République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 8 juin 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 8e session - 26e séance
PL 7243
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, est modifiée comme suit:
Art. 16, al. 1 et 2 (nouvelle teneur)
Catégories d'immeubles
1 Les catégories d'immeubles admises au bénéfice de la présente loi sont les suivantes:
a) catégorie 1, immeubles d'habitation bon marché (HBM);
b) catégorie 2, immeubles d'habitation à loyers modérés (HLM);
c) catégorie 3, immeubles d'habitation pour la classe moyenne (HCM);
d) catégorie 4, immeubles d'habitation mixte (HM), comprenant des logements avec subvention proportionnelle aux revenus des locataires et des logements sans subvention.
2 L'accès à un logement dans l'une ou l'autre des catégories indiquées à l'alinéa 1 est déterminé en fonction des conditions relatives aux locataires définies aux articles 30 et suivants.
Art. 23 B (nouveau)
Catégories d'immeubles
Le Conseil d'Etat autorise, pour les immeubles de la catégorie 4, une subvention personnalisée au logement aux locataires respectant les conditions fixées à l'article 30.
Art. 24, al. 1 lettre d (nouvelle)
Principes, dégressivité, durée
d) pour les immeubles de la catégorie 4, l'exonération est totale pendant les 5 premiers années; ensuite tous les 5 ans, elle est réduite d'un quart, pour disparaître totalement dès la 21e année.
Art. 25, lettre a (nouvelle teneur)
Conditions générales
Pour être admis au bénéfice de la présente loi, les immeubles doivent répondre aux conditions suivantes:
a) comprendre essentiellement des logements dont les loyers soient compatibles avec la destination de logements d'utilité publique dans chacune des quatre catégories prévues à l'article 16;
Art. 26, lettre d (nouvelle teneur)
Autres cas
Peuvent également être admis au bénéfice de la présente loi:
d) des logements individuels dans des immeubles neufs de la catégorie 2 (HLM) et 3 (HCM) lorsque ces logements sont soumis au régime de la propriété par étages et que le copropriétaire satisfait aux conditions de la section 4 du présent chapitre.
Art. 30, al. 1 (nouvelle teneur)
Limites de revenu
Principe
1 Les logements visés à l'article 16, catégories 1, 2, 3, sont destinés aux personnes dont le revenu, à la conclusion du bail, n'excède pas le barème d'entrée et dont le revenu, en cours de bail, n'excède pas le barème de sortie. Dans les immeubles de catégories 4, les 60% au moins des logements sont destinés, lors de la première location, à des locataires pouvant bénéficier d'une subvention personnalisée au sens de l'article 30A.
Art. 30A (nouveau)
Subvention personnalisée au logement pour les immeubles HM
1 La subvention personnalisée au logement est accordée aux locataires proportionnellement à leur revenu, afin de ramener leur taux d'effort au niveau de ceux fixés à l'article 30. La subvention ne doit toutefois pas excéder le double du montant maximum de l'allocation de logement de l'article 39A.
2 L'article 31 n'est pas applicable pour les immeubles de la catégorie 4.
Art. 31A (nouvelle teneur)
Exceptions
1 Les locataires d'un logement de la catégorie 4 ne bénéficiant pas d'une subvention personnalisée ne sont pas soumis aux limites de revenus fixées aux articles 30 et suivants; en revanche, les loyers de ces logements restent placés sous le contrôle de l'autorité compétente.
2 Le Conseil d'Etat peut autoriser le propriétaire d'un immeuble de la catégorie 1, 2 ou 3 à renoncer, pour un certain nombre de logements, aux prestations de l'Etat. Les locataires de ces logements ne sont également pas soumis aux limites de revenus fixées à l'article 30; en revanche, les loyers de ces logements restent placés sous le contrôle de l'autorité compétente.
3 Le Conseil d'Etat est autorisé à édicter des mesures exceptionnelles permettant de déroger en faveur du locataire au barème d'entrée et au barème de sortie, aux conditions d'octroi et au montant de l'allocation de logement et de la subvention personnalisée, ainsi que de réduire, voire de supprimer les surtaxes, en particulier pour des motifs sociaux.
EXPOSÉ DES MOTIFS
I. Introduction
Le 1er octobre 1992, le Grand Conseil adoptait à l'unanimité un projet de loi modifiant la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977 (ci-après LGL), changeant les barèmes d'entrée et les taux d'effort, ce qui a eu pour conséquence attendue et recherchée d'augmenter le montant de la surtaxe pour les locataires bénéficiant de revenus assez élevés.
C'est ainsi que, désormais, des logements subventionnés ont été libérés, ce qui a permis de les mettre à disposition de personnes ayant un revenu plus modeste que les précédents locataires.
Il en résulte actuellement que les immeubles d'utilité publique sont occupés par des personnes d'un même statut social, créant de la sorte une concentration de population de même classe.
Dans un souci d'échanges sociaux et culturels, un groupe de concertation, réunissant le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIER), les constructeurs, les régisseurs et les associations de locataires, est arrivé à la conclusion, sur proposition du DIER, qu'une nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation mixte (HM) doit être créée, dans lesquels des locataires disposant de niveaux de revenu différents puissent se loger.
Parallèlement, il sera toujours possible de construire des immeubles traditionnels HBM, HLM ou HCM, dès lors que le système actuel de la LGL est maintenu pour ces catégories.
