République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7295
14. Projet de loi du Conseil d'Etat relatif au préavis du canton de Genève sur la consultation fédérale concernant la création d'un dépôt de déchets radioactifs de faible à moyenne activité et à courte durée de vie, sur le site de Wellenberg, commune de Wolfenschiessen, canton de Nidwald. ( )PL7295

LE GRAND CONSEIL

vu l'article 160C, alinéa 5, de la constitution genevoise, du 24 mai 1847;

vu l'article 6 de l'arrêté fédéral concernant la loi sur l'énergie atomique, du 6 octobre 1978;

vu le vote négatif du demi-canton de Nidwald, du 25 juin 1995;

Décrète ce qui suit:

Article unique

Le canton de Genève préavise négativement le projet de création d'un dépôt de déchets radioactifs de faible à moyenne activité et à courte durée de vie, sur le site de Wellenberg, commune de Wolfenschiessen, canton de Nidwald.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 30 juin 1994, le département fédéral des transports, des communications et de l'énergie a consulté les cantons au sujet de la demande d'octroi d'une autorisation générale présentée à la Confédération par la «Genossenschaft für die nukleare Entsorgung Wellenberg - GNW» (Coopérative pour l'élimination des déchets nucléaires de Wellenberg), aux fins de construire un dépôt final pour déchets de faible et moyenne activité,et à courte durée de vie, sur le site de Wellenberg, commune de Wolfenschiessen, dans le canton de Nidwald.

Selon l'article 1 de l'arrêté fédéral concernant la loi sur l'énergie atomique, du 6 octobre 1978, celui qui entend construire une installation atomique doit avoir obtenu une autorisation générale du Conseil fédéral; l'octroi de cette autorisation est soumis à l'approbation de l'Assemblée fédérale.

L'article 6 de cet arrêté fédéral prévoit que, dans ces cas, les cantons sont consultés.

L'article 160C, alinéa 5, de la constitution genevoise stipule que les autorités cantonales doivent s'opposer par tous les moyens juridiques et politiques à leur disposition à l'installation de centrales nucléaires, de dépôts de déchets hautement et moyennement radioactifs et d'usines de retraitement sur le territoire du canton et au voisinage de celui-ci. Pour les installations ne répondant pas à ces conditions de localisation, le préavis du canton est donné par le Grand Conseil sous forme de loi.

Le dépôt doit être construit à Nidwald, sur le site de Wellenberg, lequel, compte tenu des risques qu'il représente, ne peut pas être considéré comme étant dans le voisinage du canton de Genève. En conséquence, il appartient au Grand Conseil de donner le préavis du canton sous forme de loi.

En date du 25 juin 1995, le demi-canton de Nidwald a refusé l'installation du dépôt en question sur son territoire, à raison d'environ 52% de non contre 48% de oui, alors que les habitants de la commune de Wolfenschiessen, principale intéressée, l'ont acceptée.

En dépit de ce vote négatif, la Confédération a décidé de poursuivre la procédure, raison pour laquelle notre canton doit se prononcer.

Dans un unique souci de respecter la volonté populaire de Nidwald, le canton de Genève se déclare défavorable au projet de création de ce dépôt de déchets radioactifs de faible à moyenne activité et à courte durée de vie, sur le site de Wellenberg, commune de Wolfenschiessen, canton de Nidwald.

Il sied de rappeler que le canton de Genève avait adopté une position similaire, en 1992, dans le cadre des dossiers concernant les centrales nucléaires de Mühleberg et de Beznau, en insistant auprès de l'autorité fédérale sur la nécessité de respecter la volonté des citoyens d'un canton. Vu les dispositions de notre constitution, il serait fort mal venu d'accepter que ce type d'ouvrage puisse être réalisé dans un autre canton, alors même que la majorité de la population de celui-ci s'y est formellement opposée.

Par ailleurs, le canton de Genève adhère au principe selon lequel les déchets radioactifs produits dans notre pays doivent être déposés en Suisse, de façon sûre et durable. Si tous les cantons qui disposent des sites les plus appropriés pour ces entreposages devaient à l'avenir s'opposer à leur création, la Suisse serait placée devant un grave problème. En effet, pour répondre aux besoins énergétiques de notre pays, nous devons actuellement recourir à la production nucléaire.

