République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7289
9. Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit pour le déplacement de la prise d'eau de la station d'alimentation artificielle de la nappe d'eau souterraine du Genevois à Vessy. ( )PL7289

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit d'investissement

Un crédit de 1 300 000 F est ouvert dès 1996 au Conseil d'Etat pour déplacer la prise d'eau de la station d'alimentation artificielle de la nappe d'eau souterraine du Genevois à Vessy.

Art. 2

Budget d'investissement

Ce crédit est réparti en 2 tranches annuelles inscritesaux budgets d'investissement dès 1996 sous la rubrique69.57.00-543-01.

Art. 3

Couverture financière

La couverture financière de ce crédit est assurée par le financement spécial relatif à la réalimentation de la nappe souterraine de Vessy.

Art. 4

Amortissement

Le taux d'amortissement applicable à cet investissement est fixé au taux déterminé pour l'amortissement de la station de Vessy et de son annexe, le laboratoire de Sierne, soit au moyen de 30 annuités fixes.

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

Objectifs

Dès les années 1960, la nappe souterraine du Genevois a vu son niveau s'abaisser à la suite d'une surexploitation tant dans les puits genevois que dans ceux de la Haute-Savoie.

Les concertations transfrontalières de l'époque ont abouti à l'arrangement du 9 juin 1978 entre le Conseil d'Etat et le préfet de la Haute-Savoie, relatif à la protection, l'utilisation et la réalimentation de la nappe souterraine franco-suisse du Genevois.

L'Etat de Genève a décidé de construire une station de réalimentation de la nappe de Vessy, en 1979. Les premiers apports à la nappe ont débuté en février 1982. Depuis lors à ce jour, 145 millions de m3 ont été infiltrés dans le sous-sol.

Actuellement la prise d'eau dans l'Arve est située dans une passe de l'ancienne usine de la Société des eaux de l'Arve. Cette usine est actuellement exploitée par les Services industriels de Genève (SIG), la concession de la Société étant échue. Très vétuste, l'usine n'est munie que d'un dégrillage manuel qui engendre d'importants frais de main-d'oeuvre.

Les SIG ont étudié la possibilité de construire une centrale hydroélectrique sur le site de l'ancienne usine. Ce projet est actuellement renvoyé sine die pour des raisons économiques. Par contre, les SIG ont construit de nouveaux puits au parc Bertrand et au chemin du Velours, qui remplacent les puits vétustes de Vessy, trop vulnérables en cas de pollution accidentelle de la rivière.

Afin de supprimer l'ancien dégrillage, et de ne pas empêcher la construction, à long terme, d'une future centrale hydroélectrique, il est nécessaire de construire une nouvelle prise d'eau, située plus en amont, sur la rive gauche, et de la raccorder par une canalisation nouvelle, branchée sur l'actuelle conduite qui alimente la station de réalimentation, où l'eau brute de la rivière est dessablée, désinfectée, floculée et filtrée, avant de rejoindre par infiltration, la nappe d'eau dans le dispositif d'épandage souterrain de la «Grande Fin».

Besoins

Prise d'eau avec ses équipements mécaniques...........................

528 000 F

Conduite Ø 700 mm, longueur 250 m de raccordement à la conduite actuelle..........................................................................

584 000 F

Etablissement du projet définitif, requête en autorisation de construire, honoraires...................................................................

188 000 F

Total

1 300 000 F

Impacts à attendre

Seules les nuisances usuelles d'un chantier sont à attendre pendant 3 à4 mois. Les prélèvements dans l'Arve pour réalimentation ne sont pas modifiés par la prise d'eau future et restent fixés à 0,6 m3/seconde, soit moins de 1% du débit moyen de la rivière.

Budget prévisionnel d'exploitation

Ces investissements n'entraîneront pas de dépenses d'exploitation sup-plémentaires.

Quant à la charge financière annuelle comprenant les intérêts au taux de 5,75% et l'amortissement au moyen de 30 annuités, elle se montera à91 930 F.