Ce projet de loi prévoit également l'introduction de la PPE-HCM afin d'encourager l'accession à la propriété de la classe moyenne, qui pourrait ainsi participer directement à la politique de relance de notre canton.
II. Nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation mixte (HM)
Cette nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation se caractérise principalement par un système de mixité de logements et par une subvention personnalisée au logement.
L'immeuble de la nouvelle catégorie doit être agréé par l'Office financier du logement et doit donc répondre à des critères techniques et architecturaux habituels, prévus par la LGL, ou par son règlement d'application.
L'aide cantonale constitue, d'une part, en une exonération fiscale totale durant les 5 premières années, puis dégressive et, d'autre part, en une subvention personnalisée au logement, en lieu et place de subventions à l'exploitation, dont le montant maximum est de 2 400 F par pièce et par an, ce qui correspond au double du montant actuel de l'allocation au logement. Cette subvention personnalisée est calculée proportionnellement au revenu du locataire. Ainsi, si le titulaire du bail dispose d'un faible revenu, il bénéficiera alors d'une pleine aide annuelle au logement de 2 400 F par pièce. En revanche, s'il dispose d'un revenu élevé et que son taux d'effort est inférieur à ceux prévus par la LGL, il n'aura pas droit à cette subvention.
Cette nouvelle catégorie de logements sociaux répond également à la proposition de motion 944 «pour l'accès aux logements HBM et HLM des couples mariés dont le revenu est susceptible d'être notablement modifié après une naissance», déposée le 16 septembre 1994 au Grand Conseil.
En effet, les jeunes couples disposant d'un revenu et, par conséquent, d'un taux d'effort inférieur à celui prévu par l'article 30 LGL pourront bénéficier d'un logement de la catégorie 4, qui sera, au moment de la location, non-subventionné. Mais, après la naissance d'un enfant et la diminution ou la cessation de l'activité d'un des parents, leur revenu diminuera et le couple pourra alors demander, le cas échéant, l'octroi d'une subvention personnalisée au logement subventionnée, calculée proportionnellement à leur revenu.
III. Commentaire article par article
Art. 16, al. 1
Cette disposition légale fait, comme auparavant, une distinction entre les immeubles d'habitation bon marché (HBM), les immeubles à loyers modérés (HLM) et les immeubles destinés à la classe moyenne (HCM). Ainsi, le système actuel de la LGL est maintenu.
Mais, parallèlement au système actuel, une nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation mixte (HM) a été introduite sous lettre d. Il s'agit d'immeubles comprenant 60% au minimum de logements occupés par des personnes pouvant prétendre à la subvention personnalisée au logement, laquelle varie en fonction d'une augmentation ou d'une diminution du revenu du locataire. Le revenu de ces personnes doit donc correspondre aux limites de revenus fixées à l'article 30 LGL. Le 40% des logements restant peut être occupé par des personnes, dont le revenu leur permet d'occuper des logements en loyers dits libres, contrôlés cependant par l'autorité compétente. Bien entendu, ces locataires ne bénéficieront pas d'une subvention personnalisée vu le niveau élevé de leur revenu.
Art. 16, al. 2
Cette disposition rappelle que l'accès à un logement de type HBM, HLM, HCM ou encore HM est subordonné à la réalisation des conditions des locataires prévues aux articles 30 et suivants LGL, à savoir les limites de revenu, les taux d'effort, les normes d'occupation, etc., comme l'article 16 alinéa 2 LGL (teneur actuelle) le prévoit implicitement.
Art. 23B
Cette disposition légale introduit la subvention personnalisée qui peut être accordée directement aux locataires des immeubles de la catégorie 4, pour autant qu'ils réalisent les conditions fixées à l'article 30 LGL. La subvention maximum par pièce et par an correspond au double du montant prévu pour l'allocation de logement.
Art. 24, al. 1, lettre d
L'aide fournie par le canton au propriétaire d'un immeuble HM consiste en une exonération fiscale complète les 5 premières années. Ensuite, cette exonération sera dégressive, réduite d'un quart tous les 5 ans afin de disparaître la 21e année. Cette exonération fiscale est identique à celle accordée pour les immeubles HLM et, dès lors, tant les logements HLM que les logements HM sont soumis à une période de contrôle cantonal des loyers de 20 ans.
Art. 25, lettre a
Cette disposition légale a été modifiée pour des raisons formelles puisqu'il faut dorénavant faire référence aux quatre catégories d'immeubles prévus à l'article 16 précité et non plus à trois catégories d'immeubles.
Art. 26, lettre d
Cette disposition légale reprend le projet de loi 7116 modifiant la LGL en introduisant le régime de la propriété par étages pour des logements HCM, selon les modalités de la teneur actuelle de l'article 26 lettre d LGL.
L'encouragement à l'accession à la propriété a été consacré en mars 1992 dans la Constitution genevoise, soit à l'article 10A. Ce principe était déjà admis par le Grand Conseil, puisque ce dernier adoptait, en 1985, l'article 26 lettre d LGL (teneur actuelle), qui vise l'accession à la propriété de logements HLM selon le régime de la propriété par étages.