Cette réalité ne peut être ignorée, et les efforts entrepris par notre canton en faveur des énergies renouvelables et des diminutions de la consommation ne modifieront pas les choses dans le court et le moyen terme. Une nouvelle réflexion doit être engagée en tenant compte des besoins de confort et des espoirs de prospérité des habitants, ainsi que de leur volonté de protéger durablement notre environnement.

C'est avec ces réserves, Mesdames et Messieurs les députés, que le Conseil d'Etat vous suggère d'accueillir favorablement le présent projet de loi.

Préconsultation

M. Pierre Vanek (AdG). Je salue l'élaboration de ce projet de loi, même si elle est tardive. Je rappelle que j'avais interpellé le Conseil d'Etat, le 22 juin, à ce sujet. M. Haegi m'avait répondu qu'il n'y avait nul besoin d'un projet de loi ! On s'aperçoit qu'il était, en fait, nécessaire d'en rédiger un, comme je l'avais affirmé alors.

Quant à sa teneur essentielle consistant à demander que le canton de Genève préavise négativement le projet de création d'un dépôt de déchets radioactifs au Wellenberg, il est évident que j'y souscris. C'était d'ailleurs la seule possibilité pour un canton qui se veut antinucléaire; toute autre prise de position aurait été parfaitement contraire à l'avis des citoyens que nous sommes censés représenter.

Néanmoins, j'aimerais dire que l'exposé des motifs de ce projet de loi ne me satisfait guère, car il me semble y manquer un certain nombre d'éléments. D'abord on y indique que c'est dans l'unique souci de respecter la volonté populaire à Nidwald que nous nous déclarons défavorables à ce projet de création d'un dépôt de déchets radioactifs. Or je pense que, quand on se prononce dans le cadre d'une consultation fédérale, s'il est nécessaire d'avoir un point de vue démocratique et de se préoccuper de l'avis des personnes, il faut également avoir une position sur le fond.

Sur le fond, cet l'exposé des motifs comporte des lacunes considérables, et je crois que deux choses devraient être dites au minimum. La première c'est que pour n'être pas constamment dans cette impasse, qui consiste à ne pas pouvoir déposer ses déchets radioactifs - je crois exprimer le point de vue des citoyens de ce canton, qui l'ont confirmé par leurs votes, à plusieurs reprises, y compris en consultation fédérale - nous devons, à l'échelle de la Suisse, entreprendre une sortie du nucléaire, pour ne pas continuer à produire de ces déchets dont on ne sait que faire, puisqu'on ne peut les déposer ni à Nidwald, ni à Ollon, ou ailleurs.

Le second point que j'aimerais évoquer dans cette problématique des déchets - j'y avais rendu le Conseil d'Etat attentif à l'époque - c'est qu'on devrait aussi cesser d'exporter nos déchets radioactifs pour retraitement à l'usine de la Hague ou à l'usine de Sellafield, déchets qui doivent nous revenir. Cette extraction produit du plutonium, qui va à Malville ou peut servir à la fabrication de bombes atomiques et nous devrions également prendre position sur le fond, sur ce point.

Cela n'est pas une position révolutionnaire, ni même une position antinucléaire. Les Suédois, en 1983 ou 1984, ont rompu leur contrat avec la Cogema pour le retraitement. Sous le président Carter, les Etats-Unis ont fait de même, tout en continuant l'exploitation de centrales nucléaires. C'est donc une position que nous pourrions prendre et qui ne sort pas du tout de l'objet de cette consultation, qui pose la problématique des déchets.

En ce qui concerne l'exposé des motifs il est dit, et c'est extrêmement surprenant, que : «...si tous les cantons qui disposent de sites plus appropriés pour ces entreposages devaient à l'avenir s'opposer à leur création, la Suisse serait placée devant un grave problème». Or, la Suisse est aujourd'hui placée devant un grave problème, car tous les sites posent problème. Le conditionnel n'est pas de mise !

Je rappelle aussi que les autorités fédérales avaient, en 1975, fixé un délai à 1985 pour le règlement de cette question, c'est-à-dire pour que l'on trouve un entreposage ou une autre solution "définitive". Projeter à nouveau cette question dans l'avenir et ne pas reconnaître qu'il y a un problème à résoudre aujourd'hui, est une grave lacune de cet exposé des motifs.

