République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 mai 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 7e session - 20e séance
I 1958
M. René Longet (S). Le temps ayant fait son oeuvre, cette interpellation, déposée voilà six mois, n'a pas perdu son intérêt, mais doit être relativisée et, dans une certaine mesure, reformulée.
A l'époque, je m'étais étonné des observations lénifiantes de certains membres du Conseil d'Etat sur un fond de discours très engagé de ce dernier par rapport à la Genève internationale, suite au départ des deux secrétariats, celui de la biodiversité, en novembre, et celui du climat, en mars.
Comme vous le savez, ces deux secrétariats font partie des institutions internationales. Ils ont pris leur autonomie juridique, en quelque sorte, à partir du moment où ces accords internationaux sont entrés en force. Les conférences des parties ont malheureusement décidé d'établir ailleurs ces secrétariats provisoirement installés à Genève. A l'époque, j'ai regretté cette décision que plusieurs conseillers d'Etat ne jugeaient pas grave.
Or, ces secrétariats entraînent une synergie importante, et si leur dispersion à travers le monde satisfait peut-être certains intérêts elle est franchement néfaste pour la cohérence du système et la communication entre les institutions, et cela spécialement pour les pays qui ont peu de moyens.
J'ai quatre questions à poser au Conseil d'Etat.
Premièrement, je désire savoir si vous avez reçu des informations au sujet de la commission du développement durable pour laquelle vous vous étiez battus dans le cadre de la délégation suisse au sommet de la Terre à Rio. Ce combat a échoué, laissant cette commission s'installer aux Etats-Unis, mais un espoir subsiste de la voir revenir à Genève.
Deuxièmement, la notion de développement durable rapproche les institutions internationales qui sont souvent très abstraites et très peu connues de la population. Elle permet de mieux comprendre ce qui se manifeste au niveau local et régional, notamment au travers des organisations non gouvernementales. Dans quelle mesure est-il possible de réactiver et de concrétiser les idées d'interface développées lors de la discussion sur l'affectation du palais Wilson ? Comme on le sait, ce dernier n'a pas pu être affecté à ce lieu de rencontres et d'échanges. Toutefois, l'Académie de l'environnement offre un autre site potentiel. En effet, cet organisme qui forme une certaine synergie sur le site de Conches va nommer, ou a déjà nommé, un nouveau directeur. Ce concept a-t-il été oublié ou peut-on encore en attendre quelque chose ?
Troisièmement, suite aux malheureuses restrictions imposées au système des Nations Unies, des rumeurs circulent sur la possible non-occupation de certains locaux du Palais Wilson par les institutions du programme des Nations Unies pour l'environnement. En savez-vous plus sur cette question ?
Quatrièmement, je désire savoir si l'idée que Genève soit un carrefour international du développement durable est encore partagée par le Conseil d'Etat. Nous avons eu l'impression que certains concepts officiels du Conseil d'Etat ont été transformés. Soudainement, on s'est mis à parler d'informatisation, de «smart Geneva», omettant les concepts de «capitale de l'environnement et du développement durable». Certes, cela n'est pas incompatible, mais il ne faut pas oublier cette ambition. Or sa réalisation demande une mobilisation conséquente. Je désire vous demander ce que pense le Conseil d'Etat, et vous-même, de l'actualité de ce concept ?
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Pour répondre à l'interpellation de M. Longet sur le retour de la commission du développement durable, il paraît, d'après la presse, que l'on aurait critiqué le manque d'enthousiasme de la conseillère fédérale Ruth Dreifuss, ainsi que les déclarations qu'elle aurait faites à ce sujet.
Au moment où la discussion s'est engagée dans cette nouvelle perspective, Mme Dreifuss a eu raison de prendre soin de se comporter comme une partenaire de la commission et de ne rechercher que son efficacité. En effet, elle n'avait pas à agiter le petit drapeau suisse et genevois, car, à ce moment, elle aurait mis l'importance sur le fait que cette commission revienne à Genève. Il est beaucoup plus habile de parler d'efficacité, car, à ce moment, on s'aperçoit que Genève possède la synergie nécessaire pour traiter au mieux ces problèmes.
Le résultat du travail des autorités, tant fédérales que cantonales, a fait que l'on parle du retour de cette commission à Genève. Les autorités ont considéré que leur présence dans les différentes conférences internationales n'était pas inutile, même en cas d'échecs, comme ceux de Berlin ou de Madrid, car il leur faut être constamment présentes sur le terrain pour dire ce qu'elles font et quels sont leurs centres d'intérêt, afin de favoriser des choix naturels lorsque les circonstances le permettent. C'est dans ces circonstances qu'elles ont imaginé le retour de la commission à Genève.
Il faut être réalistes et bien se rendre compte que les organisations locales et internationales doivent traiter de problèmes beaucoup plus importants en matière d'environnement, ce qui ne veut pas dire que l'interface soit impossible à réaliser. Nous avons - et c'est un point que vous apprécierez - développé les ONG d'une façon considérable sur le site de Conches que nous avons qualifié de «site d'excellence». Nous avons réuni quelques-unes des associations les plus importantes du monde qui, elles-mêmes, ont créé le fameux groupe «Neptune» à l'instigation de notre administration et dans lequel on retrouve les principales organisations non gouvernementales s'occupant de développement durable. Grâce à la création de ce groupe «Neptune» et à l'engagement de certains de ses membres dans les structures de la cité, les conditions seront bientôt réunies pour arriver à l'interface. Aujourd'hui, il m'est impossible de faire des pronostics quant à son utilisation, mais les décisions prises ne sont pas remises en question, même si des ajustements sont nécessaires. L'affaire est à suivre, mais le projet de base reste le même.
Pour le reste, Monsieur le député, vous interprétez les messages du Conseil d'Etat, et cela n'engage que vous. Mais je puis vous assurer devant mes deux collègues présents que nous sommes tous imprégnés de cette sensibilité au développement durable. Regardez, M. Vodoz hoche du bonnet pour confirmer mes dires ! Je vous annonce donc avec plaisir, et sans ironie, que tous nos grands dossiers s'inscrivent dans cette politique.
Toutefois, vous admettrez que ce terme est un peu galvaudé. Autrefois, les choses avaient un autre nom, mais elles étaient imprégnées de la même ambition d'équilibrer une volonté de protéger l'environnement, un développement économique dont nous avons besoin pour notre prospérité et une action sociale correspondant à ce qui est légitimement attendu. Tout cela, pour vous dire que notre gouvernement n'a pas changé ses projets de base à ce sujet.
Cette interpellation est close.