République et canton de Genève

Grand Conseil

IN 105
23. a) Initiative populaire «Pour l'emploi contre l'exclusion». ( )IN105
IN 105-A
b) Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la validité et la prise en considération de l'initiative populaire «Pour l'emploi contre l'exclusion». ( -)IN105

IN 105

LANCEMENT D'UNE INITIATIVE

La Communauté genevoise d'action syndicale et le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs ont lancé l'initiative populaire suivante intitulée « Pour l'emploi, contre l'exclusion », qui a abouti.

1.

Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le  

23 décembre 1994

2.

Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le  

23 mars 1995

3.

Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le  

23 septembre 1995

4.

Décision du Grand Conseil au sujet de la prise en considération de l'initiative sur la base du rapport de la commission en charge, au plus tard le  

23 juin 1996

INITIATIVE POPULAIRE

«Pour l'emploi, contre l'exclusion»

Genève est confrontée depuis le second semestre de 1990 à un chômage important. Or, depuis cette période, tant au niveau de sa politique économique que du traitement social du chômage, le Conseil d'Etat n'a développé aucune action d'envergure, comme s'il considérait l'augmentation du chômage, et l'exclusion sociale qui en découle, comme une fatalité.

Face à cette attitude de laisser faire, la Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS) et le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT) lancent une initiative visant à contraindre les pouvoirs publics à adopter toutes les mesures adéquates en matière de politique économique et de traitement social du chômage.

A défaut de pouvoir supprimer le chômage par des mesures cantonales, CGAS et SIT se fixent pour objectif de rompre avec le laisser-faire, de créer un nouvel élan économique et social et, enfin, de mettre un terme à l'exclusion sociale qui découle du chômage de longue durée.

Les soussignés, électrices et électeurs dans le canton de Genève, en application des articles 64 et 65 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 94 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, appuient la présente initiative non formulée, qui a pour but de légiférer dans le sens du texte figurant ci-après:

INITIATIVE POPULAIRE

«Pour l'emploi, contre l'exclusion»

A. Politique économique: créer des emplois, agir de manière anticyclique, réformer la fiscalité

1. Développer une politique économique

Il prend en compte la dimension régionale, la nécessité d'un développement durable et veille à l'amélioration des infrastructures afin de garantir des conditions-cadres attractives: transports (lien avec le réseau TGV, modernisation de l'aéroport), télécommunications, protection de l'environnement, qualité de la vie, formation et perfectionnement pro-fessionnels, logements pour toutes les catégories de résidants.

En tant qu'employeur, il développe une politique visant à maintenir les postes de travail dans la fonction publique pour lutter contre le chômage et préserver les prestations à la population, en concertation avec les syndicats.

1.2   La politique de promotion économique, en lien avec la région, vise particulièrement:

· les entreprises, à haute valeur ajoutée, destinées à l'exportation, notamment: biotechnologie, biomédical, haute technologie, protection de la nature, dépollution, technologie d'information, mécatronique;

· les entreprises de recherche: environement, culturel, santé;

· les entreprises privées et publiques utiles au rôle international de Genève: organisations internationales et humanitaires, tourisme, consultant;

· les emplois de proximité répondant aux besoins sociaux en constante évolution: personnes âgées, garde d'enfants, mais aussi dans les domaines culturels, sportif et associatif.

1.3   Les moyens disponibles s'adressent prioritairement aux PME et aux entreprises coopératives ou qui associent les travailleurs-euses à la gestion: cautionnement, prise en charge partielle des intérêts, allégements fiscaux transparents, aide administrative (recherche de terrains, subventions fédérales, permis de travail, marketing), mise en réseau avec des institutions de recherche (CERN, OMS, universités, EPFL), bonus à la rénovation.

L'Etat veille à ce que la Banque cantonale joue un rôle de soutien à l'activité économique locale et aux emplois ou qu'elle ne s'engage pas dans des projets contribuant à la spéculation.

L'Etat lutte contre la spéculation foncière qui déstabilise les entreprises au détriment de l'emploi.

1.4   L'Etat intègre la dimension régionale dans ses décisions, notamment en:

· s'assurant de la complémentarité des mesures régionales;

· équilibrant les pôles d'habitation et d'activités;

· dynamisant les échanges;

· organisant des réseaux de transports publics efficaces.

1.5   Le suivi et la transparence de la politique économique sont garantis par une structure à créer associant les partenaires sociaux et l'Etat et travaillant avec les banques. Cettre structure est également destinée à convoquer les entreprises qui ont annoncé à l'office cantonal de l'emploi (OCE) leur intention de licencier et à examiner toute mesure alternative aux licen-ciements.

Le Conseil d'Etat informe le Grand Conseil deux fois par an des mesures prises.

2. Agir de manière anticyclique

2.1   L'Etat s'engage dans une politique économique anticyclique de soutien à l'emploi dans les périodes conjoncturelles difficiles par le biais de son budget d'investissement et par la politique de l'emprunt. A cet effet, il constitue des réserves pendant les périodes favorables. Les critères utilisés pour définir une période conjoncturelle sont les différents indicateurs quantitatifs et qualitatifs de l'économie cantonale et des secteurs d'activité économique.