Enfin, cet exposé se termine par l'affirmation démobilisatrice que les efforts entrepris par notre canton, en faveur des énergies renouvelables et des diminutions de la consommation, ne modifieront pas les choses dans le court et le moyen terme. Elles ne modifieront certes pas les choses du jour au lendemain et du tout au tout, mais ces efforts doivent commencer à modifier les choses à court terme, peuvent les modifier de manière sensible à moyen terme et nous permettre de nous passer de l'énergie nucléaire à long terme.

Nous ne pouvons pas nous contenter, je crois, de l'article unique de ce projet de loi assorti de cet exposé des motifs. Nous devons le compléter avec les considérations minimales que je viens d'avoir l'honneur de vous exposer.

M. Chaïm Nissim (Ve). Comme mon préopinant, nous avons trouvé l'exposé des motifs, Monsieur Haegi, insuffisant. Vous dites ainsi que tant que le nucléaire existe, il produira des déchets, ce qui est un truisme ! Le texte tend presque à s'excuser de n'être pas favorable à la construction de ce dépôt de déchets, et cela, parce que la population de Nidwald y est opposée, considérant, par ailleurs, que nous devons gérer ces déchets.

La population genevoise, et mon groupe en particulier, voit le problème ainsi, Monsieur Haegi : le nucléaire n'est pas une fatalité, on peut en sortir ! Il y a trois ans la "Coordination-énergie" a produit une petite étude dans laquelle nous prévoyions qu'une partie des investissements que nous allions faire serait faite dans les économies d'énergie, une autre partie dans les centrales à gaz, ou des couplages chaleur-force. Avec un certain investissement, nous pourrions nous "sortir" du nucléaire en vingt ans.

M. Joye a apprécié notre idée et a lancé deux études scientifiques qui ont démontré que nos chiffres n'étaient pas tout à fait exacts; nous étions en effet optimistes. Il s'avère, selon les chiffres de ces deux études officielles, que les premiers kilowattheures économisés nous coûteraient environ huit centimes. Ce chiffre est à rapprocher des sept centimes que nous payons, actuellement, par kilowattheure pour le nucléaire français.

Les centrales au gaz pourraient nous fournir des kilowattheures moins chers, soit quatre ou cinq centimes; il y a désaccord entre les Services industriels et le groupe CERA qui a été mandaté pour l'une de ces deux études sur le prix du gaz. Ce qui est sûr c'est que les centrales au gaz rendraient le prix du kilowattheure moins élevé que celui du nucléaire français. En utilisant, pour partie, les centrales au gaz couplage chaleur-force et en procédant à des économies d'énergie, nous pourrions parvenir, en quelques années et avec des investissements raisonnables, à "sortir" du nucléaire.

Mais qu'allons-nous faire avec les déchets des centrales existantes ? Le retraitement n'est pas une fatalité, comme M. Pierre Vanek nous l'a dit. Le président Carter en a décidé ainsi, il y a douze ans, et, depuis, les Etats-Unis ne retraitent plus; il n'y a plus de centrale de retraitement aux Etats-Unis. Le stockage à long terme dans les cavernes style Wellenberg n'est pas donc pas incontournable !

Il me faut préciser, Monsieur Haegi, car je sais que vous allez le dire tout à l'heure, que les déchets du Wellenberg sont des déchets "à vie courte" et moyennement radioactifs. A cette fin, je vous ai apporté un document de la Cedra, que vous ne pouvez accuser de partialité, et qui démontre ce qu'est l'activité des déchets à vie courte. Le graphique comporte une échelle logarithmique pour représenter les années, ce qui est une manière de compresser le temps. Selon ces données, l'activité des déchets enterrés dans le Wellenberg serait de dix mille ans, et on nous affirme que cette durée est courte, par rapport à d'autres déchets radioactifs !

En ce qui concerne la toxicité du plutonium, un expert, dans l'un des débats que j'ai eus à Malville il y a vingt ans, nous disait que le plutonium n'était pas toxique, car il pouvait le manger ! Curieusement il avait raison : le plutonium est dangereux lorsqu'il est inhalé, car il peut alors provoquer un cancer. Toutes les études statistiques faites depuis quarante ans, à partir des morts d'Hiroshima et de Nagasaki, le démontrent. Il faut un milligramme à un microgramme de plutonium pour provoquer un cancer !

Mme Christine Sayegh (S). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, après mes brillants préopinants je serai quelque peu plus modeste, n'étant pas une spécialiste de l'énergie !