Il s'agit à présent de favoriser les personnes disposant d'un revenu moyen pour accéder à leur logement, en leur accordant la même aide modeste de l'Etat, laquelle consiste en une subvention pour les logements HCM mesurée. En effet, pour les HCM, cette aide de l'Etat est limitée dans le temps (10 ans seulement) et le montant de l'aide peut être réduit par voie réglementaire, dès lors que l'article 32A alinéa 2 LGL (teneur actuelle) prévoit que le Conseil d'Etat est autorisé à rendre plus sévère le barème d'entrée.
L'article 32A LGL relatif aux conditions applicables aux copropriétaires s'applique sans modification tant aux logements HLM qu'aux logements HCM et soumet donc au contrôle de l'Etat toute aliénation d'un logement pendant la durée de l'aide fournie par l'Etat.
La proportion de logements soumis au régime de la propriété par étages (ci-après: PPE) visée à l'article 37A LGL est maintenue. Ainsi, le nombre de logements soumis au régime de la PPE/HLM ou de la PPE/HCM mis chaque année au bénéfice de la loi ne pourra pas dépasser 20% du nombre total de logements admis annuellement au bénéfice de la LGL. Actuellement, seuls 97 logements en PPE/HLM ont été construits depuis l'entrée en vigueur de l'article 37A LGL, à savoir depuis le 1er juin 1985. C'est dire que la proportion de logements en PPE/HCM sera très faible par rapport à l'ensemble de logements sociaux construits chaque année par l'Etat.
Il est bien évident que, parallèlement, l'Etat continuera à mener une politique soutenue en matière de création de logements HBM, conformément à la loi pour un plan d'urgence-logements, du 21 juin 1991.
Art. 30, al. 1
Cette disposition légale reprend la teneur actuelle de l'article 30, alinéa 1 LGL. Mais, elle précise également que, dans les immeubles de la catégorie 4, au moins 60% des logements devraient être attribués, dès la première mise en location des immeubles, à des locataires remplissant les conditions légales et réglementaires pour obtenir une subvention personnalisée.
Art. 30A
Il faut tout d'abord relever que la subvention personnalisée au logement se substitue en fait aux subventions traditionnelles accordées par l'Etat pour les logements HBM, HLM et HCM. En effet, elle ne s'adresse qu'à des personnes dont les taux d'effort correspondent ou sont supérieurs à ceux fixés par l'article 30, alinéa 3 LGL, autrement dit aux personnes qui respectent les limites de revenus prévues par l'article 30 LGL. En ce sens, les mêmes limites de revenu que celles actuellement admises pour les logements HBM, HLM ou HCM sont imposées aux locataires subventionnés de logements HM.
Toutefois, le montant maximum de cette subvention personnalisée ne peut pas excéder le double du montant de l'allocation de logement définie à l'article 39A LGL et aux articles 21 et suivants du règlement d'exécution de la LGL.
Comme exposé précédemment, la subvention personnalisée au logement est adaptée en fonction de la variation du revenu du locataire. Ainsi, dès que le revenu est tel qu'il entraîne un taux d'effort inférieur à ceux fixés par l'article 30 LGL, la subvention personnalisée est supprimée.
En revanche, si le revenu du locataire est modeste et entraîne, par conséquent, un taux d'effort supérieur à ceux définis à l'article 30 LGL, le locataire aura alors droit à une subvention personnalisée et, le cas échéant, à une allocation de logement au sens de l'article 39A et suivants LGL dans l'hypothèse où son revenu est vraiment modeste.
Il est bien évident que, si la subvention au logement varie en fonction de l'évolution du revenu du locataire, aucune surtaxe ne peut être demandée à ce dernier qui verrait son aide diminuer, voire disparaître dans l'hypothèse où son taux d'effort serait inférieur à ceux prévus par l'article 30 LGL.
Art. 31A
L'alinéa 1 de cette disposition légale est le pendant de l'article 30 du présent projet de loi et rappelle a contrario que les logements HM occupés par des personnes, dont le revenu dépasse les limites de revenus fixées par l'article 30 LGL, sont en loyers dits libres. Ces loyers restent cependant contrôlés par l'Etat, dès lors que celui-ci accorde une exonération fiscale dégressive pendant 20 ans (article 23B du présent projet de loi).
Les alinéas 2 et 3 de cette nouvelle disposition légale ne reprennent en fait que la teneur actuelle des alinéas 1 et 2 de l'article 31A LGL. Leur numérotation est, par conséquent, modifiée.
** *
Telles sont, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à éclairer et motiver le présent projet de loi et dont nous espérons, de votre part, un accueil favorable.
Préconsultation
M. Jean Opériol (PDC). Le groupe démocrate-chrétien accepte avec intérêt ce projet de loi. (Brouhaha. La présidente fait sonner sa cloche.) Il propose de le renvoyer à la commission du logement pour y être étudié. En effet, il a plusieurs mérites, dont celui de mettre, peut-être une fois pour toutes, en adéquation quasi parfaite, les prestations de l'Etat quelles qu'elles soient en matière de logement social et les différentes catégories de demandeurs de logement.
En effet, je rappelle, pour rafraîchir la mémoire de certains, que nous avons ouvert la porte des HLM à ceux qui en avaient besoin, en 1957; nous avons ouvert la porte des HCM aux demandeurs de cette catégorie, en 1969. Au passage, l'Etat lui-même et les fondations de droit public avaient répondu à la demande des locataires de catégorie HBM. (Discussions.) Aujourd'hui, nous nous apercevons que malgré le lifting apporté à la problématique de la surtaxe, certains locataires doivent, malheureusement, quitter le logement qu'ils habitent pour des questions, précisément, d'inadéquation...