2.2   Les investissements sont prioritairement affectés à des réalisations représentant un caractère d'utilité publique, répondant aux besoins sociaux créateurs d'emplois et favorisant une politique régionale (développement des transports publics, construction de logements sociaux, infrastructures de formation). Ils sont, si possible, combinés avec des investissements privés de manière à dégager un effet multiplicateur de la politique d'investissement public. Les possibilités de mise en place de sociétés mixtes sont étudiées.

3. Réformer une fiscalité qui pénalise l'emploi

La fiscalité cantonale sur les personnes morales est réformée de manière à mettre sur pied un système d'imposition proportionel sur les seuls bénéfices et non pas sur l'intensité du rendement (= rapport bénéfice/capital), qui pénalise actuellement les entreprises à faible capitalisation. Un rééquilibrage en faveur de ces dernières, souvent fortes pourvoyeuses d'emplois, sera rétabli par une pression fiscale accrue sur les entreprises à forte intensité de capital pour un volume total de rentrées fiscales équivalant à celui d'aujourd'hui.

B. Emploi, formation, temps de travail

· permettre à qui le souhaite d'accéder à la formation, assurer une qualification de base aux nombreux-ses salariés-es non qualifiés-es auxquels-les Genève a fait appel jusqu'ici;

· permettre à qui le souhaite d'accéder à la formation continue, promouvoir une requalification ou une qualification supplémentaire pour le personnel moyennement qualifié.

· une «carte de crédit annuel» de formation permettant de suivre des cours professionnellement utiles dans une institution d'utilité publique et équivalant à 40 heures de cours;

· l'accès pour qui le souhaite à un bilan personnel après cinq ans de travail salarié et un an dans la même entreprise;

· une politique d'information de toutes les possibilités de formation;

· la mise sur pied d'une structure d'appui pour la réalisation des projets de formation des acteurs sociaux concernés (entreprises, associations professionnelles...);

· l'organisation à l'intention plus particulièrement du personnel non qualifié, de cours collectifs en vue de la préparation au CFC selon l'article 41 de la loi fédérale sur la formation professionnelle.

Une structure tripartite est mise en place. Elle associe l'office d'orientation et de formation professionnelle (OOFP), l'office de la promotion économique et l'office cantonal de statistique (OCSTAT).

5. Encourager la création d'emplois par la réduction du temps de travail

· affectation prioritaire des gains de productivité à la diminution de l'horaire hebdomadaire du travail;

· maintien de la protection sociale;

· implication des travailleurs-euses de l'entreprise;

· accord des salariés concernés et des partenaires sociaux de la branche.

C. Traitement social du chômage: le chômage sans l'exclusion

6. Mettre un terme à l'exclusion

6.1

· L'Etat a pour tâche de mettre fin à l'exclusion due au chômage de longue durée par le développement des occupations temporaires (OT) utilisables chaque délai-cadre. Celles-ci sont d'une durée de 6 mois et interviennent dès la 1re année de chômage.

· Si le terme des indemnités journalières de la LACI intervient avant la fin du délai-cadre de prestation, une nouvelle OT - dont la durée doit permettre l'ouverture d'un nouveau droit LACI - est proposée.

· Le but de ces mesures est d'éviter tout recours à l'assistance publique pour les chômeurs-euses en fin de droit LACI.

6.2

· L'OT individuelle tient en principe compte des compétences de la personne à qui elle est proposée. Elle peut également faciliter un recyclage. Elle doit, en tout état de cause, viser à augmenter l'aptitude au placement. Pour ce faire, elle est jumelée avec un plan de formation intégré à l'horaire hebdomadaire de travail.

· Les mesures d'OT peuvent être combinées avec des mesures d'allocations d'initiation au travail (AIT) prévues par la LACI.

6.3   L'Etat assure la perte de gain des personnes en OT qui seraient en incapacité de travail.

6.4   Afin de trouver de nouvelles places d'OT, l'Etat crée ou encourage des programmes d'OT collectives dont le caractère d'utilité publique est fondamental; il établit un réseau de collaboration avec les associations et organisations sans but lucratif, les organisations non gouvernementales. Il peut autoriser, sous contrôle des partenaires sociaux, des projets précis d'OT dans le cadre d'entreprises.

L'Etat veille, par le biais d'un contrôle tripartite, à ce que les programmes d'OT collectives ne soient pas en concurrence avec les entreprises, qu'une OT, une AIT ou un stage ne remplacent pas un poste de travail ou que ces placements (stages, IT) ne soient pas des aides déguisées aux entreprises.

6.5   Toute personne au chômage depuis plus de 3 mois s'inscrit, en priorité auprès d'institutions d'utilité publique, pour effectuer un bilan, suivre des cours de techniques de recherche d'emploi (TRE), participer à un club d'emploi, à une entreprise d'entraînement, etc.

7. Réinsérer les sans-emploi

Le fonds genevois de chômage est transformé en fonds destiné à allouer des prestations sur le modèle actuel pour toute personne souhaitant se réinsérer sur le marché du travail et n'ayant pas droit aux indemnités fédérales de chômage.

