République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7228-A
8. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève - section Cité - (création d'une zone de développement 3 destinée à des équipements publics et correction des limites de la zone 3) et déclarant d'utilité publique la réalisation d'équipements scolaires. ( -) PL7228
Mémorial 1995 : Projet, 2102. Renvoi en commission, 2110.
Rapport de Mme Liliane Maury Pasquier (S), commission d'aménagement du canton

En date du 28 avril 1995, le Grand Conseil renvoyait en commission le projet de loi 7228. La commission de l'aménagement, sous la présidence de Mme Martine Roset, a étudié ce projet de loi lors de sa séance du 28 juin 1995, en présence de MM. P. Brun, chef du service des plans de zones et de l'information, et J. Ch. Pauli, juriste au département des travaux publics et de l'énergie.

Présentation du projet de loi

La rive droite de la ville de Genève a vu récemment la mise en oeuvre ou la réalisation de plusieurs importantes opérations portant sur la rénovation ou la construction de logements (quartier des Grottes, périmètre des Charmilles, campagne Masset, Montbrillant, etc.).

Cette mise à disposition de logements neufs ou rénovés entraîne, bien sûr, un accroissement de la population scolaire des quartiers concernés dans tous les ordres d'enseignement.

Pour faire face à l'augmentation du nombre d'élèves dans les degrés primaires, la Ville de Genève avait notamment envisagé la réalisation d'un groupe voire d'un demi-groupe scolaire dans le quartier de Vermont, rejetée en votation populaire. D'autres solutions ont dès lors dû être trouvées, telles la construction d'un demi-groupe scolaire dans le parc des Cropettes ou la réservation d'un terrain pour une école dans le périmètre d'un plan localisé de quartier à la rue Chandieu.

Dans l'enseignement secondaire, le problème est le même. Le collège de Genève est confronté à de semblables difficultés. La capacité des 6 collèges du cycle d'orientation de la rive droite (excepté celui des Colombières, trop excentré, à Versoix) sera dépassée dès l'an 2000, cela sans même prendre en compte les immeubles non encore construits mais forcément fournisseurs potentiels d'élèves.

Il est donc apparu comme absolument nécessaire de trouver un terrain pour un futur cycle d'orientation. Le secteur faisant l'objet du présent projet de loi (compris entre les rues Baulacre, de Beaulieu et Montbrillant et un groupe d'immeubles situés en 3e zone) apparaît tout à fait approprié à cette réalisation tout en permettant notamment la préservation d'un bâtiment classé comme « remarquable » à l'inventaire, la villa Roux. Désigné par l'appellation d'« îlot 14 » dans le schéma directeur du quartier des Grottes, ce secteur constitue un résidu de 5e zone (villa). Fort bien situé (nombre d'élèves habitant directement à proximité, proximité de la gare qui permettrait d'étendre le secteur de recrutement, si nécessaire), il appartient, pour près de la moitié, à la ville de Genève. L'Eglise nationale protestante est propriétaire de la parcelle Nord-Ouest, le solde des terrains appartenant à des privés. Des tractations sont en cours pour l'acquisition de ces terrains par l'Etat.

Audition des consorts Taillard

Les consorts Taillard ont hérité de parcelles situées dans l'îlot 14 qu'ils ont conservées car ils ont toujours souhaité pouvoir y réaliser des logements, sans volonté spéculative mais sachant bien que, vu leur localisation, ces terrains ne resteraient certainement pas en zone villa.

Dès 1988, ils ont entrepris des démarches en présentant un avant-projet de construction de logement subventionné, avec un taux d'utilisation du sol de 1,35. En novembre 1989, le département des travaux publics leur a donné une réponse négative, précisant que des besoins en locaux pour l'en-seignement secondaire se faisaient jour.

Suite à l'enquête publique de janvier 1992, à laquelle ils ont répondu par des observations, et pour faire avancer les choses, les consorts Taillard ont déposé, en octobre 1993, une requête préalable en autorisation de construire une villa pour diplomate, conforme à la zone actuelle de leurs parcelles. Cette requête a reçu une réponse négative le 4 mars 1994, refus qui ouvre le délai de deux ans, mentionné par l'article 17 LaLAT, au cours duquel le Grand Conseil doit approuver un éventuel projet de modification de régime des zones. Dans ce cas, ce délai échoit donc le 4 mars 1996.