La présidente. Monsieur Saurer, s'il vous plaît !
M. Jean Opériol. ...entre leur capacité contributive, leur niveau économique et la catégorie de logements subventionnés. Autant dire que le caractère un peu monolithique de la LGL actuelle sera largement amélioré par cette nouvelle catégorie d'habitation mixte. A l'intérieur d'un même immeuble - cela existe d'ailleurs déjà dans certains HLM - certains étages, par exemple les attiques, pourront avoir un loyer libre, alors que les autres auront des loyers HCM ou HLM, voire HBM dans certains cas.
Nous recommandons donc le renvoi de ce projet de loi en commission, projet de loi qui nous fait indiscutablement penser à une formule qui pourrait être taxée «d'anti-Sarcelles» !
M. Christian Ferrazino (AdG). Notre groupe ne partage pas l'enthousiasme de M. Opériol, et je m'en expliquerai brièvement.
En effet, on constate, dans ce projet de loi, que M. Haegi est devenu notre nouveau Wellhauser, c'est dire qu'il conçoit les projets sur le logement sans les locataires et contre les locataires. Vous allez voir pourquoi ! Contrairement à ce que vous prétendez, Monsieur Haegi, aucune concertation sérieuse n'a eu lieu avec les partenaires sociaux sur ce projet de loi !
Ce projet de logements mixtes, évoqué par M. Opériol, tel qu'il est proposé dans ce projet de loi, affaiblit le logement social à Genève. C'est ce que nous ne pouvons pas accepter. Je précise que ce n'est pas l'idée de la mixité en tant que telle qui est mise en cause - car c'est une bonne idée - mais la concrétisation de cette idée telle que vous la proposez dans ce projet de loi.
En effet, la mixité des logements dans un même immeuble est, bien entendu, une bonne chose dans la mesure où elle permet de faire cohabiter, à l'intérieur d'un même bâtiment, des personnes de couches sociales différentes, et je crois que tout le monde peut s'en réjouir. Vous avez choisi de remplacer le subventionnement à la pierre, tel qu'il existe, par le subventionnement à la personne, c'est-à-dire directement versé au locataire et dont le montant peut varier en fonction de la situation personnelle de ce locataire. Cette manière de faire est une mauvaise concrétisation de cette bonne idée.
En effet, Monsieur Haegi, il suffit que le locataire voie son revenu s'améliorer pour que, finalement, la proportion des logements sociaux diminue. Avec votre projet de loi, des locataires entrés dans des logements au bénéfice d'une subvention personnalisée, qui ne répondraient plus aux conditions de subventionnement, précisément parce que leur revenu aurait augmenté, pourraient néanmoins continuer à occuper ces logements, alors que ces derniers devraient être attribués à des personnes qui en ont véritablement besoin.
Ce projet de loi risque donc d'aider des personnes qui n'en ont pas besoin et d'affaiblir ainsi l'aide que l'Etat devrait apporter aux locataires de condition modeste. Actuellement - je vous le rappelle - les logements sociaux se libèrent au fur et à mesure que les locataires qui les occupent n'en ont plus besoin, c'est-à-dire lorsque les revenus de ces locataires ne correspondent plus aux normes de subventionnement. Cela permet un tournus régulier et l'affectation de ces logements sociaux à ceux qui en ont véritablement besoin.
Ce parlement avait voté la modification de 1992 sur les surtaxes et les allocations logement dans cet esprit, mais ce projet de loi, paradoxalement, va totalement à l'encontre de cette décision. Mais le comble du comble de ce projet de loi - et vous n'en parlez pas Monsieur Opériol - est qu'il prévoit une exonération fiscale totale, pleine et entière pour le propriétaire, quel que soit le revenu des locataires qui occupent cet immeuble ! La loi prévoit d'accorder une pleine exonération, dès la première année de location, alors qu'elle prévoit également que 40% des logements peuvent être occupés par des locataires dont les revenus correspondent à la possibilité d'occuper des logements libres. Et, durant toute la période de contrôle, c'est-à-dire durant vingt ans, l'exonération continue à être accordée, même s'il n'existe plus aucun locataire dans l'immeuble ayant droit à une subvention personnalisée.
Alors, Monsieur Haegi, votre projet de loi ne fait que générer des pertes fiscales et vient en aide, une fois encore, aux personnes qui n'en ont pas besoin. Et comme si cela ne suffisait pas, comme si vous vouliez couronner le tout et pour bien nous faire comprendre quels sont les gens que vous souhaitez aider, Monsieur Haegi, vous prévoyez d'affecter une partie des deniers publics à aider nos concitoyens, dont les revenus sont confortables et qui disposent d'une douillette fortune en banque, à devenir propriétaire de leur logement.
Mesdames et Messieurs, n'allez pas croire qu'il s'agit d'avances faites par l'Etat et qui seraient remboursables, avec des intérêts favorables ! Pas du tout ! Il s'agit ni plus ni moins de subventions à fonds perdus - je dis bien de subventions à fonds perdus ! - que M. Haegi propose d'octroyer très généreusement à des locataires dont les revenus peuvent atteindre 120 000 F par année et dont la fortune peut se monter à 250 000 F. Voilà la proposition faite aujourd'hui par M. Haegi !