8. Instaurer une contribution sociale généralisée (CSG)

Pour financer le nouveau programme d'OT, complémentaire à celui prévu aujourd'hui par la loi, et le fonds cantonal de chômage, une contribution sociale généralisée est instituée. Elle est prélevée en pour-cent, sans plafond, sur tous les revenus du capital, du travail et des transferts. Son montant est fixé au vu de l'estimation du coût des mesures envisagées et a un caractère temporaire dépendant des résultats de la lutte contre le chômage.

9. Faciliter le premier emploi

Pour les jeunes qui sont au chômage et à la recherche d'un premier emploi, l'Etat promeut, dès le 4e mois, toutes les mesures de perfectionnement professionnel, d'occupation et de stage. Le but est aussi de donner la première expérience professionnelle sous forme de stage aux jeunes sortant de formation. Ces mesures doivent être compatibles avec des programmes d'occupation à plein temps, de formation ou d'utilité publique, notamment des stages linguistiques, y compris à l'étranger.

10. S'assurer obligatoirement contre la perte de gain

Chaque chômeur-euse est assuré-e obligatoirement contre la perte de gain dans le cadre d'une assurance collective ou privée ou à l'assurance prestations cantonales maternité et maladie (PCMM). Les prestations sont versées sans restriction de risques et sans critère de permis de travail.

11. Réformer l'OCE: doter les services publics d'une nouvelle ambition

11.1   La mission du service public est d'assurer le placement des demandeurs-euses d'emplois dans le respect des conditions de travail définies règles usuelles de la profession.

11.2   Est interdit tout transfert de données ou de ressources vers des entreprises de placement privé et agences de travail temporaire.

11.3   L'Etat a pour tâche de réformer et professionnaliser le service de placement de l'OCE pour le rendre plus efficace. Le personnel est formé systématiquement et en nombre suffisant pour répondre aux normes Ofiamt(1 placeur-euse pour 100 chômeurs-euses) et aux qualités qu'exige le contact avec les chômeurs-euses.

11.4   Cette réforme doit permettre la création de plusieurs antennes polyvalentes et interprofessionnelles de l'OCE de manière à utiliser toutes les ressources de recyclage, de réinsertion et de placement. Les antennes travaillent en lien avec les partenaires sociaux et les bourses de l'emploi paritaires grâce à la création d'un conseil consultatif pour chacune de ces antennes. Le service de l'emploi informe de toutes les possibilités de formation par des documents pour les chômeurs-euses (centre de bilan, TRE, club emploi, etc., accrédités par les organes compétents).

11.5   L'autonomisation des antennes doit permettre la motivation des équipes, l'émulation et de trouver à terme des sources de financement complémentaires (notamment taxes prélevées sur certaines opérations de placement).

IN 105-A

Le Conseil d'Etat a constaté l'aboutissement de cette initiative par un arrêté du 5 décembre 1994, publié dans la Feuille d'avis officielle du 23 décembre 1994. De cette date, court une série de délais successifs qui définissent les étapes de la procédure en vue d'assurer le bon exercice des droits populaires.

Le premier de ces délais a trait au débat de préconsultation qui doit, de par la loi, intervenir à la séance du Grand Conseil du 23 mars 1995. C'est en vue de ce débat que le Conseil d'Etat soumet le présent rapport.

A. La validité de l'initiative

Le Conseil d'Etat est d'avis que l'initiative «Pour l'emploi, contre l'exclusion» (IN 105) peut poser un problème de recevabilité au niveau de l'unité de la matière, ainsi que cela ressort de la brève analyse qui suit.

1. Recevabilité formelle

1. Unité de la matière

Le respect de ce principe postule que l'on présente au suffrage du corps électoral une question unique à laquelle il puisse répondre par oui ou non.

Ce principe n'exclut pas qu'une initiative contienne plusieurs propositions. Elles doivent toutefois avoir entre elles un rapport de connexité qui fasse apparaître comme objectivement justifiée la réunion de plusieurs propositions en une seule initiative et une seule question soumise au vote. L'exigence d'un rapport intrinsèque entre les différentes parties d'une initiative est nécessaire afin de garantir la libre formation de la volonté populaire, tant au stade de la récolte des signatures qu'au stade du vote. Il faut que les citoyens puissent clairement manifester leur volonté, et non pas qu'ils soient induits en erreur par un texte qui comporte plusieurs propositions, dont on ne pourra jamais dire si elles recueillent toutes leur assentiment.

En principe, l'exigence de l'unité de la matière est plus souple s'agissant d'un projet rédigé en termes généraux dans la mesure où il doit ensuite être concrétisé par le législateur. Ce dernier pourra en effet corriger les imperfections de l'initiative dans la procédure d'adoption de la loi.

Lorsque l'initiative ne respecte pas l'unité de la matière, on s'efforcera d'éviter son invalidation en la scindant en autant de parties qu'il y a de propositions.

