République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 15 décembre 1994 à 17h
53e législature - 2e année - 2e session - 47e séance
M 803-1-B et objet(s) lié(s)
17. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants :
TABLE DES MATIÈRES
Pages
1. Introduction 6053
2. Axes de développement 6053
2.1. Promotion économique, politique d'accueil 6054
2.1.1. Aide aux entreprises existantes 6054
2.1.2. Accueil de nouvelles entreprises 6055
2.1.3. Des résultats probants 6059
2.1.4 Extension des activités de la promotion économique 6059
Pages
2.2. Développement prioritaire des «grands axes moteurs» 6060
2.2.1. Genève place internationale 6060
a) Tourisme 6060
b) Commerce international 6061
c) Organisations internationales 6061
d) Sociétés multinationales 6063
2.2.2. Genève place financière 6064
2.2.3. Genève, centre de formation 6065
2.2.3.1. Sensibilisation des jeunes etdes enseignants: création d'un groupe«école et économie» 6065
2.2.3.2. Projets de réforme visant à dispenser uneformation plus en phase avec l'économie 6066
2.2.3.3. Redéfinition du bagage scolaire:l'adéquation entre les acquis etles prérequis 6067
2.2.4. Genève, centre de technologies de pointe 6067
3. Politique régionale 6068
4. Conditions-cadre 6069
4.1. Groupes de pilotage 6069
4.2. Collaboration interdépartementale et allégements de procédures 6069
4.3. Mise à disposition des terrains nécessairesau développement des activités industrielles/artisanaleset des organisations internationales 6070
4.4. Soutien à l'innovation et intégration de l'innovation dansles constructions et réalisations publiques 6071
4.4.1. Développement de la Fondation genevoise pourl'innovation technologique (FONGIT) 6071
4.4.2. Intégration de l'innovation technologique dans les constructions et réalisations publiques 6074
Pages
4.5. Application des articles 14 A et 65 A LCP concernant les allégements fiscaux 6076
5. Soutien confédéral 6080
6. Conseil économique et social 6080
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ANNEXES
1. Textes des motions
1a) M 803A 6082
1b) M 911 6084
1c) M 932 6085
2. Directives d'application concernant les allégements fiscauxen faveur des entreprises 6086
3. Postulat Maitre du 17 décembre 1992 6091
4. Description d'innovations intégrées dans des constructionset réalisations publiques 6093
1. Introduction
A maintes reprises, que ce soit en réponse à de précédentes interventions parlementaires ou dans le cadre des débats de diverses commissions, le Conseil d'Etat a eu l'occasion de préciser les grands lignes de la politique économique qu'il entend mener pour le canton de Genève. Le premier document sur ce sujet a été l'«Exposé du Conseil d'Etat sur sa politique en matière économique» de juin 1975. Le «Rapport du Conseil d'Etat sur l'économie genevoise» de 1989 (RD 128) non seulement confirmait les grands axes choisis par le gouvernement mais allait plus loin pour mettre l'accent sur les réalisations concrètes découlant directement de l'application de la politique économique retenue.
Il est d'ailleurs intéressant de constater que la plupart des éléments retenus plus tard dans la motion 803-A font en fait chaque fois l'objet d'un paragraphe particulier et détaillé du RD 128, notamment en ce qui concerne les objectifs fixés, la promotion industrielle, l'encouragement des innovations ainsi que la coopération intercantonale et régionale.
Il semble donc utile de se concentrer sur certains aspects essentiels de la politique économique du Conseil d'Etat, politique qui s'insère d'ailleurs parfaitement dans le cadre d'un développement durable, dans la mesure où le contexte économique actuel contraint les entreprises à concentrer leurs efforts sur des produits ou services à haute valeur ajoutée ou à haute technicité.
Ce rapport rappellera aussi les éléments constitutifs du Conseil économique et social (CES). Regroupant tous les partenaires de la vie économique et sociale du canton, ce Conseil doit, en effet, représenter l'organisme susceptible de répondre à l'une des demandes de la motion 803-A en analysant les «perspectives du développement genevois» et en faisant toutes propositions utiles au Conseil d'Etat dans ce domaine.
2. Axes de développement
Le développement prioritaire des «grands axes moteurs» doit retenir ici notre attention.
2.1. Promotion économique, politique d'accueil
D'emblée, il convient de rappeler que la promotion économique vise deux grands objectifs, à savoir, d'une part, le soutien aux entreprises existantes et, d'autre part, l'accueil de nouvelles entreprises.
2.1.1. Aide aux entreprises existantes
Nous devons être bien conscients de l'importance primordiale qu'il convient d'attacher à la satisfaction des besoins des entreprises déjà actives à Genève, notamment pour trois raisons:
- les entreprises exerçant leurs activités dans notre canton et satisfaites d'être à Genève représentent des porte-parole convaincants auprès des candidats éventuels à une nouvelle implantation. Il s'agit là de notre meilleure «carte de visite»;
- il est illusoire de prétendre attirer de nouvelles entreprises à Genève si d'autres quittent notre territoire parce qu'elles n'y trouvent pas les conditions-cadre nécessaires à leur bon développement;
- le fait que les entreprises existantes bénéficient d'un soutien actif des pouvoirs publics représente une confirmation pour les sociétés que nous tentons d'attirer à Genève de l'existence d'une véritable collaboration entre secteurs public et privé, et ce pas seulement au moment où nous tentons de les «séduire».
L'aide aux entreprises genevoises revêt diverses formes. C'est ainsi que le département de l'économie publique est appelé, par exemple, à
- faciliter les contacts avec les différents secteurs de l'administration et rechercher des allégements de procédures chaque fois que cela est possible. Dans ce domaine, le secteur de la main-d'oeuvre étrangère a fait l'objet d'un examen approfondi qui, avec l'aide des partenaires sociaux et des milieux économiques, a permis de réduire considérablement les délais d'examen des requêtes présentées;
- favoriser la mise en place de plans particuliers pour faciliter les restructurations en évitant des licenciements ou en limitant les effets négatifs de ces derniers;
- proposer des allégements fiscaux permettant aux entreprises d'investir aussi largement que possible dans leur outil de travail ou de production (voir § 4.10);
- permettre, lorsque cela est justifié, le recours aux réductions de l'horaire de travail, aux mesures d'«initiation au travail», selon la loi fédérale sur l'assurance-chômage (LACI), pour ne citer que deux domaines particuliers. Grâce à cet appui, un grand nombre d'entreprises ont pu passer au travers de périodes plus difficiles sans devoir réduire le potentiel représenté par les connaissances de leurs collaborateurs;
- favoriser la mise en relation avec des partenaires financiers, commerciaux ou industriels;
- offrir des conditions-cadre performantes. Un exemple récent mérite d'être relevé ici, dans la mesure où il touche le commerce de détail, secteur économique le plus important du canton en termes d'emplois.
Confrontés à une concurrence de plus en plus vive, les commerces doivent bénéficier d'améliorations vitales, notamment dans deux domaines particuliers:
· l'accessibilité: entre autres, avec la réalisation des parkings de la place Neuve, de la place Grenus, de la rue Pierre-Fatio et l'extension du parking sous-lacustre, actuellement à l'étude;
· les horaires d'ouverture: la volonté d'action du Conseil d'Etat est clairement illustrée par le dépôt du projet de loi 7093 proposant une ouverture retardée jusqu'à 20 h une fois par semaine et les autorisations délivrées de cas en cas afin de permettre l'ouverture retardée des commerces lors de manifestations spéciales. A titre d'exemple, on peut citer les dérogations accordées pour la Journée européenne du patrimoine, la Fête des Eaux-Vives (artisans et commerçants en fête) et la Fête de village de l'Association des artisans et commerçants du Vieux Chêne-Bourg.
D'une manière générale, les entreprises locales bénéficient aussi des bienfaits de l'une des stratégies mises en place dans le cadre des actions de la promotion économique liées à l'accueil de nouvelles entreprises et représentées par l'approche personnalisée. Les chefs d'entreprises doivent être en mesure de considérer l'administration face à un problème particulier. Cette attitude est la seule qui permette d'identifier assez tôt les sources de conflits éventuels et de rechercher ensemble assez en amont les solutions possibles.
2.1.2. Accueil de nouvelles entreprises
a) Une fois encore, avant d'aller chercher trop loin les nouveaux venus, il convient de soutenir ceux qui, sur place, souhaitent créer leur propre entreprise. L'esprit d'entreprise existe bel et bien dans notre canton et nous devons nous en féliciter.
En apportant, par exemple, un soutien actif aux chômeurs souhaitant créer leur propre activité indépendante, Genève a agi en véritable pionnier sur le plan suisse et ces initiatives servent aujourd'hui d'exemple pour d'autres réalisations.
Le Conseil d'Etat souhaite cependant aller plus loin et deux projets sont actuellement à l'étude:
- il s'agit, tout d'abord, de mettre à disposition des PME une documentation complète permettant à celui qui souhaite créer une entreprise de bénéficier d'un véritable guide pratique. Le département de l'économie publique, en étroite collaboration avec la Chambre de commerce et d'industrie de Genève, prépare actuellement un tel document;
- il s'agit, ensuite, de mettre sur pied un organisme qui accorde un soutien financier aux personnes souhaitant créer leur propre activité indépendante, en leur permettant de bénéficier d'un accompagnement, sous la forme de conseils et d'une aide qui seraient apportés par d'anciens chefs d'entreprises aujourd'hui à la retraite. Le département de l'économie publique étudie actuellement cette question, en étroite collaboration avec les responsables du «Club Adlatus» de Genève.
b) Sur le plan extérieur, c'est par le biais d'un bon positionnement du canton de Genève et d'une campagne de promotion active que nous avons, depuis maintenant un peu plus d'un an, présenté ce dernier comme un site privilégié pour de nouvelles activités.
L'expérience montre en effet que, en tenant compte de tous les éléments qui caractérisent notre canton, nous avons un produit de qualité à offrir et que ce n'est pas par le biais de subventions ou autres aides spéciales que nous remporterons des succès durables. Des exemples apportés par nombre d'autres régions du monde démontrent clairement que de nouvelles implantations décidées avant tout en raison de conditions financières temporaires, pour ne pas parler de subventions, permettent de se réjouir à court terme de l'arrivée d'une nouvelle entreprise mais se révèlent bien souvent totalement défavorables au développement économique à long terme des régions concernées.
A cet égard, il est intéressant de constater qu'après 15 ans d'activité intense et fructueuse, la promotion économique du canton de Neuchâtel arrive aux mêmes conclusions que celles retenues à Genève. Les auteurs du rapport établi par l'université de Neuchâtel intitulé «Bilan 93 - La promotion économique neuchâteloise» le confirment: «Quand nous avons demandé aux nouvelles entreprises quelles étaient les motivations qui les avaient amenées à Neuchâtel, nous avons été quelque peu surpris de constater que les incitations financières jouent en définitive un rôle secondaire. La raison en est simple: le mécanisme de concurrence entre les régions les conduit à offrir des avantages à peu près similaires. Les incitations financières sont donc nécessaires mais insuffisantes. Les entreprises que nous avons rencontrées attachent beaucoup d'importance à l'établissement d'une relation de confiance avec le Service de promotion économique, sachant qu'elles bénéficieront de son appui en cas de besoin. Elles sont également attentives à la flexibilité du gouvernement et à sa capacité de comprendre les problèmes et les besoins des entreprises.»
Toutes les actions entreprises au titre de la promotion du canton de Genève s'insèrent dans le cadre de la politique de développement qualitatif de notre économie retenue par le Conseil d'Etat. Il s'agit certes, dans la conjoncture actuelle, d'accueillir des entreprises pour créer de nouveaux emplois. Nous devons cependant encore tout mettre en oeuvre pour faire en sorte, dans la mesure du possible, que ces emplois ne soient pas passagers ou par trop «volatiles» et qu'ils permettent aussi de maintenir l'équilibre entre les différents secteurs d'activités de notre canton.
Aujourd'hui encore, certes un peu moins pour ceux qui résident ou exercent leurs activités dans le canton mais sans aucun doute à l'étranger, l'image que les gens se font de Genève est totalement faussée par les événements qui ont jalonné les années fastes que nous avons traversées. Pour trop de monde, Genève signifie encore, et à tort, manque de locaux pour de nouvelles activités, prix élevés, impossibilité d'obtenir les autorisations de travail nécessaires pour les dirigeants spécialisés, manque de main-d'oeuvre qualifiée.
