République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 8 décembre 1994 à 17h
53e législature - 2e année - 2e session - 46e séance
M 954
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
que Genève entend devenir la capitale mondiale de l'environnement;
qu'actuellement, toutes les compétences en matière d'environnement sont regroupées au sein d'un même département;
que de nombreuses espèces animales sont en voie de disparition ou sont menacées aux niveaux cantonal et régional;
que les espèces sauvages doivent pouvoir se déplacer au sein d'un réseau de biotopes pour se maintenir;
que la richesse de la faune genevoise est directement liée aux possibilités d'échanges qui subsistent encore entre les massifs du Jura et des Voirons, et les zones naturelles du canton,
invite le Conseil d'Etat à
élaborer un plan cantonal de conservation et de gestion des milieux naturels, assorti d'un calendrier de réalisation. Ce plan devrait permettre de:
conserver les grandes zones naturelles;
délimiter, maintenir et protéger ou revitaliser, voire compléter les couloirs écologiques existants.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Suite aux dernières élections cantonales, le nouveau Conseil d'Etat a procédé à certains remaniements de services dans les départements. C'est ainsi que la plupart des services compétents en matière d'environnement ont été regroupés au sein du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIER). Par un souci de rationalisation et d'une meilleure efficacité, cette mesure a été très largement saluée.
Récemment, l'Association genevoise pour la protection de la nature. Ce document a été présenté au conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales. Dans ce mémoire remis au département, l'AGPN relève notamment la nécessité d'une politique globale de gestion en matière de protection de la nature dans le canton de Genève.
Certains députés se sont également sentis concernés par cette question. Ces députés se rallient à l'idée d'un plan cantonal de conservation et de gestion des milieux naturels. Ce document serait plus précisément consacré à la flore, à la faune et à leurs biotopes. Il s'agit de bien faire la différence avec le plan de gestion de l'environnement qui se rapporte, lui, davantage à l'eau, à l'air, au sol et aux déchets. D'ailleurs, dans ce domaine précis, les travaux semblent beaucoup plus avancés. Un plan de gestion de l'environnement serait même en cours d'élaboration. En revanche, il ne semble pas qu'il existe un plan de conservation et de gestion des milieux naturels. Est-il même prévu? L'élaboration d'un plan global consacré à la gestion des milieux naturels répond au souci de conservation des valeurs naturelles de notre canton, notamment en prenant en considération le rôle patrimonial de cette nature.
Un tel plan devrait rapidement être réalisé afin que toutes les interventions futures qui toucheront ou influenceront le territoire naturel genevois cela concernera tout particulièrement d'éventuels futurs déclassements se fassent dans une conception globale et cohérente. Un tel plan devrait s'insérer dans le contexte général du pays de Genève selon ses limites biogéographiques.
Ce plan servirait de base à la mise en place de mesures de conservation et de revalorisation. Si des aménagements doivent provoquer un impact sur le milieu naturel, des mesures compensatoires adaptées et cohérentes devraient pouvoir être définites. Ces dernières se feront selon le plan de gestion global du territoire; cette procédure devrait donc permettre d'éviter de longs et coûteux recours.
Dans le canton, les grands ensembles naturels les bois et autres réserves naturelles par exemple sont isolés. La survie de nombreuses espèces sauvages n'est donc plus assurée. Ainsi, 79% des batraciens de Suisse sont menacés de disparition; cette situation provient essentiellement de la suppression ou de la dispartion des voies de migrations entre le milieu de reproduction (les étangs) et les habitats des batraciens (les forêts).
La construction de routes a sérieusement morcelé le territoire de cette faune. Aujourd'hui, il faudrait à nouveau relier entre eux ces grands ensembles par des structures naturelles ou artificielles afin que des espèces sauvages puissent retrouver des possibilités naturelles de se déplacer. A ce titre, les haies naturelles, les cordons boisés riverains ou les passages souterrains constituent de bonnes illustrations des «voies de circulation». Certaines de ces structures de liaison existent. Les rivières en sont également un bel exemple. Elles sont toutefois souvent interrompues par des routes, des zones construites ou d'autres obstacles. Enfin, il s'agit aujourd'hui d'élaborer des mesures qui permettent de revitaliser et de compléter ces biotopes.
