celles édictées par l'International Accounting Standards Committee, au 1er janvier 1995 est entré en vigueur un nouveau plan comptable. Celui-ci permet notamment de séparer la comptabilité générale de la comptabilité analytique et, partant, la mise en place d'outils de gestion performants. De plus, il convient de noter l'inscription des mouvements des provisions et réserves dans le compte de résultat.
Dès lors, aux fins de comparaisons, les chiffres 1994 ont été reconstitués selon la nouvelle organisation comptable.
Bilan 1995
Le total du bilan au 31 décembre 1995 (chiffres arrondis) ascende à 1,887 milliard de F, soit une augmentation de 0,132 milliard de F (7,5%) par rapport au 31 décembre 1994.
A l'actif
On constate notamment une augmentation très importante du poste «Immobilisations corporelles», qui passe de 0,916 milliard de F à1,395 milliard de F. Ces mouvements proviennent des rubriques «Immeubles et terrains», augmentation de 0,256 milliard de F à 0,565 milliard de F, et «Installations diverses», 0,632 milliard de F à 0,793 milliard de F. En contrepartie, le poste «Immobilisations en cours et stockées» est réduit de 0,511 milliard de F à 0,138 milliard de F. La mise en service du nouveau centre administratif des Services industriels de Genève explique ces variations.
Au passif
On peut remarquer que le poste «Provision pour remploi» a été réduit à zéro par dissolution de la provision y relative. Les dettes exigibles à long terme passent de 0,811 milliard de F à 0,915 milliard de F, soit une augmentation de 0,104 milliard de F.
Le ratio fonds propres sur total du passif passe de 33% à 32,5%, le reflet de l'augmentation générale de l'endettement des Services industriels de Genève.
Compte de profits et pertes 1995
Le total des produits d'exploitation n'augmente que faiblement: de 669 millions de F à 683 millions de F, soit une augmentation de 2%. Par contre, le total des produits - y compris hors exploitation et produits exceptionnels - augmente de manière significative suite à la dissolution de provisions pour un montant global de 70 millions de F, soit de 684 millions de F à 773 millions de F.
Au niveau des résultats d'exploitation - hors résultats exceptionnels -, on constate une détérioration de la situation. En effet, les charges d'exploitation passent de 673 millions de F en 1994 à 689 millions de F en 1995, ce qui donne un résultat d'exploitation déficitaire de 4,3 millions de F en 1994 et 5,623 millions de F en 1995.
Financement
Le disponible de trésorerie à fin 1995 est de 13,3 millions de F, soit une baisse de 8,5 millions de F par rapport à 1994.
On constate que la marge brute d'autofinancement liée à l'exploitation (cash-flow résultant des activités normales des Services industriels de Genève), en tenant compte des variations actifs et passifs d'exploitation, est sensiblement réduite puisque celle-ci passe de 161 millions de F à 88 millions de F.
L'endettement des Services industriels de Genève est passé de 405 mil-lions de F en 1989 à 935 millions de F à fin 1995. Le taux d'intérêt moyen a atteint son plafond en 1994, soit 5,9%, pour amorcer une légère baisse en 1995 à 5,84%.
En résumé, le résultat net d'exploitation est déficitaire de 17,6 millions de F, soit 12,1 millions de F de moins que prévu dans le budget (budget 1995: -29,7 millions de F), ce qui traduit, entre autres, les premiers efforts de compression en matière de charges du personnel et de frais généraux. Le résultat net de l'exercice est bénéficiaire de 0,8 million de F, soit un écart favorable de 4,9 millions de F par rapport au budget (budget 1995:-4,1 millions de F).
Pour ce qui touche à la présentation détaillée du compte de profits et pertes et du bilan pour l'année 1995 ainsi qu'à l'exposé des éléments qui ont caractérisé la gestion des Services industriels de Genève durant l'année écoulée, nous vous invitons à prendre connaissance de deux documents annexés au présent projet de loi.
En conformité avec la loi du 5 octobre 1973, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver les comptes des Services industriels de Genève pour l'exercice 1995.
(PL 7475-A)
Rapport
La commission, sous la présidence de M. Roger Beer, a examiné les comptes 1995 des Services industriels, lors de sa séance du 14 juin 1996.
