République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 avril 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 6e session - 14e séance
PL 7443
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
CHAPITRE I
Encouragement à l'emploi
Article 1
Buts
1 L'Etat, en collaboration avec les communes, vise à renforcer la position et la compétitivité de l'économie genevoise. Il encourage le maintien des emplois publics et privés existants et la création de nouveaux emplois dans le cadre d'une stratégie de développement durable.
2 Il privilégie les emplois productifs et socialement utiles par un soutien direct ou indirect aux entreprises localisées dans le canton ou disposées à s'y implanter. Il favorise la diversification et l'innovation.
3 Il s'emploie à améliorer des infrastructures garantissant des conditions-cadres attractives, telles que, notamment, les transports, les télécommunications, l'environnement, une offre de logements diversifiée pour toutes les catégories de la population, la qualité de la vie ainsi que la formation et le perfectionnement professionnels.
4 Il coordonne son activité avec le canton de Vaud et les autres cantons romands, les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie, notamment en:
a)
s'assurant de la complémentarité des mesures régionales;
b)
équilibrant les pôles d'habitation et d'activités;
c)
dynamisant les échanges et en
d)
organisant des réseaux de communications publics efficaces.
5 Il coordonne les mesures cantonales avec les lois fédérales et prend les mesures nécessaires pour permettre au canton de bénéficier des mesures fédérales entrant dans le cadre défini par la présente loi.
Art. 2
Mesures d'incitation
1 Les mesures d'incitation à l'emploi cherchent, dans les limites d'une saine gestion et pour autant que les conditions de rémunérations et de travail usuelles soient respectées:
a)
à maintenir et à développer des activités en encourageant les efforts de reconversion, de diversification et d'innovations économiques;
b)
à implanter des entreprises nouvelles dans les domaines industriel, commercial ou des services;
c)
à rechercher de nouveaux marchés et
d)
à favoriser l'essaimage et le maillage d'entreprises.
2 Dans ce cadre, les mesures prévues par la présente loi encourageant particulièrement:
a)
les entreprises à haute valeur ajoutée, destinées à l'exportation, en particulier dans les secteurs de la biotechnologie, du biomédical, de la haute technologie, de la protection de l'environnement, de la technologie d'information;
b)
les entreprises de recherche;
c)
les organisations privées qui jouent un rôle actif dans la renommée internationale du canton, soit notamment les organisations internationales et humanitaires, les entreprises à vocation touristique et les consultants;
d)
les entreprises qui mettent sur pied des programmes de réduction significative du temps de travail;
e)
les petites et moyennes entreprises, les entreprises coopératives ou qui associent les travailleurs à la gestion;
f)
les associations sans but lucratif offrant des emplois de proximité répondant à des besoins sociaux et durables.
3 L'Etat veille, par des moyens appropriés distincts et en collaboration avec la Confédération, à favoriser le développement et l'implantation d'organisations publiques internationales dans le canton.
CHAPITRE II
Aides au financement
Art. 3
Catégories d'aides
L'Etat peut accorder les aides financières suivantes, à la condition que le projet permette de créer ou de maintenir des emplois, compte tenu des adaptations qu'exige l'évolution de la conjoncture économique:
a)
cautionnement de crédits bancaires pour garantir des crédits d'investissement et la prise en charge partielle d'intérêts dus à une banque pour le démarrage d'activités nouvelles;
b)
contribution au recyclage, à la création d'emplois et participation aux frais d'études de marché visant à la création d'emplois et à la rationalisation des entreprises existantes dans le cadre défini par la présente loi.
Art. 4
Aides au démarrage d'activités nouvelles
1 Les cautionnements et contributions au service de l'intérêt sont destinés à combler une lacune de financement ou alléger une charge financière trop lourde de l'entreprise durant la phase initiale d'une activité nouvelle.
2 Les cautionnements et contributions au service de l'intérêt ne sont accordés que pour les crédits d'investissement à moyen et à long terme qui sont nécessaires à l'exécution d'un projet. Le capital propre investi doit couvrir une part raisonnable du coût total de l'investissement.
3 Les crédits doivent être destinés à l'acquisition de machines, d'installations, d'outillages, d'appareils, de brevets, de licences et d'immeubles ainsi qu'à la construction.
4 Outre les dépenses d'investissement, sont également comprises dans le coût total les autres dépenses concernant directement le projet, telles que les frais de personnel et de matériel, à l'exclusion des fonds de roulement et des frais d'exploitation ultérieurs à la phase de démarrage.
5 Les frais de recherche et de développement relèvent en principe de la compétence de la Confédération et ne sont pas inclus dans le coût total. Le droit fédéral est applicable par analogie en cas d'intervention du canton.
Art. 5
Cautionnements
1 Les cautionnements ne peuvent dépasser en principe le tiers du coût total.
2 La durée du cautionnement est au maximum de 10 ans.
3 Les investissements réalisés avant la soumission du projet à l'Etat ne sont pas pris en compte.
4 Lorsqu'il accorde une caution, l'Etat peut exiger des garanties de la part des bénéficiaires directs ou indirects de cette aide.
Art. 6
Prise en charge d'intérêts
1 Les contributions au service de l'intérêt se montent au plus à un quart de l'intérêt commercial usuel, à condition que l'établissement bancaire renonce pour sa part à un quart de cet intérêt.
2 La prise en charge ne s'étend pas au-delà d'une période de 6 ans. Elle est réalisée sous la forme de versements adressés directement à l'établissement bancaire concerné.
Art. 7
Recyclage, création d'emplois et frais d'étude
1 L'Etat peut accorder une contribution à la réorientation de l'activité d'une entreprise menacée, notamment pour le recyclage de personnes et la création d'emplois.
2 L'Etat peut participer aux frais d'études visant au recyclage des personnes et à la création d'emplois. De telles études doivent concerner par exemple:
a)
la «faisabilité» du projet;
b)
la recherche et le développement;
c)
les études de marché;
d)
toute étude pouvant servir au développement de l'économie cantonale.
3 En principe, les contributions sont limitées au maximum à 50% du coût total.
4 L'Etat peut encourager la reconversion et la réintégration dans le circuit économique des personnes qui perdent leur emploi ou sont menacées de le perdre à la suite de réformes de structures, de restructurations, de fermetures ou de fusions d'entreprises.
Art. 8
Autres conditions
1 En principe, l'aide ne s'applique pas à la rénovation d'immeubles, ni à l'achat ou au renouvellement d'équipements et de machines au sein d'une entreprise existante, à moins que des considérations d'économie cantonale l'exigent. Les aides ne couvrent pas non plus les besoins en liquidités chargés de couvrir les frais d'exploitation.