La scission de l'initiative n'est toutefois possible que si toutes ses parties sont en elles-mêmes valides. Si, après scission, il s'avère que l'une des parties est nulle, elle n'est pas soumise au peuple. Encore faut-il que la partie restante ait suffisamment de substance pour que l'on doive considérer qu'elle aurait été signée pour elle-même par les partisans de l'initiative. Si tel n'est pas le cas, toute l'initiative doit être déclarée nulle.

L'initiative 105 comporte précisément, regroupées par thèmes, de nombreuses propositions ayant trait à une multitude de domaines, à savoir le développement d'une politique économique, l'action anticyclique, la réforme fiscale, le développement de la formation, l'encouragement à la création d'emplois par la réduction du temps de travail, le chômage sans exclusion, la réinsertion des sans-emploi, l'instauration d'une contribution sociale généralisée, des mesures propres à faciliter le premier emploi, l'assurance obligatoire contre la perte de gain, la réforme du service de placement de l'office cantonal de l'emploi.

Au vu de cette énumération et du développement de ses éléments dans le texte de l'initiative, on est enclin à considérer que l'initiative propose non pas un seul but, mais plusieurs buts distincts - même si, dans sa finalité, l'initiative est globalement orientée ver la protection de l'emploi - et plusieurs moyens pour les atteindre, moyens dont il n'apparaît pas de façon évidente qu'ils soient unis par un lien matériel suffisant, permettant d'affirmer, selon la jurisprudence, que l'exigence de l'unité de la matière est respectée.

En conséquence, le Grand Conseil sera probablement appelé à scinder l'initiative en autant de parties qu'il y a de propositions distinctes, ce qui présuppose un examen détaillé de l'initiative quant au fond.

A ce stade, il serait prématuré d'affirmer que toutes les propositions contenues dans l'initiative 105 peuvent être, a priori, considérées comme valides. Si, de l'avis du législateur, tel ne devait pas être le cas, il conviendrait alors de déterminer si les parties restantes conservent suffisamment de substance pour que l'on doive considérer que l'initiative aurait néanmoins été signée pour ces parties.

En conclusion, le Conseil d'Etat est d'avis que la scission de l'initiative par le Grand Conseil en plusieurs objets soumis au peuple, en raison du non-respect de l'unité de la matière, devrait permettre de la sauver (art. 66, al. 2, de la constitution).

2. Unité de la forme

Le principe de l'unité de la forme exige que les initiants choisissent entre l'initiative formulée et l'initiative non formulée, mais pas un mélange des deux formes, faute de quoi le traitement de l'initiative serait difficile, voire impossible, compte tenu des dispositions légales applicables.

S'agissant en l'espèce d'une initiative non formulée et rédigée comme telle, au sens de l'article 65 de la constitution, l'unité de la forme est respectée.

3. Unité du genre

L'unité du genre ou l'unité normative (art. 66, al. 1, de la constitution) exige que l'initiative soit du niveau d'une norme législative ou de celui d'une norme constitutionnelle, sans mélange des deux.

S'agissant d'une initiative conçue en termes généraux dite non formulée, il appartiendra au Grand Conseil d'en concrétiser, le cas échéant, la teneur par une ou des lois ou par une norme constitutionnelle.

II. Recevabilité matérielle

1. Conformité au droit supérieur

La multitude de domaines visés par l'initiative 105 non formulée ne permet guère de se prononcer valablement, au stade de la brève analyse du présent rapport et sans anticiper sur un examen détaillé des nombreuses propositions du texte, sur la conformité de l'initiative au droit supérieur.

On ne discerne toutefois aucun élément susceptible d'imposer le constat que l'initiative heurterait manifestement le droit supérieur. Le Conseil d'Etat se limitera donc au rappel des principes essentiels qui prévalent en la matière.

La conformité au droit supérieur suppose qu'une initiative cantonale ait un contenu compatible avec ce droit. Dès lors que l'on a affaire à une initiative non formulée, l'initiative doit respecter la constitution cantonale, ainsi que l'ordre juridique fédéral (force dérogatoire du droit fédéral), voire intercantonal ou international.

En principe, il ne suffit pas que les objectifs poursuivis par l'initiative soient conformes au droit supérieur, il faut encore que les moyens proposés pour atteindre ces objectifs ne soient pas contraires à ce droit. S'agissant d'une initiative rédigée en termes généraux, il faut prendre en considération la latitude d'appréciation dont dispose le législateur lors de la concrétisation ultérieure du texte. Il appartient alors au législateur de choisir parmi les solutions possibles pour atteindre les objectifs fixés par les initiants celles qui sont conformes au droit fédéral.

En outre, l'initiative devant être interprétée de manière conforme à la constitution fédérale, elle ne peut être déclarée contraire au droit supérieur que si elle ne se prête pas à une telle interprétation.

L'initiative 105 étant conçue en termes généraux, la recherche d'une interprétation des voeux des initiants permettant le respect du droit supérieur, lors de la concrétisation ultérieure, est plus aisée que dans l'hypothèse d'une initiative formulée.

2. Exécutabilité

Ce principe veut qu'en cas d'acceptation par le peuple, l'initiative puisse être réalisée, c'est-à-dire traduite concrètement dans les faits et dans un délai raisonnable.