M. Ph. Joye, président du département des travaux publics et de l'énergie et M. J.-P. Genoud, directeur de l'office cantonal de l'énergie, assistaient aux travaux de la commission.
Les Services industriels étaient représentés par:
M.meeL. Ducor , président;
M.meeJ.-G. Florio, secrétaire général;
Mmee.M. Riechsteiner, service de l'eau;
M.meeY. de Siebenthal, directeur du service du gaz;
M.meeP. Cugni, service du gaz;
M.meeT. Jullierat, service de l'électricité;
M.meeE. Wohlwend, directeur des services généraux;
M.meeP.-A. Horta., chef de la division financière.
M. Ducor présente les comptes et met en évidence le résultat positif obtenu, entre autres, à l'aide d'un nouveau plan comptable et une masse importante d'informations comme jamais fournies jusqu'à ce jour, grâce au système informatique. L'audit interne intervenu en 1993, pour un coût de 300 000 F, est entré en application en 1995; un contrôle est exercé a posteriori par la fiduciaire Ofor.
Les réserves sur les mobilisations devraient être levées en 1997, compte tenu de l'état d'avancement du travail réalisé par les services financiers. Le résultat est positif d'un peu moins du million de francs.
Il attire l'attention sur le résultat d'exploitation qui est déficitaire. Les ventes d'eau sont en hausse de 3,5% pour 59 millions de m3; celles du gaz sont en croissance remarquable à plus de 5,6% à 1 385,4 GW/h, celles de l'électricité ont augmenté de 0,7% à 2 400 millions de kW/h, alors que la population a crû de 0,9%. Les tarifs de l'eau et de l'électricité ont augmenté de 5%, les tarifs du gaz ont poursuivi leur politique de rabais conjoncturel.
L'événement grave survenu à Verbois, soit l'incendie, se solde par: la totalité du dommage causé à l'usine est pris en charge par les assurances, de même que le nettoyage et l'évacuation du matériel incendié. Le pont roulant est remis en marche; quant aux 4 groupes, ils seront mis en fonction entrele 1er janvier 1997 jusqu'en mars 1998. Pour l'énergie de substitution,des accords de trois mois en trois mois sont passés à des prix inférieurs à4 c le kW/h.
Les Services industriels ont remboursé un des emprunts auprès de la caisse de pension (20 millions de francs) et dénoncé un emprunt public de40 millions de francs. Un nouvel emprunt privé a été émis pour 100 millions de francs, pour 10 ans, à 4,5%.
M. Ducor vient de remettre le rapport du groupe de travail désigné par le Conseil d'Etat, sur la politique tarifaire, à M. Joye. Ce groupe était formé de secrétaires généraux de divers départements, de M. Joye, M. Genoud,M. Florio et lui-même.
Tous les départements ont été associés à ce travail, ce qui a nécessité plus de temps que prévu. Le Conseil d'Etat a maintenant en main des éléments pour reprendre la discussion entamée en septembre 1995. Sans avoir lu ce document, les commissaires sont conscients que des choix politiques fondamentaux seront à faire, compte tenu des mutations que connaît l'économie énergétique. De plus, la baisse de l'activité économique, la prudence des consommateurs, l'augmentation des prix de vente des fournisseurs des Services industriels accentuent le contexte difficile dont les conséquences se lisent clairement dans les comptes. Trésorerie en baisse, la marge brute d'autofinancement liée à l'exploitation réduite et une agravation de l'écart entre les ratios fonds propres sur total bilan et fonds étrangers et provisions sur total bilan.
Après avoir répondu aux nombreuses questions dépassant parfois le cadre de l'examen des comptes 1995, c'est par
10 oui (4 lib., 1 rad., 1 pdc, 1 soc., 3 AdG) et 1 abstention (1 Ve) que l'entrée en matière du projet de loi est acceptée et par
10 oui (4 lib., 1 rad., 1 pdc, 1 soc., 3 AdG) et 1 abstention (1 Ve) que le projet de loi est accepté.
Premier débat
M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur. Lors de l'examen des comptes, la commission n'avait pas pris connaissance du rapport de la fiduciaire Ofor. Après cette lecture, il se trouve que la présentation des comptes du Conseil d'administration des SI y est présentée de manière différente que dans le projet de loi.