Couverture financière

La charge financière estimée à 91 930 F sera portée au financement spécial relatif à la réalimentation de la nappe souterraine de Vessy et couverte par une adaptation des redevances en matière de droit d'eau pour le captage des eaux souterraines de l'Arve (voir plan financier annexé).

Vu ce qui précède, le Conseil d'Etat vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet de loi.

Préconsultation

M. Max Schneider (Ve). Ce projet de loi dépasse la simple installation de pompage sous la nappe d'eau souterraine du Genevois à Vessy. Comme l'indique les objectifs de ce projet de loi, on a déjà injecté dans le sous-sol 145 millions de mètres cubes.

Il y a environ cinq ans, lors d'une interpellation de mon cher collègue M. Loutan qui s'inquiétait de la baisse de niveau de cette nappe souterraine, il lui a été répondu qu'il n'y avait pas de danger et que cette nappe était maintenue à niveau. Il s'inquiétait aussi de possibles pollutions ou d'une saturation du filtrage à travers le gravier. On lui a encore répondu : «Pas de problème, M. Loutan, les choses sont en ordre !».

Les choses ne semblent pas si en ordre que cela, puisque cet intéressant projet de loi nous est proposé. Je remercie beaucoup les personnes qui ont écrit les objectifs aux pages 2 et 3, parce qu'elles nous expliquent ce qui se passe dans cette nappe souterraine.

C'est pour en savoir davantage que je souhaiterais, Madame la présidente, que ce projet de loi soit renvoyé à la commission de l'environnement, afin que nous puissions entendre les tenants et aboutissants des travaux concernant cette nappe phréatique, notamment en coordination avec nos voisins français, ou à la commission des affaires régionales, puisqu'il s'agit d'un problème franco-suisse d'importance.

Le parti écologiste ne s'oppose pas à ce projet pour l'instant, mais s'y intéresse de près, de même qu'à la vision future de la construction d'une centrale hydroélectrique, sur le site de l'ancienne usine de Vessy.

La présidente. Le Bureau et les chefs de groupe avaient décidé de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'énergie. Puisque je ferai voter sur votre proposition, je vous prierai de choisir entre la commission de l'environnement et celle des affaires régionales. (M. Annen interrompt la présidente.)

C'est ce que je viens de dire Monsieur Annen ! Vous ne m'écoutez pas !

M. Max Schneider. Excusez-moi de n'être pas intervenu au Bureau auparavant, mais je pense que M. Haegi, puisque ce projet de loi émane de son département, pourrait choisir lui-même la commission qui lui semble la plus adéquate.

M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais intervenir sur un autre registre que celui évoqué par M. Schneider. La question que nous nous posons est de savoir s'il appartient à l'Etat de Genève de payer cette somme ou si cela ne serait pas plutôt le rôle des Services industriels.

Si l'on se réfère à l'exposé des motifs, il en ressort que le déplacement de cette prise d'eau est essentiellement justifié par le fait de réserver la possibilité de réaliser une future centrale hydroélectrique à cet endroit. Certes, la réalisation de cette centrale est différée dans le temps, mais il n'empêche qu'il apparaît que le besoin de déplacer la prise d'eau est bien provoqué par les projets futurs des Services industriels. Dès lors, il semblerait logique que ce soient les Services industriels, qui ont déjà racheté les Eaux de l'Arve, qui supportent cette dépense.

Il faudra sérieusement examiner la question, car, en l'état des finances cantonales, il n'y a pas de petites économies, d'autant plus que les Services industriels ont moins de difficultés que l'Etat à financer leur budget d'équipement.

Vous hochez la tête, Monsieur Haegi, mais vous savez comme moi qu'il n'y a pas - malheureusement diront certains, heureusement diront les Services industriels - de possibilité de référendum contre la hausse des taxes SI. Celles-ci bénéficient ainsi, toutes les années, d'une adaptation de l'ordre de 4% à 6%. Les Services industriels se trouvent donc, malgré tout, dans une situation plus facile que l'Etat. C'est pourquoi je suggère que nous leur demandions de prendre cette dépense à leur charge.