2 En règle générale, sauf circonstances nouvelles, une entreprise bénéficiaire d'une aide ne peut recevoir une autre aide avant un délai minimum de 3 ans à partir du dernier versement.
Art. 9
Présentation de la demande d'aide
1 Toute demande d'aide financière doit être présentée à l'Etat par l'intermédiaire d'un établissement bancaire.
2 Celui-ci fournira des informations:
a)
sur les promoteurs du projet, sur leur activité actuelle, leurs antécédents, leur situation financière (bilan, notamment);
b)
sur le projet lui-même (étude de «faisabilité»), c'est-à-dire description de ce projet, technologie appliquée, produits à réaliser, budget global, financement (fonds propres, crédits bancaires et cautionnement) et preuve de la viabilité (budget d'exploitation, marchés, perspectives);
c)
sur sa propre appréciation du projet avec ses conclusions sur la forme et l'importance de l'aide souhaitée.
3 Les relations entre l'Etat et la banque concernée font l'objet d'un engagement ou d'un contrat de cautionnement et les relations entre l'Etat et l'entreprise sont consignées dans une convention.
4 En particulier, la banque doit veiller à ce que l'aide accordée soit utilisée conformément au but fixé, à ce que les prêts bénéficiant de la caution de l'Etat soient amortis dans les délais prévus et à ce que l'Etat soit renseigné par elle sur la réalisation du projet et de ses objectifs.
5 D'une manière générale, l'Etat veille à ce que la Banque cantonale genevoise, conformément à son but principal qui consiste à «contribuer au développement économique du canton et de la région», puisse participer activement à l'effort de promotion économique.
CHAPITRE III
Fiscalité, immeubles et aides fédérales
Art. 10
Allégements fiscaux
Dans les limites de la législation fiscale, l'Etat peut accorder des allégements aux entreprises faisant des efforts de recherches et d'investissements conformes aux buts de la présente loi.
Art. 11
Mesures relatives aux terrains et immeubles à usage commercial et industriel
L'Etat a recours aux mesures existantes découlant de la législation cantonale sur les terrains et zones industrielles et internationales et les coordonne avec celles prévues par la présente loi.
Art. 12
Aides fédérales
L'Etat sollicite les aides fédérales en matière de promotion économique, de recherche et de développement et les coordonne avec les mesures prévues par la présente loi.
CHAPITRE IV
Fonds de promotion de l'économie
Art. 13
Constitution du fonds
1 Afin de permettre la réalisation des buts définis par la présente loi et la participation du canton à des mesures fédérales allant dans le même sens, il est créé un fonds de promotion de l'économie genevoise.
2 Ce fonds est alimenté:
a)
par une subvention de 10 millions de francs au minimum portée chaque année au budget de l'Etat;
b)
par les intérêts de ses capitaux;
c)
par les sommes remboursées en vertu des dispositions fédérales et cantonales applicables en la matière et
d)
par des dons.
3 La subvention annuelle s'ajoute aux autres subventions déjà versées pour la promotion économique et le tourisme.
CHAPITRE V
Organisation administrative
Art. 14
Office de la promotion économique
1 Il est mis sur pied, dans le cadre du département de l'économie publique, un office de la promotion économique (ci-après: office) dont les tâches consistent notamment à promouvoir l'économie genevoise à l'intérieur et à l'extérieur du canton en incitant les entreprises installées à s'y développer et les entreprises extérieures à s'y implanter.
2 L'office a notamment pour tâches de:
a)
mettre sur pied une antenne servant d'intermédiaire entre les entreprises et l'administration;
b)
faciliter l'accès au marché du travail et aux établissements bancaires ainsi que l'accès aux technologies existantes;
c)
stimuler la collaboration et l'échange d'expériences;
d)
apporter son appui dans la recherche de terrains et d'immeubles;
e)
coordonner les services et organismes exerçant des tâches dans le domaine de la promotion économique.
Art. 15
Office de la promotion économique et licenciements collectifs
L'office est l'autorité compétente en vertu de l'article 24 et suivants de la loi sur le service de l'emploi et la location de services, du 18 septembre 1992.
Art. 16
Délégués ou déléguées à la promotion économique
Placé sous la responsabilité d'un directeur ou d'une directrice, l'office comprend 2 délégués ou déléguées appelés à travailler en étroite collaboration sur la base de mandats précis: l'un, chargé de la promotion économique exogène et l'autre, de la promotion endogène.
Art. 17
Commission du développement économique
1 Une commission du développement économique (ci-après: commission) est créée qui a notamment pour tâches:
a)
de se prononcer sur l'organisation des services de l'Etat concernés par le développement économique;
b)
de formuler ses préavis sur les questions et rapports que le Conseil d'Etat lui soumet;
c)
de saisir ce dernier de propositions qu'elle élabore de sa propre initiative et
d)
de conseiller le gouvernement en matière de stratégie économique prospective et préventive.
2 La commission est composée de:
a)
4 représentant-e-s du département de l'économie publique (deux de la commission, un de l'office cantonal de statistique, un de l'office cantonal de l'emploi);
b)
4 représentant-e-s désigné-e-s en fonction de leurs compétences issus de l'université, des organisations internationales et de la Banque cantonale genevoise;
c)
4 représentant-e-s de l'Union des associations patronales genevoises (UAPG) et 4 de la Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS).
3 Elle est présidée par le chef du département de l'économie publique et se réunit au moins 10 fois par an.
4 Elle peut confier des mandats d'études à divers organismes tels que le Conseil économique et social de l'université.
Art. 18
Information
1 En début de chaque année, le Conseil d'Etat fournit un rapport détaillé au Grand Conseil et à la commission sur:
a)
l'état des secteurs de l'économie genevoise;
b)
les résultats de la promotion économique en général et en particulier sur l'emploi;
c)
les mesures envisagées destinées à la mise en oeuvre de la loi et les nouvelles mesures envisagées.
2 Une fois par législature, le Conseil d'Etat confie à l'université une évaluation générale de la politique de promotion économique.
3 L'évaluation doit porter notamment sur les domaines suivants:
a)
emploi;
b)
niveau des salaires et durée du travail;
c)
retour fiscal;
d)
revenu cantonal;
e)
divers aspects qualitatifs.
4 Le Conseil d'Etat prend les mesures nécessaires pour assurer les bases statistiques à l'évaluation de la promotion économique.