Il serait bon d'en comprendre la raison. Ceux qui auront le courage d'ouvrir ce document y liront, à la page 1.27, une remarque de la fiduciaire en question, dont la portée nous laisse songeurs. A ce sujet, nous avons échangé, M. Ducor et moi-même, une correspondance au sujet de l'interprétation des chiffres. Ce dernier maintient l'interprétation du Conseil d'administration, différente donc de celle du projet de loi qui vous est soumis ce soir.
Je ne désire pas noyer ce parlement sous une avalanche de chiffres et me limiterai donc à quelques remarques essentielles.
Les SI basent leur rapport sur le compte de résultat, tandis que le projet de loi est, quant à lui, inspiré du rapport de la fiduciaire, basé sur le total général. Ainsi, à l'article 2 de la page 3 du projet de loi, il convient de soustraire la différence entre les chiffres des lettres a et b pour constater que le résultat est bénéficiaire. Si l'on se rapporte à la discussion en commission et que l'on visualise le rapport des SI à la page 1.5, on s'aperçoit que le résultat est déficitaire. Cette dichotomie est étonnante.
Si l'on s'en tient à l'interprétation des SI, on comprend mieux que pour retrouver une situation positive, il faut déterminer ce qui pèse dans les comptes. Très vite, on constate deux choses. Dans la colonne des produits, les tarifs industriels semblent trop bas et le rabais octroyé aux collectivités publiques accentue le manque à gagner. Du côté des charges, les comptes apparaissent ainsi lourdement pénalisés par les redevances aux collectivités publiques, celles-ci étant supérieures à 35 millions. C'est certainement ce message que les SI veulent faire passer par leur présentation déficitaire des résultats. Mais sont-ce là les véritables raisons du déficit ? J'en doute !
Si l'on compare l'analyse du compte pertes et profits 1995, les conclusions des SI, comparées à celles du projet de loi, sont diamétralement opposées. Prenez la page 1.5 du rapport : pour les SI, le total des charges d'exploitation reste stable à 689 millions pour les deux années. Or, dans le projet de loi, on constate une détérioration à ce niveau. Qui a raison ? Le Conseil d'administration des SI devrait nous renseigner sur la nature des provisions.
Les chiffres avancés par les SI ne sont pas comparables, car les charges, en 1994, sont aussi constituées des amortissements exceptionnels et des provisions qui ont augmenté sensiblement pour des raisons certainement explicables, mais qui ont échappé à la commission.
En ce qui concerne le financement, on passe à la page 1.8 du rapport des SI. Ils prennent en compte la comparaison de la capacité d'autofinancement - terme barbare - qui passe de 83 millions à 101 millions en 1995; donc, selon les SI, elle s'améliore sensiblement. Dans le projet de loi, la marge brute d'autofinancement liée à l'exploitation, soit les chiffres des SI complétés pour connaître le véritable flux net de la trésorerie liée à l'exploitation et qui formera le total, la tendance s'inverse et montre une réduction sensible de cette marge. Là, l'explication est difficile à trouver. On s'aperçoit que les encaissements des débiteurs sont ralentis et que les fournisseurs sont payés plus rapidement, que le cash des SI est réduit. Ils ont donc dû faire appel à la trésorerie. Ainsi, l'endettement a augmenté.
En effet, le fameux ratio fonds propres sur total du bilan passe de 33,1 à 32,4%, reflétant l'augmentation générale de l'endettement des SI. Je demande à notre parlement s'il veut continuer à fermer les yeux sur cette dégradation ?
Au sujet de la remarque de la fiduciaire : «La gestion immobilière, telle qu'elle est pratiquée actuellement, ne permet pas de s'assurer que tous les éléments indiqués dans ce poste du bilan sont toujours existants, évalués correctement et propriété des SI.»
Mes chers collègues, y a-t-il eu des disparitions soudaines d'immeubles ? On pourrait se le demander suite à cette remarque. Vous admettrez notre perplexité. Je n'ai pas de réponse à vous apporter, cette remarque n'ayant pas été discutée par les commissaires. Toutefois, je propose de la garder en mémoire, de laisser un délai aux SI jusqu'à la prochaine présentation des comptes 1996, pour leur permettre de mettre en ordre leur comptabilité immobilière. Je suis certain qu'ils donneront, comme ils l'ont toujours fait, toutes les réponses à nos interrogations.