Alors, si l'état actuel de nos finances justifie que l'on fixe des priorités dans le domaine du logement social, ce n'est pas celle visée par votre projet en faveur des riches. Monsieur Haegi, vous êtes en train de rallumer la guerre du logement à Genève !
Sachez toutefois, Monsieur le président, que les associations de locataires sont prêtes à vous répondre, comme elles ont répondu, à l'époque, à M. Wellhauser qui avait eu la même envie que la vôtre !
M. David Hiler (Ve). Notre groupe a lu, avec un certain intérêt, les différentes déclarations de M. Claude Haegi, concernant la «paix du logement».
A ce propos, nous aimerions rappeler, pour la bonne forme, que la «paix du logement», c'est lorsque deux partenaires parviennent à un accord sous l'égide de l'Etat. Il semblait que nous allions dans la bonne direction et que le Rassemblement pour une politique sociale du logement et la Chambre genevoise immobilière travaillaient de concert, depuis un certain nombre de mois. Or, le Conseil d'Etat, pour une raison ou pour une autre, a voulu - semble-t-il - accélérer les choses, sans attendre la fin des négociations concrétisées par un accord en bonne et due forme entre ces deux partenaires.
Comme M. Ferrazino l'a indiqué et comme son ton le confirme - car la représentativité de celui-ci sur cet objet ne fait guère de doute - la «paix du logement» sera pour une autre fois, à moins que nous parvenions, en commission, à améliorer ce projet sérieusement ! A ce stade, le regret du parti écologiste genevois est que l'Etat n'ait pas poursuivi les négociations avec les deux partenaires principaux de ce secteur pour aboutir à un projet de loi consensuel. En effet, un projet de loi concernant le logement, qui n'aurait pas l'aval de la Chambre genevoise immobilière, pourrait poser problème parce que, malgré tout, les investisseurs sont indispensables. Inversement, un projet de logement social qui serait refusé par le Rassemblement pour une politique sociale du logement serait - permettez-moi de vous le dire - un projet relativement louche et suspect, car je vois mal comment ce dernier pourrait s'opposer à un bon projet de logement social.
Faute d'avoir donné le temps au temps, nous nous trouvons maintenant dans une situation relativement difficile, parce qu'il va peut-être falloir faire des arbitrages en commission et engager des négociations. Nous maintenons qu'il aurait été préférable de laisser le Rassemblement et la Chambre genevoise immobilière aboutir à un accord, plutôt qu'à ce qui nous a paru être davantage un coup de publicité relativement malvenu qu'une prise de responsabilité politique !
Il ne suffit pas d'écouter les gens pour instaurer la «paix du logement», il faut que des accords soient conclus entre partenaires. La «paix du logement» est un terme qui découle de la «paix du travail», et celle-ci repose sur des accords signés entre partenaires représentatifs. Ils existent aujourd'hui sur la scène du logement : il suffit de leur donner le temps de travailler. A notre sens, l'Etat ne devrait intervenir ainsi que s'il s'avérait impossible, lors de ces négociations, de parvenir à un accord - ce qui pourrait effectivement arriver. Or, d'après ce que nous avons compris, les négociations étaient encore en cours au moment où ces projets de lois ont été présentés.
Nous devons donc travailler longuement. J'aimerais tout de même rappeler que toutes les votations sur le logement ont donné la victoire au Rassemblement pour une politique sociale du logement, ces quinze dernières années. Si nous devions en arriver à ces pénibles extrémités, il n'en serait pas autrement cette fois !
M. Pierre Kunz (R). Décidément, Monsieur Hiler, chaque fois que la droite s'occupe de logement social, c'est pour se faire de la publicité !
Mesdames et Messieurs les députés, la modification légale qui nous est soumise par le Conseil d'Etat, à n'en pas douter, et contrairement à ce que prétendent certains, constitue une réforme intéressante et intelligente. Ce projet de loi n'affaiblit aucunement le logement social, mais, au contraire, il le rend possible, au vu des nouvelles donnes de la société dans laquelle nous vivons.
Les radicaux saluent donc cette volonté de réforme en profondeur manifestée par le gouvernement, une réforme dont les aspects positifs sont évidents.
En premier lieu, l'introduction de la nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation dite «mixte» permettra à ce Grand Conseil de mettre un terme à l'une des conséquences sociales les plus nuisibles de la loi actuelle, à savoir l'inexorable découpage de notre canton en quartiers et en communes pour les uns riches, pour certains moins riches et pour d'autres carrément en difficulté.
Les incidences fiscales et sociales plus nuancées, que feront peser les modifications démographiques de la construction de ces immeubles sur les communes hôtes de ces habitations, devraient contribuer au développement du logement social dans les communes qui - comme c'est le cas dans la mienne, à Laconnex - refusent obstinément d'apporter leur contribution, leur effort de solidarité, à la construction de ces logements sociaux.
En deuxième lieu, la nouvelle loi privilégie clairement l'allocation personnalisée, cela tout aussi clairement au détriment des aides à l'exploitation. Ces aides constituent, manifestement, la source la plus puissante non seulement des coûts de construction élevés du logement social mais également du gonflement incontrôlé de la masse des subventions englouties à fonds perdus dans le financement du logement social, sans parler des incohérences fonctionnelles et des lourdeurs administratives considérables qui caractérisent le système HLM actuel.