Le projet de déclassement en zone 3 destinée à des équipements publics ne correspond pas aux souhaits des consorts Taillard qui ont fait opposition lors de la deuxième enquête publique.

Après discussion avec leurs mandataires, ils sont finalement prêts à accepter un échange de terrains qui leur garantisse les mêmes droits à bâtir que ceux de leur avant-projet, soit, au taux de 1,35, 4 200 m2 de plancher.

Discussion de la commission

Les commissaires ont acquis la conviction de la nécessité pressante de permettre au cycle d'orientation de faire face aux tâches qui sont les siennes et, dans le cas précis, d'accueillir les nouveaux élèves de la rive droite. Connaissant la difficulté de trouver, en ville, des terrains permettant de remplir les différentes conditions inhérentes à un tel projet, ils et elles sont également convaincus que l'îlot 14 représente un bon choix.

Le Conseil municipal de la Ville de Genève partage le même point de vue puisqu'il a donné, lors de sa séance du 6 décembre 1994, un préavis favorable unanime à ce projet.

Les consorts Taillard ont certes présenté un projet également intéressant pour une collectivité publique puisqu'il est toujours important de pouvoir offrir à la population des logements à loyer modéré dans un environnement favorable (proximité du centre-ville, desserte par les transports publics, sans grandes nuisances de trafic, ...).

Cependant, dans le cas d'espèce, l'intérêt prépondérant de la population est bien de pouvoir réaliser un équipement scolaire dans ce secteur.

Les commissaires souhaitent que les tractations entre le Conseil d'Etat, éventuellement le Conseil administratif de la Ville de Genève, et les consorts Taillard aboutissent. Certains d'entre eux relèvent toutefois qu'à l'heure actuelle les parcelles sont situées en 5e zone, ce qui ne permet de toute façon pas de construire avec un taux de 1,35 et de réaliser 4 200 m2 de plancher.

Traitement des oppositions formées par Mme Anne-Marie Gaspoz-Taillard et M. Denis Taillard

La commission propose de rejeter les oppositions formées par les personnes citées en titre pour les motifs qui suivent.

A la forme, il y a lieu de considérer que Mme Anne-Marie Gaspoz-Taillard et M. Denis Taillard (ci-après les opposants) sont propriétaires, respectivement copropriétaires des parcelles 3827, 3828 et 3829, sises à l'intérieur du périmètre du plan n° 28411-117, visé à l'article 1, alinéa 1, du présent projet de loi, et comprises notamment dans le périmètre déclaré d'utilité publique. Ils ont donc qualité pour s'opposer à l'adoption de ce plan. Formée en temps utile, l'opposition est recevable à la forme.

Au fond, le projet de loi querellé tend, pour l'essentiel, à la création d'une zone de développement 3 destinée à des équipements publics, d'une superficie de 25 528 m2, dont 16 095 m2 font l'objet de la déclaration d'utilité publique stipulée à l'article 2. Ce secteur, actuellement incorporé à la zone villa, est destiné à accueillir la construction d'un cycle d'orientation.

A l'appui de leur opposition, les opposants exposent qu'il serait «superflu d'inclure dans le périmètre d'utilité publique prévu (leurs) trois parcelles qui totalisent une surface de 3 183 m2. En effet, le périmètre d'utilité publique prévu (...) représenterait quelque 26 350 m2, alors que des collèges de même type nécessitent moins de surface, voir Cayla environ 21 000 m2, Renard 19 685 m2, De Budé quelque 19 000 m2 et Sécheron 12 109 m2. Une surface de 23 167 m2, ou même moins, serait, semble-t-il, largement suffisante pour couvrir les besoins scolaires et le terrain ainsi délimité en serait beaucoup plus homogène et plus facile à aménager». Ils estiment, par ailleurs, qu'il serait préférable que leurs terrains soient déclassés «en zone 3, pour accueillir un immeuble de logement, voire de caractère mixte».

Les opposants ne contestent donc pas la nécessité de construire, qui plus est à l'emplacement retenu, un cycle d'orientation qui puisse accueillir l'augmentation de la population scolaire, consécutive à la réalisation de plusieurs importantes opérations de construction d'immeubles de logements survenues ces dernières années sur la rive droite du canton (Charmilles, campagne Masset, Sports-Essor, etc.) et qui aboutiront prochainement à la saturation de la capacité d'accueil des cycles d'orientation existants, comme le relate l'exposé des motifs à l'appui du projet de loi, mais invoquent un prétendu problème de disproportionnalité de l'espace retenu à cette fin.