Il semble évident qu'au-delà des objectifs écologiques, un plan cantonal de conservation et de gestion des milieux naturels devrait assurer le maintien de la qualité de la vie qui fait l'attractivité actuelle de Genève. D'un point de vue purement économique, cette attractivité résultant de plusieurs facteurs favorables n'est plus à démontrer.
Il est vrai que la protection de la nature ne s'applique pas qu'aux réserves naturelles et à quelques parcelles abandonnées. Les rivières, les forêts, les haies, etc., représentent tous des éléments vivants qu'il est impératif de préserver. Ils forment un ensemble et en tant que tel méritent protection.
Des couloirs de déplacement pour la faune et pour la flore les spécialistes parlent des couloirs écologiques constituent le réseau entre les milieux naturels. On pourrait également appeler ce réseau la trame formant l'élément fondamental de toute survie animale et végétale. Au besoin, ces couloirs écologiques ou cette trame, en fait une sorte de maillage vert, devraient être recréés!
La nécessité d'un plan général de gestion du milieu naturel n'est plus à démontrer. Elle pourrait se baser sur la législation fédérale comme sur la coordination transfrontalière. De plus, ce plan devrait largement s'inspirer des études existantes. Elles sont nombreuses !
Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement cette proposition de motion.
Débat
M. Hervé Burdet (L). Cette proposition de motion concerne la réalisation d'un plan cantonal de gestion des zones naturelles à Genève. Pour celles et ceux qui sont soucieux de la santé des finances publiques, j'aimerais dire pour commencer que les moyens existent, que les lignes budgétaires sont présentes et que le personnel est en place. Quelles que soient les critiques ou les doutes émis dans ce parlement sur la qualité de ce personnel, je voudrais dire que je lui fais, en ce qui concerne mon groupe et moi, pleinement confiance, même s'il y a eu substitution d'un certain nombre de responsables, les nouveaux responsables, je n'en doute pas, feront leur preuve.
Sur l'arrière-fond, on observe que le DIER a récemment rassemblé l'ensemble des services de l'Etat s'occupant de protection de l'environnement. Je ne voudrais pas manquer, cependant, l'occasion de dire que, curiosité insigne, le service des lacs et cours d'eau est toujours et encore rattaché au département des travaux publics et de l'énergie, ce qui est insolite. Si l'on en arrive au fonctionnement des commissions extra-parlementaires, nous avons dans ce canton des commissions de la faune, de la pêche, des forêts et une sous-commission nature et monument de la CMNS. Ça fait beaucoup de monde et beaucoup de commissions pour un même sujet, ce qui a pour paradoxe de voir le président de la commission de la pêche auditionné par la commission de la faune, car cette dernière s'est brusquement souvenue que les poissons sont aussi des animaux ! Nous avons un certain nombre d'autres incongruités.
Je voudrais encourager ce parlement à approuver cette proposition de motion qui n'a pour but que d'élaborer un plan cantonal, c'est-à-dire de dresser une stratégie permettant de mettre en oeuvre les moyens dont l'Etat dispose, une stratégie permettant de conserver les grandes zones naturelles du canton, de délimiter, de maintenir et de protéger ou de revitaliser, voire compléter les couloirs écologiques existants. Au bénéfice des quelques commentaires - puisque je ne vous ferai pas l'injure de vous répéter l'exposé des motifs - je vous recommande de faire bon accueil à cette proposition de motion.
M. Roger Beer (R). M. Burdet a dit l'essentiel. Toutefois, j'aimerais, par rapport à certains doutes pouvant subsister suite à la dernière intervention de M. Haegi sur ce sujet, dire qu'il n'y a absolument pas de suspicion à avoir sur le personnel composant le département de l'environnement.
Je pense que, malgré le regroupement de certains services, cette motion, puisqu'elle demande un état des lieux et un plan de gestion - il ne s'agit pas seulement de savoir ce qui existe, mais de savoir ce que l'on va faire - devrait permettre à tous les collaborateurs du département de l'environnement de nous montrer ce dont ils sont capables et d'établir un document pour savoir ce que l'on va faire de l'environnement.
J'aimerais ajouter - M. Burdet ne pouvait pas le faire - qu'un certain nombre de compétences existent au niveau municipal et notamment aux Conservatoire et Jardin botaniques en ce qui concerne la flore, mais également au Museum en ce qui concerne la faune. (Grand brouhaha.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, on ne s'entend plus !