Cette image dépassée ne correspond plus à la réalité que nous nous efforçons maintenant de bien faire connaître, à savoir:
· un changement fondamental dans l'attitude des Genevois face à l'économie. Les temps de la croissance zéro, voire même de la décroissance, sont bien derrière nous et une volonté de tout mettre en oeuvre pour préserver et créer des emplois s'est clairement manifestée;
· il y a aujourd'hui à Genève une offre satisfaisante, voire même dans certains cas abondante, de locaux, qui plus est, à des prix à la baisse, permettant d'accueillir toute nouvelle activité;
· nous disposons actuellement d'un nombre largement suffisant d'autorisations de travail pour développer tous les projets intéressants;
· grâce aux articles 14 et 65 A LCP, complétés par des directives d'application largement diffusées auprès de tous ceux qui pourraient être concernés (associations professionnelles, conseillers d'entreprises, chefs d'entreprises, bureaux d'avocats d'affaires...), Genève peut offrir aux entreprises de production, ainsi qu'à celles dont l'activité est étroitement liée à l'industrie, les accompagnements fiscaux nécessaires pour faciliter leur démarrage ou leur développement (voir § 4.5).
Chacun sait qu'aujourd'hui la plupart des régions du monde cherchent à convaincre les investisseurs de venir développer de nouvelles activités chez elles.
Il est prouvé cependant que, noyés sous une abondance d'informations, les dirigeants d'entreprises attachent de plus en plus d'importance à la qualité des relations qu'ils peuvent établir avec leurs éventuels futurs partenaires. C'est ainsi qu'en Suisse en général et à Genève en particulier, nous disposons d'un atout très spécial qui fait que notre taille relativement petite devient un véritable avantage.
Ceux qui nous entourent apprécient de pouvoir rencontrer facilement les responsables de l'administration ou d'organismes économiques, sans devoir rechercher longuement le bon interlocuteur ou sans attendre longtemps avant d'obtenir les rendez-vous demandés.
Ces mêmes chefs d'entreprises savent à quel point beaucoup feront tout pour eux au moment où il s'agit de les accueillir, mais craignent souvent qu'une fois établis ils aient grand peine à trouver le véritable partenaire les aidant à résoudre les problèmes auxquels ils seront inévitablement confrontés. Etablir une relation directe et privilégiée avec ces personnes est donc capital et nous distingue de beaucoup d'autres régions européennes.
Cette personnalisation des contacts se retrouve dans toute l'approche retenue pour la promotion économique:
- la documentation développée, présentée dans le détail il y a une année, a largement pris en compte l'approche personnalisée, notamment par le biais de «fiches techniques»;
- les chefs d'entreprises trouvent au sein du département de l'économie publique des interlocuteurs qui prennent en charge l'intégralité de leurs dossiers et les suivent pas à pas.
Enfin, la promotion économique tient largement compte de la notion de «développement durable», élément qui transparaît clairement au travers de la notion de «qualité de vie» qui représente un argument clef. Dans la mesure où la «qualité de vie», c'est-à-dire la mise à disposition de conditions de travail et de vie favorables, devient l'un des atouts principaux qui permettent d'attirer de nouvelles entreprises à Genève, il est clair que nous nous devons de tout mettre en oeuvre pour que cette qualité persiste au fil du temps, faute de quoi nous perdrions toute chance d'assurer le développement économique de ce canton, si nécessaire au bien-être de sa population.
2.1.3. Des résultats probants
La justesse de la stratégie retenue peut aussi être recherchée dans les résultats extrêmement encourageants enregistrés jusqu'à ce jour.
Alors que, d'une manière générale, on estime qu'il faut au minimum un à deux ans pour commencer à tirer profit d'une campagne de promotion, c'est déjà après une année seulement que nous avons enregistré à Genève la création de pas moins de 45 nouvelles entreprises ou développements marquants d'entreprises existantes, soit 420 emplois nouveaux pour 1993, engendrant au moins 400 emplois supplémentaires d'ici à 1995.
Et ce premier succès n'était pas un simple hasard puisque, après une première année très fructueuse, la promotion économique a continué à obtenir des résultats importants et encourageants. Durant les 6 mois qui ont suivi nous avons enregistré 24 implantations nouvelles avec un nombre de création d'emplois maintenu au même niveau que précédemment. Les résultats restent donc sur une trajectoire ascendante.
2.1.4. Extension des activités de la promotion économique
Les efforts ont été concentrés initialement sur la mise en valeur du potentiel local représenté par les avocats, fiduciaires, banques, conseillers d'entreprises, chambres de commerce, ambassades, consulats. Il s'agissait d'exploiter au mieux toutes les possibilités offertes par le caractère international de Genève et de réactiver des dossiers que nos partenaires avaient tout simplement laissés de côté vu le manque d'ouverture manifesté par Genève durant de nombreuses années.
L'action de la promotion économique est maintenant étendue à la prospection à l'étranger, au travers de séminaires tenus notamment aux Etats-Unis et dans le Sud-Est asiatique. Ici encore, l'approche «personnalisée» a été maintenue. C'est ainsi que les présentations s'appuient largement sur les témoignages de chefs d'entreprises du pays ou de la région visitée ayant déjà choisi Genève pour y implanter une partie de leurs activités.
De plus, pour assurer un suivi des nombreux contacts établis aux Etats-Unis et tirer un profit maximum des retombées des séminaires, le département de l'économie publique s'est assuré les services d'un agent local.
2.2. Développement prioritaire des «grands axes moteurs»
2.2.1. Genève place internationale
Le caractère international de Genève est un autre des principaux atouts sur lesquels s'appuie la promotion économique.
Le fait que notre canton soit en mesure d'offrir un cadre international complet (programmes scolaires étrangers - clubs étrangers - organismes internationaux...), permettant aux nouveaux venus de se sentir chez eux, n'est pas étranger à la venue d'un grand nombre de sociétés internationales.
A juste titre, la commission permanente de l'économie du Grand Conseil relève que, lorsque l'on se réfère aux activités à caractère international, il faut entendre à la fois le tourisme, le commerce international, les organisations internationales et les sociétés multinationales.
a) Tourisme
Ces derniers temps, ce domaine a été l'objet d'une attention toute particulière. Sous l'impulsion du département de l'économie publique, et grâce à l'adoption par votre Grand Conseil de la loi sur le tourisme, Genève s'est enfin doté des moyens nécessaires pour développer son tourisme. Nous ne reviendrons pas ici sur l'analyse du passé et de l'avenir en matière touristique, détaillée dans l'exposé des motifs du «projet de loi sur le tourisme» (PL 6941).
Il convient maintenant de s'assurer que les structures et stratégies de l'office du tourisme de Genève (OTG) soient adaptées au nouveau contexte, afin de permettre de tirer le meilleur parti possible des moyens substantiels mis à disposition du tourisme, secteur d'activité important de l'économie genevoise.
Le chemin vers une nouvelle dynamique est d'ores et déjà entamé, notamment au travers des actions suivantes:
- pour la première fois, l'OTG a établi pour 1995 un plan marketing complet, fixant une ligne d'action claire et des priorités parfaitement identifiées;
- grâce à la collaboration précieuse de membres de son comité de direction, l'OTG a complètement revu son organigramme, dans le but d'assurer une efficacité maximale de tous les collaborateurs;
- une collaboration étroite avec le canton de Vaud a permis de mettre sur pied des campagnes de promotion communes à l'étranger, sous le thème «Lake Geneva region». De toute évidence, il ne s'agit que d'un premier pas vers une collaboration régionale et transfrontalière beaucoup plus étendue. Des discussions sont d'ores et déjà en cours avec le canton du Valais et les régions frontalières afin d'identifier les possibilités de coopération et de définir les différents éléments d'une stratégie de promotion ainsi élargie à l'ensemble des territoires concernés.
b) Commerce international
De tout temps, et l'on peut remonter ici jusqu'au Moyen Age, Genève a été un centre de commerce international très actif.
Il n'est pas exagéré de dire que Genève est aujourd'hui un centre important de commerce international sur le plan mondial. A titre de comparaison, la somme des impôts payés par les sociétés de «trading» est maintenant supérieure à celle versée par l'ensemble des banques.
Durant sa première année d'activités, la promotion économique a facilité la création de pas moins de 15 nouvelles sociétés de commerce international, représentant un chiffre d'affaires que l'on peut évaluer à plus de 300 millions de francs. En outre, durant le même laps de temps, une dizaine de nouvelles sociétés du même type se sont implantées à Genève sans requérir quelque aide particulière que ce soit.
Les nouvelles sociétés auxquelles nous venons de faire référence exercent leurs activités dans des domaines aussi variés que le pétrole et ses dérivés, les métaux ferreux et non ferreux, les produits industriels de base (profilés d'acier ou d'aluminium, produits chimiques), le coton brut et les produits finis de coton, les produits alimentaires de base (huiles, graisses, riz, blé, etc.) ainsi que les métaux précieux.
c) Organisations internationales
Son image de ville internationale, si importante pour son développement, Genève la doit en grande partie à la présence sur son sol des organisations internationales, qu'elles soient gouvernementales (OIG) ou non gouvernementales (ONG).
Nous ne reviendrons pas dans le détail sur la contribution essentielle de ces dernières à l'économie du canton, cette matière faisant l'objet d'études spécifiques publiées régulièrement par l'office cantonal de la statistique. Nous nous bornerons donc à une mise à jour des chiffres mentionnés dans la motion 803-A en précisant qu'en 1993 le nombre de personnes occupées dans le secteur international (OIG - missions permanentes et 10 principales ONG) s'établissait à 27 400 et que le montant total des dépenses engagées par les organisations internationales se fixait pour 1992 à 3,1 milliards de francs.
Il est vrai que, dans un monde toujours plus concurrentiel, Genève ne saurait se «reposer sur ses lauriers» et tout doit être mis en oeuvre pour que notre canton reste toujours aussi attractif pour ce type d'organismes.
Que ce soit de manière isolée ou en relation étroite avec la Confédération, suivant le type d'actions à entreprendre, le Conseil d'Etat a mis en place une véritable stratégie qui vise notamment:
- à établir des contacts directs, permanents et réguliers avec les responsables des principales organisations internationales pour être à leur écoute et parfaitement informé de leurs besoins actuels et futurs;
- à entreprendre, chaque fois que nécessaire, de véritables actions de promotion de Genève en tant que lieu privilégié pour l'accueil d'organisations internationales. Un bon exemple de cet engagement a été la campagne de promotion menée à bien en relation avec la présentation de la candidature de la Suisse pour accueillir à Genève le Secrétariat de la Commission à haut niveau sur le développement durable (CDD).
La brochure «Genève pour un développement durable» a permis de compléter admirablement la documentation de base utilisée pour la promotion économique générale;
- à sensibiliser la Confédération à l'importance de ces organisations, non seulement pour Genève mais aussi pour la Suisse tout entière, cela justifiant d'ailleurs un plus grand soutien financier de la part des autorités fédérales.
Dans ce domaine particulier, il convient aussi de citer la création récente de la fondation «Un avenir pour Genève» dont le but, clairement défini dans les statuts, est notamment de «développer, au niveau de la réflexion et de l'action, une dynamique de mise en valeur et de renforcement des atouts de la Genève internationale et de son rôle dans la politique extérieure de la Suisse».
Tous ces efforts portent leurs fruits. Pour s'en convaincre, il n'est que de constater:
- l'effet positif des mesures prises sur des médias internationaux. L'article paru dans l'édition du 28 avril 1994 du grand quotidien «The New York Times International» qui, après avoir relevé l'évolution très positive du comportement de Genève vis-à-vis des organisations internationales, conclut par la déclaration suivante de M. Vladimir F. Petrovsky, directeur général de l'ONU, «Genève met vraiment tout en oeuvre pour que l'on se sente chez soi». Un autre article, paru dans l'édition des 14-15 mai 1994 de l'«International Herald Tribune», va exactement dans le même sens;
- le succès remporté lors des négociations qui ont conduit au choix de Genève pour l'implantation du siège de la nouvelle «Organisation mondiale du commerce (OMC)». Ce dossier particulièrement difficile et délicat a permis de constater:
· l'importance d'une collaboration étroite entre les divers secteurs de l'administration cantonale, unissant leurs efforts pour élaborer un dossier complet et coordonné;
· l'importance de la collaboration entre la Confédération et notre canton. Mois après mois, au travers de contacts réguliers et de réunions de coordination, il a été possible d'agir rapidement et de manière efficace afin de présenter une offre concurrentielle;
· l'importance de la stratégie de promotion économique sur laquelle s'appuient toutes les actions menées à bien dans ce domaine. Adaptés aux circonstances du moment, nombre d'éléments constitutifs du plan marketing de base ont été utilisés pour contrecarrer les objections avancées et souligner l'attractivité de l'offre suisse/genevoise.
d) Sociétés multinationales
Grâce à son caractère international, Genève a toujours représenté un lieu d'implantation attractif pour les sociétés multinationales.
