République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 septembre 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 9e session - 40e séance
I 1938
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je n'interviendrai pas longuement sur le troisième volet de cette interpellation. Je me bornerai à rappeler les faits.
Engagé dans une procédure d'asile en Grèce, M. H., de nationalité syrienne, avait reçu une décision négative à sa demande, en juin 1990. Craignant son renvoi en Syrie depuis la Grèce, M. H. a quitté clandestinement ce dernier pays pour la Suisse, en février 1995. Il y est entré, muni de papiers d'identité falsifiés. En vertu du fait que l'intéressé a séjourné près de cinq ans en Grèce, après le rejet de sa demande, l'Office fédéral des réfugiés a décidé de ne pas autoriser M. H. à entrer en Suisse. Il a donc ordonné son renvoi préventif vers son dernier pays de résidence. En l'espèce, un recours a été déposé contre la décision de l'ODR.
La Grèce, comme la Suisse, est signataire de la Convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés. A ce titre, elle est tenue au respect du principe de non-refoulement. Cela signifie qu'elle ne peut expulser ou refouler un réfugié, vers un territoire où sa liberté ou sa vie seraient menacées, pour un des motifs prévus par ladite convention. Or, la procédure engagée par la Grèce avait amené cet Etat à estimer que l'intéressé n'avait pas le statut de réfugié, sa vie n'étant nullement en danger en Syrie. Si vous avez, Monsieur le député, des critiques à émettre à ce sujet - et je peux les comprendre - elles sont à adresser à l'Etat grec et non à l'Etat suisse.
Deux tentatives infructueuses de renvoi de H. ont été effectuées, dans les quarante-huit heures qui ont suivi, par la police genevoise, l'autorité cantonale compétente pour exécuter les décisions de l'ODR.
Je précise, Monsieur le député, que nous n'avons jamais reçu de H. la plainte qu'il a formulée à l'adresse de la Ligue des droits de l'homme. Ce document n'est pas en notre possession.
En l'absence d'une décision de la Commission suisse de recours, les services de police ont agi sur la base d'une directive de l'ODR stipulant, en substance, qu'en cas de dépôt d'un recours la décision contestée doit être exécutée aussi longtemps que la Commission suisse de recours n'a pas donné d'instructions contraires. La loi fédérale est entrée en vigueur en février 1995. Elle a modifié certains alinéas de l'article 47. Elle n'autorise l'exécution immédiate d'un renvoi, suite à une décision de première instance, qu'à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures. Ce délai doit permettre à la personne concernée de demander à l'autorité de recours la restitution de l'effet suspensif. Cette dernière dispose, ensuite, de quarante-huit heures pour se prononcer. Or, M. H. a été renvoyé en Grèce une semaine plus tard.
Alors qu'elle avait rejeté deux recours contre la décision de renvoi prise par l'ODR, la Commission suisse de recours a finalement admis une demande de réexamen de la demande d'asile de H., parce qu'il avait été détenu en Grèce, mais pas accepté en tant que requérant d'asile. C'est pour cette raison que H. a été autorisé à revenir en Suisse, le 30 mars, et sa demande est toujours à l'examen.
Toutefois, sur un point, je vous dois, Monsieur le député, des explications complémentaires. Avisés par l'ODR que la demande d'asile allait être rejetée, les services de police ont préparé le départ de H. de Suisse. Dans un premier temps, il est exact que des contacts ont été pris avec le consulat de Syrie. Cette maladresse est due au fait que la police n'était pas encore en possession du texte et ignorait que la décision de l'ODR visait au renvoi préventif de ce ressortissant, non pas en Syrie mais en Grèce.
Par souci de clarté, il est prévu, dorénavant, de demander à l'ODR que les décisions de renvoi notifiées à la police de l'aéroport le soient également à l'office cantonal de la population, qui a la maîtrise du dossier "asile".
Vous m'avez interrogé, une troisième fois, sur les mesures concrètes qui ont été prises. En attirant votre attention, Monsieur le député, sur le fait que les mesures genevoises vont largement au-delà de ce qui est admis dans d'autres cantons suisses, je précise que l'ODR n'a pas modifié sa directive sur l'exécution du renvoi du 22 février 1993, de sorte que nous avons décidé de donner nos propres instructions à la police de l'aéroport pour qu'elle s'en tienne, désormais, strictement à la lettre de l'article 47 de la loi sur l'asile et qu'elle veille, ainsi, aux délais de vingt-quatre et de quarante-huit heures évoqués plus haut.
Vous m'avez encore interrogé sur la réalité d'un aide-mémoire. Ce document, destiné aux étrangers ayant déposé une demande d'asile à l'aéroport, va être distribué aux intéressés dès le courant de ce mois. Ce papier, qui n'a pas son égal ailleurs en Suisse, a été présenté à la délégation du Conseil d'Etat aux réfugiés le 22 août dernier. Je vous signale également que, depuis plusieurs mois, les candidats à l'asile entendus à l'aéroport reçoivent, à la fin de leur audition, une liste des services de consultation juridique auxquels ils peuvent faire appel dans le cadre de la procédure. Cela aussi, Monsieur le député, est une spécificité genevoise en faveur des requérants d'asile. Je serais même tenté de dire que c'est une facilité de plus, mais je vous déclare nettement que je n'ai pas l'intention d'accumuler, à l'avenir, des facilités de ce genre. J'estime que nous avons largement et suffisamment fait.
Je remarque enfin que les requérants d'asile, qui se présentent à la frontière, ne bénéficient d'aucune de ces facilités, valables seulement pour l'aéroport.
J'estime avoir répondu complètement à votre interpellation. Cela ne change rien au fait que H. est toujours en Suisse, que l'Etat grec ne l'a pas reconnu comme réfugié et que je n'ai malheureusement toujours pas la décision de l'Office fédéral.
Cette interpellation est close.