République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 4 mai 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 6e session - 21e séance
P 1005-A
Le Grand Conseil a reçu, le 13 juillet 1993, la pétition suivante, munie de 25 signatures:
PÉTITION
Mesdames et
Messieurs les députés,
Au nom des locataires des appartements des immeubles 7-9, rue des Allobroges et 43-45, rue Caroline situés côté cour où sont installés les locaux de l'imprimerie Victor Chevalier (impasse 12, rue des Mouettes), nous vous adressons la présente pétition.
Pour la bonne compréhension de notre problème, il convient de préciser que le bruit résultant des activités de l'imprimerie Victor Chevalier se trouve d'autant plus amplifié du fait qu'il s'agit d'une cour fermée sur trois faces, avec un effet de résonance important.
Depuis plusieurs années déjà, à maintes reprises, mais hélas sans succès, nous nous sommes adressés, non seulement à l'un des responsables de l'imprimerie, mais également au service d'écotoxicologie.
Dès que le temps le permet, l'imprimerie maintient ses portes ouvertes. Ses activités de manutention (chargement et déchargement) débutent aux environs de 6 h 30 déjà. Les rotatives fonctionnent fort tard dans la journée, soit jusqu'à 21 h ou 22 h, même pendant certains jours fériés, comme ce fut le cas encore récemment le samedi et le lundi de Pentecôte. De plus, le bruit produit par les machines oblige les employés à s'exprimer à très haute voix, dans leurs rapports professionnels, au point que les propos échangés sont perçus jusque dans les étages supérieurs.
Enfin, la proximité immédiate de 2 saloons, dont les habitués utilisent pour leurs voitures les parkings devant nos immeubles, augmente encore les nuisances déjà relevées, cris et claquements de portières ne nous étant pas épargnés.
Tous les désagréments cités plus haut ont pour conséquence de graves perturbations pour nous, locataires, non seulement la nuit, mais également la journée. Même nos balcons ne peuvent être utilisés normalement.
Nous ne revendiquons pas l'impossible et avions émis quelques suggestions pour pallier les inconvénients relevés: équipement d'air conditionné pour l'imprimerie, permettant la fermeture des portes et fenêtres - roues silencieuses pour les chariots de transport - livraisons et gros transports dès une heure décente le matin.
Les locataires de nos immeubles vous seraient extrêmement reconnaissants de bien vouloir intervenir, afin de leur permettre d'accéder à une certaine qualité de vie, qu'ils sont en droit d'attendre.
Cette pétition a été examinée par la commission des pétitions, dans son ancienne composition, sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, les 4 et 18 octobre 1993, puis suspendue. A la nouvelle législature, la commission, présidée par Mme Liliane Johner, a réexaminé la pétition et soumet à présent ses conclusions au Grand Conseil.
Dans son ancienne composition, la commission a auditionné les pétitionnaires, Mmes Crelier, Kohli, Rossier et Martinez, ainsi que le directeur de l'Imprimerie genevoise Victor Chevalier S.A., M. André Koelliker.
Auditions
Mmes Crelier, Kohli, Rossier et Martinez sont des locataires du 7, rue des Allobroges à Carouge, et leurs appartements donnent sur une cour intérieure. Dans cette cour se trouvent, outre un parking privé, deux groupes de locaux artisanaux qui abritent, entre autres, un atelier de réparation de voitures et une imprimerie. Si le garage ne semble pas poser de grands problèmes, il en va différemment de l'imprimerie qui, aux dires des pétitionnaires, engendre de nombreuses nuisances: bruits de machines, conversations à voix haute entre les ouvriers, livraisons matinales bruyantes et odeurs de solvants désagréables. Sans compter, accessoirement, le bruit des voitures se garant dans le parking privé. Il faut préciser que ces inconvénients sont ressentis surtout en été, quand les fenêtres sont ouvertes, et ajouter la résonance provoquée par le fait que la cour, un quadrilatère, est fermée sur trois côtés par des immeubles d'habitation. De plus, les pétitionnaires reprochent à l'imprimerie de déployer ses activités dès 6 h 30 le matin jusqu'à 21 h voire 23 h, ainsi que des jours fériés. Les pétitionnaires précisent que le problème existe depuis 30 ans! Ces dernières années, il semble que les positions des voisins se soient durcies. Les locataires de la rue des Allobroges ont demandé qu'une expertise sur l'intensité des nuisances phoniques soit effectuée par les services de l'écotoxicologue cantonal sans que cette tentative aboutisse, à cause de diverses difficultés d'exécution.
La commission a ensuite entendu M. Koelliker, directeur de Victor Chevalier Imprimerie genevoise S.A. L'imprimerie, une des quatre plus importantes du canton, reçoit des commandes de façon irrégulière. Elle doit les honorer le plus rapidement possible pour rester concurrentielle. C'est pourquoi le travail se prolonge parfois jusque tard dans la nuit.
Conscient que le bruit des machines pouvait incommoder le voisinage, M. Koelliker a fait installer la climatisation dans ses ateliers. Il a même, récemment, ajouté un dispositif pour rendre le climatiseur plus silencieux. Par diverses mesures, il a essayé de rétablir un certain confort auditif à l'intension des locataires des immeubles environnants. Pour les odeurs de solvant, il semble malheureusement qu'il n'y ait pas grand-chose à faire. Quant à déménager, actuellement cela lui serait impossible, pour des raisons financières. Il ajoute que certains immeubles existaient déjà à cet endroit en 1961, quand l'imprimerie est venue s'installer. Il va essayer de renouer le dialogue avec ses voisins et fait montre de bonne volonté.
Discussions de la commission
Le problème posé par cette pétition est, hélas, bien difficile à résoudre. Il résulte du voisinage indésirable entre des locaux à vocation artisanale et des immeubles résidentiels. Les intérêts des occupants, des uns et des autres ne sont pas aisés à concilier et il découle souvent de leurs divergences des affrontements, ou, tout au moins, des blocages et une certaine incommunicabilité.
Le directeur de l'imprimerie a pourtant fait preuve de bonne volonté. Pour ne plus avoir à ouvrir les fenêtres en été, il a fait installer la climatisation et a pris des mesures diverses pour diminuer le bruit. En tant que dirigeant d'entreprise, dans un domaine, les arts graphiques, ultra-sensible à la conjoncture économique, donc, nécessitant une grande souplesse d'adaptation et une grande rapidité d'exécution, il n'a pas une énorme marge de manoeuvre s'il veut conserver des places de travail tout en ménageant le voisinage.
Mais, d'un autre côté, les locataires, ses voisins, ont évidemment droit au repos et au maximum de calme, en tout cas pendant la nuit.
Malgré cela, quand il s'est agi de faire mesurer l'intensité du bruit qu'ils avaient à subir par les services de l'écotoxicologie, les locataires n'ont, semble-t-il, pas fait preuve d'un esprit coopératif bien marqué, refusant l'accès de leurs balcons sous divers prétextes. D'autre part, une expertise est difficile à planifier car, on l'a vu, les activités de l'imprimerie sont irrégulières, donc malaisées à prévoir. Enfin, d'autres voisins affirment ne subir aucune nuisance auditive ou olfactive.
Si chacun y mettait du sien, les choses pourraient facilement s'arranger. C'est, du reste, ce qui semble se passer actuellement. Il n'y a plus eu d'escarmouches depuis quelque temps, même si, il faut le reconnaître, le problème se fait plus aigu en été. La commission encourage les voisins et l'imprimeur à recourir à la discussion chaque fois que cela sera nécessaire. Et elle vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité, de bien vouloir déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.