Nombre d'entre elles apprécient tout particulièrement la possibilité qui leur est donnée de rassembler dans notre canton des équipes pluridisciplinaires composées de personnes de multiples nationalités qui oeuvrent toutes en parfaite harmonie.
Ici encore, nous ne reviendrons pas dans le détail sur l'importance dece secteur économique, si ce n'est pour rappeler qu'il englobe plus de300 entreprises et plus de 20 000 emplois.
L'approche «personnalisée» adoptée sur le plan général a aussi été retenue pour les sociétés multinationales, dans le but de connaître et de toujours mieux tenir compte des préoccupations de ces entreprises qui contribuent de manière essentielle au développement économique de Genève.
C'est ainsi que l'on doit se réjouir de voir ce secteur de l'économie locale toujours plus représenté dans des groupes de travail, commissions ou instances tels que la Fédération des Syndicats patronaux, la Chambre de commerce et d'industrie de Genève, la Banque Cantonale de Genève, l'Aéroport international de Genève, l'office pour la promotion de l'industrie genevoise, pour ne citer que quelques exemples.
Dans ce domaine, la concurrence est aussi très vive et rien n'est acquis à jamais. Notre objectif doit être non seulement de garder les sociétés déjà établies mais d'inciter de nouvelles entreprises à les rejoindre.
Les conditions-cadre générales jouent ici à nouveau un rôle clef. Mais les multinationales, en dehors de tous les éléments qui contribuent à la qualité de la vie, attachent une importance particulière à la sécurité du droit, à la sécurité des personnes et des biens, à une fiscalité non pénalisante par rapport à d'autres sites concurrents ainsi qu'au maintien de liaisons aériennes performantes avec le reste du monde. Toute détérioration de notre situation dans ces domaines respectifs aurait de fâcheuses conséquences.
Au fil des ans, Genève a abrité de nombreux «quartiers généraux» d'entreprises américaines. Même si les conditions géopolitiques ont considérablement changé, Genève peut toujours représenter une véritable plate-forme internationale pour la gestion des affaires dans d'autres parties du monde, notamment l'Europe et plus particulièrement l'Europe de l'Est. Ce sont ces éléments qui devraient permettre d'attirer de nouveaux «quartiers généraux» de sociétés issus d'autres pays, par exemple d'Asie.
2.2.2. Genève place financière
De tout temps, Genève a été reconnue comme une place financière de choix, mais, une fois de plus, on ne saurait vivre sur sa réputation.
La régionalisation n'épargne pas le secteur financier et l'on peut clairement identifier aujourd'hui une nette tendance à voir Genève considérée avant tout comme un site offrant des compétences particulières en matière de gestion de patrimoine. Plusieurs établissements ont récemment concentré à Genève les activités qu'ils exercent dans ce domaine particulier.
L'avenir de la place financière genevoise dépend très largement d'actions et de décisions prises au niveau fédéral. Ce sont des questions telles que le secret bancaire, le droit de timbre ou l'application de la TVA à certaines opérations bancaires (problème qui a finalement pu être résolu de manière satisfaisante) qui déterminent en grande partie nos chances de succès.
Tout n'échappe cependant heureusement pas au rayon d'influence directe du canton et le Conseil d'Etat s'efforce, au travers de contacts réguliers avec les milieux bancaires, d'associer ceux-ci aussi étroitement que possible au développement économique de Genève.
On doit à cet égard se féliciter de la création de la fondation «Genève place financière» qui, en concertation très étroite avec les autorités cantonales, joue un rôle essentiel dans le cadre des actions de promotion de la place financière genevoise, tant sur un plan général que plus particulier, notamment pour tout ce qui touche à la formation. Au moment où des produits bancaires toujours plus spécialisés apparaissent sur le marché, il est essentiel que Genève soit à même d'offrir un potentiel suffisant de personnes possédant les qualifications adéquates.
2.2.3. Genève, centre de formation
Le départemeent de l'instruction publique (DIP) se préoccupe de rapprocher le monde de l'école et celui de l'économie, l'objectif étant de faciliter l'insertion professionnelle des jeunes. On peut notamment mentionner les mesures suivantes:
2.2.3.1. Sensibilisation des jeunes et des enseignants: création d'un groupe «école et économie»
Depuis 1993, le service de la formation professionnelle réunit un groupe de travail comprenant les représentants des directions générales du cycle d'orientation, de l'enseignement secondaire postobligatoire, des études pédagogiques de l'enseignement secondaire et de l'Office pour la promotion de l'industrie genevoise (OPI), dans le but de mettre en place une coordination efficace entre les milieux industriels et les écoles.
Objectifs:
- permettre aux enseignants et aux élèves de mieux connaître le tissu industriel genevois;
- favoriser un contact direct entre les jeunes et les entreprises;
- créer de nouveaux liens entre les enseignants et les professionnels;
- favoriser le choix professionnel des élèves et les vocations pour l'industrie;
- à terme, faire en sorte que les informations réciproques permettent une meilleure connaissance des exigences des uns et des autres.
2.2.3.2. Projets de réforme visant à dispenser une formation plus en phase avec l'évolution des exigences professionnelles
a) Création de troncs communs de formation
Dès la rentrée scolaire 1994-1995, le DIP a instauré un tronc commun de première année dans les métiers du bois, en réunissant les formations d'ébéniste, de menuisier et de charpentier. Si la formation dispensée aux apprentis et aux élèves à plein temps se passe à l'école et dans les ateliers au premier semestre, le second semestre donne la possibilité aux jeunes d'effectuer des stages dans les trois types de métiers afin de mieux en cerner les exigences et de se déterminer en connaissance de cause.
L'instauration de troncs communs dans les différents métiers vise à promouvoir une formation de base plus large et plus solide, favorisant la mobilité professionnelle et l'adaptation des individus à des techniques diversifiées. Elle répond à une volonté politique des autorités de ce canton d'harmoniser les exigences et de favoriser un contact direct de l'école avec la réalité professionnelle.
Le Conseil central interprofessionnel (CCI) demande d'ailleurs que ce principe soit élargi à l'ensemble des métiers.
b) Projet de regroupement des filières duales (apprentissage) et plein-temps (école)
Compte tenu
- de l'existence dans certaines professions de l'industrie et de l'artisanat de formations duales et plein-temps réparties sur plusieurs lieux de formation (scolaires): CEPIA, EAD, ETM;
- de l'évolution de plus en plus rapide des technologies et des perspectives professionnelles dans ces secteurs;
- de la nécessité de diminuer les intervenants face aux milieux professionnels et de créer des relations suivies et harmonisées avec ceux-ci, permettant de mieux adapter les exigences des différentes professions à l'enseignements dispensé dans les écoles.
le DIP a décidé de constituer des groupes de travail afin d'analyser les regroupements possibles de formation dans les différents secteurs professionnels.
Le regroupement des filières de l'apprentissage et de l'école plein-temps sous des directions uniques favorisera les relations avec les milieux professionnels et les interactions entre l'école et l'économie.
2.2.3.3. Pour une plus grande implication des entreprises dans le processus de formation et notamment de l'apprentissage
Parallèlement à une scolarisation de la formation en entreprise (développement des cours d'introduction en école, instauration de troncs communs favorisant l'acquisition d'une meilleure culture générale, instauration de la maturité professionnelle, projet de création de hautes écoles spécialisées), on constate qu'en 11 ans, près de 1800 places d'apprentissage ont disparu du contexte économique genevois. Les causes sont diverses. Il n'en reste pas moins nécessaire d'encourager les entreprises à accroître le potentiel de places d'apprentissage si l'on veut pouvoir conserver un système de formation duale qui a fait ses preuves.
2.2.4. Genève, centre de technologies de pointe
Comme il l'a déjà fait à maintes reprises, le Conseil d'Etat réaffirme aujourd'hui sa volonté d'assurer le développement d'une économie équilibrée, en favorisant le maintien:
· d'un secteur primaire performant, même si, traduit en termes d'emplois, il ne représente qu'une faible partie de la population;
· d'activités de production compétitives comportant un niveau d'emploi et technologique qui permettra au secteur secondaire de rester l'un des éléments moteurs de l'économie locale;
· d'activités de service variées et équilibrées qui permettent au secteur tertiaire de garder son dynamisme.
Dans son rapport de 1989 sur l'économie genevoise, le Conseil d'Etat a longuement analysé l'évolution du secteur secondaire genevois. Depuis, il n'a cessé de soutenir le développement de technologies de pointe et d'activités liées à la recherche et au développement.
L'office pour la promotion de l'industrie genevoise (OPI) continue de jouer dans ce domaine un rôle essentiel. Après s'être consacré à la promotion des secteurs liés à la «mécatronique», l'office a été désormais ouvert à d'autres secteurs importants de notre industrie (informatique, industrie chimique et pharmaceutique, bâtiment...).
En matière de mise à disposition de terrains équipés à des prix concurrentiels, l'Etat est aussi intervenu de manière énergique, permettant à nombre d'entreprises de bénéficier des multiples avantages de véritables parcs technologiques étroitement liés à la cité (voir § 4.3).
3. Politique régionale
L'élément régional est aujourd'hui très présent dans toutes les réflexions menées à bien par le Conseil d'Etat.
Nous ne reviendrons pas dans ce rapport sur les grandes lignes de la politique régionale du gouvernement qui ont été présentées de manière détaillée il y a peu de temps dans le «rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil concernant la politique régionale» (RD 221) du 13 avril 1994. Nous soulignerons simplement une fois encore (réf. § 4 de ce document qui traite les aspects relatifs à l'économie) que si la concrétisation de projets communs transfrontaliers restera difficile tant que la Suisse ne se sera pas rapprochée de l'Union européenne, chaque possibilité réelle d'agir en concertation, dans l'intérêt de la région franco-genevoise, ne manque pas d'être exploitée.
Afin de favoriser une meilleure connaissance réciproque des données économiques pertinentes, une action spécifique a été développée. Elle a permis la parution récente d'un «Atlas régional», fruit d'une collaboration étroite et active entre l'office cantonal de la statistique du canton de Genève (OCSTAT) et de la direction régionale Rhône-Alpes de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).
Tous ces éléments montrent clairement que penser région devient un véritable réflexe et que si la prise en compte de la dimension régionale est nécessaire dans nombre de nos réflexions, il ne faut toutefois pas minimiser les difficultés découlant d'organisations politiques, juridiques et fiscales offrant certaines différences importantes. Des secteurs tels que la culture et l'aménagement du territoire, les transports et le tourisme offrent sans aucun doute les meilleures possibilités de développements concertés dans l'immédiat. Ce n'est pas un hasard si les études liées à la construction d'un métro dans le canton de Genève ont immédiatement conduit à prendre en compte les besoins des régions frontalières de Genève.
4. Conditions-cadre
4.1. Groupe de pilotage
Nous ne traiterons pas à ce stade du rapport la question du «groupe de pilotage» proposé dans la motion 803-A, dans la mesure où cette matière sera abordée dans le paragraphe relatif au Conseil économique et social.
4.2. Collaboration interdépartementale et allégements de procédures
Dans le paragraphe relatif à la promotion économique, nous avons déjà abordé cette question, en relevant les efforts entrepris pour alléger les procédures relatives au marché du travail et à l'exercice d'activités économiques diverses.
Dans le domaine de la construction, le département des travaux publics et de l'énergie a mis en place un groupe de travail créé spécialement pour procéder à une véritable radiographie de toutes les procédures en vigueur, dans le but de proposer tous les allégements possibles. Sans attendre le résultat de cette réflexion approfondie, des mesures concrètes ont d'ores et déjà été mises en place pour réduire les délais et, ici encore, agir en véritable partenaire de ceux qui ont recours aux services de l'administration.
Il n'est pas exagéré de dire que la collaboration interdépartementale, élément essentiel pour résoudre rapidement les problèmes d'entreprises souhaitant développer leurs activités ou s'établir à Genève, est maintenant, enfin, devenue réalité. La concertation et la collaboration étroite qui existaient depuis quelques années déjà entre le département de l'économie publique et le département des finances ont maintenant, fort heureusement, pu être étendues au département des travaux publics et de l'énergie. Nombreux sont les chefs d'entreprises qui ont déjà eu l'occasion de se féliciter de cette évolution importante et indispensable.
4.3. Mise à disposition des terrains nécessaires au développement des activités industrielles/artisanales et des organisations internationales
Heureusement, Genève ne connaît plus aujourd'hui la situation qui prévalait il y a quelques années, caractérisée par un manque de locaux et un certain type de spéculation.