A l'examen, il s'avère cependant que la surface moyenne des terrains sur lesquels reposent les 19 cycles d'orientation existants du canton s'élève à 25 582 m2. Seuls cinq cycles d'orientation, sur les 19 précités, ont été construits sur un emplacement de moins de 20 000 m2, la plus petite surface usitée étant celle du cycle de Sécheron (12 109 m2), suivi par le cycle de l'Aubépine-Roseraie (15 989 m2), deux cycles érigés dans des quartiers urbains, à forte densité de population et où il serait très difficile, pour les collectivités publiques, de parvenir à disposer de grands terrains pour les constructions scolaires. A noter que le cycle de Sécheron, construit par nécessité sur des terrains trop exigus, comporte notamment un bâtiment de 5 niveaux et n'est pas considéré comme un modèle du genre.

En l'espèce, le projet de loi querellé envisage la création d'une zone d'utilité publique de 16 095 m2, et non 26 350 m2 comme l'indiquent à tort les opposants, qui confondent l'espace déclaré d'utilité publique et voué au cycle d'orientation avec la totalité des surfaces faisant l'objet de la modification du régime des zones querellée. Cette surface de 16 095 m2 est largement inférieure à la moyenne précitée de 25 582 m2 par unité. Il s'agit plus précisément de la troisième plus petite surface vouée à l'édification d'un cycle d'orientation, sur les 19 sites existants. Compte tenu des contraintes existantes (végétation et conservation souhaitable de bâtiments intéressants tels que la villa Roux ou la maison d'habitation du 10, rue Baulacre, à l'intérieur du périmètre d'utilité publique envisagé), cet espace ne permettra de construire qu'un petit cycle d'orientation, qui ne pourra que difficilement satisfaire au quota usuel d'accueil de 700 élèves par unité.

Il s'ensuit que le grief d'une surface d'utilité publique à destination d'un équipement public prétentument trop étendue pour les besoins usuels en surface d'un cycle d'orientation est infondé et doit être rejeté.

Quant à la demande des opposants tendant à ce que trois de leurs parcelles soient déclassées en zone de développement destinée à des immeubles ou affectées à d'autres activités, la commission estime qu'il existe un intérêt public très important à la construction d'un cycle d'orientation dans ce secteur. Cet intérêt public, qui n'est d'ailleurs pas contesté par les opposants, doit incontestablement primer les intérêts privés de ceux-ci.

Au vu de ces considérations, les griefs formulés par les opposants sont infondés et ne peuvent qu'être écartés. Les oppositions formées par Mme Anne-Marie Gaspoz-Taillard et M. Denis Taillard doivent dès lors être rejetées.

Décision de la commission

Après avoir rejeté les oppositions formées par Mme Anne-Marie Gaspoz-Taillard et M. Denis Taillard (article 4 nouveau du projet), la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité d'accepter ce projet de loi.

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7228)

LOI

modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève - section Cité - (création d'une zone de développement 3 destinée à des équipements publics et correction des limites de la zone 3) et déclarant d'utilité publique la réalisation d'équipements scolaires

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28411-117 dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 26 juillet 1991, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève - section Cité - (création d'une zone de développement 3 destinée à des équipements publics et correction des limites de la zone 3), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

1 La réalisation d'équipements publics tels que bâtiments scolaires et annexes à l'intérieur du périmètre figurant au plan no 28411-117 visé à l'article premier est déclarée d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933.

2 Conformément à l'article 30A, alinéa 2, de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, les terrains compris à l'intérieur de la zone de développement 3 destinée à des équipements publics sont grevés d'un droit de préemption au profit de l'Etat de Genève, subsidiairement de la Ville de Genève. Ce droit est annoté au registre foncier.

Art. 3

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre des zones créées par le plan visé à l'article 1.

Art. 4

L'opposition au projet de loi n° 7228, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève - section Cité - (création d'une zone de développement 3 destinée à des équipements publics et correction des limites de la zone 3) et déclarant d'utilité publique la réalisation d'équipements scolaires, formée par Mme Anne-Marie Gaspoz-Taillard et M. Denis Taillard, est rejetée pour les motifs exposés dans le rapport de la commission chargée de l'étude de la présente loi.

Art. 5

Un exemplaire du plan no 28411-117 susvisé, certifié conforme par la présidente du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.