Art. 19
Procédure
1 Les demandes d'aide et d'allégements fiscaux sont adressées au service de la promotion économique.
2 La présente loi ne confère aucun droit à l'obtention d'une aide ou d'un allégement.
CHAPITRE VI
Obligation de renseigner et remboursement
Art. 20
Obligation de renseigner et devoir de secret
1 Le requérant est tenu de fournir tous renseignements. Sollicités par l'office en rapport avec les aides requises, il permet de prendre connaissance des livres et de tout autre document utile.
2 Les personnes chargées de l'application de la loi sont tenues au secret de fonction.
Art. 21
Infraction à l'obligation de renseigner et renseignements fallacieux
1 En cas d'infraction à l'obligation de renseigner, de même que si les autorités sont induites en erreur par des renseignements fallacieux ou par la dissimulation de faits, ou encore lorsqu'il y a tentative de les induire en erreur, l'aide sera refusée et la restitution des prestations déjà fournies sera exigée.
2 S'ils sont fautifs, les requérants ou les autres intéressés pourront être exclus de toute aide prévue par la présente loi.
Art. 22
Remboursement des aides financières
L'Etat peut exiger le remboursement des aides financières si les circonstances le justifient et le permettent.
CHAPITRE VII
Dispositions particulières et finales
Art. 23
Règlement d'exécution
Le Conseil d'Etat édicte un règlement d'exécution.
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe l'entrée en vigueur de la présente loi au plus tard dans un délai de 12 mois après son adoption par le Grand Conseil.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Projet de loi en faveur du développement de l'économie et de l'emploi
Commentaire article par article
Chapitre I: Encouragement à l'emploi
Article 1 - Buts
L'article 1 définit les buts généraux du projet de loi. Les mots clés de ces buts sont les suivants:
· le renforcement de la position et la compétitivité de l'économie genevoise (alinéa 1);
· la création d'emplois par des entreprises à Genève ou disposées à s'y implanter (alinéa 2);
· l'amélioration des infrastructures pour garantir des conditions-cadres attractives (alinéa 3);
· la coordination cantonale et régionale (alinéa 4);
· la coordination des mesures cantonales et fédérales (alinéa 5).
De manière générale, le projet de loi vise à une promotion économique largement renforcée visant tant les entreprises existantes à Genève (promotion économique endogène) que la venue d'entreprises nouvelles (promotion économique exogène), dans le cadre d'une stratégie de développement durable.
Article 2 - Mesures d'incitation
Les mesures d'incitation sont, évidemment, le complément indispensable à cet effort de promotion économique. De manière générale, les mesures sont soumises à la condition qu'elles respectent les limites d'une saine gestion et que les conditions de rémunération et de travail usuelles soient respectées. Ces deux conditions ne devraient pas susciter de questions particulières. On rappellera que l'Etat accorde une aide et qu'il est donc possible, à cet égard, d'exiger le respect d'un standard minimum. Cette idée avait déjà guidé la loi sur les soumissions et adjudications publiques des travaux de l'Etat, du 2 novembre 1892 (L 6 1), et son règlement d'application du 9 janvier 1985 (L 6 12, article 12), s'agissant du respect des salaires et des conditions de travail.
Les mesures d'incitation doivent favoriser des objectifs précis (alinéa 1):
· le maintien et le développement des activités;
· l'implantation d'entreprises nouvelles;
· la recherche de nouveaux marchés et
· l'essaimage et le maillage d'entreprises.
Dans ce cadre, il convient d'encourager les efforts de reconversion, de diversification et d'innovation économiques.
En vertu de l'alinéa 2, il convient d'encourager plus particulièrement les entreprises des secteurs suivants:
· les entreprises à haute valeur ajoutée destinées à l'exportation (par exemple, biotechnologies, biomédical, haute technologie, protection de l'environnement, technologie d'information);
· les entreprises de recherche;
· les organisations privées à caractère international;
· les entreprises qui mettent sur pied des programmes de réduction du temps de travail;
· les petites et moyennes entreprises et les entreprises coopératives ou qui associent des travailleurs à leur gestion;
· les associations sans but lucratif offrant des emplois de proximité répondant à des besoins sociaux et durables.
L'énumération n'est pas exhaustive, car il y a lieu de laisser une certaine souplesse dans la loi afin que les autorités exécutives et le gouvernement puissent agir de façon flexible.
Il va de soi également qu'il y a lieu de favoriser le développement et l'implantation d'organisations publiques internationales dans le canton (alinéa 3). Toutefois cet objectif ne relève pas de la promotion économique au sens où l'entend le projet de loi. En effet, le secteur des organisations publiques internationale répond à des spécificités telles, que les efforts les concernant doivent faire l'objet d'une approche particulière, vu notamment ce qui a trait aux rapports avec la Confédération.
Chapitre II: Aides au financement
Article 3 - Catégories d'aides
L'Etat peut accorder un certain nombre d'aides financières, à la condition que les projets permettent de créer ou de maintenir des emplois, compte tenu des adaptations qu'exige l'évolution de la conjoncture économique. L'idée essentielle est que l'Etat doit permettre de créer des emplois mais non pas de sauver des entreprises qui sont vouées à disparaître. Il est donc tenu compte de l'impératif permanent de régénérer le tissu économique local et régional qu'il ne s'agit pas de subventionner de manière permanente. Cela serait hors de la portée des finances cantonales et pourrait constituer un frein à l'innovation. C'est la raison pour laquelle deux catégories d'aides sont prévues:
· le cautionnement de crédits bancaires pour garantir les crédits d'investissement et la prise en charge partielle d'intérêts dus à une banque pour le démarrage d'activités nouvelles (alinéa 1, lettre a);
· la contribution au recyclage, à la création d'emplois et la participation aux frais d'étude de marché visant à la création d'emplois et à la rationalisation des entreprises existantes (alinéa 1, lettre b).
Article 4 - Aides au démarrage d'activités nouvelles
Cette position définit les conditions auxquelles les aides sont accordées. Il s'agit, pour l'essentiel, d'alléger une charge financière trop lourde ou de combler une lacune de financement de l'entreprise durant la phase initiale d'une activité nouvelle (alinéa 1).
De tels crédits ne sont accordés qu'à moyen et à long terme et l'entrepreneur doit, par son capital propre investi, couvrir une part raisonnable du coût total de l'investissement (alinéa 2).
Le fait que ces aides ne doivent pas constituer une subvention permanente au fonctionnement d'entreprises est précisé par les alinéas 3 et 4 qui fixent le cadre des dépenses pour lesquelles ces aides peuvent apporter une contribution. A ce titre, les fonds de roulement et les frais d'exploitation ultérieurs à la phase de démarrage ne peuvent être pris en charge.