La politique de densification menée à bien pendant plusieurs années fait qu'aujourd'hui il n'est pas d'activité que nous souhaitions accueillir à Genève qui ne puisse trouver place dans notre canton.
Dans les zones industrielles, les locaux ne manquent pas et si les surfaces nues pouvant être mises à disposition restent limitées, la situation s'améliorera nettement grâce à la mise en valeur des terrains situés dans la nouvelle zone industrielle de Mouille-Galland (extension de la zone industrielle de Meyrin-Satigny) et dans l'extension de la zone industrielle de Plan-les-Ouates, jusqu'à l'autoroute de contournement.
En ce qui concerne les organisations internationales, une collaboration étroite entre la Confédération, le canton et la FIPOI permet de tenir largement compte des besoins actuels et futurs de ces organismes. Plus qu'un manque de surfaces à disposition, c'est parfois, hélas, un manque de volonté de permettre aux projets de se concrétiser que l'on doit constater. Nous ne nous attarderons pas sur les difficultés regrettables auxquelles le Conseil d'Etat a dû faire face pour mener à bien, à titre d'exemple, le dossier relatif à la «Maison Europe». Nous devons toutefois relever qu'avant toute chose, ce sont ces types d'hésitations et de situations qui font le plus grand tort à la Genève internationale, dans la mesure où, par la force des choses, ils sont largement relayés sur un plan mondial, ne serait-ce que par ceux qui sont nos concurrents et, en toute logique, utilisent de telles situations à leur profit.
4.4. Soutien à l'innovation et intégration de l'innovation dans les constructions et réalisations publiques
4.4.1. Développement de la Fondation genevoise pour l'innovation technologique (FONGIT)
La FONGIT a clairement démontré son utilité en tant qu'organisme pouvant apporter de précieux conseils aux innovateurs.
Grâce aux connaissances des animateurs de l'Association genevoise pour l'innovation technologique (AGIT) et surtout au travers des échanges qui ont lieu entre tous les partenaires de la FONGIT qui représentent les milieux les plus divers sur le plan de l'économie et de la recherche, de nombreux conseils ont été apportés à des inventeurs. Le fait d'envoyer simplement certains d'entre eux à la bonne adresse a souvent permis à ces derniers de trouver l'élément qui leur manquait pour aller de l'avant avec leur projet. En ce sens, la FONGIT joue parfaitement son rôle d'interface entre la recherche et les entreprises qui lui était dévolu.
A ce jour, 400 inventions ont été présentées à l'AGIT, 150 ont fait l'objet de discussions, 70 l'objet d'un rapport après enquête et examen par le Comité de l'AGIT, et 7 ont été retenues pour présentation à la FONGIT en vue d'un financement (taraudeuse - maison modulaire - simulateur de tir - marieuse de documents - machine à froid - composteur pour restaurants - doseur de poudre).
Après plus de 4 ans d'activité, un certain nombre de conclusions intéressantes peuvent être tirées, qui viennent soit confirmer certaines doutes que l'on pouvait raisonnablement avoir, soit éclairer d'une manière quelque peu différente la vision que l'on a généralement des inventeurs et des inventions.
Lors de la création de la FONGIT, il avait été décidé de mettre à disposition des inventeurs une structure physique (atelier) et financière leur permettant d'élaborer leurs prototypes dans de bonnes conditions, et ainsi de donner une chance supplémentaire à leurs innovations. Cette idée généreuse se révèle pourtant peu efficace, dans la mesure où en fin de compte l'inventeur refuse le partage de son idée, et par conséquent toute aide extérieure jugée comme une intrusion.
Au lieu de considérer que l'aide apportée par la FONGIT/AGIT est une chance qui devrait leur permettre de progresser dans leurs projets, les inventeurs ont tendance à se reposer sur la structure offerte et souvent se désintéressent de leurs propres innovations. L'aide financière, notamment les honoraires, est parfois considérée comme un dû, et le futur intérêt de l'AGIT dans l'exploitation industrielle de l'innovation, à la limite comme un abus. Trop souvent, et de manière surprenante, l'aide de l'AGIT se transforme dans l'esprit des destinataires en un revenu mensuel, en une véritable subvention, plutôt qu'en un défi de réalisation d'objectif.
On doit dès lors se demander pourquoi, alors même que l'invention en elle-même est porteuse d'espoirs, les succès sont si rares. Les expériences vécues amènent leurs auteurs à penser que le couple inventeur/invention est dans la majeure partie des cas un état de chrysalide et que la condition de l'éclosion s'appelle la «structure». Il faut donc aujourd'hui ajouter au triptyque invention/inventeur/client une notion supplémentaire et obligatoire: la structure financière et la capacité industrielle.
Tenant compte de ce qui précède, il s'avère qu'à l'avenir il ne faudra prendre en considération que les projets que l'inventeur est prêt à inscrire dans le cadre de la structure indispensable à la réussite industrielle, cela pouvant aller jusqu'à la prise en compte d'une cession d'une partie, voire même d'une majorité des droits sur l'invention dans le cadre d'une entreprise partenaire existante ou à créer.
Compte tenu de l'évaluation faite, deux solutions s'avéraient possibles:
- l'AGIT comme maître d'oeuvre: puisque la structure d'aide à un inventeur est difficile à appréhender, pour être efficace il faudrait envisager la prise en charge de l'invention par l'AGIT, en tant que seul maître d'oeuvre, c'est-à-dire renforcer considérablement la structure actuelle et négocier cas par cas les intérêts de l'inventeur selon la valeur estimée de l'invention. La mise de fonds et les frais de gestion seraient très importants. En outre, l'AGIT se trouverait rapidement placée au centre de conflits d'intérêts pouvant naître entre différents projets susceptibles d'être concurrents et qu'elle devrait néanmoins porter;
- l'AGIT partenaire: l'AGIT est considérée comme un lieu de rencontres et de réunions, où les inventeurs peuvent parler longuement de leurs innovations et exposer leurs problèmes ou leurs ambitions. Ils peuvent demander un conseil, recevoir un encouragement ou au contraire la preuve du fait que la poursuite de leur idée semble utopique. L'AGIT reste ainsi le centre de rencontres et d'animation autour du thème de l'innovation technologique industrielle, de même qu'une aide dans le domaine de la protection juridique. Elle assure un accompagnement et un encouragement permanents, elle évalue technologiquement et économiquement les projets d'innovation et elle représente l'interface entre les institutions financières et industrielles.
En quelque sorte, l'AGIT offre une compétence pragmatique, pour échafauder la structure dont l'innovation a besoin, si cette dernière est jugée intéressante, et elle participe à l'évolution du projet sur la base d'une redevance raisonnable. Elle ne participe cependant plus directement au financement même des projets ou à la réalisation de prototypes.
Les fonds disponibles à ce jour, compte tenu des participations annoncées jusqu'à fin 1994, permettent le fonctionnement de la FONGIT/AGIT sur une telle base jusque dans le courant de 1996. Au terme de cette période, une nouvelle évaluation devra être faite afin de déterminer si l'approche finalement retenue est bien la meilleure possible.
Le nouveau rôle précisé de la FONGIT est sans aucun doute important. Dans un article paru dans l'«Hebdo» du 17 mars 1994 et intitulé «La solitude d'un petit inventeur», l'auteur relève:
«Après tout, Tetra Pak a bâti un empire dans le conditionnement sur une seule invention et bien des géants industriels, de Ford à BBC, sont nés dans des garages de la foi de bricoleurs géniaux.
»Encore faudrait-il être informé de ces découvertes marginales. En France, l'«Agence nationale de valorisation de la recherche» communique aux entreprises ces découvertes bricolées qui, au lieu de finir dans un coin du concours Lépine, trouvent souvent un destin industriel. En Suisse, aucun organisme ne se charge de valoriser ces innovations «non-officielles». Alors elles restent dans des cartons à dessins. Ou, comme le velcro, trouvent preneur à l'étranger.»
C'est donc sur ce rôle d'aide à la valorisation de l'innovation que la FONGIT se concentrera à l'avenir. Cette tâche restera toutefois difficile, comme l'atteste le rapport sur la promotion économique neuchâteloise cité précédemment et qui, à propos de la «Fondation de soutien pour la recherche appliquée et orientée (FSRAO)» ou encore plus simplement «Soutien et valorisation (SOVAR)» précise:
«SOVAR constitue en quelque sorte un pari. L'idée est de favoriser la création de nouvelles activités dans le canton par une politique d'orientation de la recherche vers les besoins de l'économie, par des transferts de technologies et des «spin off». Bien que la tâche s'avère difficile, elle mérite qu'on s'y attelle. L'expérience montre que les conditions de réussite des nouvelles entreprises sont sévères: une bonne technologie ne suffit pas, encore faut-il un bon manager, un marché et un financement. On comprend donc pourquoi le taux d'échecs des nouveaux projets est souvent élevé (70% à 80% selon certaines sources). Il faut donner à SOVAR les moyens d'accomplir sa mission et d'accompagner 2 ou 3 projets par année jusqu'au stade du «business plan». Chaque projet nécessite un investissement de 100 000 à 150 000 francs, dépenses qui viennent s'ajouter aux charges de structure de l'institution. Le programme devra ensuite faire l'objet d'une évaluation. On saura alors s'il mérite d'être maintenu.»
Au vu de ce qui précède, l'augmentation de la participation de l'Etat à la FONGIT, évoquée dans le cadre de la motion 803-A, n'est, en l'état, pas nécessaire.
L'AGIT reçoit déjà aujourd'hui une aide précieuse grâce à la mise à disposition de personnes en «occupation temporaire». Il est vrai qu'il est parfois dommage de ne pas pouvoir bénéficier de compétences précieuses pendant plus de 6 mois. C'est pourquoi, suivant l'invite de la motion 932, le Conseil d'Etat est intervenu auprès de l'Office fédéral des arts et métiers, de l'industrie et du travail (OFIAMT) pour que dans ce secteur particulier des inventions et de l'innovation, d'une part, des chômeurs puissent être employés plus de 6 mois durant la période d'indemnisation et, d'autre part, de tels programmes bénéficient des mêmes aides financières que celles octroyées par la Confédération dans le cadre de programmes d'occupation temporaire collectifs.
4.4.2. Intégration de l'innovation technologique dans les constructions et réalisations publiques
Au cours de ces dernières années, le département des travaux publics et de l'énergie (ci-après DTPE) s'est appliqué à recourir aux techniques nouvelles dans la conception et l'équipement de ses bâtiment et ouvrages de génie civil.
Ces techniques ne s'appliquent pas seulement aux installations du bâtiment, mais également à l'enveloppe et à l'exploitation de celui-ci.
Enveloppe du bâtiment:
a) Dans le cadre de l'école supérieure de commerce la plus récemment construite, une installation aéraulique (voir annexe 4) permet le transfert de l'énergie thermique d'une façade à l'autre, selon les besoins.
b) L'utilisation rationnelle de la lumière du jour assurant, d'une part, un grand confort ergonomique et, d'autre part, une réduction de consommation d'électricité lumière, a déjà donné des résultats intéressants, par exemple à l'école supérieure de commerce André-Chavanne, au nouvel Hôtel de Police et à UNI MAIL.
Installations:
c) L'application de la production de chaleur conjuguée avec la production d'électricité, à l'aide de groupes chaleur-force, avec deux installations en cours de mise en service au nouvel Hôtel de Police et au dépôt des Transports publics genevois à la Jonction.
d) L'utilisation du refroidissement «ABIATIQUE» (voir annexe 4), sans production de froid. Cette technologie a été choisie et réalisée notamment dans les établissements socio-éducatifs (EPSE) à Thônex, le bâtiment rue de l'Hôtel-de-Ville 11 (OPF) et est prévue pour l'Institut d'hygiène.
e) Dans le domaine des économies d'électricité, l'éclairage, son efficacité lumineuse et son «ergonomie» jouent un rôle important. C'est pour cette raison que le DTPE a équipé plusieurs de ses bâtiments de commandes optimalisées (voir annexe 4) de l'éclairage, par exemple dans le bâtiment LES CHAMPS à Belle-Idée, le bâtiment de la radiothérapie à l'Hôpital cantonal universitaire, le bâtiment de l'Hôtel de Police et le bâtiment d'UNI MAIL.
f) Mesure, commande et réglage des installations du bâtiment.
De plus en plus, les bâtiments d'une certaine importance sont équipés de sous-stations intelligentes (voir annexe 4) avec mesure, commande, réglages numériques.