En troisième lieu, il convient de mettre en exergue une autre qualité de ce projet de loi qui apporte - enfin, pourrait-on dire - une réponse satisfaisante à ceux qui, même s'ils ne disposent que d'un revenu moyen, désirent acquérir leur logement. Or, aussi bien socialement que fiscalement ou encore économiquement, l'accroissement du nombre de propriétaires est favorable pour un canton comme Genève.
Enfin, la réforme qui nous est soumise est susceptible de réconcilier Genève avec les investisseurs privés dont l'intérêt, depuis plusieurs années, s'était considérablement effrité, particulièrement dans le secteur du logement social, à cause de la rigidité et de la lourdeur du tissu législatif que nous connaissons.
Certes, Mesdames et Messieurs, cette réforme, pour profonde qu'elle soit, ne constitue qu'un premier pas, un grand pas. Manque encore, notamment, ce que Beat Kappeler appelle, et pour cause, «un assouplissement radical des normes et des règles de la construction», car, comme l'écrivait notre collègue M. Moutinot dans son journal préféré, en juin de l'année dernière : «On peut faire moins cher !».
Il n'empêche que ce projet de loi est accueilli très favorablement par le groupe radical. Il faut dire qu'il rejoint largement - vous vous en êtes aperçus - les objectifs poursuivis par une bonne partie des radicaux. Nous vous recommandons donc, bien entendu, de renvoyer ce projet de loi en commission, où il pourra faire l'objet d'une étude approfondie.
M. Laurent Moutinot (S). Mesdames et Messieurs les députés, tout comme M. David Hiler, je regrette la genèse de ce projet de loi et la rupture des négociations tripartites en cours. Il est, bien entendu, du droit de l'Etat de relancer un dossier lorsque celui-ci est bloqué. Cela n'était pas le cas, et il est regrettable que la concertation, si souvent prônée par le Conseil d'Etat, n'ait malheureusement pas eu lieu dans cette affaire.
Ce projet de loi comporte deux idées : une bonne, dont la solution n'est pas satisfaisante, et une mauvaise.
La bonne idée, c'est la mixité, parce qu'il est évident que l'encouragement au brassage des populations évite les ghettos, le délogement, et peut favoriser la fiscalité des communes. Par conséquent, nous souscrivons au but visé, c'est-à-dire la mixité dans les logements. Malheureusement, le système proposé ne peut pas être accepté, parce qu'il risque de provoquer une diminution du nombre de logements sociaux, par le biais d'un système qui laisse jusqu'à 40% des logements d'un même immeuble en secteur libre. L'attractivité de ce système auprès des investisseurs est certaine, mais son corollaire immanquable est la baisse du nombre de logements sociaux. De plus, ce système entraîne la généralisation de l'aide à la personne en lieu et place de l'aide à la pierre.
Plus techniquement, ce projet pose des problèmes extrêmement compliqués, s'agissant notamment du calcul du barème d'entrée. En effet, dans ce barème d'entrée, le loyer dépend du revenu et le revenu du loyer : je ne sais pas comment l'on compte sortir de ce cercle vicieux !
Deuxième problème technique : que se passe-t-il, si par le biais de leur augmentation de revenu, plus de 40% des locataires d'un immeuble se trouvent hors du système subventionné ?
Troisième anomalie de ce système : pourquoi l'exonération fiscale est-elle indépendante du revenu des locataires, donc de la nécessité d'aider ?
Quatrième problème : dans la mesure où la subvention à la personne est élevée, les loyers feront un bond considérable lorsque l'immeuble sortira du contrôle. Ces problèmes existent déjà à la sortie du contrôle, mais ils seront probablement deux fois plus importants, puisque le montant de la subvention est multiplié par deux.
Nous sommes donc prêts à étudier un système favorisant la mixité, mais avec des refontes extrêmement importantes, pour que nous puissions adhérer à ce projet.
L'autre aspect de ce projet de loi n'a rien à voir avec le premier : il s'agit de l'accession à la propriété par le biais de la propriété par étage HCM. J'ai déjà dit tout le mal que je pensais de ce système qui consiste, lorsque les finances publique sont basses, à privilégier une catégorie de la population qui n'en a pas besoin. Je crois qu'il faut recentrer l'aide étatique pour ceux qui en ont véritablement besoin, quitte - comme cela a déjà été dit - à ce que la catégorie HCM ne bénéficie plus d'aide, si elle n'en a pas besoin, ni en location, ni, surtout, en propriété.
M. René Koechlin (L). Que ce projet de loi suscite des jaunisses parmi nos collègues des bancs d'en face ne nous surprend guère ! Quelques-uns, parmi ces députés, souffrent d'hépatite et digèrent mal les plats, si succulents soient-ils, que leur offre le Conseil d'Etat, surtout lorsque ces mets sont conçus pour nourrir les personnes dans le besoin dont les partis de gauche prétendent monopoliser la défense !
Contrairement à ce que laissait entendre M. Ferrazino tout à l'heure, il n'est pas question d'aider des personnes qui n'en ont pas besoin, et l'affirmer est franchement ridicule. Il est plutôt question de remplacer le paiement d'une surtaxe par la dégressivité de la subvention, ce qui est la fois beaucoup plus simple et - vous l'avouerez - psychologiquement plus positif. Il n'est donc pas du tout question d'aider les riches; d'abord qui est riche, qui l'est moins : c'est une différenciation difficile à établir, Monsieur Ferrazino !