L'exécution de l'initiative doit être assurée par l'adoption d'un cadre législatif déterminant les conditions dans lesquelles les mesures prévues par celle-ci doivent être réalisées.

Il convient de relever à cet égard que les multiples propositions contenues dans l'initiative laissent présager un éventail d'objectifs potentiels relativement nombreux.

On ne saurait dès lors écarter la probabilité de voir surgir des difficultés d'interprétation au niveau de la concrétisation de l'initiative.

Ce grief ne saurait cependant constituer un obstacle tel à la concrétisation qu'il faille considérer l'initiative comme irréalisable et, partant, l'invalider pour cause d'inexécutabilité manifeste.

B. La prise en considération de l'initiative

L'initiative 105 traite une multitude de sujets touchant une grande variété de domaines:

- la promotion économique;

- l'action anticyclique de l'Etat;

- la réforme de la fiscalité;

- le développement d'une formation accessible à tous;

- la réduction du temps de travail;

- le traitement social du chômage.

Certains thèmes se rapportent à des domaines qui font déjà l'objet d'actions prioritaires de la part du Conseil d'Etat. A titre d'exemple, on peut notamment citer:

- promotion économique: depuis plus de 2 ans, le gouvernement mène une politique de promotion économique active ayant justement pour but, comme les auteurs de l'initiative le demandent, non seulement de créer de nouveaux emplois en attirant à Genève des entreprises offrant des produits et services à haute valeur ajoutée, mais encore en apportant une aide renforcée aux sociétés déjà établies sur notre sol afin de contribuer au maintien d'un maximum d'emplois existants. La justesse de la stratégie retenue est démontrée par les résultats extrêmement encourageants enregistrés jusqu'à ce jour. Alors qu'en 1993 nous avions compté, fait exceptionnel pour une première année, pas moins de 45 nouvelles entreprises ou développements marquants d'entreprises existantes, soit 420 emplois nouveaux engendrant au moins 400 emplois supplémentaires d'ici à 1995, 1994 a confirmé que ce premier succès n'était pas un simple hasard puisque les résultats obtenus ont été encore supérieurs avec environ 500 emplois créés;

- organisations internationales: que ce soit de manière directe ou en relation étroite avec la Confédération, le Conseil d'Etat a mis en place une véritable stratégie qui vise à établir des contacts directs, permanents et réguliers avec les responsables des principales organisations internationales, ainsi qu'à entreprendre de véritables actions de promotion de Genève en tant que lieu privilégié pour l'accueil de telles organisations;

- tourisme: ce domaine a été l'objet d'une attention toute particulière et, grâce à l'adoption par votre Grand Conseil de la loi sur le tourisme, Genève s'est dotée des moyens nécessaires pour développer ce secteur d'activités;

- formation: la création d'un «Centre de bilan», la sensibilisation des enseignants et des jeunes aux réalités de l'économie, les projets de réforme visant à dispenser une formation plus en phase avec l'évolution des exigences professionnelles représentent autant de mesures per-mettant de donner à chacun les meilleures chances de succès;

- exclusion due au chômage: une politique active en matière d'occupations temporaires, tant individuelles que collectives, une offre variée de cours de perfectionnement professionnel et de techniques de recherche d'emploi, la création de «clubs emploi» et d'une «entreprise d'entraînement», de même que l'instauration d'un revenu minimum cantonal d'aide sociale (RMCAS) assorti d'une contre-prestation, représentent autant d'actions menées à bien pour éviter à tout prix l'exclusion due au chômage;

- premier emploi des jeunes: des cours de perfectionnement ciblés, les allocations d'initiation au travail permettant de réduire la charge salariale qui pèse sur l'entreprise alors que le jeune est encore en phase de formation dans son premier emploi, ainsi que les stages en entreprises qui dans bien des cas se transforment en un engagement définitif, permettent d'apporter aux jeunes une aide efficace au moment où ils s'insèrent dans la vie pratique;

- réforme de l'office cantonal de l'emploi (OCE): la restructuration complète du service de placement actuellement en cours permettra d'offrir aux chômeurs un service plus personnalisé et mieux ciblé, augmentant ainsi leurs chances de trouver plus rapidement un nouvel emploi.

D'autres propositions, et tout particulièrement celles relatives au traitement du chômage, ne pourront être étudiées qu'à la lumière des décisions qui seront prises suite au débat actuellement en cours au niveau fédéral.

Enfin, certaines suggestions qui sont clairement du ressort du canton méritent probablement une étude plus approfondie, et le Conseil d'Etat est prêt, le moment venu, à entrer en matière sur ces dernières. Il conviendra toutefois d'identifier clairement, au préalable, s'il ne s'agit pas dans certains cas, en fait, de concrétiser sur le plan légal des situations préexistantes.

Telles sont les réflexions générales dont le Conseil d'Etat tenait à vous faire part en préambule à la discussion de l'initiative populaire 105 «Pour l'emploi, contre l'exclusion».

Il en ressort que le Grand Conseil devrait envisager de scinder l'initiative en plusieurs domaines clairement définis, de telle sorte que son traitement puisse être mieux coordonné et par là même facilité.