Les différents bâtiments pourvus d'un tel système sont l'Hôpital cantonal universitaire de Genève, le Centre médical universitaire (CMU), l'école André-Chavanne, UNI MAIL, le nouvel Hôtel de Police et la centrale thermique de Belle-Idée (Institutions universitaires de psychiatrie - IUPG).
Ouvrages de génie civil:
g) La direction du génie civil est impliquée dans le projet «DRIVE II V 2022 EUROTRIANGLE», lequel s'inscrit dans le cadre du projet SNIR (système nationale d'information routière), financé par le compte des routes nationales.
Un des champs d'expérimentation en Suisse est localisé sur l'autoroute de contournement de Genève (RN1a) où un système de détection d'incidents par analyses d'images sera installé (système SIAT).
Les quelques exemples qui viennent d'être donnés montrent que l'Etat de Genève, dans le cadre des efforts qu'il déploie pour améliorer les qualités techniques et énergétiques de ses bâtiments et installations, recourt déjà largement aux technologies nouvelles lorsqu'elles s'avèrent économiquement rentables et respectueuses de l'environnement. Les expériences positives réalisées jusqu'ici le confortent dans sa volonté de poursuivre résolument dans cette voie.
4.5. Application des articles 14A et 65A LCP concernant les allégements fiscaux
La teneur des articles 14A (applicable aux sociétés de personnes et aux entreprises en raison individuelle) et 65A (applicable aux sociétés dotées de la personnalité morale, soit essentiellement les sociétés anonymes et les coopératives) introduits dans la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP), est, depuis le 1er janvier 1991, la suivante:
1) Le Conseil d'Etat peut, après consultation des communes concernées, accorder des allégements fiscaux à des entreprises nouvellement créées ou en cours de restructuration, afin de faciliter leur installation et leur développement s'ils sont dans l'intérêt de l'économie du canton; ces allégements ne peuvent aller au-delà d'une période de 10 ans.
2) Le Conseil d'Etat informe les communes concernées des allégements fiscaux accordés et présente un rapport annuel au Grand Conseil, dans le cadre du compte rendu, sur sa politique en matière d'allégements fiscaux.
Il sied de relever tout d'abord que les allégements fiscaux qui peuvent être accordés en vertu des deux dispositions mentionnées ci-dessus, dont les modalités d'application seront décrites ci-après, sont destinés à permettre au Conseil d'Etat de mener une politique active d'encouragement au développement économique du canton par le biais de mesures incitatives de caractère fiscal. Les allégements accordés en vertu de ces dispositions doivent dès lors être distingués des exonérations fiscales - totales ou partielles - qui peuvent être accordées à des institutions poursuivant des buts d'utilité publique, en vertu de l'article 75, alinéa 2 LCP. De même, l'on distinguera les allégements fiscaux faisant l'objet des articles 14A et 65A LCP de l'exonération accordée à certaines organisations internationales en vertu d'accords dits «de siège» conclus entre ces dernières et la Confédération suisse.
Peuvent bénéficier des exonérations accordées en vertu des articles 14A et 65A par le Conseil d'Etat (voir directives d'application en annexe 2) les entreprises nouvellement créées dans le canton ou qui subissent une restructuration d'envergure nécessitant des investissements importants permettant d'assimiler l'opération à une «nouvelle création».
L'exonération peut être accordée également à des entreprises existantes qui s'installent dans le canton, en provenance soit de l'étranger, soit d'un autre canton. Dans ce dernier cas, le Conseil d'Etat respecte toutefois le Concordat entre les cantons et la Confédération suisse sur l'interdiction des arrangements fiscaux, du 10 décembre 1948, et prend en compte les éventuels allégements du même ordre dont l'entreprise nouvelle arrivante à Genève aurait bénéficié dans le canton de départ. En d'autres termes, l'allégement accordé dans un tel cas ne dépasserait pas la durée de dix ans, déduction faite des années d'allégements «consommées» dans un autre canton et non reprises par ce dernier canton lors du départ de l'entreprise concernée. A l'inverse, les allégements accordés par le Conseil d'Etat contiennent une clause stipulant que tout départ du canton intervenant pendant la durée de validité des allégements ou dans les cinq ans qui suivent leur expiration donnerait lieu à une reprise fiscale de l'intégralité des impôts qui auraient été dus en l'absence de tout allégement.
Le fait pour une entreprise d'être au bénéfice d'allégements fiscaux ne la dispense bien évidemment pas de l'obligation de remplir annuellement une déclaration fiscale et de produire tous les documents pertinents en vue de permettre aux autorités de saisir sa situation financière. Il est simplement renoncé, totalement ou partiellement, à percevoir l'impôt. Cette obligation est également destinée à permettre à l'Administration fiscale de s'assurer que les conditions qui ont justifié l'octroi des allégements subsistent.
Comme on l'a vu plus haut, la durée maximale des allégements consentis est de 10 ans à compter de la création de l'entreprise ou de sa restructuration, ce délai ressortant de l'article 1, alinéa 3, lettre b, du Concordat. En pratique, le Conseil d'Etat accorde généralement des allégements pour des périodes quinquennales ou décennales.
Les allégements portent sur les impôs sur le bénéfice et sur le capital. Ils sont, en règle générale, dégressifs, l'exonératioon étant alors totale la première année, puis réduite graduellement jusqu'à s'éteindre complètement. Il peut arriver également que l'exonération soit fixe pour toute la durée des allégements, voire que l'on rencontre des solutions intermédiaires.
Concernant l'impôt sur le bénéfice, la pratique admet que l'exonération dégressive ne commence à courir que lorsque l'entreprise dégage un résultat fiscal bénéficiaire et qu'elle est interrompue pour les années où elle est déficitaire, sans pour autant que la durée totale de l'exonération ne puisse être dépassée. En d'autres termes, une entreprise qui se verrait mettre, en 1994, pour 5 ans, au bénéfice d'une exonération dégressive à raison de 20% par année ne pourrait plus s'en prévaloir à partir de l'année 1999, quand bien même elle ne serait pas devenue bénéficiaire pendant cette période.
En ce qui concerne les reports de pertes, les entreprises mises au bénéfice des allégements peuvent naturellement se prévaloir de leurs pertes fiscalement déterminantes pendant la durée légale de leur report. Il va de soi, à cet égard, que le délai de report n'est pas suspendu pendant la durée de validité des allégements. De même, ces entreprises ne sauraient déduire de leurs résultats la part des impôts non dus en raison des mesures d'allégement.
Il faut encore préciser que la partie du bénéfice correspondant à l'économie d'impôt réalisée grâce aux allégemeents fiscaux doit être attribuée à un fonds de réserve. Ainsi, l'entreprise ne peut pas en disposer en faveur de ses actionnaires ou de personnes les touchant de près tant que les allégements déploient leurs effets.
Pour en venir enfin aux critères régissant l'octroi d'allégements fiscaux en vertu des articles 14A et 65A LCP, le Conseil d'Etat accorde une grande importance à la création et au maintien d'emplois à Genève, ainsi qu'à l'arrivée et au développement d'entreprises propres à dynamiser le tissu économique et social du canton. Il s'ensuit que l'octroi d'allégements est subordonné à la présentation d'un dossier et de contacts avec les responsables concernés desquels doivent ressortir des indications précises quant à la réalisation du projet pour lequel l'allégement fiscal est souhaité.
Dans l'optique du Conseil d'Etat, les articles 14A et 65A LCP peuvent également s'appliquer lorsque des entreprises existantes font l'objet d'assainissements importants consentis par leurs créanciers, dans la mesure où ces opérations permettent de maintenir ou créer des emplois dans le canton.
En 1993, 13 entreprises ont été mises au bénéfice des articles en question, ce qui donne un total de 45 entreprises qui bénéficiaient des mesures d'allégement au 1er janvier 1994. Il convient de relever que l'une de ces entreprises a été absorbée par une société bénéficiant elle aussi d'allégements et que trois entreprises ont cessé toute activité en 1993 ou n'en ont jamais déployé effectivement. Ces entités sont dès lors retirées dela statistique, qui comprend 41 entreprises totalisant un peu moins de 2900 emplois. Celles-ci exercent leurs activités notamment dans les secteurs suivants: négoce, «trading», électromécanique, électronique, industrie de précision et équipements médicaux, filature, recherche et développement, informatique et développement de logiciels, télécommunications.
La répartition des effectifs des entreprises concernées est la suivante:
- jusqu'à 10 personnes 15
- entre 11 et 50 personnes 13
- entre 51 et 100 personnes 6
- plus de 101 personnes 7
Il est par ailleurs important de relever que les entreprises existantes représentent près de 70% des entreprises et 85% des emplois concernés par les allégements fiscaux détaillés ci-dessus. Les mesures d'accompagnement fiscal ne sont donc pas exclusivement - tant s'en faut - réservées aux entreprises nouvelles, comme on l'entend parfois. On trouve ici une nouvelle preuve de l'application des principes exposés au paragraphe 2.1.1. «aide aux entreprises existantes».
Précisons enfin que les allégements consentis ne s'appliquent pas aux impôts en tous genres dus en raison de la propriété d'immeubles de placement, autrement dit non nécessaires à l'exploitation de l'entreprise en question. De même, les allégemeents ne sont que pour les impôts cantonaux et communaux, à l'exclusion de l'impôt fédéral direct.
Sur la base des éléments qui précèdent, le Conseil d'Etat estime que les articles 14A et 65A LCP représentent un outil souple et dynamique lui permettant de favoriser un bon développement économique du canton. La pratique développée au fil des ans par les administrations concernées (département des finances, département de l'économie publique, communes) permet en outre d'assurer le respect du principe de l'égalité de traitement, compte tenu des spécificités des cas d'espèce.
Ce type de données, qui seront reprises régulièrement dans le cadre des rapports de gestion du Conseil d'Etat, devrait permettre au Grand Conseil de se faire une idée aussi précise que possible du bon usage fait des possibilités offertes par les articles 14A et 65A LCP, et donc répondre aux attentes des auteurs de la motion 911. Chacun comprendra qu'en raison du secret fiscal et il ne soit pas possible de fournir plus de renseignements, notamment nominatifs.
5. Soutien confédéral
Le Conseil d'Etat, en étroite collaboration avec les parlementaires fédéraux, ne manque pas d'intervenir en faveur de l'introduction, par la Confédération, de mesures propres à favoriser une relance économique durable.
C'est ainsi que, à titre d'exemple, nous avons demandé que les dispositions qui remplaceront l'arrêté Bonny ne se limitent pas à soutenir les régions dont «l'économie est particulièrement menacée» mais s'étendent aussi au soutien financier d'organismes qui, dans quelque région que ce soit, agissent en faveur du développement des innovations et des nouvelles technologies (cf. annexe 3).
Notre canton a aussi largement bénéficié des mesures prévues par «l'arrêté fédéral concernant l'octroi de contributions visant à encourager les investissements publics», du 19 mars 1993. Une collaboration étroite et constructive avec l'Office fédéral pour les questions conjoncturelles a permis d'obtenir le soutien de 44 projets (24 au niveau de l'Etat, 5 des collectivités publiques et 15 des communes) bénéficiant de subventions à hauteur de 14,4 millions de francs. A eux seuls, ces projets généreront environ 100 millions de francs de travaux.
Au vu des difficultés financières auxquelles la Confédération est confrontée, il apparaît plus judicieux au Conseil d'Etat de continuer à tout mettre en oeuvre pour obtenir un soutien financier dans le domaine de la promotion des innovations, que d'exiger, sans grande - pour ne pas dire aucune - chance de succès, «une augmentation de la dotation du Fonds de garantie des risques à l'exportation, à condition que les montants supplémentaires en question soient utilisés pour garantir des projets d'entreprises situées dans les régions défavorisées par la clef de répartition adoptée pour distribuer le bénéfice de la Banque Nationale revenant aux cantons».
6. Conseil économique et social
Au point 9 du discours de Saint-Pierre, le Conseil d'Etat affirmait:
«Afin de favoriser le dialogue, le gouvernement a décidé de mettre sur pied un Conseil économique et social. Précieux appoint pour le Conseil d'Etat et le canton, il sera également une instance de créativié et de prospective. Sa démarche doit répondre à la volonté du gouvernement de renforcer la coopération et de rassembler toutes les énergies.»
Afin de concrétiser la volonté clairement exprimée le 6 décembre 1993, le Conseil d'Etat a adopté, en date du 22 juin 1994, un «règlement sur le Conseil économique et social» dont le texte intégral a été communiqué en annexe aux projets de loi 7111 à 7114 actuellement à l'examen de votre Grand Conseil.
