République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 20 janvier 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 3e session - 4e séance
P 896-B
En référence au rapport de la commission des pétitions renvoyé le 29 novembre 1991 au Conseil d'Etat, celui-ci tient à préciser que M. Philippe Joye, président du département des travaux publics et de l'énergie, a très récemment rencontré MM. Gérard Pillon et Jean-Daniel Schlaepfer, propriétaires économiques de la SI Les Baillets et animateurs du Domaine des Balisiers. Cette rencontre était destinée à mettre à plat les multiples problèmes et litiges existant entre la SI Les Baillets et le département des travaux publics et de l'énergie. Cette mise au point apparaissait nécessaire, compte tenu de la dégradation des relations entre les parties (voir p. 6, ch. 6, du rapport de la commission des pétitions).
La situation se présente dès lors comme suit:
le hangar agricole projeté a finalement été autorisé le 23 juin 1994, mais dans une implantation différente (dossier no 92804). Entrée en force, cette autorisation est aujourd'hui définitive, n'ayant pas été contestée par les voisins;
s'agissant de la destruction partielle du mur en cause, il appert que sa reconstruction constitue une tâche pour le moins difficile et encore s'agit-il là d'un euphémisme. Compte tenu de ce qui précède, MM. Gérard Pillon et Jean-Daniel Schlaepfer ont donné leur accord à la création sur la parcelle considérée d'un biotope, soit un étang. Ce projet fait l'objet d'une requête en autorisation de construire par procédure accélérée (APA no 10327), actuellement en cours d'instruction. Bien qu'elle implique la démolition du solde du mur, cette solution paraît somme toute préférable à toute autre.
Quant aux amendes infligées par le même département, confirmées par les instances judiciaires et dont le Grand Conseil a rejeté la demande de grâce, elles ont, bien sûr, été maintenues, des poursuites ayant été entamées à l'endroit des contrevenants.
Dans le cadre de la discussion avec MM. Gérard Pillon et Jean-Daniel Schlaepfer, un accord a été conclu portant sur le paiement des amendes, intérêts et frais relatifs à cette affaire de mur.
Le Conseil d'Etat souhaite sincèrement que ce dénouement amiable incite désormais MM. Gérard Pillon et Jean-Daniel Schlaepfer à respecter les lois et règlements en vigueur et à s'abstenir de toute intervention relevant de la politique du fait accompli, à défaut de quoi ils s'exposeraient aux rigueurs de la loi.
Débat
M. Christian Ferrazino (AdG). Ce rapport fait suite au point 57 dont notre collègue, M. Dupraz, a parlé tout à l'heure. Lorsqu'il disait que les délits profitent aux malhonnêtes, on peut confirmer cette affirmation dans le cadre de ce dossier. On s'aperçoit d'ailleurs qu'il s'agit des mêmes personnes, MM. Pillon et Bocion...
La présidente. Schlaepfer, Monsieur Ferrazino !
M. Christian Ferrazino. Schlaepfer, merci ! Je sais que vous êtes très spécialistes dans les noms des spéculateurs et qu'il suffit de faire une erreur pour que vous la corrigiez immédiatement ! (L'orateur hausse le ton pour se faire entendre, car il est très chahuté.) Ce rapport du Conseil d'Etat ne peut être accepté, en tout cas dans sa formulation, car je crois que c'est la moindre des choses que ce Grand Conseil connaisse les termes de l'accord qui aurait été pris.
Mais, avant d'y parvenir, je me permets d'exprimer quelques réflexions sur le libellé de ce rapport. Il nous est dit que M. Joye a rencontré ces multirécidivistes. C'est bien le cas, car ils n'hésitent pas, précisément, à se moquer éperdument des lois en vigueur et construisent ce qu'ils veulent là où ils le veulent, sans tenir compte de la réglementation. M. Joye nous dit : «S'agissant de la destruction partielle du mur en cause, il appert que sa reconstruction constitue une tâche pour le moins difficile...». Mais c'est une plaisanterie, Monsieur Joye ! Il n'est quand même pas difficile de reconstruire un mur, il suffit de mettre des briques... (Rires, commentaires et quolibets fusent.) Voyons, c'est une véritable plaisanterie ! Non seulement c'est une plaisanterie, mais, tenez-vous bien, ce n'est pas tout, on nous dit - et cela est encore plus grave - que le département a autorisé la destruction du reste du mur. Bien évidemment, si on ne peut pas le construire, il faut le démolir complètement ! Voilà la négociation brillante que M. Joye a menée avec ces multirécidivistes. Ensuite, il vient nous dire que l'affaire s'est arrangée en raison de l'autorisation qu'il a délivrée. Eh bien, je dois dire que c'est parfait ! Vous êtes un négociateur hors pair, Monsieur Joye ! Il faut tout de même être conscient que ces gens obtiennent, grâce à vous et avec votre bénédiction, ce qu'ils voulaient. Eh bien, comme l'a dit M. Dupraz, c'est vraiment une palme à la politique du fait accompli ! Nous pouvions attendre de votre part, Messieurs du Conseil d'Etat, une autre réponse que celle-ci !