Toutefois les dispositions constitutionnelles de notre canton ont permis à celui-ci de se doter des moyens pour que la politique cantonale en matière d'énergie soit fondée sur la conservation d'énergie, le développement prioritaire des sources d'énergie renouvelées et le respect de l'environnement.

C'est donc dans cet esprit que l'article 160, alinéa 5, de notre constitution donne mandat aux autorités de s'opposer, par tous les moyens juridiques et politiques, à l'installation de centrales nucléaires et, notamment, de dépôt de déchets hautement et moyennement radioactifs.

C'est également dans cet esprit que les autorités cantonales doivent donner leur avis, dans le cadre des consultations prévues dans le droit fédéral, et, plus particulièrement, l'article 6 de l'arrêté fédéral du 6 octobre 1978.

Le projet de loi qui nous est proposé par le Conseil d'Etat est donc conforme au mandat de la constitution genevoise. Vu l'éloignement géographique, la motivation de ce projet de loi paraît quelque peu surprenante. Il propose, notamment, de respecter la volonté de la majorité des habitants du demi-canton de Nidwald, qui s'oppose à la construction de ce dépôt de déchets nucléaires, sur le site de Wellenberg, alors que les habitants de la commune ne s'y opposent pas !

On admettra, puisque l'objectif est conforme à notre politique de l'énergie, les conclusions de ce projet de loi, mais je trouve tout de même que l'exposé des motifs est quelque peu léger. J'aurais souhaité qu'il soit un peu mieux ciblé et ne pas paraître s'ingérer dans les affaires d'un autre canton.

M. Hervé Burdet (L). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral voudrait vous suggérer de renvoyer ce projet de loi à sa commission de l'environnement, et ceci pour deux raisons au moins.

Premièrement, le libellé qui vient d'être évoqué par Mme Sayegh de l'alinéa 5 de l'article 160C stipule que : «...les autorités cantonales s'opposent, par tous les moyens juridiques et politiques à leur disposition, à l'installation de centrale nucléaire, de dépôt de déchets hautement et moyennement radioactifs et d'usines de retraitement sur le territoire du canton ou au voisinage de celui-ci». La suite de cet article précise que : «...pour les installations qui ne répondent pas à ces conditions de localisation, le préavis du canton est donné par le Grand Conseil, sous forme de loi».

Nous sommes ici en face d'un paradoxe apparent, car il semble que plus nous nous éloignons du canton plus il faudra de projets de lois, Nidwald étant dans un voisinage suffisamment "proche" pour qu'il faille un projet de loi. J'aimerais que nous puissions en parler en commission.

Le plus grave est que si on nous dit que les autorités doivent s'opposer par tous les moyens juridiques et politiques à ce genre d'installation et qu'on nous dit, ensuite, que le Grand Conseil doit se prononcer sous forme de loi, il y a là une anomalie en terme de droit constitutionnel, car je ne pense pas qu'on puisse indiquer audit Grand Conseil comment il doit voter, c'est-à-dire qu'on ne peut pas lui demander de se prononcer, dans un sens ainsi prédéterminé par la constitution.

Nous risquons, une fois de plus, que, sur la colline de Montbenon, l'on veuille apprendre aux Genevois comment interpréter leur constitution. Il serait sans doute prudent d'en parler entre nous, à la commission de l'environnement.

La deuxième raison pour laquelle il y aurait, à mon avis, lieu de soumettre cette question à la commission de l'environnement est que tout le monde sait que le canton de Genève consomme beaucoup plus d'énergie qu'il n'en produit. Qui dit "consommation d'énergie" dit "production de déchets nucléaires", et nous savons que nous importons de l'énergie dont une partie est d'origine nucléaire.

Qui dit "déchets" dit "dépôt" et nous nous retrouvons à l'article 160C de la constitution qui stipule que nous devons nous opposer à la création de dépôt dans le canton, d'abord, et dans le voisinage, ensuite. Cela signifie-t-il que nous devions préconiser le dépôt de nos propres déchets à l'étranger ?

Le groupe libéral entend vous dire que nous devrions être des consommateurs responsables de nos consommations d'énergie, cette responsabilité s'étend à nos déchets et à leur gestion. Il n'est pas d'accord non plus que nous exportions nos déchets avec tous les problèmes qui en découlent. Il considère l'avant-dernier alinéa de l'exposé des motifs proposé par le Conseil d'Etat judicieux, lequel nous rappelle que cette réalité ne peut être ignorée et que les efforts entrepris par notre canton en faveur des énergies renouvelables et des diminutions de la consommation ne modifieront pas les choses, dans le court et le moyen terme.