Lors des travaux préliminaires qui ont conduit à la mise sur pied d'un CES, il est clairement apparu que si cet organisme doit certes permettre de mener à bien des travaux à caractère prospectif, notamment sur tous les sujets abordés précédemment dans ce rapport, il doit cependant à tout prix resté ancré dans les réalités, faute de quoi il ne deviendrait très vite plus qu'une structure supplémentaire peu efficace. D'une manière générale, le CES, organe consultatif, doit donc représenter un interface entre le monde politique et les milieux économiques et sociaux. Indépendant du pouvoir politique ainsi que des administrations, et donc en main de la société civile, le CES doit représenter un cadre de réflexion permettant d'approcher les grands problèmes de notre temps et les défis à venir, en se substituant, le cas échéant, à certains organismes existants dont il peut reprendre les missions.
Réflexion faite, il s'avère donc que l'instauration d'un CES est indépendante de l'éventuelle création d'une «cellule de réflexion» que le gouvernement pourrait mettre sur pied afin de poursuivre avec un nombre très restreint de personnalités de haut niveau, une réflexion à titre purement prospectif sur l'avenir de Genève en général.
On voudra bien, pour le surplus, se référer à l'exposé des motifs à l'appui des projets de loi 7111 à 7114 ainsi qu'aux travaux actuellement en cours devant la commission permanente de l'économie, travaux qui donneront lieu prochainement à un rapport devant votre Grand Conseil.
Débat
M. Bernard Clerc (AdG). Ce rapport concernant les trois motions exprime un certain nombre de choses, mais pas tout. On parle de développement durable, de développement qualitatif, mais à aucun moment nous n'avons une définition précise de ces notions. Qu'est-ce qu'un développement durable, qu'est-ce qu'un développement qualitatif dans une économie de marché comme celle que nous connaissons ?
On parle également de qualité de vie. Je pense que le rapport comporte une contradiction, puisque, alors qu'on insiste sur la nécessaire qualité de vie pour attirer un certain nombre d'implantations d'entreprises dans notre canton, on parle en même temps de développement de la circulation automobile et des parkings. Que je sache, ce n'est pas forcément de cette manière que l'on améliore la qualité de vie.
On nous parle de quatre cent vingt emplois créés, mais nous n'avons aucune indication sur le nombre des emplois disparus ces dernières années. Je rappelle que, grâce au recensement des entreprises de 1991, nous avons un certain nombre de données qui précisent qu'il y a environ vingt-cinq mille emplois qui ont disparu dans notre canton, depuis le dernier recensement, mais nous n'avons aucune donnée sur les disparitions d'emplois depuis 1991.
En ce qui concerne les allégements fiscaux, nous sommes heureux des chiffres fournis par le département qui annonce que quarante et une entreprises bénéficient d'allégements fiscaux représentant deux mille neuf cents emplois. Ces quarante et une entreprises représentent - il faut le savoir - 0,18% des entreprises imposées et 1,1% des emplois du canton de Genève. C'est-à-dire que les mesures d'allégements fiscaux sont extrêmement réduites, en tout cas en termes du nombre d'entreprises et en termes du nombre d'emplois touchés et, visiblement - nous aurons l'occasion d'y revenir dans d'autres débats concernant la fiscalité - l'aspect fiscal est loin d'être l'aspect essentiel pour l'implantation d'une entreprise à Genève, puisque le rapport lui-même nous dit que la plupart des allégements fiscaux, environ 80%, sont accordés à des entreprises résidant déjà sur le territoire du canton.
Je pose donc deux questions que j'adresse au Conseil d'Etat :
1) Quels sont les chiffres exacts des emplois disparus depuis 1991 ?
2) Quel est le montant global des allégements fiscaux consentis, puisque, comme cela a été dit dans notre motion, ces allégements fiscaux constituent, en quelque sorte, une rentrée fiscale en moins et peuvent être considérés comme des dépenses ?
M. Jean-Claude Genecand (PDC). Ce rapport du Conseil d'Etat sur le développement économique est instructif. Il ouvre des horizons pour les entreprises en difficulté ou celles qui recherchent une extension, ou encore celles qui veulent s'installer. Il gagnerait cependant en crédibilité s'il était davantage chiffré. Par exemple, combien d'entreprises ont profité de la mise en place de plans particuliers pour faciliter la restructuration afin de limiter les effets négatifs des licenciements ? S'agit-il de cas isolés ou d'un pourcentage important ?
Autre information générale qu'il serait intéressant de préciser, je veux parler des chômeurs qui souhaitent créer leurs propres activités indépendantes. S'agit-il d'un soutien sporadique ou d'un grand nombre de créations d'activités indépendantes ? Quel rôle joue l'Etat dans la mise en relation entre partenaires financiers, commerciaux ou industriels ? C'est une phrase laconique qui mériterait d'être explicitée.
Nous sommes heureux d'apprendre que les entreprises, selon l'analyse neuchâteloise, attachent davantage d'importance à la relation et à la flexibilité du gouvernement qu'à des incitations financières bien que celles-ci ne soient pas à dédaigner. Dans la foulée, ce rapport nous apprend que quarante-cinq nouvelles entreprises se sont créées en 1993 engendrant quatre cent vingt nouveaux emplois, ainsi que probablement quatre cents autres emplois d'ici 1995. Il eût été intéressant également de connaître celles qui ont fermé leurs portes, cela non pour rabaisser l'excellent travail fourni par cette campagne de promotion, mais pour mieux appréhender la réalité économique de Genève. Ces quelques exemples pour dire que ce rapport apparaît davantage comme un inventaire de projets souhaités et souhaitables qu'une photographie de la réalité économique genevoise. Si les statistiques existent, pourquoi sont-elles absentes de ce rapport ? Si elles n'existent pas, comment peut-on juger valablement des progrès réalisés ?
Quant à la motion 932 sur la FONGIT, la réponse est un peu décevante. On avance à nouveau l'argument des difficultés neuchâteloises pour constater que la participation de l'Etat n'est pas nécessaire. Dire que l'invention ne représente que 20% du développement du produit fini n'est pas nouveau. En effet, pour qu'une invention trouve son aboutissement, il faut élaborer un outillage pour la réalisation du produit, il faut un marché, donc un bon «management» et naturellement un financement. Il est vrai que le taux de réussite final est faible, entre 10 et 20% du total des inventions. Mais c'est précisément ce que l'on peut attendre de l'Etat avec la mise en place d'une équipe dynamique qui a pour rôle de tester l'invention, de créer une structure qui va permettre à l'inventeur de collaborer avec d'autres acteurs indispensables à la réalisation de son invention. Je trouve que c'est un constat d'échec de la part de l'Etat de déclarer que sa participation à la FONGIT ne peut être poursuivie en ces termes. Il y a mieux à faire, c'est d'ailleurs une dominante dans ce rapport. On définit des grands axes, mais on reste en retrait du possible ou, pourquoi pas, de risquer l'impossible. C'est ce souffle qui manque, ce qui est vraiment regrettable pour le développement industriel de Genève.
Mme Christine Sayegh (S). J'interviendrai uniquement sur la motion 911-A. Je remercie le Conseil d'Etat de nous avoir donné une réponse explicite quant à la manière d'appliquer la loi en matière allégements fiscaux. Toutefois, je pense que ce n'est pas trahir le secret fiscal de nous donner le montant global que représente cet allégement fiscal. En effet, si c'est un outil de développement économique performant, il y a lieu de savoir s'il est coûteux. Je demanderai donc un complément à ce rapport.
M. Pierre Kunz (R). Dans le rapport du Conseil d'Etat, long et détaillé, notre groupe voudrait mettre en évidence l'avant-dernier paragraphe, celui consacré à l'éventuelle création d'une cellule de réflexion. Plus que tous les autres aspects de ce rapport, il nous paraît en effet important, parce que c'est le seul qui est consacré au futur.
Notre gouvernement envisage donc de mettre sur pied un groupe, je cite : «...de personnalités de haut niveau et qui se livreraient à une réflexion à titre purement prospectif sur l'avenir de Genève en général.».
Pour les radicaux, cette démarche est non seulement souhaitable - hautement souhaitable - mais elle est nécessaire. Et les radicaux s'étonnent timidement qu'il faille tellement réfléchir à l'opportunité de réfléchir ! En effet, dans la compétition féroce que Genève et son économie doivent affronter, et qu'ils devront encore affronter, dans un monde de plus en plus ouvert, nous ne pourrons construire notre avenir qu'à l'aide d'une stratégie à long terme clairement définie. Nous ne pourrons faire valoir les atouts de notre canton - atouts qui sont forts et nombreux - que si nous les jouons intelligemment et en toute connaissance de cause. Notre avenir, disons-le clairement, ne saurait s'accommoder des improvisations et des zigzags de ces dernières décennies, lorsque tout était facile, très facile, trop facile.
Dans un tel contexte, la cellule de réflexion prospective, dont la création est envisagée, doit jouer un rôle essentiel. Seul un instrument de cette qualité permettra en effet aux autorités de ce canton de déterminer une stratégie cohérente et de prendre les décisions politiques nécessaires, impliquées par cette stratégie en matière d'aménagement du territoire, en matière d'urbanisme, en matière de fiscalité, en matière d'enseignement, etc. Les radicaux attendent donc avec intérêt la mise sur pied de cette cellule de réflexion et ils souhaitent que le Conseil d'Etat ait ensuite la cohérence, la cohésion et le courage suffisants pour mettre en oeuvre les conclusions découlant des études de cette cellule. C'est dans cette attente, et eu égard au contenu général tout à fait satisfaisant du rapport, que notre groupe vous recommande de l'accepter.
M. Armand Lombard (L). Nous avons pris connaissance avec satisfaction de cette réponse aux trois motions soumises au Conseil d'Etat, car nous avons trouvé un rapport qui donne des pistes et des chiffres, peu nombreux, il est vrai, mais suffisamment pour se faire une idée exacte de la situation économique de Genève. Nous sommes loin de la langue de bois habituelle, ce qui est une bonne surprise, de même qu'il est satisfaisant de voir certains thèmes repris, qui avaient donné tant de fil à retordre à la commission de l'économie lorsqu'elle a essayé de proposer la motion 803. Les membres de cette commission se rappelleront les débats difficiles qu'elle a engendrés. Les directions à prendre sont claires.
Je relève quatre points :
D'abord, le rapport fixe les axes moteurs du développement genevois et il est extrêmement important de connaître les analyses qui montrent les points forts de Genève, ses créneaux. Je vous les rappelle brièvement :
1) la place financière : la compétence dans ce secteur est très importante;
2) la place internationale, à laquelle on peut adjoindre le tourisme et le commerce, les organisations internationales et les organisations non gouvernementales. Cela est important;
3) la formation;
4) les technologies de pointe.
Il me semble que si, dans ces quatre domaines, nous arrivons à développer des énergies, cela sera tout à fait favorable au développement de notre République. Il a été question des allégements fiscaux, je n'y reviendrai donc pas. Je suis satisfait de voir des procédures clairement établies et de savoir le cheminement utilisé par le Conseil d'Etat. C'est un bon point de départ pour comprendre les améliorations de certaines entreprises. Je note les allégements fiscaux pour les entreprises existantes Personnellement, je me réjouirai de voir le pourcentage d'entreprises nouvelles augmenter et que ces dernières puissent aussi bénéficier de ces allégements fiscaux.
L'analyse du développement de FONGIT-AGIT amène le Conseil d'Etat à la conclusion qu'il faut davantage échafauder les structures dont les innovateurs ont besoin que développer directement leurs innovations. Le conseil d'Etat mentionne, au travers de l'Association Adlatus, avec ses conseillers en entreprise, les projets d'une pépinière d'entreprises qui formeraient de nouvelles entreprises dans le domaine de la gestion et du «management». C'est également un point positif pour le développement de l'économie de Genève.
Permettez-moi, avec un peu d'ironie, d'être sceptique sur le réflexe de chacun par rapport au souci de la région. A mon avis, si seulement 10% de la population se sentaient concernés, ce serait déjà très bien. L'espoir est là, mais à l'évidence nous n'avons pas un réflexe important à ce niveau. Nous devons donc apporter de l'eau au moulin, pas seulement au niveau du Conseil d'Etat, mais au niveau du Grand Conseil et de toutes les institutions. Il faut comprendre que le travail ne peut plus se faire dans un seul canton. C'est la masse critique d'une population de un million et demi à deux millions d'habitants qui détermine une compétence économique et c'est vers cela que nous devons tendre. Je remercie le Conseil d'Etat pour son excellent rapport.