Que ce projet de loi comporte des défauts, nous en convenons ! Et il faudra bien en parler en commission pour y remédier, si l'on parvient à les déceler et s'ils sont réels : c'est d'ailleurs pour cela que ces projets sont travaillés en commission. Vous savez bien, par ailleurs, que ce genre de projets relatifs au logement demandent à être appliqués pendant un certain temps. Cela permet de déceler, au fil des années, les éventuels défauts qui ne sont pas faciles à voir au moment de l'examen des textes. Et il est toujours assez tôt pour apporter ensuite les corrections qui s'imposent.
Il faut tout de même reconnaître que ce projet de loi constitue une intéressante tentative d'assouplissement de la loi générale sur le logement et, plus généralement, de l'aide aux locataires. Par la création d'une nouvelle catégorie d'immeubles d'habitation mixte, le projet propose - comme le relevait tout à l'heure M. Moutinot - d'intégrer l'aide à la pierre et l'aide personnalisée. Un système de subventionnement adaptable, sans surtaxe, au revenu du bénéficiaire et à son évolution dans le temps est éminemment souhaitable.
Notre groupe salue, en passant, le travail du Conseil d'Etat qui a préalablement consulté les milieux intéressés et, même si cette consultation n'a pas donné tous les fruits attendus, elle a tout de même eu lieu. Nous pourrons la parfaire en commission.
Ce projet devrait aussi donner satisfaction aux communes qui, pour des raisons fiscales, rechignent à accueillir de fortes concentrations de logements subventionnés, notamment HLM et HBM. Onex, Avully et Vernier, pour ne citer qu'elles, en savent quelque chose ! Cette catégorie d'habitation mixte répond au problème des jeunes natifs que les communes tentent d'héberger à des conditions variées, car ces jeunes n'ont pas tous les mêmes revenus et n'appartiennent pas tous aux mêmes catégories sociales. Une commune qui ne compte pas beaucoup de jeunes, mais qui tient à les héberger, doit pouvoir disposer d'un outil lui permettant de s'adapter à leurs différents moyens.
La présidente. Monsieur Koechlin, le temps de parole en préconsultation est de cinq minutes !
M. René Koechlin. J'en suis à combien, Madame la présidente ?
La présidente. Vous avez utilisé votre temps de parole, mais, je vous en prie, terminez votre intervention !
M. René Koechlin. Je n'en dirai pas plus, Madame, puisque le temps est passé ! J'avais encore d'autres choses à exprimer, mais je le ferai en commission. Je me réjouis d'étudier ce projet, car il me paraît intéressant; il devrait, en fin de compte, donner satisfaction à tout le monde.
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Certes, tout est perfectible, y compris la concertation ! M. Hiler a mentionné en commission l'exemple de l'Allemagne où l'on peut aboutir à un accord, ensuite ratifié par le pouvoir politique, entre partenaires économiques. Chez nous, le fonctionnement est un peu différent, et le pouvoir politique conserve les prérogatives qui sont les siennes.
Durant ces dernières semaines, nous devions examiner deux projets : une modification de la LDTR et une modification de la loi générale sur le logement. Dans le cadre de la LDTR, le dialogue a été engagé, mais il ne débouche sur rien de concret, car les positions sont figées, et nous nous rendons bien compte qu'une décision politique devra être prise.
Il nous a fallu neuf séances pour examiner la loi générale sur le logement, mais il nous en aurait peut-être fallu une dixième pour éviter toute interprétation des réflexions exprimées durant ces séances. Pendant ces séances, tant le Rassemblement que la Chambre genevoise immobilière et mon département ont exprimé des avis sur la matière que nous traitions. Arrivés au terme de ces neuf séances, j'ai signalé que nous prendrions nos responsabilités politiques, que le département rédigerait un projet après avoir écouté les uns et les autres, qu'il le présenterait au Conseil d'Etat et que ce dernier, à son tour, prendrait le relais. C'est ce qui s'est produit. Nous aurions pu imaginer aller plus loin, mais, vu le contexte dans lequel nous vivons et la répartition des tâches des uns et des autres, il n'y a pas de quoi à être choqué.
J'ajoute que la concertation peut se pratiquer avec les partenaires, comme évoqué tout à l'heure, mais elle doit surtout se faire sur le terrain, au quotidien. C'est dans cet esprit que je rencontre régulièrement les différentes coopératives d'habitation de Genève, qui sont nombreuses et imaginatives, ainsi que les syndicats de ce canton, qui ont présenté un projet que nous étudions, mais sur lequel nous n'avons pas encore pu donner de réponse définitive - nous avons même localisé un terrain pour le concrétiser - et nous admettons parfaitement que plusieurs solutions sont possibles pour répondre au problème du logement. Ça, c'est de la véritable concertation, ce n'est pas un spectacle : c'est l'expression d'une volonté d'arriver à une solution concrète plus efficace encore que le fait de légiférer !