Débat

M. Michel Halpérin (L). Madame la présidente, je dirai un mot au sujet du vote qui vient de se dérouler pour l'initiative précédente. Vous avez donné le compte-rendu du résultat du vote en indiquant que l'initiative était recevable, mais il faut préciser qu'elle est recevable parce que scindée !

La présidente. Oui, parce que scindée ! C'est bien pour cela que j'ai lu les conclusions du rapport.

M. Michel Halpérin. D'accord !

S'agissant de l'initiative 105, nous avons sous les yeux le rapport du Conseil d'Etat, et je voudrais profiter de cette occasion, puisque nous en sommes au débat sur la validité formelle ou la recevabilité de l'initiative, pour vous rendre compte, à titre intérimaire, des travaux de la commission législative. Cette commission a déjà procédé à un examen de l'initiative 105 et elle a constaté que cette initiative, selon toute vraisemblance, ne répondait ni aux exigences d'unité de la matière ni à celles d'exécutabilité. Par conséquent, il y a une probabilité - pas encore une certitude - qu'elle soit à un moment ou à un autre l'objet d'un vote d'irrecevabilité de la commission.

Toutefois, la commission dans ses travaux a estimé qu'il lui incombait de se pencher sur la totalité des éléments d'appréciation de recevabilité d'une initiative et qu'elle devait notamment se pencher sur le problème de sa conformité au droit supérieur, qui est un des aspects de l'examen de cette recevabilité. Nous avons compté - parce que c'est un travail extrêmement difficile - sur le rapport du Conseil d'Etat à ce sujet. Or, force nous est de constater que, sur ce point en particulier, le rapport du Conseil d'Etat, tel qu'il nous a été livré ces jours-ci, est tout à fait lacunaire.

Par conséquent, la commission législative n'y trouvera pas les réponses avisées d'un juriste de la couronne sur ce sujet essentiel de la conformité au droit supérieur. Or, il me faut rendre attentive cette assemblée au fait que - je rejoins ici le débat que nous avons abordé hier au sujet des initiatives - l'initiative 105 comporte, sur à peu près neuf pages, le texte qui serait, le cas échéant, soumis au vote populaire, selon les décisions que notre Conseil serait appelé à prendre. De surcroît, il couvre une matière extrêmement abondante sur des sujets d'économie générale, avec des propositions particulières de nature différente les unes des autres.

Dès lors, il est très possible que certains aspects de cette initiative soient conformes au droit supérieur, que d'autres soient radicalement incompatibles avec ce droit supérieur et que d'autres encore soient susceptibles de l'être selon la manière dont ils seront traités au fond. De sorte que l'avis d'un juriste nous paraît essentiel. La commission législative, quelle que soit la compétence de l'un ou l'autre de ses membres, n'est pas outillée pour faire un travail d'une telle envergure. Elle souhaiterait donc que le Conseil d'Etat mette à sa disposition un des juristes de son administration pour y procéder, à défaut elle devra probablement mandater un professeur de notre université pour qu'il réponde à ces questions dans le délai qui, je vous le rappelle, est court, puisque le Grand Conseil devra statuer sur la recevabilité formelle d'ici le mois de septembre.

Je vous remercie, et si le Conseil d'Etat est en mesure de me répondre sur ce point il facilitera les travaux de la commission législative.

M. Christian Grobet (AdG). Ce que je disais tout à l'heure au sujet de l'initiative dite «La Suisse» se confirme. Je ne m'étonne pas que M. Halpérin, dont on connaît bien les positions, essaye aujourd'hui de nous convaincre que l'initiative 105 serait irrecevable.

Je note que vous aviez défendu avec le même talent, et avec beaucoup plus de flamme, la recevabilité de l'initiative sur laquelle le peuple s'est prononcé il y a une semaine au sujet de la Rôtisserie-Pélisserie qui, elle, posait des problèmes importants de recevabilité sans parler de ceux auxquels le Conseil d'Etat semble confronté au sujet de l'initiative sur la «Traversée de la rade».

Nous ne saurions nous satisfaire, Monsieur Halpérin, de l'avis d'un juriste de la couronne. Il fut un temps, du reste, où un professeur plus ou moins patenté était consulté systématiquement par le Conseil d'Etat et, comme par hasard, donnait des avis de droit négatifs sur les initiatives lancées par les milieux des locataires, ce qui nous a obligés à recourir jusqu'au Tribunal fédéral. Ces avis de droit n'ont pas résisté à la sagesse des juges fédéraux. A vrai dire, le Tribunal fédéral avait précisément - même si la jurisprudence de celui-ci peut évoluer - retenu les principes développés par le professeur Aubert, à savoir qu'il fallait être extrêmement ouvert s'agissant des initiatives, surtout lorsqu'elles sont non formulées, ce qui est le cas ici, le Grand Conseil pouvant, le cas échéant - c'est du reste son devoir - lui trouver des solutions.