M. Chaïm Nissim (Ve). Comme mon collègue Bernard Clerc, j'ai été assez frappé par l'emploi, aux pages 8 et 9 de ce rapport, des termes «développement qualitatif», «développement durable», «qualité de la vie». J'ai eu l'impression - je regrette de devoir vous le dire, Monsieur Maitre - que la personne qui a écrit ce rapport voulait agiter ces mots comme un grigri pour attirer des entreprises à Genève, mais qu'elle n'a pas compris le sens profond de ces mots, un peu comme si le fait d'employer les mots suffisait à ce que le développement devienne magiquement réalité. A mon avis, on ne peut pas employer ces mots sans une réflexion profonde pour savoir dans quelle direction on veut orienter le développement, sans savoir quels services de quelles entreprises on veut décourager ou encourager. Votre rapport manque de substance. Je vois que vous vous orientez vers un développement durable, mais comment allez-vous le faire ? Quelles sont les entreprises dont vous estimez qu'elles ne conviennent pas à ce concept de «développement durable» et que vous voulez décourager ? (Eclat de rires.) Pourquoi vous riez ? C'est drôle et ce n'est pas drôle à la fois !
Mme Micheline Calmy-Rey. T'as raison !
M. Chaïm Nissim. Micheline me dit que j'ai raison, cela me fait plaisir ! Pour arriver aux résultats que vous annoncez, vous devez faire des choix sur l'économie genevoise que je n'ai pas relevés dans ce rapport. Vous ne faites qu'employer les mots.
Comme mon collègue, M. Genecand, je trouve que ce rapport n'est pas suffisamment chiffré, notamment en ce qui concerne le crédit de 500 000 F de FONGIT-AGIT. Qu'avez-vous fait de cet argent ? Comment l'avez-vous employé ? J'aimerais bien voir figurer cette réponse dans un rapport complémentaire.
M. Christian Ferrazino (AdG). J'aimerais revenir sur un point qui a été soulevé par plusieurs intervenants : l'absence ou l'existence de statistiques en matière d'emplois et l'évolution réelle des emplois dans ce canton. En effet, si on lit superficiellement le rapport du Conseil d'Etat, comme semble l'avoir fait notre collègue, M. Lombard, on constate que c'est une sorte de brevet d'autosatisfaction que le Conseil d'Etat semble vouloir se décerner.
Si l'on gratte un peu les chiffres, on s'aperçoit que le tableau est quelque peu moins rose. Notamment en matière d'emplois, on peut prendre connaissance qu'il y aurait eu - cela figure en page 10 - des résultats probants. Vous aurez constaté les expressions utilisées : «la stratégie est géniale», «les résultats quant à eux sont extraordinaires». Les chiffres indiquent qu'il y a eu quatre cent vingt emplois nouveaux pour 1993.
Il ne faut pas être un grand mathématicien pour se rendre compte que ce chiffre est très faible. Mais, au-delà de la faiblesse de ce chiffre et du rapport qui date du 28 novembre 1994, je me souviens qu'une semaine plus tard, Monsieur Maitre, lors d'une conférence de presse que vous avez donnée à l'issue des votations du 4 décembre - c'était donc le lundi 5 décembre - vous annonciez avec le même sourire que vous avez aujourd'hui - manifestement c'est une constance chez vous - que les emplois créés se montaient au nombre de mille. Alors, il faudra que vous nous expliquiez comment il se fait que votre rapport déclare le 28 novembre que les emplois créés se montent à quatre cent vingt et qu'une semaine plus tard, après l'échec des votations que vous avez connu, ce nombre ait plus que doublé.
Ce rapport comporte beaucoup de chiffres contradictoires, qui n'éclairent en réalité pas la situation. En effet, pour avoir une vision globale de cette situation au niveau de l'évolution des emplois, il manque le nombre des emplois perdus. Monsieur Maitre, ce rapport est totalement muet sur ce nombre. Votre rôle est d'autant plus aisé en restant muet que personne ne peut venir combler cette lacune et cela pour une raison bien simple. Monsieur Genecand, vous dites que si les statistiques existent il faut qu'on nous les donne. Mais la réponse est évidente, si on ne nous les donne pas, c'est qu'elles n'existent pas.
C'est bien le fond du problème. On n'est pas capable, aujourd'hui, de connaître l'évolution réelle du nombre des emplois, car, comme l'ont dit Bernard Clerc et Chaïm Nissim tout à l'heure, des milliers d'emplois ont été perdus ces dernières années.
Ce rapport se contente simplement de mettre en avant de façon contradictoire une fois encore le nombre d'emplois nouveaux, mais ce qui importe - et vous ne me contredirez pas sur ce point, Monsieur Maitre - pour saisir l'évolution réelle des emplois à Genève, c'est de comparer les emplois nouvellement créés avec les emplois perdus. Je prends le pari sans trop de risques, Monsieur Maitre, que si les statistiques existaient le tableau serait moins rose que celui dépeint par ce rapport. Nous allons du reste déposer une motion pour demander à l'office cantonal de la statistique de nous donner régulièrement une statistique sur l'évolution des emplois à Genève, parce que je crois que tout le monde conviendra de la nécessité d'avoir cet élément analytique qui fait défaut aujourd'hui.
Mme Micheline Calmy-Rey (S). J'ai envie de dire à M. le chef du département de l'économie publique que c'est toujours pareil ! Chaque fois que le Grand Conseil vous renvoie une motion, Monsieur le président, vous êtes sur la défensive. Vous avez le sentiment d'une basse attaque et le rapport que vous produisez à la suite de la motion qui vous est renvoyée n'est qu'un long justificatif. Vous avez déjà tout réfléchi, tout fait et les propositions que nous vous soumettons sont sans objet ni intérêt.
La commission de l'économie ne vous a pas renvoyé la motion 803 pour savoir quelle est la politique économique que vous pratiquez. Elle a souhaité que le Conseil d'Etat intensifie son action. Elle a souhaité qu'il stimule encore plus qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant l'activité économique. Elle a souhaité que le Conseil d'Etat fasse plus qu'il n'a fait. L'inventaire que vous nous soumettez ne répond donc en aucun cas à la demande de la commission de l'économie. Depuis quatre ans, Genève a effectivement perdu des emplois. Genève a perdu vingt-huit mille cinq cents emplois sur un total de cent nonante-trois mille, soit trois emplois à temps complet sur vingt. Face à cette situation qui est grave, la passivité ne suffit pas. L'Etat doit mener une politique audacieuse, un brin utopique et volontariste, qui encourage les entreprises à rester à Genève, à s'y implanter et à s'y développer. Pour cela, l'Etat dispose d'un certain nombre d'instruments, mais ces moyens sont mal utilisés, voire en contre-emploi.
J'ai cherché en vain dans votre rapport les critères qui président à la prospection d'entreprises nouvelles. Même chose pour les allégements fiscaux : on n'y trouve pas de cohérence ! Et tout le rapport ne nous convainc pas d'une véritable politique économique. On a un peu l'impression que la politique économique se résume à l'accueil des entreprises. Vous parlez, certes, de productivité et d'innovation, mais c'est pour nous dire que la FONGIT et l'AGIT existent - ce que l'on savait déjà - que le Conseil d'Etat et le Grand Conseil les ont subventionnées et qu'il n'est pas nécessaire d'augmenter leur dotation et de développer leurs activités.
Quant au chapitre de la formation, il donne juste le sentiment que ni la conception ni la mise en pratique d'un changement, c'est-à-dire d'une vraie offensive en matière de formation des adultes, ne sont en marche.
Mesdames et Messieurs les députés, nous vivons une période de mutation. Pour la première fois, à cause de la concurrence - certains appellent cela la guerre économique - à cause du développement de la productivité, on produit plus ou tout autant avec de moins en moins de personnel. Les Genevois auront encore bien des difficultés à vaincre, même avec une reprise économique, puisque des études sérieuses menées par l'université de Genève nous prédisent un chômage structurel de l'ordre de 3,5 à 4% même en cas de relance. Or nous avons le sentiment, en lisant votre rapport, que le Conseil d'Etat se base sur des conceptions vieillottes à l'égard de cette évolution, à savoir qu'il est persuadé que la relance réglera complètement le problème de l'emploi et le problème de la politique économique.
Le gouvernement nie l'évolution des choses et il ne réfléchit par conséquent pas à des mesures destinées à l'accompagner. Nous ne pouvons que le regretter, mais nous ne pouvons pas obliger un Conseil d'Etat qui ne le veut pas à penser ! (Rires.)
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. En répondant à ces différentes motions, le Conseil d'Etat s'est limité aux invites de celles-ci et par conséquent il a cherché à faire le point sur les axes essentiels de réflexion ou constat que ces motions suggéraient. Nous avons ainsi eu l'occasion de rappeler, ou peut-être, comme l'a dit plus justement M. Lombard, de mieux définir les axes prioritaires au développement économique.
Par axe prioritaire au développement économique, on parle tout d'abord de développement économique. Je vous rappelle qu'il n'y a pas si longtemps c'était un terme qui faisait horreur à d'aucuns qui aujourd'hui sont évidemment, la fleur au fusil, les premiers à donner des leçons au gouvernement. Ces axes prioritaires de développement économique reposent sur un certain nombre de qualités, d'atouts intrinsèques à Genève, soit déjà pleinement exprimés, soit qui peuvent et doivent encore être améliorés.
Je n'ai pas l'intention d'en faire l'énumération complète maintenant. Cela figure, pour l'essentiel, dans le rapport. Qu'il me soit simplement permis de dire que, comme place internationale, Genève a évidemment un rôle absolument particulier à jouer. Cela implique des efforts redoublés en matière de tourisme et d'accueil, en matière de soutien aux organisations internationales en tant que telles - je crois que notre gouvernement n'a pas failli à sa tâche - en matière de soutien au commerce international - Genève est à cet égard un centre d'excellence.
Un des atouts majeurs de notre canton, de la place économique de Genève, c'est le commerce de détail. Nous avons une structure économique qui, dans ce domaine, est extrêmement vive, mais doit faire face - vous le savez bien - à une concurrence qui place Genève dans une situation pratiquement sans comparaison avec ce que l'on trouve dans d'autres lieux de Suisse. Sur ce point, également, je me réjouis d'entendre les bons conseils de ceux qui s'opposaient à un tout petit peu plus de dynamisme dans le commerce de détail, il n'y a de cela pas si longtemps.
En ce qui concerne la place financière, c'est évidemment un pôle d'excellence à Genève, en particulier en ce qui concerne la gestion de fortune. Nous devons faire en sorte que, dans le domaine de la formation notamment, nous puissions véritablement assurer une relève de haute qualité dans des métiers qui ont tendance à devenir de plus en plus pointus et tout à la fois de plus en plus diversifiés.
Il a été fait allusion aux technologies de pointe. C'est un point central du développement industriel de notre canton qui n'a, de toute évidence, pas les surfaces nécessaires pour accueillir des industries qui sont des industries que l'on pourrait qualifier de «lourdes» - reste à le démontrer d'ailleurs, car ce terme ne convient peut-être plus à l'évolution de ces industries. Le développement des technologies de pointe est évidemment très important. Nous avons, au travers de ce rapport, après avoir rappelé certains axes prioritaires du développement économique du canton, dans le cadre de nos moyens - et sur le plan cantonal nous n'avons pas tous les outils en main, tant s'en faut - rappelé quelques outils au service de ce développement économique.
Je me permets donc de faire une brève incursion sur le chapitre de la promotion économique, parce qu'on lui prête des ambitions qu'elle n'a pas. Lorsqu'on parle de la création du nombre d'emplois par la promotion économique, il s'agit d'abord, Monsieur Ferrazino, de constater que le chiffre du rapport parle des emplois créés et des entreprises en 1993 et le chiffre que nous avons eu l'occasion de donner le 5 décembre parle des emplois et des entreprises créés en comptant l'année 1994.
En faisant le cumul sur un peu plus de dix-huit mois de promotion économique structurée, telle que nous l'avons mise en place, c'est un peu plus de nonante entreprises nouvelles qui ont été créées et de mille emplois nouveaux immédiats dégageant des emplois supplémentaires dans un avenir proche. Il ne faut pas oublier les emplois et les entreprises qui ne résultent pas de l'activité de la promotion économique. Par définition, et heureusement, il y a eu d'autres entreprises et d'autres emplois qui ont été créés à Genève sans que la promotion économique y soit pour quelque chose. Ils se sont créés sur la base de l'activité d'entreprises qui n'ont pas eu à nous demander ni notre aide ni notre appui, et moins encore nos conseils. Les emplois créés par la promotion économique, avec l'appui de la promotion économique, représentent une petite partie du total des emplois créés et des entreprises nouvelles qui se sont implantées dans notre canton. Il faut avoir cela bien présent à l'esprit.