Enfin, il est prévu que les frais de recherche et de développement relèvent en principe de la compétence de la Confédération et ne sont pas inclus dans le coût total. Il existe, à cet égard, diverses aides qui peuvent entrer en ligne de compte (alinéa 5).
Article 5 - Cautionnements
Les cautionnements peuvent être accordés, pour autant qu'ils ne dépassent pas en principe le tiers du coût total. La durée d'un tel cautionnement est au maximum de 10 ans. L'Etat ne peut prendre en charge des investissements réalisés avant que le projet ne lui ait été soumis (alinéa 3) et il peut exiger des garanties de la part des bénéficiaires directs ou indirects de l'aide (alinéa 4). Les bénéficiaires indirects peuvent être, par exemple, les actionnaires, voire d'autres sociétés d'un même groupe.
La durée du cautionnement est au maximum de 10 ans (alinéa 2), durée qui s'inspire de la législation neuchâteloise dans ce domaine.
Article 6 - Prise en charge d'intérêts
Si l'Etat accorde une prise en charge d'intérêts, l'établissement bancaire qui accorde le crédit doit également contribuer à cet effort en abaissant sa propre rémunération (alinéa 1). Cet effort est logique, vu la diminution du risque consécutive à la prise en charge d'intérêts par l'Etat. Cette prise en charge est limitée à un quart de l'intérêt commercial usuel, montant auquel s'ajoutera une renonciation à un quart de cet intérêt par l'établissement bancaire concerné. La diminution de la charge des intérêts s'élève donc à un demi-pourcent.
Par analogie avec la législation neuchâteloise en la matière, la prise en charge d'intérêts ne s'étend pas au-delà d'une période de 6 ans. Pour qu'elle déploie pleinement ses effets, cette prise en charge est réalisée sous la forme de versements adressés directement à la banque concernée (alinéa 2).
Article 7 - Recyclage, création d'emplois et frais d'étude
Il arrive souvent que les activités économiques soient menacées, alors qu'un effort pour la reconversion pourrait permettre de maintenir des emplois, voire d'en créer de nouveaux. Ces efforts de reconversion peuvent concerner, d'une part, le recyclage des personnes et, d'autre part, une réorientation de l'activité de l'entreprise dans un but de création de nouveaux emplois.
Ces mesures de recyclage et de réorientation entraînent des frais auxquels l'Etat peut participer selon les critères précis fixés par la loi (alinéa 2). En principe, les contributions de l'Etat sont limitées à 50% du coût total de ces mesures (alinéa 3).
Il est également prévu de prévoir un encouragement à la reconversion et la réintégration dans le circuit économique des personnes qui perdent leur emploi ou sont menacées de le perdre à la suite de restructurations, de fermetures ou de fusions d'entreprises. Le règlement d'application de la loi ainsi que la pratique administrative détermineront les conditions auxquelles l'Etat interviendra à ce titre (alinéa 4).
Article 8 - Autres conditions
Il convient également de prévoir les autres conditions devant être réunies en cas d'octroi d'une aide. Il n'y a pas lieu, notamment, de prévoir d'aide pour la rénovation d'immeubles, ni pour l'achat ou le renouvellement d'équipements et de machines au sein des entreprises existantes, à moins que des considérations économiques cantonales l'exigent. Par ailleurs, les aides ne doivent pas servir à constituer les fonds de roulement nécessaires au fonctionnement de l'entreprise, raison pour laquelle elles ne couvrent pas non plus les besoins de liquidités chargés de couvrir les frais d'exploitation (alinéa 1).
Par ailleurs, les aides ne doivent pas se renouveler en chaîne, afin d'éviter un phénomène de subventionnement permanent et structurel. C'est la raison pour laquelle, en règle générale, et sauf circonstances nouvelles, une entreprise bénéficiaire d'une aide ne peut recevoir une autre aide avant un délai minimum de 3 ans à partir du dernier versement (alinéa 2).
Article 9 - Présentation de la demande d'aide
Cette disposition précise les conditions formelles qui doivent accompagner toute demande d'aide. La condition la plus importante exige que la demande d'aide soit présentée à l'Etat par l'intermédiaire d'un établissement bancaire, accompagnée de toute une série d'informations économiques (alinéas 1 et 2). La banque a pour tâche de veiller à ce que l'aide accordée soit utilisée conformément au but fixé, à ce que les prêts bénéficiaires de la caution de l'Etat soient amortis dans les délais prévus et à ce que l'Etat soit renseigné par elle sur la réalisation du projet et de ses objectifs. Ces conditions sont fixées par des conventions particulières (alinéas 3 et 4).
Enfin, l'Etat veillera à ce que la Banque cantonale genevoise puisse participer, conformément, à son but, à cet effort de promotion économique (alinéa 5).
Chapitre III - Fiscalité, immeubles et aides fédérales
Article 10 - Allégements fiscaux
Le projet de loi n'innove en rien sur ce point. Il stipule le principe de l'octroi d'allégements aux entreprises faisant des efforts de recherche et d'investissement conformes au but du projet de loi, mais cela dans les limites de la législation fiscale actuelle.
Article 11 - Mesures relatives aux terrains et immeubles à usage commercial et industriel
Il existe une législation cantonale importante relative aux terrains et zones industrielles et internationales. Par ailleurs, des fondations spécifiques apportent une contribution dans la mise à disposition de tels terrains. Cet effort doit faire partie intégrante, comme par le passé d'ailleurs, de la promotion économique.
Article 12 - Aides fédérales
Cette disposition vise à affirmer le principe de la coordination entre les aides fédérales et les aides cantonales en matière de promotion économique, même si dans l'immédiat le canton ne devait pas remplir les conditions mises à l'octroi des aides fédérales. Cette coordination est également nécessaire dans le domaine des aides en matière de recherche et de développement.
Chapitre IV - Fonds de promotion de l'économie
Article 13 - Constitution du fonds
Un fonds de promotion de l'économie genevoise doit être créé (alinéa 1). Il est alimenté par une subvention d'un minimum de 10 millions de francs par année, par les intérêts de ses capitaux, par les sommes remboursées en vertu des dispositions fédérales et cantonales applicables en la matière ainsi que par des dons (alinéa 2). L'idée essentielle est de créer une base financière stable pour l'octroi des aides à la promotion économique.
Il est également précisé que la subvention annuelle ne doit pas se voir imputer d'autres subventions déjà versées actuellement pour la promotion économique et le tourisme. Le projet consacre donc le principe du cumul entre les aides actuellement existantes et de la subvention annuelle nouvelle (de 10 millions de francs) versée au fonds (alinéa 3).