M. Roger Beer. Si, si ! Si, si !
M. John Dupraz. Y'a q'des sourds dans cette salle !
M. Roger Beer. L'intérêt de cette motion est d'insister sur ce qui, aujourd'hui, par rapport au discours général de la Genève, capitale de l'environnement, peut sembler le parent pauvre, c'est-à-dire la nature. Nous parlons beaucoup de gestion de l'environnement et je crois que le département a des programmes en la matière : il travaille sur la qualité de l'eau, de l'air, des sols et j'ai quelquefois l'impression que l'on oublie de nous parler de la qualité de la verdure, de la nature.
Cette motion, Monsieur le conseiller d'Etat, devrait vous permettre d'exposer au Grand Conseil et au public un certain nombre de concepts généraux de conservation de la nature, dans l'idée globale du maillage et des réseaux verts que mon collègue Burdet a cités auparavant. Je vous remercie d'accueillir favorablement cette motion.
M. Jean-Claude Genecand (PDC). Genève peut s'enorgueillir de la beauté de ses parcs, de la richesse du jardin botanique, de l'entretien de ses forêts, malheureusement les zones naturelles font un peu désordre aux yeux du citoyen «propre en ordre» et se sont rétrécies comme une peau de chagrin.
Souvenez-vous, pour les plus anciens, notre campagne genevoise était riche en haies bordant les propriétés ou en bosquets répartis harmonieusement à l'intérieur des cultures. La mécanisation et le travail rationnel ont contraint les paysans à supprimer ces haies naturelles encombrantes et improductives. Ainsi, si vous parcourez la campagne genevoise, il n'est pas rare de traverser des contrées entrecoupées de chemins et de routes mais sans l'ombre de boisement. Cette situation inquiète la paysannerie. Je vous rappelle en effet que notre ancien collègue Charles Bosson a présenté, en octobre 1991, le projet de loi 6754 instituant les contributions de caractère écologique dans l'agriculture. S'appuyant sur la loi fédérale de la protection de la nature, ainsi que sur la loi fédérale sur l'agriculture, il préconisait l'indemnisation pour la création et la sauvegarde de zones tampons le long des haies et en bordure des cours d'eau.
Ce projet de loi est toujours en commission et je constate qu'il va dans le même sens que l'invite de notre motion. En effet, créer des zones tampons, c'est revitaliser des prairies maigres propices à une flore spécifique et une faune appropriée. C'est aussi planter de nouvelles haies, comme le préconise le projet de loi. Notre motion va un poil plus loin en demandant que l'on fasse l'inventaire de ces milieux naturels et, bien sûr, que l'on se dote d'un plan de gestion avec un calendrier de réalisations. Il est tout de même paradoxal que les associations de protection de la nature doivent recourir pour protéger les aires naturelles détruites, soit par négligence, soit pas solution de facilité.
Si nous possédions une législation en l'état, cela permettrait de résoudre de nombreux problèmes sans coûts supplémentaires, à la satisfaction de tous. Pensons, par exemple, au remaniement parcellaire. Il y a eu celui de Bardonnex, il y a celui de Plan-les-Ouates maintenant, c'est le moment idoine pour conserver voire pour recréer ces couloirs écologiques, c'est-à-dire une haie entre deux propriétés et cela sans bourse délier pour l'Etat.
Notre arrière-pays est riche et intéressant, il n'est pas grand et nous sommes nombreux, il faut veiller à conserver et à régénérer ce qui fait son charme, c'est pourquoi je vous invite à renvoyer cette motion à la commission de l'environnement et de l'agriculture pour étude et pour lui donner une suite favorable.
Mme Sylvie Châtelain (S). La nécessité de mettre en place une politique globale de conservation et de gestion des milieux naturels n'est plus à démontrer et vous l'avez rappelé avant moi. Un plan cantonal permettrait d'intégrer les aménagements naturels futurs, les mesures de compensations ou autres, dans une perspective générale et non au coup par coup. J'aimerais cependant insister sur l'intérêt de définir dans ce plan un réseau cohérent de couloirs écologiques. L'idée de relier les zones naturelles entre elles plutôt que de les isoler n'est, certes, pas nouvelle, mais elle encore peu mise en application à Genève et en tout cas pas de manière systématique. Or, si la survie des espèces végétales et animales dépend pour une bonne part de la préservation des espaces naturels, elle est aussi largement tributaire des possibilités de communication entre ces zones.