Une nouvelle réflexion doit être engagée, en tenant compte des besoins de confort et des espoirs de prospérité des habitants, ainsi que de leur volonté de protéger durablement notre environnement. C'est pour entamer ce type de réflexion que nous vous suggérons, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement.

M. Roger Beer (R). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que tout a été dit; j'ai beaucoup apprécié ce qu'a dit M. Burdet. Personnellement, je trouve que nous aurions pu voter ce projet de loi en discussion immédiate et le renvoyer au Conseil d'Etat.

Malheureusement je ne m'explique pas le fait que, notamment l'Alliance de gauche, et certains spécialistes entendent aller en commission. Monsieur Burdet, j'ai un peu de peine à suivre votre raisonnement, car je ne suis pas persuadé qu'avec ce genre de projet de loi... (Interruption.) Evidemment le Conseil d'Etat doit s'asseoir sur l'avis du Grand Conseil pour donner son propre avis... (Rires.)

Une voix. On ne peut pas s'asseoir sur le Grand Conseil !

M. Roger Beer. En fait, étant donné que nous n'avons pas le choix, nous devons être d'accord, et cela m'ennuie un peu ! Nous avons parfois l'avantage de procéder à des auditions en commission. Nous discutons sans être formellement saisis par le Grand Conseil. Dans le cas présent, nous allons essayer de traiter cet objet comme un projet de loi et lancer une discussion sur le fondement de notre politique énergétique et une réflexion sur l'avenir.

Permettez-moi de vous dire, Monsieur le député, que je ne suis pas persuadé que ce soit le bon biais pour aborder cette question. Cependant, vu le consensus qui semble se dégager pour que le Grand Conseil s'occupe de cela à la commission de l'environnement, je l'accepte, mais du "bout des lèves".

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés. A la question de savoir où nous pouvons mettre ces déchets, M. Segond me suggérait, en aparté, le trou dont M. Nissim parlait hier soir, et autour duquel vous pourriez vous trouver à nouveau et dans la tenue qui vous a été décrite. Ce serait une solution ! (Rires.)

Une voix. Nous risquons d'être irradiés !

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, une précision en ce qui concerne l'interprétation de l'article 160C : le choix ne vous est pas dicté, mais la lecture de cet article nous a conduits à penser que Nidwald n'était pas dans le voisinage du canton de Genève. Car, si tel avait été le cas, nous n'aurions pas besoin de soumettre ce projet à votre Conseil et nous aurions l'obligation constitutionnelle de nous y opposer.

Cela signifie donc que le risque, tel que nous l'apprécions, ne touche pas notre canton. On a voulu lorsqu'on a prévu cet article constitutionnel qu'il soit rédigé ainsi, même si cela peut sembler un peu surprenant. Nous l'appliquons aujourd'hui tel qu'il est. C'est une interprétation du texte que vous pourriez ne pas partager en considérant que Nidwald est "proche" et que vous n'avez pas à vous exprimer sur ce point.

Je suis arrivé à la conclusion que le dépôt de Wellenberg ne représentait aucun risque pour la population de Nidwald et encore moins pour notre canton. J'ai bien pensé que certains passages de l'exposé des motifs n'allaient pas vous "mettre en joie", et je ne suis pas mécontent de votre réaction; les qualificatifs que vous avez trouvés expriment bien votre contrariété.

Mais, au fond, qu'est-ce qui vous contrarie ? C'est probablement la situation paradoxale dans laquelle nous sommes. Nous avons voté un article constitutionnel, sans en assumer toutes les conséquences, et nous en sommes au point où nous devons avoir une réflexion sérieuse. On ne peut pas, sur de tels sujets, manquer de rigueur et prendre des raccourcis. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité que, dans l'exposé des motifs, les choses soient présentées de cette manière.

On peut souhaiter un programme de démobilisation et de démantèlement nucléaire. Mais, même si vous le mettez en place demain matin, vous connaissez trop bien le sujet pour savoir que vous aurez à gérer ces problèmes, non seulement pendant des centaines d'années mais des millénaires !