Que n'ai-je entendu sur vos bancs, Monsieur Halpérin, sur le devoir de sauver à tout prix l'initiative de M. de Tolédo sur la Rôtisserie-Pélisserie ! Elle a fait naufrage ce dernier week-end, et certains d'entre nous s'en félicitent. Mais je rappelle que pendant quinze ans... (L'orateur répète ce chiffre pour insister sur la durée.) ...la droite a tenté de trouver une solution pour la sauver; c'est le contreprojet qui a été voté par ce Grand Conseil, lequel devait se substituer, en quelque sorte, à l'initiative, ce qui n'a pas été possible parce qu'il n'y avait pas de clause de retrait.

La philosophie du professeur Aubert est très simple. Il disait : in dubio pro populo ! (M. Vodoz fait une remarque à l'orateur.) Oui, il me reste quelques réminiscences de latin; elles ne sont certainement pas aussi bonnes que les vôtres, Monsieur Vodoz, mais cette expression est restée ancrée dans ma mémoire, parce que chaque fois que l'on discutait d'initiatives au Conseil d'Etat ou au Grand Conseil cette expression ressortait souvent, car elle figurait dans l'avis de droit du professeur Aubert. Elle a, du reste, été reprise par le Tribunal fédéral qui, justement, s'est montré extrêmement ouvert.

Alors, de grâce, ne commençons pas ici à ergoter autour d'une initiative qui préconise toute une série de solutions ! De deux choses l'une, ou le Grand Conseil accepte d'entrer en matière sur cette initiative, considérant qu'elle a du bon, et, si c'est le cas - comme elle l'a fait sur l'initiative du parti du Travail contre la spéculation foncière - on pourra trouver des solutions qui répondent au texte de l'initiative. Bien entendu, Monsieur Halpérin, vous êtes contre l'initiative, mais cela ne nous étonne pas, car c'est pour des motifs autres que des motifs juridiques. Evidemment, il est toujours facile d'invoquer le droit lorsqu'on est opposé à une initiative pour des raisons politiques. Il faut laisser le peuple trancher et, lorsqu'il a tranché, comme il l'a fait pour la rade, nous avons le devoir de trouver une solution, selon les thèses qui sont du reste défendues par le Conseil d'Etat s'agissant de la traversée de la rade.

Alors, de grâce, ne tenez pas un langage un jour et un autre le lendemain lorsqu'un objet ne vous plaît pas politiquement !

M. Michel Halpérin (L). Je ne doute pas, comme la plupart des membres de cette assemblée, que M. Grobet magister juris et politicae - puisque vous aimez le latin - soit un éminent spécialiste de la manière d'appliquer les textes juridiques selon le goût politique qu'on en a. Nous savons que vous avez une expérience irremplaçable sur ce sujet, et nous sommes heureux que vous en fassiez profiter le Grand Conseil.

La raison qui me pousse à reprendre la parole est, Monsieur le député, qu'il se trouve que vous n'êtes pas membre de la commission législative et que, par conséquent, vous avez l'excuse de nous apporter vos lumières à contretemps. Mais cette commission législative ne fait pas de politique; elle lit les textes et elle le fait consciencieusement. Le rapport qui a été lu tout à l'heure, et qui ne vous a pas plu, en est la meilleure démonstration.

Et si j'ai eu l'occasion, hier, d'exprimer ma préoccupation profonde de voir le mauvais traitement auquel les initiants finiront par conduire le droit d'initiative dans ses fondements mêmes, c'est parce que je prétends - cela m'est personnel - que, lorsqu'on croit faire voter tout un peuple sur un texte de neuf pages imprimées par une seule réponse, oui ou non, alors que le texte se décompose lui-même en vingt-sept chapitres et une quarantaine de sous-chapitres, on prend les gens pour des imbéciles !

Comme je sais que vous n'avez pas ce mépris de la population, je pars de l'idée que vous devriez, en juriste fin que vous êtes, vous intéresser aux réflexions collectives de la commission législative que j'ai l'honneur de présider et qui ne se livre pas aux petits jeux qui vous sont familiers !

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Je suis un peu étonnée de ce débat juridique qui tourne seulement autour de la recevabilité de l'initiative, alors que personne n'aborde le fond ! Vous me permettrez, si cela ne vous gêne pas trop, d'aborder le fond.

M. Michel Halpérin. Ce n'est pas l'objet du débat !

Des voix libérales. Ce n'est pas à l'ordre du jour !

Mme Fabienne Bugnon. Ce n'est pas à l'ordre du jour ? Alors, je vais reprendre mon ordre du jour ! Excusez-moi, mais le numéro 15 de notre ordre du jour est bien l'IN 105, initiative pour l'emploi contre l'exclusion !

La présidente. Absolument !

Mme Fabienne Bugnon. Il faut prendre le point 15, Madame la présidente, ou le point 16 ?

La présidente. Nous sommes au point 15, Madame ! Mais si vous voulez, prenez la parole maintenant; vous ne la prendrez pas au point 16 !

Mme Fabienne Bugnon. Non, non, je la reprendrai au point 16, je vous en prie !