Chapitre V - Organisation administrative et développement économique
Remarques générales
Le projet de loi est innovateur dans deux domaines. Il définit les buts de la promotion économique et les aides pouvant être apportées par l'Etat selon les modalités exposées plus haut. Ensuite, il met sur pied des structures renforcées visant à permettre un développement véritablement efficace de cette promotion sur le long terme, à l'instar de ce qui s'est fait dans d'autres cantons, notamment Neuchâtel. C'est à ce titre que le projet de loi prévoit la création d'un office de la promotion économique, d'une commission du développement économique et d'une obligation d'informer régulière.
Article 14 - Office de la promotion économique
Cet office, dépendant du département de l'économie publique, se voit confier l'exécution des tâches prévues par la loi (alinéa 1). En particulier, l'office doit mettre sur pied une antenne servant d'intermédiaire entre les entreprises et l'administration (alinéa 2). Cette antenne facilitera l'accès au marché du travail, aux établissements bancaires ainsi qu'aux technologies existantes. Cet office servira de lieu de collaboration et d'échanges d'expérience de toutes sortes. Il apportera, enfin, son appui dans la recherche de terrains et d'immeubles.
C'est ainsi que l'office devra également coordonner des services et organismes exerçant des tâches dans la promotion économique (alinéa 2).
Article 15 - Office de la promotion économique et licenciements collectifs
L'office de la promotion économique est l'autorité compétente en vertu de l'article 24 et suivants de la loi sur le service de l'emploi et de la location de services (J 4 1). En vertu du droit fédéral, le canton doit créer une instance officielle chargée de recevoir les préavis en cas de licenciements collectifs pour cause économique et de conduire la procédure prévue par la loi (articles 335a à 335g CO). Il est logique de rattacher cette activité à la promotion économique, car, de cette sorte, il sera possible d'agir immédiatement dès que des restructurations entraînant des suppressions d'emplois sont annoncées.
Article 16 - Délégués-e-s à la promotion économique
L'expérience du canton de Neuchâtel montre que l'institution d'un délégué à la promotion économique extérieure (exogène) a joué un rôle important dans les succès rencontrés dans l'implantation d'entreprises nouvelles venues d'ailleurs. A ce titre, il y a lieu de préciser que le même canton de Neuchâtel a également instauré plus récemment la charge de délégué à la promotion intérieure (endogène) afin de favoriser les efforts de promotion économique issus du canton, sans un apport externe.
Ces deux délégués-e-s seront placés-e-s sous la responsabilité d'un directeur-trice. Toutefois ils/elles seront appelé-e-s à travailler en étroite collaboration sur la base de mandats. Les expériences concluantes faites par le canton de Neuchâtel soulignent les avantages d'une activité fondée sur des mandats précis. Une telle exigence permet la mesure régulière des résultats, tels que la création d'emplois et les autres retombées économiques et fiscales.
Article 17 - Commission du développement économique
La création du fonds et la promotion économique doivent être accompagnées d'un organisme consultatif, la commission du développement économique. Celle-ci a notamment pour tâches de se prononcer sur l'organisation des services de l'Etat dans ce domaine, de formuler des préavis sur les questions liées à la promotion, de saisir le Conseil d'Etat de propositions dans ce domaine et de conseiller le gouvernement de manière générale sur la stratégie économique prospective et préventive (alinéa 1).
Afin de permettre la réalisation de ces tâches, la commission est composée de 4 représentants du département de l'économie publique, de 4 représentants compétents issus de l'université, des organisations internationales et de la Banque cantonale genevoise, ainsi que de 4 représentants chacun pour l'UAPG (Union des associations patronales genevoises) et la CGAS (Communauté genevoise d'action syndicale) (alinéa 2).
La commission est présidée par le chef du département de l'économie publique et se réunit au moins 10 fois par an (alinéa 3). Ce rythme de réunions témoigne de l'importance et du dynamisme nécessaire de cette structure. La commission a également la faculté de confier des mandats d'étude à divers organismes tels que le conseil économique et social de l'université (alinéa 4).
Article 18 - Information
Afin de permettre une concertation large, le projet demande que le Conseil d'Etat fournisse un rapport détaillé au Grand Conseil et à la commission de développement économique, en début de chaque année. Ce rapport se prononce sur l'état des secteurs de l'économie genevoise, les résultats de la promotion économique en général et en particulier sur l'emploi, de même que les mesures envisagées pour la mise en oeuvre de la loi (alinéa 1).
Cette information doit permettre aux parlementaires et à la commission un débat général régulier.
Par ailleurs, le projet de loi demande qu'une évaluation générale de la politique de promotion économique soit effectuée une fois par législature par l'université (alinéa 2). Le rapport d'évaluation permet de tirer les bilans précis et de corriger le tir. A ce titre, l'évaluation doit porter sur le retour fiscal, l'emploi et le niveau des salaires, le revenu cantonal et divers autres aspects qualitatifs.
Seul un effort conçu sur le moyen et le long terme est en mesure d'apporter des résultats en matière de promotion économique. D'où l'importance de prévoir d'ores et déjà une évaluation et une information régulières. Afin de favoriser celles-ci, le canton prend des mesures nécessaires pour assurer les bases statistiques à l'évaluation de la promotion économique (alinéa 4).
Article 19 - Procédure
Cette disposition indique la procédure à suivre pour les demandes d'aides et d'allégements fiscaux qui sont adressées à l'office de la promotion économique. La loi précise également qu'elle ne confère aucun droit à l'obtention d'une aide ou d'un allégement. En d'autres termes, les subventions accordées par l'Etat sont de nature discrétionnaire: il n'y a pas de droit subjectif à leur obtention (alinéa 2).
Chapitre VI - Obligation de renseigner et remboursement
Ce chapitre concerne diverses dispositions sur l'obligation de renseigner et le devoir de secret (article 21), sur les infractions à cette obligation de renseigner et en cas de renseignements fallacieux (article 22) et sur le remboursement des aides financières si les circonstances le justifient et le permettent (article 23). Il est précisé, à cet égard, que l'Etat peut exiger le remboursement, il n'est donc pas tenu de le faire.
Enfin, le Conseil d'Etat est chargé d'éditer un règlement d'exécution et de mettre la loi en vigueur (chapitre VII).
Conclusion
Le canton de Genève traverse une des crises économiques et de l'emploi les plus graves de son histoire contemporaine. Si, par l'exportation du chômage et la tertiarisation de son économie, il a mieux traversé que d'autres cantons et que la plupart des pays de l'OCDE les crises issues des deux premiers chocs pétroliers de 1973 et 1982, il est depuis le second semestre 1990 confronté à une situation extrêmement difficile. Terminées les périodes de plein-emploi, de folle croissance, de surchauffe et de spéculation. Les lendemains d'ivresse déchantent, les conséquences de ces excès s'ajoutent aujourd'hui au ralentissement conjoncturel international, au progrès technologique, aux concentrations des grands groupes aux niveaux local, national et international.