En conclusion, je suis désolé d'avoir parlé aussi longtemps, mais vous conviendrez avec moi que l'on ne peut pas passer sous silence des interprétations aussi divergentes des résultats. Notre rôle n'est pas seulement d'accepter les comptes, mais aussi de se demander pourquoi le projet de loi du département diffère tant des conclusions du Conseil d'administration des SI.
Toutefois, j'encourage le parlement à adopter le projet de loi, tel que présenté initialement, et je demande au Conseil d'Etat de nous remettre, dans les plus brefs délais, le rapport du groupe de travail désigné par lui sur la politique tarifaire. Nous avons déjà accepté de voter le budget sous réserve de ce document et nous l'attendons toujours.
L'endettement enlise petit à petit les SI, il serait dommage de fermer les yeux, faute de ne plus pouvoir y voir clair !
M. Chaïm Nissim (Ve). Je félicite M. Mauris de son discours de banquier et le rassure sur son temps de parole qui n'a pas été trop long.
En commission, Monsieur Mauris, vous ignoriez les éléments que vous nous livrez ce soir; vous les avez donc appris pendant les vacances, et je vous suis reconnaissant que votre formation de banquier vous ait permis de plonger aussi profondément dans les chiffres, afin de nous fournir ces informations si importantes. Personnellement, je n'y serais pas arrivé, et je me contenterai de vous lire le discours d'ingénieur que je vous ai préparé.
Toutefois, il serait bon, Monsieur Mauris, à la lumière des chiffres dont vous faites état, de renvoyer ces comptes à la commission, afin d'éclaircir ce problème de dichotomie.
Après avoir lu le rapport de M. Mauris, qui n'est pas en cause, mes collègues, les Verts, m'ont grondé, me demandant pourquoi je m'étais abstenu en commission. Ils m'ont demandé si la gestion des SI avait été, d'une quelconque manière, dirigée dans le sens du développement durable ?
Les tarifs ont-ils été augmentés, s'agissant de fluides non renouvelables, comme l'électricité et le gaz ? Non, et j'ai dû admettre que le rapport sur les tarifs des SI, qui devait nous parvenir le 1er avril, n'était toujours pas arrivé. Par souci de transparence, les contrats nucléaires ont-ils été rendus publics ? Non, on ne les a pas vus, sauf celui que l'on a reçu «par la bande». Une démarche a-t-elle été entreprise pour dénoncer le contenu de ces contrats ou, au moins, pour les renégocier, vu que, en plus d'être antiécologistes, ils représentent une très mauvaise affaire ? A ce sujet, je donnerai deux chiffres : on trouve aujourd'hui sur le marché spot du kWh à 2 centimes. Ces contrats, par contre, nous enchaînent à payer le prix de 7 centimes par kWh pendant vingt ans, soit trois fois le prix de celui du marché aujourd'hui.
Les SI ont-ils enfin créé un fonds pour les économies d'énergie ? Non, toujours pas ! Ont-ils accepté de racheter le courant des autoproducteurs à un tarif généreux, soit 19 centimes par kWh, comme cela se pratique déjà à Bâle, canton qui mène une véritable politique pour essayer de sortir de la dépendance engendrée par le nucléaire ? Non, ils n'ont pas commencé à racheter à un tarif généreux les kWh produits par les petits autoproducteurs.
Dans ces conditions je suis désolé, Mesdames et Messieurs les députés, mais nous refuserons ce projet, à moins que le renvoi en commission ne soit accepté. Nous voterons non, jusqu'à ce que les conditions que je viens d'énumérer soient satisfaites.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je félicite M. Mauris pour ses réflexions. Je les partage depuis un certain temps. Bien entendu elles ne mettent nullement en cause la qualité et les bonnes intentions des SI. Simplement, nous divergeons sur la manière de gérer le déficit.
Il y a de cela quelques mois, j'ai demandé qu'un audit interne soit effectué, afin de me rendre compte de la situation que vous avez si bien évoquée. J'en ai tiré la conclusion, que le Conseil d'Etat a agréée, soit qu'on ne peut pas régler ces problèmes, assez délicats, par une hausse des tarifs. La situation est périlleuse, malgré les efforts extrêmement importants que M. Ducor a faits pour réduire ces dépenses.