Monsieur le président, vous précisez que grâce à ces messieurs un biotope va être créé. J'ai constaté que, suivant les projets d'aménagement qui nous sont présentés, on essaye toujours d'avoir une petite fibre un peu écologiste pour mieux faire passer les choses ! Il faudrait également dire, Monsieur Joye, ce que vous évitez de faire... (M. Maitre sourit.) Bien sûr, cela vous fait rire, parce que l'idée vient certainement de vous ! (L'assemblée s'écroule de rire.) Il faut dire que la commission des monument de la nature et des sites a été particulièrement irritée de la manière avec laquelle vous l'avez traitée dans ce dossier. Mais cela, vous ne l'avez pas dit dans votre rapport, et la création d'un biotope (...). Avant que nous nous déterminions sur ce que l'on va faire de ce rapport, la moindre des choses, Monsieur Joye, serait de dire au Grand Conseil quels sont les termes de cet accord que vous avez obtenu avec ces multiples récidivistes. En effet, il me semble nécessaire de le renvoyer en commission, puisque M. Joye est très réticent de nous donner publiquement les renseignements précis que nous lui demandons. Nous l'avons vu tout à l'heure avec le prix de la rente de superficie pour Reuters. On nous dit 6%, mais 6% de quoi ? Ensuite, on entend parler de 100 F !
Il faut quand même savoir, et j'en terminerai pas là, si vous avez aussi brillamment négocié les termes de cet accord au niveau financier que vous l'avez fait pour le mur ! Avez-vous totalement aboli cette amende, ou en reste-t-il quelques dizaines de francs ? (Rires.)
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je suis presque réticent à prendre la parole après vous, Monsieur le député, parce que votre façon de traiter les problèmes est tellement polémique, tellement peu constructive... (Les députés de l'Alliance de gauche font un aahh ironique.) ...qu'elle me rappelle étonnamment...
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Mais tu devrais parler du dépôt du Bachet-de-Pesay !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Monsieur Ferrazino, je... (L'orateur est chahuté et ne peut pas placer un mot. La présidente fait sonner sa cloche.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il nous reste quatre points à l'ordre du jour, je vous en prie !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Monsieur le député Ferrazino, vous avez l'art de vouloir me faire tourner en bourrique avec des discussions qui ont pris un certain temps et qui ont permis de liquider, comme je l'ai dit, mais vous étiez absent à ce moment-là, des litiges lamentables qui portaient sur des objets de peu d'importance, contrairement à celle que vous leur donnez. Vous ne vous donnez pas la peine de lire la réponse jusqu'au bout. Si vous l'aviez fait, vous auriez constaté que des amendes ont été infligées par le même département et confirmées par les instances judiciaires. Il y a également eu un accord sur le paiement de ces amendes, les intérêts et les frais relatifs à cette affaire de mur. L'autorisation est définitive pour le hangar agricole, puisque cette construction n'a pas été contestée par les voisins.
Cette réponse suffit largement par rapport à l'importance du litige, et je me réjouis de m'en remettre à la sagesse de ce Conseil pour l'appréciation et le sort qu'il entend donner à ce rapport.
La présidente. Monsieur Ferrazino, à quelle commission voulez-vous renvoyer ce rapport ?
M. Christian Ferrazino. Je demande le renvoi à la commission de l'aménagement, Madame la présidente !
La présidente. Ce rapport est donc renvoyé à la commission de l'aménagement. (Forte contestation des députés de l'Entente.)
Une voix de droite. Par assis, debout ! (Contestation des députés de gauche.)
La présidente. Je regrette, lorsqu'il y a doute ou lorsqu'un vote est contesté, que ce soit à droite ou à gauche, je fais voter par assis debout ! (Grand vacarme.)
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
La proposition de renvoyer ce rapport à la commission d'aménagement du canton est rejetée par 36 non contre 34 oui.
La présidente. Comme quoi, Mesdames et Messieurs les députés libéraux, vous ne protesterez pas lorsque je fais voter par assis/debout dans l'autre sens !
Mme Laurette Dupuis (AdG). Sauf le respect que je vous dois, j'aimerais vous demander, dorénavant, comme nous le faisions au Conseil municipal, de fermer les portes. En effet, il est trop facile de rentrer au dernier moment, que ce soit dans nos rangs ou dans ceux d'en face. Je trouve que cela n'est pas très correct !
La présidente. Madame Dupuis, je partage votre souci, car nous avons eu des contestations sur les votes. J'attends vos propositions à ce sujet.
M. Armand Lombard. Verrouillons, Madame, verrouillons ! (Grands rires.)
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.