Oui, nous avons perdu de très nombreux emplois; oui, nous avons perdu plus de vingt mille emplois, entre vingt et vingt-cinq mille selon les estimations - nous n'avons pas de statistiques qui permettent de le dire de manière très précise - sur un total de deux cent quarante mille emplois, Madame Calmy-Rey, que nous avions au début de l'année 1990. Genève n'a pas encore été en mesure d'en recréer autant qu'elle en a perdu. C'est une conclusion sur laquelle je reviendrai dans un instant. En effet, elle est centrale, puisqu'elle indique la mesure des efforts que nous avons encore à déployer.
Qu'il me soit simplement permis de dire - cela n'est pas un brevet d'autosatisfaction pour le gouvernement, Madame Calmy-Rey, car nous avons l'ambition de faire beaucoup mieux - que Genève a des atouts absolument valables qu'il est de notre devoir de développer et de valoriser. Les résultats de la promotion économique de Genève situent Genève dans le peloton de tête de tous les cantons suisses, cela avec des comparaisons qui nous mettent à l'aise face à des cantons qui ont beaucoup plus d'expérience que nous dans ce domaine.
Si je dis cela c'est pour souligner le fait que nous avons des cartes très valables à jouer à Genève et que nous avons un potentiel de développement tout à fait remarquable. Encore faut-il pouvoir et vouloir pleinement le jouer et le mettre à profit. Cela signifie qu'il ne faut pas mettre des bâtons dans les roues à chaque initiative prise et qu'il ne faut pas contester tous les projets : cela est trop facile de vouloir le développement de Genève, de vouloir la création d'emplois dans l'abstrait et de dire non au premier projet concret proposé créant ainsi des entraves à toute initiative qui permet un développement économique et des entreprises.
Les mesures d'accompagnement fiscales sont probablement les secrets d'Etat les mieux gardés dans ce pays. C'est tout à fait étonnant de constater que ces mesures, qui font l'objet de directives mises en place par le département des finances, avec l'appui du département de l'économie publique, ont été communiquées, transmises et commentées. Depuis que nous avons adopté ces nouvelles directives, environ deux ans et demi à trois ans se sont passés, et pourtant vous avez toujours l'air de les découvrir, ce qui est aussi parfois le cas de mandataires qui en principe devraient les connaître pour les appliquer régulièrement.
On assiste à ce propos à des discours très contradictoires. On nous dit tout d'abord que le développement de ces mesures est assez réduit, car elles ont relativement peu d'impact. Mais que ne nous dirait-on pas si ces mesures d'accompagnement fiscales faisaient l'objet de décisions qui sont légion ! On nous dirait que nous sommes en train de brader la substance fiscale de l'Etat. On nous dirait que nous faisons de l'accompagnement fiscal tous azimuts, en forme d'arrosoir. Or, vous le savez, ces mesures d'accompagnement fiscales sont prioritairement destinées aux entreprises industrielles. Nous ne les réservons en principe pas aux entreprises de services, sauf lorsqu'il y a synergie avec des projets de développement industriel. En cela, il me semble que nous devrions être à l'unisson avec ce que par ailleurs nous entendons très fréquemment sur vos bancs, à savoir qu'il faut développer en priorité une politique d'accompagnement à la création industrielle. Il me semble donc que je décèle çà et là dans vos propos quelques contradictions.
Par ailleurs, les mesures d'accompagnement fiscales ont concerné un certain nombre d'entreprises existantes. Cela est le fruit de la situation que nous connaissons. Que n'aurait-on pas dit si ces mesures ne concernaient que les nouvelles entreprises ? On aurait dit que le gouvernement ne fait les yeux doux qu'à celles-ci et qu'il méprise totalement le tissu économique existant de notre canton. Nous nous battons avec et pour les entreprises qui sont ici parce que c'est notre priorité, mais nous réservons évidemment ces mesures aux entreprises nouvelles. Elles sont des éléments souvent intéressants, même s'ils ne sont pas toujours déterminants. C'est d'ailleurs dans ce sens que nous parvenons exactement aux mêmes conclusions que le canton de Neuchâtel, qui a l'expérience de la promotion au sens strict du terme, puisqu'il a vécu la crise horlogère.
Je suis frappé que tout débat de politique économique devant ce Grand Conseil donne lieu au même et traditionnel clivage. Il y a ceux qui prennent acte, qui constatent, qui disent vouloir travailler à faire davantage et ceux qui se complaisent dans les éternelles jérémiades, pour qui rien ne va jamais et prennent nos rapports pour des satisfecit à notre endroit. Ce n'est rien de tel !
Quels que soient les clivages politiques à cet égard, nous avons le devoir de nous réunir pour développer et valoriser les atouts de Genève, enviés par de très nombreuses collectivités ! A fortiori, il est inadmissible de les ternir ! C'est malheureusement trop souvent le cas. Pour valoriser ces atouts il faut un peu de volonté politique, du courage et se fixer un cap basé sur des décisions concrètes. Je le répète, c'est trop facile de faire de beaux discours abstraits ! Nous voulons vous rencontrer, Mesdames et Messieurs, sur des décisions concrètes. Nous sommes certains - en tout cas nous l'espérons - que nous pourrons compter sur votre appui. Ce qui manque dans ce contexte n'est pas tant la volonté générale exprimée de manière abstraite que le caractère. Nous souhaitons que, dans cette phase difficile sur le plan économique que nous traversons, l'on ne parle pas que de l'esprit de Genève mais bientôt et toujours davantage du caractère de Genève !
M. Bernard Clerc (AdG). Monsieur Maitre, c'est vraiment toujours pareil ! Vous dites que nous restons dans des considérations générales et théoriques. Justement, mon intervention était toute autre. Je vous ai posé un certain nombre de questions précises et vous les avez éludées ! Je vous ai demandé ce que vous entendiez par «développement durable» et vous n'y avez pas répondu. Je vous ai demandé ce que vous entendiez par «développement qualitatif», vous n'y avez pas répondu. Je vous ai demandé quel était le nombre d'emplois disparus, vous n'y avez pas répondu, si ce n'est pour dire qu'il n'y avait pas de statistiques à ce sujet. Enfin, je vous ai demandé quel était le montant global des allégements fiscaux et vous n'y avez pas répondu non plus. Cela n'est pas de la théorie, ce sont des faits concrets !
Mme Christine Sayegh (S). Je serai moins passionnée que mon préopinant.
Je souhaiterais, Monsieur Maitre, que vous me disiez quel est le montant global des allégements fiscaux. J'ai remarqué dans votre intervention que vous évoquiez surtout des mesures d'accompagnement fiscales, mais il s'agit bien en fait d'allégements fiscaux. Il me serait agréable de savoir si vous voulez répondre maintenant ou si vous souhaitez répondre à une prochaine séance.
M. Max Schneider (Ve). Autour de la FONGIT et de l'AGIT tout s'agite... (Rires et exclamations.) ...mais je ne vais pas donner de leçon à M. Maitre, ni même formuler des critiques. Je voudrais apporter quelque chose de constructif en essayant de suivre les invites de la motion 932-A. En effet, les deux motionnaires - qui font d'ailleurs partie de votre parti - ont posé de très bonnes questions au sujet du bilan ou du rapport des comptes après trois années d'activité de la FONGIT. Passablement de personnes dans cette République sont intéressées par ce sujet. On parle de quatre cents projets, dont septante ont été étudiés et sept ont été retenus. Cette demande de bilan me semble tout à fait justifiée. Apparemment, certains sont intéressés, notamment les sept qui ont reçu une aide éventuelle, ou une promesse d'aide, par ce bilan. Cela permettrait de voir ce que l'on pourrait améliorer, non pas dans le but de vous faire un procès d'intention, mais pour que nous, députés, puissions comprendre ce qui s'y passe. Nous pourrions tenter de voir comment un inventeur va de l'avant, pourquoi il n'y a pas autant de succès que l'on en attendait, ce que l'on pourrait faire pour améliorer tout cela.
C'est la raison pour laquelle je souhaite le renvoi de ce rapport pour complément d'information sur la FONGIT et l'AGIT. Cela nous aidera à mieux comprendre leurs mécanismes.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Nous avons expliqué en préambule à ce rapport qu'il y avait lieu de se référer à un certain nombre de rapports antérieurs. En effet, cela ne sert à rien de se livrer à d'inutiles redites. Je pense en particulier au rapport divers 128 dans lequel les éléments de la croissance qualitative et du développement durable sont définis. Je vous prie donc, Monsieur Clerc, de vous y référer.
Madame Sayegh, votre question sur les allégements fiscaux est étonnante, parce que c'est mal connaître la structure des directives et les mécanismes d'application de ces directives que de nous demander des chiffres à cet égard. Les mesures d'accompagnement fiscales sont ainsi appelées parce qu'elles n'entraînent pas toujours des allégements fiscaux, mais elles permettent un traitement adapté, comme par exemple des amortissements, des ratios entre des fonds propres et des fonds empruntés, etc.
Ces mesures sont évolutives et s'étalent sur une période qui peut durer dix ans. C'est dire que vous ne pouvez pas dresser une photographie à un moment donné, ce d'autant que ces mesures sont très souvent des mesures qui dans l'immédiat ne coûtent strictement rien à l'Etat en termes de rentrées fiscales, parce qu'elles s'adressent à des entreprises qui ne dégagent pas encore de bénéfices, c'est-à-dire de substances fiscales directement imposables. Je suis navré, Madame, je comprends bien que ma réponse peut vous paraître un peu elliptique, mais, en toute loyauté, nous n'avons tout simplement pas la capacité de vous dire que les mesures d'accompagnement fiscales se traduisent par un manque à gagner fiscal d'une certaine somme. Cette situation ne peut se juger que dans la durée, car ces chiffres se modifient d'année en année, non seulement sur l'ensemble des entreprises, mais pour chaque entreprise directement concernée.
Monsieur Schneider, s'agissant de la FONGIT, il serait utile que vous lisiez le rapport. Nous établissons un bilan et nous mettons le doigt sur les insuffisances actuelles de la FONGIT. Contrairement à ce que dit Mme Calmy-Rey, nous ne disons pas que tout va bien, puisque nous mettons les insuffisances en évidence, en particulier de type structurel, c'est-à-dire le cadre d'accompagnement d'un projet innovateur. Nous sommes arrivés à la conviction qu'un projet innovateur peut passer du stade de l'innovation au prototype, puis du stade du prototype à la commercialisation que s'il est intégré dans une entreprise existante ou à créer. Ce sont les nouveaux développements de la FONGIT auxquels nous nous attelons actuellement, en particulier grâce à la réflexion suggérée par la motion 932-A.
Le bilan de la FONGIT est relativement maigre, ce qui montre bien l'extraordinaire fossé qu'il y a entre un projet, une idée, même une idée géniale, et l'aptitude de cette idée géniale à être commercialisée, c'est-à-dire à trouver un marché et à être portée par une structure à même de faire vivre véritablement cette idée et de satisfaire sa clientèle de dégager des bénéfices de façon à pouvoir réinvestir. Cette marge entre l'invention et ses chances de voir le jour sur un marché compétitif est très grande, ce qui donne le côté passionnant de l'expérience de la FONGIT. Il est donc impérieusement nécessaire de structurer davantage la FONGIT pour renforcer l'appui par des entreprises existantes ou à créer. L'Etat a encore beaucoup à faire pour s'investir encore davantage dans cette structure de partenariat qu'est la FONGIT.
M. Chaïm Nissim (Ve). Monsieur Maitre, j'ai été choqué par les mots employés dans le rapport du Conseil d'Etat, comme «développement durable», «développement qualitatif». Vous avez répondu à mon collègue Bernard Clerc que ces mots sont «mieux» définis dans le RD 128 - ils ne sont pas du tout définis dans le dernier rapport - mais je constate avec surprise que ce rapport date de 1989, soit avant le sommet de Rio. Je me réjouis donc de lire la manière dont ces mots ont été définis avant même leur existence.
Monsieur Maitre, vous parlez, à la fin de votre rapport, des allégements fiscaux que vous consentez à des entreprises industrielles. Je voudrais des actes, c'est comme cela que je comprends le «développement durable». Il faut consentir des allégements fiscaux aux entreprises industrielles qui produisent des choses intéressantes dans la durée, par contre il ne faut pas le faire avec les industries de produits de luxe, c'est-à-dire inutiles, peu durables ou polluants. Je désirais obtenir plus de précisions, pour savoir dans quel sens vous voulez orienter le développement de ce canton, et je n'ai malheureusement pas eu de réponse.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat est rejetée.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.