Le canton de Genève a traversé ces périodes successives sans véritablement gérer les mutations, en les subissant. Ainsi, en 20 ans, le canton est entré dans le tout tertiaire, sacrifiant par là même son secteur industriel et, plus grave, l'équilibre de ses activités. Explosion d'emplois volatiles, succursales sans compétence de décision, marchés protégés par des cartels et absence de gestion des mutations marquent les années 80. La juxtaposition des aspects conjoncturels et structurels de la crise décuple ses effets; depuis le second semestre 1990, 33 000 emplois ont été perdus, sans compter les secteurs international et de l'agriculture. Dans la seule année 1995 et dans le seul secteur de l'industrie, près de 400 places de travail ont disparu. Genève vit la crise économique et de l'emploi actuelle la plus grave des cantons de la Confédération.
Certes, à l'heure de la globalisation économique, la Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS) n'a pas la prétention d'imaginer que les mesures inscrites dans son initiative 105, déposée après trois semaines et avec plus de 11 000 signatures, invalidée depuis lors par le Grand Conseil, permet de supprimer le chômage à Genève. La Suisse et Genève n'échappent pas aux limites de l'action que les collectivités publiques rencontrent partout pour soutenir l'activité économique et l'emploi. Raison de plus pour ne négliger aucun paramètre des actions possibles, alors qu'aucun canton ne maîtrise ni les taux d'intérêts ni la politique monétaire, leviers privilégiés de la politique économique.
A travers son initiative, la CGAS préconise le développement d'une politique économique cantonale et la lutte contre le chômage à travers une démarche volontaire. Elle propose ainsi d'agir de façon cohérente dans les domaines de la politique et de la promotion économique, de la fiscalité, de la formation, de la réduction du temps de travail et du traitement social du chômage.
Le présent projet de loi s'intitulant «en faveur du développement de l'économie et de l'emploi» vise à concrétiser la première partie de son initiative, la politique et la promotion économiques. Ce projet de loi ne réinvente nullement la roue à une époque où la promotion est devenue l'outil indispensable à toute politique de développement économique visant à créer des emplois. Le «modèle» en Suisse, c'est le canton de Neuchâtel qui, heurté de plein fouet déjà par le premier choc pétrolier, a dû et doit encore fournir de sérieux efforts pour diversifier son économie, attirer sur ses terres des entreprises étrangères et contribuer à des restructurations et créations locales. C'est indiscutablement un remarquable savoir-faire, accumulé depuis plus de 10 ans, et des résultats spectaculaires qui ont mené la CGAS à chercher l'essentiel de son inspiration en la matière du côté de Neuchâtel.
La situation genevoise revêt cependant ses caractéristiques propres. Particulièrement en ce qui concerne le tissu de ses entreprises marqué par un secteur tertiaire toujours hégémonique, bien que fortement ébranlé.
Le but de ce projet de loi ne vise pas à nier les efforts qui sont faits depuis 2 ans, selon le département de l'économie publique, pour attirer de nouvelles sociétés à Genève. Ce projet de loi en faveur du développement de l'économie et de l'emploi a l'ambition de faire passer Genève des efforts éclatés - tournés pratiquement exclusivement vers l'étranger - au rang de véritable politique au service d'un développement durable. Il repose sur une systématique, sur l'élargissement des efforts aux entreprises locales, et enfin sur une véritable transparence, synonyme d'évaluation et de débat démocratique. Il convient à cet égard de dépasser l'effet d'annonce, le «coup» sans lendemain, la table des matières ou autres déclarations d'intentions, et de permettre au parlement et aux partenaires sociaux d'évaluer les retombées précises de cette politique.
Le présent projet définit les buts poursuivis: la compétitivité de notre économie, la création d'emplois par des entreprises de Genève ou cherchant à s'y installer, l'amélioration des infrastructures et des conditions-cadres qui doivent le permettre, la coordination des différentes mesures au niveau cantonal et régional. L'objectif, c'est surtout la création de nouveaux marchés, aussi le maillage et l'essaimage d'entreprises. Les cibles, en termes d'implantation d'entreprises, ce sont celles dont l'activité développe une forte valeur ajoutée, les PME, les organisations internationales, celles qui épousent des formes juridiques originales et qui associent les travailleurs et les travailleuses à sa gestion. Etant donné le fait que le canton de Genève n'est pas inclus dans l'arrêté Bonny, malgré les démarches en cours, il ne peut guère que compter sur des mesures d'incitations cantonales et leur coordination avec les aides fédérales.
Les moyens à disposition sont, outre les allégements fiscaux et les mesures relatives aux terrains et aux immeubles à usage commercial et industriel, les mesures de cautionnement, de prise en charge d'intérêts, de recyclage et enfin de facilitations administratives.
Pour passer du stade actuel à celui d'une véritable politique, la CGAS souhaite évidemment fixer des règles évitant une course synonyme de dumping salarial, fiscal et foncier. En outre, elle compte principalement sur la création d'un fonds alimenté par 10 millions de francs par année au minimum, sur la création d'un véritable office, sur une évaluation suivi du parlement et des partenaires sociaux à travers une commission tripartite à instituer. Une fois par législature, l'évaluation devrait être confiée à l'université de Genève pour engendrer un débat d'envergure devant le parlement.
Mesdames et Messieurs les députés, Genève n'est ni Neuchâtel, ni le nombril de la Confédération. Une véritable politique systématique de développement est indispensable et urgente, elle doit s'inspirer des méthodes qui ont démontré leur efficacité. C'est pourquoi nous vous recommandons de réserver un bon accueil à ce projet de loi.
Préconsultation
Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Tant la démarche suivie que le contenu du projet de loi témoignent de l'action volontariste de la Communauté genevoise d'action syndicale.
La CGAS a surpris plus d'un ou d'une d'entre nous en proposant directement le dépôt de ce projet de loi. Les membres de ce parlement ont pu se sentir mis sous pression ou quelque peu molestés. De temps en temps, cela ne nous fait pas de mal !
Depuis quand une organisation, quelle qu'elle soit, dépose directement un projet d'acte législatif, utilisant, en quelque sorte, les membres du parlement comme porte-parole ?
Les raisons d'une telle démarche, vous l'aurez compris, sont claires. L'invalidation, en septembre dernier, de l'initiative 105, dans des circonstances sur lesquelles je ne reviendrai pas, a causé un choc important dans les rangs des milieux syndicaux, car les propositions de l'initiative méritaient de déboucher sur des mesures constructives pour l'avenir de l'emploi à Genève.