Du résultat des comptes émerge un bénéfice qui résulte des années de «vaches grasses», contexte qui n'a plus cours aujourd'hui. En effet, nous évoluons vers une situation très difficile, propre à presque tous les domaines d'activités industrielles et financières de notre époque. Cet état de fait a préoccupé le Conseil d'Etat qui a reçu le rapport que nous avions demandé au sujet des tarifs et l'a estimé insuffisant.
Cela pourrait intéresser M. Nissim de savoir que le Conseil d'Etat a donné un mandat pour continuer ces études, afin d'aboutir à une vision globale. Le prix du marché dont parle M. Nissim - qui n'est absolument pas celui pratiqué en Suisse, ce dernier étant d'environ 6,5 centimes le kWh - est descendu sur le marché du spot de 1,2 à 1,5 centime. Cela prouve une concurrence extrêmement forte.
Alors, comment continuer ? La situation des monopoles s'effondre. Les clients demandent, à juste titre, la transparence, afin de pouvoir s'assurer que le prix payé, non sanctionné par le marché, est juste. A n'en pas douter, nous allons vers une modification de notre environnement au point de vue de l'énergie. La Suisse occidentale doit se préparer à cette échéance, afin de mieux défendre ses intérêts face à la Suisse orientale et au pool zurichois et, en particulier, aux étrangers. Elle disposera alors d'une région comportant environ 2,5 millions d'habitants, ce qui lui permettra de pratiquer des achats groupés beaucoup plus importants que ceux que nous faisons aujourd'hui.
Les SI doivent relever le défi. En effet, ils sont amenés à réduire leurs charges d'exploitation, d'après la volonté très stricte du Conseil d'Etat. Mais au moment où les gens et les entreprises sont très sollicités par l'impôt et que les marges de bénéfices diminuent pour tous, il n'est pas raisonnable de travailler sur des hausses de tarifs, même limitées.
Monsieur Mauris, vous mentionnez les divergences entre le rapport de la fiduciaire Ofor et les comptes de l'Etat. Mais, au département des travaux publics et de l'énergie, nous nous sommes référés à la fiduciaire Ofor, car elle nous paraît abonder dans notre sens. D'ailleurs, nous devons le fait d'avoir une fiduciaire à Mme Chevalley, députée et administratrice des SI, et à moi-même qui n'avons cessé de demander, pendant huit ans, de pouvoir bénéficier d'un révisorat extérieur. Aujourd'hui, on voit apparaître les résultats. Je trouve normal qu'il y ait un litige, car les fiduciaires sont précisément là pour souligner ces problèmes.
Nous avons mis sur pied notre programme de conception cantonale de l'énergie. Monsieur Nissim, je réponds par avance à votre motion. Ce programme a été donné au Conseil d'Etat. Je vous le montre, mais je ne peux pas vous le donner, malgré votre désir de collaborer toujours étroitement aux conclusions de l'exécutif pour mieux le démolir après, bien entendu ! Contrairement à Valéry Giscard d'Estaing qui, un jour, avait présenté un rapport de ce genre, ce document est composé de textes et non pas de pages blanches !
Pour une fois, nous avons empoigné le problème avec la dernière énergie. C'est le cas de le dire ! Je vous propose d'approuver ces comptes en sachant que ce que je viens de dire correspond à une situation transitoire et qu'il faudra énormément d'énergie à tous, y compris aux organismes des SI, pour se mettre à la page d'un aggiornamento qui ne correspond pas à la tradition des grandes institutions. Mais je ne leur fais aucun reproche, et je suis sûr qu'ils travailleront avec nous. J'ai déjà eu le plaisir de collaborer avec M. Ducor et d'avancer dans ce domaine.
M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur. Monsieur Nissim, sachez que les chiffres sont les chiffres ! Et, de toute manière, même si les comptes sont renvoyés en commission, ils resteront identiques. Il faut donc les approuver. Les interrogations concernent leurs interprétations et les divergences de vue concernant la façon de gérer les SI. Les renvoyer à la commission de l'énergie ne sert à rien, vu que, de toute manière, nous serons saisis de ce rapport.
Il était bon de mentionner que l'interprétation des chiffres était différente et qu'il faudra choisir la version en fonction de la mission que l'on veut donner aux SI. Approuvons donc les comptes, tels que le projet de loi les présente et non pas tels que le Conseil d'administration des SI a voulu les présenter !