Dans le même ordre d'idée, afin de ne pas insulariser Genève, il conviendra d'associer étroitement les régions limitrophes du canton à l'élaboration et à l'application de ce plan. Pourquoi pas même imaginer faire appel un jour au programme européen Interreg pour concrétiser certaines réalisations transfrontalières ? Je ne crois pas me tromper en pensant que cette perspective séduira le chef du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales.
M. Max Schneider (Ve). Je désirais présenter cette motion, mais comme mes collègues l'ont si bien fait, je ne vais donc pas allonger le débat.
Par contre, je me pose la question sur l'opportunité de renvoyer cette motion en commission. En effet, nous demandons l'élaboration d'un plan cantonal de conservation et de gestion des milieux naturels, de nombreuses études existent déjà, elles sont à disposition à la GPN. Voilà pourquoi le fait de la renvoyer, soit en commission, soit au Conseil d'Etat, c'est kif-kif, l'important c'est qu'il y ait une volonté politique de la part du conseiller d'Etat. J'aimerais bien que M. Haegi nous dise qu'il souhaiterait avoir un délai et que, dans les six prochains mois, par exemple, nous ayons ce plan de gestion et ce plan cantonal de conservation... (L'orateur est interrompu par M. Beer.)
Monsieur Beer, si c'est comme pour la Seymaz et que nous n'avons pas de réponse au bout de douze mois, c'est grave. J'aimerais, comme je l'ai dit à l'instant, que nous ayons l'engagement du chef du département que, dans les six prochains mois, il communiquera ce plan aux députés. Ainsi, nous aurions une réponse rapide à cette demande de motion.
M. John Dupraz (R). C'est avec intérêt que j'ai lu cette motion. Lorsque M. Beer, notre bien-aimé chef de groupe, m'a présenté ce texte avant qu'il soit déposé, je lui ai aimablement fait remarquer que je trouvais bizarre que l'on puisse parler de couloirs écologiques et de protection de la nature sans évoquer la zone agricole et l'agriculture. Où cela se passe-t-il ? Essentiellement en zone agricole où des agriculteurs travaillent, où il y a une activité économique, et dans cette motion on les ignore superbement. Il m'a dit qu'il était d'accord mais que l'instigateur, soit M. Burdet, «docteur ès chlorophylle», (Rires.) grand spécialiste de la nomenclature des plantes, ne voulait pas modifier le texte. Mais a-t-il conscience de la manière dont les choses se passent ? Si vous voulez avoir une efficacité dans cette approche et pouvoir pratiquer un tel plan, il faut associer les gens directement concernés, qui travaillent et qui vivent dans la zone agricole, c'est-à-dire les paysans et les organisations faîtières telles que la Chambre genevoise d'agriculture.
D'ailleurs M. Genecand l'a très bien dit, et ses racines paysannes n'ont fait qu'un bond; il a bien compris où était le problème. Ce d'autant plus, comme il l'a rappelé, qu'il y a un projet visant à encourager l'implantation, la sauvegarde et l'entretien de surfaces de compensations écologiques qui est en commission. Mme Châtelain, à l'époque présidente de cette commission, s'est donné la peine de présenter une nouvelle rédaction de ce projet de loi. Cela va ensemble, c'est pourquoi j'insiste pour que cette motion aille en commission et que vous auditionniez les milieux agricoles, car sans eux vous aurez les pires peines à mettre quelque chose en place.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée de m'exprimer pour regretter, ô combien, que le Conseil d'Etat ait eu la légèreté de transférer l'agriculture à l'économie et de supprimer le département de l'agriculture. Voyez-vous, nous étions à l'époque un canton précurseur. Puisque l'agriculture se passe essentiellement sur le territoire des communes, des tâches comme la culture aux champs sont dévolues à ces communes. Et actuellement, la politique agraire au niveau suisse tend à mettre en valeur et en exergue les prestations non économiques de l'agriculture, c'est-à-dire toutes les prestations environnementales. Or, au moment où les autorités fédérales mettent en place cette politique à la demande des organisations professionnelles, notamment l'Union suisse des paysans, à Genève on fait exactement le contraire de ce que nous voulons au niveau suisse !