Forte de ses cinquante mille membres, la CGAS ne pouvait pas baisser les bras après l'invalidation de son initiative, ni attendre que le Tribunal fédéral rende son arrêt suite au recours déposé.
Les membres de la CGAS subissent de plein fouet la crise économique et ses conséquences sur le plan du chômage. Nous rencontrons, tous les jours, des personnes, travailleuses et travailleurs aujourd'hui et peut-être chômeuses et chômeurs demain.
Nous devons quotidiennement, lors de négociations, tenir compte des difficultés que rencontrent les entreprises quand nous formulons nos cahiers de revendications. Nous estimons que l'ensemble des travailleuses et travailleurs de ce canton ont déjà suffisamment «écopé le bateau».
A l'Etat, et j'en arrive au projet de loi, de prendre le gouvernail pour cette traversée qui s'annonce difficile ! L'Etat a une mission d'encouragement à l'emploi durable et socialement utile. Personne, ici, ne contestera son rôle dans le développement de conditions-cadres attractives, en relation avec le reste de la Romandie et des régions frontalières. Les mesures d'incitation à l'emploi, prises par l'Etat, doivent correspondre à des objectifs précis, tels que le maintien et le développement des activités, l'implantation d'entreprises nouvelles, la recherche de nouveaux marchés, l'essaimage et le maillage d'entreprises.
Les entreprises concernées par ces objectifs appartiennent aux secteurs clairement déterminés, il y a quelques années, par ce parlement. Les aides au financement, proposées par ce projet de loi, sont conditionnées par le maintien ou la création d'emplois. Elles doivent permettre de régénérer le tissu économique et social de la région, mais n'ont pas pour but l'acharnement thérapeutique. Elles portent sur le cautionnement de crédits bancaires pour garantir les crédits d'investissement nécessaires au démarrage d'activités nouvelles, et de la prise en charge partielle des intérêts dus à la banque.
Ces aides relèvent également des mesures nécessaires pour aborder les cas difficiles de rationalisation, dans une perspective de recyclage du personnel.
Afin d'atteindre les différents buts poursuivis, un fonds de promotion de l'économie genevoise doit être créé. Son alimentation, telle que prévue dans le projet de loi, serait assurée par une subvention annuelle minimale de 10 millions de francs, par les intérêts qu'elle porterait et ceux des sommes remboursées, ainsi que par des dons. Avis aux amateurs !
L'organisation actuelle de l'office de la promotion économique mériterait, à nos yeux, quelques améliorations. Nous souhaiterions que cet office serve d'intermédiaire entre les entreprises et l'administration. Il appartient, en effet, à l'Etat de coordonner les différentes activités de promotion économique. Il devrait aussi accorder à l'office la tâche de gérer les cas de licenciements collectifs. En effet, l'office de la promotion économique pourrait intervenir plus rapidement qu'il ne le fait actuellement sur le marché de l'emploi, lors de l'annonce de grandes restructurations.
La promotion économique doit viser tant le marché intérieur que le marché extérieur. Nous inspirant du modèle neuchâtelois, nous soutenons l'idée que si des démarches favorisant l'implantation de nouvelles entreprises à Genève sont indispensables, l'effort doit être aussi soutenu sur le marché intérieur.
Enfin, il nous semble indispensable qu'un organisme consultatif, composé de représentants du département de l'économie publique, de l'université, de la Banque cantonale, des organisations internationales, de l'Union des associations patronales genevoises et de la CGAS, participe à la création du fonds pour la promotion économique. Il ne s'agit pas de créer une structure dans un but de «réunionite» mais bien de se doter d'un outil apportant conseils et préavis sur l'organisation des services de l'Etat et d'élaborer une stratégie économique prospective et préventive.
Ces raisons nous amènent à vous recommander le renvoi de ce projet de loi en commission.
M. Armand Lombard (L). Mieux vaudrait garder le silence à propos de ce projet de loi, mais j'ai quand même une ou deux choses à préciser à cette estimable assemblée.
Ce projet parle de véritable politique économique et de programme cohérent. A lire l'exposé des motifs, il est équilibré, très bien rédigé, présentant un inventaire impressionnant de toutes les mesures possibles et imaginables pour le développement de l'emploi dans notre République.
Toutefois, on se rend rapidement compte que la construction manque de méthode parce que l'économie - d'ailleurs, Mme Blanc-Kühn vient de le dire indirectement - ne se crée pas par l'Etat seulement, mais par un vrai partenariat entre lui, les entreprises, les créateurs et la recherche universitaire. On ne peut pas continuer à proposer des solutions relevant d'un seul secteur, parce que c'est avec les quatre précités que l'économie se construit le mieux.
Deuxièmement, la «maison» proposée par les syndicats manque de style ou plutôt est marquée du style de la gauche genevoise qui ne suffit plus pour sortir du marasme actuel. Il est lourd, sûr, mais gris. Il y a de vieux bouquins sur les rayons, des plans basés, comme au bon vieux temps, sur un patrimoine acquis à protéger. Devant la «maison» s'étend une vague plate-bande avec une rose rouge fanée.
Tous les vieux clichés figurent dans le projet de loi. On en revient à la BCG, les volets du rez-de-chaussée, tous fermés; à un office de promotion économique qui pourrait être la cheminée avec de la fumée noire ou pas de fumée du tout, parce qu'à force d'en parler on ne sait même plus ce que c'est. On cite une commission du développement économique, alors que le conseil économique et social fonctionne. Il y a les mesures fiscales, sans doute les tuiles qui ne tiennent pas et tombent à terre; le fameux fonds de promotion économique, certainement la citerne, sans eau. J'avais encore placé dans mon excellent texte quelques vaches qui, ayant brouté les roses rouges de la plate-bande, regardent amorphes, l'oeil glauque, passives et ruminantes.
Après avoir déchanté à propos de la méthode et du style, on constate que le message de la Communauté genevoise d'action syndicale est signé par divers et multiples députés. Au lieu de se réjouir de ce regroupement de forces, on déchante davantage.
Ce regroupement présenté positivement par Mme Blanc-Kühn - ce qui est bien, car je vais m'empresser de le présenter négativement pour que vous tiriez vos conclusions - est une sorte de rachat du rejet de l'initiative 105. Ce n'est pas mal fait du tout jusqu'à ce que l'on en vienne à l'éthique et au fonctionnement de l'Etat ! On aurait pu éviter d'écrire, dans l'exposé des motifs, «nous, CGAS, pensons que...» et donner cela à signer à des députés. Et ceux-ci auraient dû prendre le temps de rectifier, en disant que c'était eux et pas la CGAS qui faisaient la loi.
