République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7264
5. Projet de loi de Mmes et MM. Laurent Moutinot, Janine Hagmann, Laurette Dupuis, Gabrielle Maulini-Dreyfus et Henri Duvillard modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (anonymat en matière de grâce) (B 1 1). ( )PL7264

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:

Art. 205, al. 11 (nouveau)

11 L'anonymat des recourants en grâce est préservé.

Art. 207, al. 4 (nouveau)

4 Le préavis de la commission est présenté en préservant l'anonymat du recourant. La publication dans le Mémorial du Grand Conseil se fait sous la forme: «le recourant» ou «la recourante».

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le respect élémentaire de certaines règles de discrétion ainsi que les exigences de la loi fédérale sur la protection des données rendent inacceptable la divulgation de situations personnelles très douloureuses que l'on rencontre dans le cadre des recours en grâce.

L'Assemblée fédérale vient, sur recommandation du Ministère public fédéral, d'adopter une présentation anonyme d'un recours en grâce et il faut y voir le début d'une nouvelle pratique.

Il va de soi que les députés seront toujours informés de l'identité des recourants mais il convient de limiter autant que faire se peut la publicité autour de ces cas.

La modification qui vous est proposée vise à introduire, à l'article 205, alinéa 11, le principe de la garantie de l'anonymat. Ce principe pourrait également prendre place à l'article 204, alinéa 5, l'actuel alinéa 5 devenant l'alinéa 6.

La mise en oeuvre du principe est réglée à l'article 207, alinéa 5, en prescrivant la forme anonyme de présentation des rapports de la commission de grâce, renforcée par la publication anonyme au Mémorial. Ainsi, un lapsus éventuel dans le débat au Grand Conseil sera corrigé au Mémorial.

Il faut reconnaître que la publicité la plus large n'est pas le fait du Mémorial - hélas! - mais de la presse. Faut-il légiférer à ce propos? Les auteurs du présent projet de loi ne le pensent pas, tout en souhaitant que les journalistes se fixent à eux-même des règles semblables en la matière.

Pour toutes ces raisons, nous vous prions, Mesdames, Messieurs les députés, de bien vouloir accueillir favorablement le présent projet de loi.

Annexe: Lettre du Ministère public de la Confédération au président de la commission des grâces du Conseil national

page 3

page 4Préconsultation

M. Laurent Moutinot (S). Très brièvement présenté, ce projet tente d'améliorer notre procédure en matière de grâce, par une meilleure protection apportée à la sphère privée, en particulier aux données dites "sensibles".

Nous avons vu dans la pratique que la grâce concerne souvent des situations douloureuses ou pénibles. Pas plus tard qu'hier, il a été fait allusion à des cas de proches de la personne demandant la grâce, atteints dans leur santé. Nous souhaitons, par conséquent, concrétiser cette volonté de discrétion non pas par une mesure excessive comme le serait le huis clos - je vous rappelle que le huis clos existe en matière de grâce exclusivement pour les mineurs en l'état actuel de notre règlement - mais, en revanche, par une certaine discrétion, c'est-à-dire par l'anonymat, de manière à éviter qu'une publicité excessive ne soit donnée, sans pour autant travailler dans le secret, puisque la presse, quant à elle, peut parfaitement identifier les cas qui nécessiteraient à juste titre une publicité. En revanche, les cas qui ne la nécessitent pas seraient définitivement mis à l'abri de toute publicité fâcheuse.

J'ai entendu dire que ce projet n'avait pas de raison d'être, car les faits contenus dans le dossier avaient déjà été débattus en public, lors de l'audience de jugement. Cet argument est inexact en ce sens que, d'une part, lors d'une audience de jugement, l'accusé a la parole en dernier et est présent pour se défendre, ce qui n'est pas le cas en matière de grâce. Mais, d'autre part et surtout, ces dossiers de grâce contiennent toute une série d'éléments qui n'ont pas été débattus devant la juridiction de jugement, pouvant concerner des tiers. C'est la raison pour laquelle je souhaite qu'en commission, puis au retour en plénière, vous fassiez bon accueil à ce projet de loi.

M. John Dupraz (R). Le groupe radical ne s'opposera pas au renvoi de ce projet de loi en commission, mais, quant au fond, nous émettons des réserves, en ce sens que, dans notre pays, la justice est publique et nous estimons que la grâce doit l'être également. Malheureusement, il se trouve que, par souci d'information, les députés rapporteurs en disent parfois un peu trop long en séance plénière, si bien que paraissent au Mémorial - et la presse peut relater ces faits - les motifs et les raisons pour lesquels les gens ont été condamnés et ceux pour lesquels ils demandent leur grâce.

Lorsque la commission de grâce, lundi dernier, a débattu longuement concernant les dossiers à traiter, les rapports sont brefs en séance plénière comme on l'a très bien vu hier. Etant donné que la justice est publique, je ne vois pas pourquoi la grâce ne resterait pas publique. Il s'agit pour nous, députés, de faire preuve de discrétion dans nos rapports en séance plénière, étant entendu que les dossiers sont traités en séances de commission.

Ce projet est renvoyé à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.