Légiférer permet de créer un cadre permettant d'aller plus loin, mais les éléments que je vous donne, eux, sont tout à fait pragmatiques. Je pourrais vous donner toute une série de contacts que nous avons pris avec des groupements, tels que la CODA qui s'occupe de logements alternatifs et avec laquelle nous avons imaginé un bail associatif que nous avons l'intention de développer. Les démarches sont multiples et seules des personnes de mauvaise foi peuvent prétendre qu'il n'y a pas de véritable concertation. Pour ma part, j'admets que celle-ci peut être améliorée, mais je réfute tout à fait les propos laissant supposer qu'elle est inexistante !
De plus, il y a quelques semaines, le Rassemblement tenait conférence de presse et saluait la qualité du dialogue avec MM. Haegi et Joye, en se félicitant de cette concertation. Il est vrai que certains événements nouveaux se sont produits depuis et qu'une séance de plus a sans doute manqué, mais de là à remettre complètement en question le travail effectué pendant dix-huit mois, c'est un pas que je ne franchirai pas ! Ce serait faire injure au Rassemblement qui compte en son sein un certain nombre de personnes parfaitement correctes et bien intentionnées, désireuses d'apporter leur contribution au problème du logement.
Mesdames et Messieurs les députés, le projet qui vous est soumis répond aux problèmes auxquels sont exposés les locataires, les communes - cela a été évoqué tout à l'heure - et les investisseurs. En ce qui concerne les locataires, nous avons tous été les témoins - et plusieurs députés ont déjà relevé ce problème devant ce Conseil - que le manque de flexibilité de la législation entraînait des déplacements inutiles et des déracinements que nous devons absolument éviter. Ce projet de loi va dans ce sens.
Par ailleurs, ce projet de loi tient compte des limites des moyens de l'Etat, et, lors de notre rencontre, le groupement des syndicats de ce canton a exprimé son sens des responsabilités en soulignant qu'il savait très bien que nous ne pourrions pas faire plus, tout en demandant au gouvernement de maintenir ses efforts dans le domaine du logement. Il a souhaité que ces efforts soient bien orientés : c'est ce que j'ai demandé, Mesdames et Messieurs les députés, lorsque nous avons revu la LGL, il y a maintenant un an et demi ou deux ans, en suggérant la révision des barèmes HBM, HLM et HCM.
A ce moment-là certains députés, qui se sont exprimés ce soir, avaient trouvé qu'il ne fallait pas trop les baisser, car cette classe moyenne, dont on dit tout d'un coup tant de mal maintenant, devait être défendue, selon eux, il y a encore quelques mois. C'est dire, d'une certaine manière, que je me réjouis de cette évolution, car je constate que j'ai convaincu ceux qui avaient un avis différent auparavant. Mais nous devons être cohérents et éviter les excès auxquels nous sommes visiblement exposés aujourd'hui.
S'agissant des investisseurs, nous constatons une diminution indiscutable de la marque d'intérêt de ces derniers dans le secteur du logement. En prononçant le mot «propriétaires», certains pensent que ces derniers détiennent une fortune tout à fait condamnable, oubliant que la majorité du parc immobilier actuel se trouve entre les mains des institutions de prévoyance soucieuses de l'intérêt de leurs assurés ! Comment peut-on faire des procès d'intention à ces propriétaires, qui poursuivent, eux-mêmes, un but social.
Alors, oui, Mesdames et Messieurs les députés, il faut trouver le moyen de suggérer à ces investisseurs institutionnels de préférer encore l'immobilier par rapport à d'autres types d'investissement vers lesquels ils sont tentés de se tourner. Certains peuvent bien crier au scandale en voyant les quelques avantages fiscaux que nous voulons donner à ces investisseurs, mais alors qu'ils ne s'étonnent pas de l'absence d'investissement dans la pierre, investissement que nous appelons maintenant de nos voeux.
Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, l'accession à la propriété donne depuis longtemps, à Genève en particulier, de l'urticaire à certains. Dès qu'on parle de propriété, l'idée de richesse et de capitaux déposés en banque est sous-entendue. C'est un discours totalement ringard ! Même les forces socialistes des pays qui nous entourent l'ont bien compris et tiennent des discours dynamiques dans ce domaine, ce qui est rassurant, d'une part, parce que l'accession à la propriété est un acte social et, d'autre part, parce qu'il ne fait pas l'ombre d'un doute que celle-ci permet de jouer un rôle déterminant pour la relance de l'économie.
Mais qui la relance intéresse-t-elle ? Je ne suis pas du tout convaincu qu'elle intéresse tous les membres de ce Grand Conseil ! Toujours est-il que s'il y avait vingt mille propriétaires de plus dans ce canton - ce qui n'est pas un objectif utopique - notre programme porterait sur un montant de l'ordre de 8 milliards, et pourrait être développé sur une petite dizaine d'années, ce qui représenterait pratiquement 1 milliard par année. Comment des choses aussi évidentes peuvent-elles échapper à des personnes soucieuses de l'intérêt de notre communauté genevoise ?
Bien sûr, nous pourrons parler de tout cela en commission, mais j'espère que nos travaux s'effectueront rapidement, mais sans rien négliger, de manière à donner des réponses à ceux qui en attendent. En effet, il est urgentissime d'agir dans ce domaine. Nous ne saurions imaginer de prétexter une longue concertation pour éviter de répondre aux questions posées clairement, alors que des propositions, également claires, ont déjà été faites.
Ce projet est renvoyé à la commission du logement.