M. Laurent Moutinot (S). J'ai été surpris par l'exposé du président de la commission législative, puisque je participe aux travaux de ladite commission. S'il est vrai qu'il est intéressant que le Grand Conseil sache que cette commission accueille pour l'instant défavorablement l'IN 105 sur le plan de la recevabilité, j'aimerais également rappeler que nous n'en sommes qu'au début de nos travaux et que je n'exclus pas qu'une position plus favorable au respect de la volonté des initiants et aux droits populaires puisse prévaloir dans la commission législative et, ultérieurement, dans le Grand Conseil. La question de savoir dans quelle mesure nous avons besoin de nous entourer de l'avis d'experts n'est pas définitivement tranchée au sein de la commission. C'est un problème constant dans cette commission de savoir si nous sommes capables de faire un travail par nous-mêmes, si nous devons demander le rapport du Conseil d'Etat pour nous aider, le cas échéant si nous devons nous entourer d'autres avis encore.

Nous avons essayé, contrairement à ce qui s'était fait pour les initiatives antérieures, de précéder le Conseil d'Etat et de discuter entre nous avant le rapport du Conseil d'Etat. C'est une saine conception des choses, parce qu'elle permet à notre Grand Conseil de prendre sa décision, avant même de pouvoir suivre le Conseil d'Etat.

En tout état, la discussion sur la recevabilité de l'IN 105 n'est de loin pas terminée au sein de la commission législative et, si j'ai bien compris, les débats d'aujourd'hui pas davantage terminés au sein de ce Grand Conseil.

La présidente. Madame Bugnon, veuillez accepter mes excuses ! Rien ne précise dans le règlement qu'au cours du débat de préconsultation - c'était le cas - il ne soit pas possible de s'exprimer sur le fond. Je vous donne donc la parole.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Merci. Je ne vous en voulais pas, car j'ai bien eu l'impression que, vous, vous aviez tout à fait bien compris ! (Rires.)

Cette initiative pour l'emploi et contre l'exclusion est née de l'incapacité des dirigeants en place à maîtriser le chômage. Nous avons tous notre part de responsabilité, et il ne m'appartient pas de distribuer les bons ou les mauvais points. Certains n'ont pas cru que le chômage prendrait de telles proportions dans notre canton et d'autres n'ont pas eu le courage politique de proposer des solutions qui pouvaient heurter leur électorat.

La critique des autres permet également l'autocritique et force est de constater que, nous non plus, nous n'avons pas réussi à faire passer nos propositions en matière de lutte contre le chômage. Je vous rappelle une de ces propositions : le partage du travail et de l'emploi !

Mesdames et Messieurs, ce n'est pas de la tarte à la crème; c'est un projet de société auquel les réfractaires devront finir par se résoudre, à moins qu'ils restent favorables à une société à deux vitesses, où l'emploi comme les ressources ne pourraient être partagés.

Pour nous écologistes, le partage du travail est plus encore qu'un projet de société : c'est un projet d'avenir où le temps libre est pris en compte avec autant de valeur que le travail. Mais, comme tout projet, certains stades seront difficiles à aborder pour quelques-uns. En ce qui nous concerne, notre langage a toujours été clair. Le partage du travail doit s'accompagner du partage des revenus et donc de diminutions des salaires, à l'exception des bas salaires. C'est un projet ambitieux. C'est une refonte totale de la société, et les écologistes sont conscients qu'ils n'y arriveront pas seuls.

Notre groupe soutiendra l'initiative qui nous est soumise, même si la multiplicité des domaines qu'elle aborde rend l'unité de la matière si ce n'est impossible, du moins compromise. Comme nous l'avons proposé pour l'initiative dite «La Suisse» en commission, nous proposerons que cette initiative soit scindée en plusieurs volets qui pourraient être notamment : la promotion de l'emploi, la réforme de la fiscalité et le développement de la formation. Par ailleurs, le traitement social du chômage devrait passer, lui, par une réflexion accrue sur la réduction du temps de travail et sur les possibilités plus diversifiées du recyclage surtout à la portée de tous et toutes sans distinction de sexe ni d'âge. Le traitement de cette initiative - M. Halpérin vous l'a déjà dit - est en cours à la commission législative et il débutera, si cela n'est fait, à la commission de l'économie.

On s'apercevra que plusieurs projets de lois ou de motions, pendants à la commission de l'économie ou déjà renvoyés au Conseil d'Etat, pourraient répondre à certaines questions des initiants. C'est la raison pour laquelle une audition des initiants est indispensable. J'ouvre ici une parenthèse pour regretter sincèrement que la commission législative n'ait pas accepté ma proposition d'entendre les initiants. N'importe quel pétitionnaire est entendu par la commission des pétitions ou par les commissions spécialisées, même si sa pétition ne comprend qu'une seule signature. Des initiants qui récoltent plus de dix mille signatures méritent au moins le même traitement. J'espère donc que la commission de l'économie saura rectifier le tir !

IN 105

Cette initiative est renvoyée à la commission de l'économie. 

IN 105-A

Ce rapport est renvoyé à la commission législative.

 

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau unanime vous propose de reporter les points 17, 18 et 19 à 20 h 30, après le débat que nous aurons sur le projet de loi 7227, et de passer maintenant au point suivant. En effet, je crains que l'importance des débats sur ces trois points ne nous emmène trop loin dans la soirée, puisqu'il est déjà 18 h 50.