M. Chaïm Nissim (Ve). Messieurs Joye et Mauris, il me semble, contrairement à vous, que le concept de transparence implique que les quinze députés, membres de la commission de l'énergie, puissent connaître la gestion des SI autrement que par le bref résumé que vous venez de nous faire.
Personnellement, je serais très intéressé de savoir comment cette fiduciaire aboutit à des conclusions différentes de celles des SI et les raisons qui amènent le Conseil d'Etat à préférer l'interprétation de la fiduciaire. Toutefois, si vous désirez rester seuls, Messieurs Mauris et Joye, à connaître la gestion des SI, alors tant pis, vous voterez contre ce renvoi en commission.
M. Roger Beer (R). En effet, la commission de l'énergie a quelques problèmes de fonctionnement, peut-être en raison du fait que nous avons trop de séances extraordinaires qui, à chaque fois, nous «mangent» les vendredis où nous siégeons. Si bien que l'on n'arrive pas à avancer autant que l'on devrait, les membres de la commission ne voulant pas siéger à midi.
Cela étant, le rapport de M. Mauris est tout à fait honnête... (Rires.) ...contrairement à ce qui pourrait être sous-entendu, et je l'en remercie. Toutefois, il est regrettable que l'on apprenne l'existence de ce rapport de la fiduciaire en plénum. Cette manière de faire est un peu cavalière. Monsieur Nissim, ce n'est pas très raisonnable de demander le renvoi en commission, surtout que vous connaissez son fonctionnement en tant que vice-président. D'ailleurs, vous aurez l'honneur de la présider vendredi prochain, car je ne serai pas là.
Des voix. Ah !
M. Roger Beer. Vous êtes d'accord avec moi, mon cher vice-président, que nous ne changerons rien à ces comptes.
M. Chaïm Nissim. Oui, mais nous aimerions comprendre, Monsieur Beer !
M. Roger Beer. Bon, mais pour ça, voyez avec M. Mauris; il vous enverra la photocopie des comptes de la fiduciaire. A mon avis, ce document n'est pas secret, puisqu'il est publié !
Pour en finir, il faut accepter ces comptes ce soir et ne pas suivre la proposition de mon cher collègue Nissim.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Monsieur Nissim, je me suis préoccupé de ces comptes bien avant vous, puisque je vous ai dit avoir demandé, selon l'article 23, un audit de la gestion des SI qui m'a été très utile depuis plus d'un an.
Je ne suis pas seul. Nous sommes nombreux à nous poser ces questions, et du côté des SI, également. Mais nous ne pouvons pas vous donner, ce soir, des conclusions ayant trait à des appréciations concernant les comptes, comme l'a très justement dit M. Mauris, en rapport avec des chiffres qui ne varient pas. Nous travaillons à l'interprétation de ces comptes.
Pour l'an prochain, j'espère que la fiduciaire sera en accord avec l'interprétation des comptes des SI. A souligner qu'elle les a approuvés. Elle a simplement émis quelques réserves. Je demande que l'on fasse parvenir ce rapport de la fiduciaire à l'ensemble des députés de ce Grand Conseil.
Une voix. Bravo !
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'énergie et des Services industriels est rejetée.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
approuvant le rapport annuel de gestion, le compte de profits et pertes et le bilandes Services industriels de Genève pour l'année 1995
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 160, alinéa 1, lettre b, de la constitution genevoise, du 24 mai 1847 ;
vu l'article 37, lettre b, de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973,
Décrète ce qui suit :
Article 1
Gestion
Le rapport de l'organe de révision au Conseil d'administration des Services industriels de Genève ainsi que le rapport annuel de gestion des Services industriels de Genève pour l'exercice arrêté au 31 décembre 1995 sont approuvés.
Art. 2
Comptesde profits et pertes etbilan
Le compte de profits et pertes et le bilan pour l'année 1995 sont approuvés conformément aux résultats suivants :
F
a) total des produits 772 869 101,64
b) total des charges 772 065 880,68
c) résultat de l'exercice 803 220,96
d) total du bilan 1 886 837 672,50
Art. 3
Répartitiondu bénéfice
Le bénéfice de 803 220,96 F de l'exercice 1995 est attribué en totalité au fonds de constructions nouvelles, conformément à l'article 28, alinéa 2, de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octo-bre 1973.
La séance est levée à 19 h 5.