D'autre part, des députés, n'ayant jamais rien entrepris dans le domaine économique, parce que ne le connaissant ou ne s'y intéressant pas, se sont offert une relance, histoire de se faire plaisir, sans trop comprendre ce qu'ils faisaient.
L'innovation, dans le domaine économique, est absolument nécessaire. Et pour qu'elle réussisse, elle ne doit pas être déléguée. Il appartient à chacun, à un proche, à un jeune, à un vieux, de faire valoir son projet. L'innovation relève de l'individu.
Il est indubitable que l'objectif de réduire le chômage de moitié en l'an 2000 est l'affaire de tous, chacun devant y travailler. Par conséquent, un tel projet n'a pas à être renvoyé au Grand Conseil, à l'économie ou à la société civile. C'est à chacun d'agir pour obtenir une diminution raisonnable du chômage.
Enfin, je ne comprends pas pourquoi des députés ont signé un tel projet de loi. En effet, il existe déjà de nombreux textes étudiés en commission de l'économie, la motion 1006, le contreprojet de la commission de l'économie à l'initiative 104 bis, le projet de loi 7074 de l'Alliance de gauche. En fait, le nouveau projet de loi ne répète, en d'autres termes, que ce qui est déjà proposé.
«Bof ! on tape sur le clou, ça ne mange pas de foin, on se met les syndicats à la bonne...»
Le président. Concluez, Monsieur Lombard, vous avez épuisé votre temps de parole !
M. Armand Lombard. A la bonne heure, disais-je...
Le président. A notre bonne heure...
M. Armand Lombard. A votre bonheur, si vous vous ennuyez, Monsieur le président !
Le président. Non, non...
M. Armand Lombard. A mon bonheur, en tout cas ! Nous renverrons, bien entendu, ce projet de loi en commission. Nous sommes prêts à en discuter, mais, à l'évidence, nous ne pourrons rien dire de plus. J'espère simplement que l'innovation inspirera les travaux de la commission.
M. Roger Beer (R). Après avoir écouté la prose fleurie, un peu fanée, de M. Lombard - prose qu'il avait déjà faite lors de la motion 1021 qui reprenait une partie des propositions de l'initiative 105 - je me dis que le PDC et les radicaux ont bien fait de signer ce projet de la Communauté genevoise de l'action syndicale. Je précise que l'égérie de cette formation, qui porte le même nom que moi, n'a absolument rien à voir avec moi. Nous n'appartenons pas à la même famille.
Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur Lombard en particulier, il est bon de rappeler les actions pour lesquelles nous nous engageons. Même si vous êtes, Monsieur Lombard, le champion de la création d'emplois et que d'autres, à votre avis, sont moins performants, il est bon de rappeler que s'il n'est pas possible à chacun de créer des postes de travail, nous sommes néanmoins tous sensibles à la question. Aussi donnons-nous un message au Conseil d'Etat pour qu'il accélère l'étude de cette proposition de relance.
Ce projet n'apporte peut-être rien de nouveau, et nous en sommes conscients. Je ne suis pas membre de la commission de l'économie, mais il m'est arrivé d'y remplacer quelqu'un et d'écouter ce qui s'y disait. Par conséquent, je pense que ce projet permettra, effectivement, d'activer les études et d'en concrétiser les objets.
C'est pour cela qu'avec nos cousins du PDC - à ce stade, je dois avouer ne pas comprendre pourquoi vous n'avez pas signé - nous avons estimé que le message était bon, qu'il ne contenait aucune attaque et ne reflétait aucun esprit partisan, mais que s'agissant d'une question déjà longuement discutée, il rappelait que nous tous avons des solutions que nous avons peine à concrétiser.
Ayant signé ce projet qui, effectivement, n'émane pas directement de ses rangs mais rejoint certaines de ses idées - vous l'avez dit, Monsieur Lombard ! - le parti radical espère que le travail en commission s'en trouvera accéléré et qu'il en sortira des propositions concrètes, certainement édulcorées, pour retrouver des emplois et participer à la relance que nous souhaitons tous.
Par conséquent, je vous remercie de renvoyer ce projet en commission.
M. David Hiler (Ve). J'aimerais attirer votre attention, et particulièrement celle de la CGAS, sur quelques points.
Les Verts ont signé ce texte, parce que son contenu fait référence à une promotion économique éprouvée dans le canton de Neuchâtel, lorsque celui-ci endura une crise d'une autre ampleur, à vrai dire, que celle dont Genève souffre aujourd'hui. Cette politique a porté des fruits.
Nous aimerions dire que quels que soient nos efforts dans ce domaine particulier, l'Etat ne commande par l'économie. C'est une vérité que nous connaissons aussi bien que vous, Monsieur Lombard ! Que l'Etat produise un certain nombre d'efforts et offre des facilités, cela nous intéresse, à condition de ne pas répéter les erreurs commises dans certaines régions européennes, à savoir s'acharner sur des secteurs qui ne pouvaient plus, à un moment donné, obtenir le succès qu'ils avaient remporté dans le passé.
Au contraire, il faut essayer de développer quelque chose de nouveau. C'est ce qui a marché à Neuchâtel et nous devons faire de même dans notre région, beaucoup moins industrialisée que celle de Neuchâtel, avec les moyens proposés par un texte qui, pour le reste, est relativement clair et complet. Et c'est l'application de ce texte, en dernière analyse, qui en décidera.
Je n'aimerais pas faire accroire que ce texte, en dépit du dynamisme des milieux économiques promis par M. Lombard, puisse, au vu de la situation mondiale, résoudre le problème.
C'est avec plaisir que notre groupe accepte de servir, aujourd'hui, de porte-parole à la CGAS, parce que partageant ses options. En revanche, je profite de l'occasion qui m'est donnée pour lui dire que son engagement en faveur du partage du travail est des plus légers et des plus faibles. Elle aurait dû se rendre compte que si l'on veut véritablement éviter l'exclusion dans la conjoncture actuelle, il faut d'urgence parler du partage du travail dans les entreprises, parce qu'avec le taux de chômage actuel à Genève une répartition relativement faible permettrait de résoudre, en grande partie, le problème du chômage en tant que tel et pas celui de la relance.
Pour continuer à cheminer ensemble, nous aimerions que le syndicat cesse de ricaner quand il est question de partage du travail et prenne cette donnée en considération, sinon il sera ce qui lui a souvent été reproché d'être, à savoir le défenseur exclusif de ceux qui ont conservé leur place.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.