M. Roger Beer (R). Je ne suivrai pas les traces de M. Grobet, bien que je reconnaisse que la question mérite largement d'être posée. Je pense, au contraire, qu'il doit certainement y avoir une bonne raison pour que ce projet soit présenté par l'Etat.

Je soutiens M. Schneider quand il pose la question de l'utilisation de l'eau dans le bassin genevois, mais je crois que celle-ci dépasse cette simple demande de financement pour la création d'une nouvelle bouche d'alimentation en eau potable.

Genève a la chance extraordinaire de bénéficier dans son bassin de sources d'eau énormes, entre autres le lac, un fleuve et une très grande rivière. De tout temps, traditionnellement, on a réalimenté la nappe phréatique parce qu'on a reconnu la qualité purificatrice du sol. A ce titre, le travail effectué par l'Etat ou les Services industriels n'était que la traduction artificielle, par la main de l'homme, de ce qui se passe dans la nature. Dans d'autres cantons, comme Bâle par exemple, certaines forêts sont totalement mises à ban, parce qu'on y déverse de l'eau pour la récupérer quelque temps après, une fois purifiée.

Le problème qui se pose ici est particulier : la station qui appartenait aux Eaux de l'Arve étant totalement vétuste, on ne peut pas, pour des raisons financières, la reconstruire actuellement, ce que nous pouvons tous comprendre. Pour réserver une amélioration ou une reconstruction future, il a donc été décidé de reconstruire cette source d'alimentation un peu en amont.

Il sera intéressant d'écouter toutes les raisons techniques qui justifient ce projet et, par la même occasion, d'obtenir un certain nombre de réponses aux questions que le parti écologiste, et M. Schneider en particulier, se posent. Je propose pour ce faire que le projet de loi soit renvoyé à la commission de l'énergie et des SI, plutôt qu'à la commission des affaires régionales.

Excusez-moi, Monsieur Haegi ! J'espère que vous ne serez pas vexé, mais je pense que la commission des affaires régionales - on le voit dans son rapport - parle déjà de beaucoup de choses et il serait peut-être plus judicieux de laisser ce problème de la nappe phréatique au canton de Genève, même si son impact est largement régional. Je vous invite donc à renvoyer ce projet de loi à la commission de l'énergie.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Mais, Monsieur le député Beer, il n'y a rien de vexant dans votre proposition !

Mesdames et Messieurs les députés, vous me permettrez de vous sourire malicieusement quand j'entends M. Grobet suggérer que nous allions du côté des Services industriels, parce que les augmentations de tarifs ne sont pas exposées à des référendums. Il y a des tentations qui peuvent surgir en certaines circonstances ! Dans le cas particulier, elles ne sont que momentanées.

Pour bien étudier ce projet, qui a bien évidemment une dimension financière, ainsi qu'une dimension environnementale qui ne saurait être banalisée, je crois, Monsieur Schneider, que vous pouvez suivre la suggestion de vos collègues. Quant à mes collaborateurs et moi-même, nous viendrons à la commission de l'énergie au moment où vous le souhaiterez.

Finalement, qu'importe la commission qui traitera de ce sujet, l'essentiel étant que vous obteniez les réponses aux questions que vous vous posez. Je vous assure de la disponibilité de mon département.

La présidente. Monsieur Schneider, maintenez-vous votre proposition de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires régionales ?

M. Max Schneider (Ve). Madame la présidente, après avoir entendu M. Haegi et M. Beer, je regrette de dire qu'un problème beaucoup plus grave n'a encore pas été soulevé : on touche les 25% de la consommation d'eau du canton de Genève...

La présidente. Nous sommes en préconsultation, M. Schneider. Je vous interrogeais simplement sur le maintien de votre proposition de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires régionales.

M. Max Schneider. Pour être plus précis, je propose de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement, qui est genevoise comme M. Beer le souhaitait, afin qu'on puisse traiter ce sujet à Genève.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejetée.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'énergie et des Services industriels est adoptée.