République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 mars 1996 à 17h
53e législature - 3e année - 5e session - 9e séance
IU 167
M. Bernard Lescaze (R). Mon interpellation s'adresse, en principe, au président du Conseil d'Etat, puisqu'il a signé, au nom de l'Etat de Genève, la lettre répondant à la procédure fédérale de consultation concernant l'avant-projet de la loi fédérale sur l'archivage.
Je précise que ce projet de loi, qui doit remplacer le règlement fédéral de 1966, tient compte de la protection des données et vise à une harmonisation pleine et entière avec la réglementation des Etats européens et des Etats-Unis, c'est-à-dire de tous les pays occidentaux avancés. Il prévoit le libre accès, après un délai de protection de trente ans, à tous les documents, à l'exception des données personnelles qui, elles, seraient accessibles au bout de cinquante ans. Il veut, en effet, empêcher un droit à l'oubli, comme on a pu le constater dans certaines affaires zurichoises où des enfants se sont efforcés de cacher le passé pro-nazi de leurs parents.
La réponse genevoise - et là j'entends faire le plaisir à M. Segond de croire qu'il n'a pas lu ce qu'il signait - est absolument incroyable ! Elle est tout simplement réactionnaire, anticonfédérale et antieuropéenne ! Pour autant qu'elle émane du chef du département de l'intérieur, sa teneur est contraire à tout ce qu'il proclame quant à la transparence, à la régionalisation, à l'Europe, etc. Elle prévoit, en effet, que le délai de protection devrait être porté à cinquante ans au minimum, et - ce n'est pas un gag - à cent cinquante ans pour les données personnelles !
Je regrette que notre canton, qui se veut à l'avant-garde, ait pu donner une telle réponse. Cela m'interpelle sur la manière dont la procédure de consultation fédérale est faite à Genève, parce que je sais bien que ce n'est ni M. Segond ni M. Haegi qui ont rédigé cette réponse, mais il n'est pas normal qu'une seule personne, à Genève, puisse engager le canton de cette manière. J'ai vérifié : la Commission consultative des archives, nommée par le Conseil d'Etat, n'a pas été consultée. Mon collègue, M. David Hiler, historien de profession et député de l'opposition parlementaire, ne l'a pas été davantage, alors que le gouvernement, en général, apprécie l'avis de l'opposition. Quant à moi, j'ai été tenu dans l'ignorance, sinon je n'interpellerais pas !
L'Etat de Genève ne pouvant persister dans cette attitude ridicule, je demande ce qu'il entend faire pour rectifier le tir, étant entendu que d'autres associations professionnelles à Genève le feront en s'efforçant, malgré tout, d'épargner le Conseil d'Etat.
Le Le président. Le gag - pour reprendre votre définition, Monsieur le député - est de considérer de façon «urgente» votre interpellation. Néanmoins, le président du Conseil d'Etat vous répondra au point 22 ter de notre ordre du jour.