C'est donc dire qu'il nous faut des spécialistes de ces domaines, faute de quoi nous exposons la population à des risques considérables et il faut en parler sérieusement. Je n'ai pas bien compris la réaction de M. Vanek qui s'oppose à l'exportation des déchets nucléaires. Je pense également que nous ne devons pas exporter les nuisances que nous produisons, mais si nous ne pouvons pas les stocker à Genève, parce que la constitution nous l'interdit, où faut-il les déposer ? C'est la question fondamentale qui nous est posée.

Vous n'allez pas pouvoir y répondre avant la fin novembre, dans le cadre de la discussion de la commission, et c'est la raison pour laquelle la suggestion de votre collègue Beer, d'un vote immédiat sur le principe, n'aurait pas forcément été mauvaise. La question fondamentale reste posée, et j'ose espérer que, sur un sujet aussi sérieux, les discussions auront la rigueur qui s'impose.

La présidente. Bien que nous soyons en préconsultation, Monsieur Nissim, je vous accorde à nouveau la parole !

M. Chaïm Nissim (Ve). Merci Madame la présidente ! Mesdames et Messieurs les députés, je propose le vote immédiat, car je suis d'accord avec M. Haegi !

La présidente. Monsieur Burdet, êtes-vous également d'accord avec cette conclusion ?

M. Hervé Burdet (L). Je continue, Madame la présidente, à préconiser une réflexion de fond sur ce sujet important, dans une commission du Grand Conseil.

M. Pierre Vanek (AdG). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que ce sujet est suffisamment sérieux pour qu'il soit discuté en commission et que nous revenions en débattre au Grand Conseil. Mon groupe s'est opposé à plusieurs reprises à des discussions immédiates, proposées par les personnes occupant des bancs d'en face. Je suis en désaccord à 95% avec les propos de M. Burdet, mais il a raison de dire que cet objet mérite d'être traité en commission. Je m'oppose donc à une discussion immédiate.

M. Chaïm Nissim (Ve). M. Haegi nous a précisé que notre canton devait se prononcer avant le mois de novembre. Pensez-vous vraiment, Monsieur Vanek, que, d'ici le mois de novembre, notre très "scientifique et très intelligente" commission de l'environnement pourra avoir la discussion qui s'impose, sur une question aussi importante que celle des déchets radioactifs ?

Tous les préopinants ont bien expliqué qu'à défaut d'un "trou magique", qui malheureusement n'existe pas, le problème n'est pas soluble en quinze jours. Je ne suis pas opposé à une discussion sur ce sujet, mais nous devrions pouvoir disposer de plusieurs années.

M. Pierre Vanek (AdG). Nous sommes placés devant l'alternative d'une discussion immédiate ou d'une discussion au sein de la commission de l'environnement. Il me semble que nous avons un peu de temps, puisque nous devons nous prononcer pour fin novembre. Je regrette, bien évidemment, que nous soyons contraints à traiter de cette question aussi rapidement.

Je rappelle toutefois que j'avais proposé, au mois de juin, que le Conseil d'Etat profite de l'été pour préparer un projet de loi à ce sujet. Malheureusement, M. Haegi était d'avis, à l'époque, qu'il n'était pas nécessaire d'élaborer un projet de loi, ce qui fait que nous avons pris du retard. Et je suis tout à fait d'accord avec M. Nissim sur le fait que nous ne pouvons pas régler ce problème sur le fond aussi rapidement en commission.

Mais je crois qu'il y a des solutions médianes. Ce serait, à mon sens, une mauvaise solution que d'entamer une discussion immédiate, car les députés n'y ont pas été préparés.

Par ailleurs, il faudrait transformer cet exposé des motifs, que je ne puis accepter en l'état. Deux heures de discussion intelligente en commission valent mieux qu'une demi-heure de discussion en séance plénière, vu la situation dans laquelle nous sommes ce soir.

Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est rejetée.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'environnement et de l'agriculture.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu du déroulement de nos travaux, il est évident que nous devrions avoir une séance supplémentaire la semaine prochaine. D'autre part, il se trouve que Mme Martine Brunschwig Graf est retenue par ses obligations hors de Genève. D'entente avec les auteurs du projet de loi 7296, ce dernier sera renvoyé à notre séance du mois de novembre.

Comme l'autre point - la pétition 1066-A - qui émarge au département de l'instruction publique est un point mineur, ces deux points seront renvoyés à notre séance de novembre.

Que celles et ceux d'entre vous qui sont d'accord avec cette proposition veuillent bien lever la main.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

La séance est levée à 19 h 10.