Du reste, ce Grand Conseil l'avait très bien compris, puisque vous avez créé une commission environnement et agriculture. Je regrette ce faux pas politique qui a été très mal ressenti dans les milieux agricoles et par les paysans. C'est une erreur grave, car là vous avez fait un pas en arrière alors que nous étions en avance sur les autres. Je regrette que l'on ait pris cette décision sans consulter les premiers intéressés et sans qu'il y ait une discussion. On ne joue pas comme ça avec un secteur dont l'importance économique est minime par rapport au tertiaire ou au secondaire - donc insignifiante dans le département de l'économie publique - mais, par contre, dans un concept global de la protection de l'environnement et de l'aménagement du territoire, elle est primordiale et essentielle. Je regrette, Messieurs, que vous ayez fait cette faute politique que je qualifie de grave.
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Il faut se féliciter de cette proposition de motion. Suite aux différentes interventions, j'ai compris que certains motionnaires étaient pour le renvoi au Conseil d'Etat et attendaient un rapport de sa part, et d'autres le renvoi en commission. Et encore, on a cru comprendre qu'il faudrait se déterminer rapidement ! Après ce que l'on a entendu, on se dit qu'avant la fin de la législature il n'y aura rien du tout. J'interroge les motionnaires. Ne pensez-vous qu'il faudrait renvoyer en premier lieu cette motion au Conseil d'Etat, puis, une fois le rapport en main, déterminer si le renvoi en commission est nécessaire ? Je pense qu'il s'agit d'un travail de département et que ce n'est pas le rôle d'une commission que de procéder à ces auditions. C'est mon avis, j'ai le droit d'en avoir un.
Je constate avec plaisir, en lisant le nom des signataires de la motion, qu'il y a une évolution par rapport à l'écologie, à la sauvegarde de la nature. On verra, lorsqu'il y aura des projets de spéculateurs, s'ils ont la même position par rapport à la défense du patrimoine et de la nature de notre canton. Ce sera très intéressant.
M. Hervé Burdet (L). Je voudrais répondre à M. Dupraz, qui pense que nous allons spolier les agriculteurs et les exploitants agricoles de ce canton, que ce n'est pas du tout notre intention !
M. John Dupraz. J'ai pas dit ça ! J'ai dit qu'il faut parler avec eux !
M. Hervé Burdet. Il est faux de dire que l'essentiel des aménagements que nous demandons pour établir des corridors entre les grandes zones naturelles se situeront sur les domaines des exploitants agricoles du canton. Il faut quand même ne pas oublier que toute la nature genevoise n'est pas dans la zone agricole exploitée. Il y a de grandes forêts, des zones conservées au titre de la loi fédérale sur le bord des eaux, et donc on peut très bien établir les buts de cette motion sans tailler dans la zone agricole.
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. On m'invite à avoir une lecture positive de cette motion et on nous dit qu'elle est un encouragement à la politique du département. Je m'efforcerai d'avoir cette lecture positive. Je me permets tout de même quelques remarques à propos du considérant. Il n'est pas nécessaire d'avoir une vocation de capitale de l'environnement pour désirer un plan de conservation et de gestion des milieux naturels.
Nous n'aurions pas cette vocation internationale que nous aurions de bonnes raisons de nous intéresser à cela. Dans le considérant, vous mettez que toutes les compétences en matière d'environnement sont regroupées au sein d'un même département. Dans l'exposé des motifs, d'une manière plus précise, vous signalez que c'est la plupart des services concernés, mais pas tous, mais que la coordination entre les uns et les autres se réalise le mieux possible.
Au sujet de l'agriculture, Monsieur Dupraz, il est évident que les agriculteurs sont au nombre des principaux acteurs de la protection de l'environnement, qu'ils peuvent protéger cet environnement et qu'ils peuvent l'altérer s'ils ne prenaient pas les mesures qui sont les leurs depuis un certain nombre d'années, travaillant en étroite collaboration avec les milieux intéressés pour la protection de l'environnement.
Une petite remarque sur le thème que vous abordez. Vous savez bien que le changement départemental a été réalisé en fonction d'une référence fédérale.
M. John Dupraz. Arrête, t'es à côté de tes pompes ! (Rires.)
La présidente. Monsieur Dupraz, s'il vous plaît !
M. John Dupraz. J'vais m'gêner !
La présidente. Oui, eh bien moi, je vous prie d'avoir des propos corrects à l'égard du Conseil d'Etat !
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Vous savez, chacun tient les propos qui reflètent son naturel !
Je répète, à l'intention des autres députés, que ce changement a été réalisé parce que sur le plan fédéral on considère que l'agriculture est une des composantes de la vie économique et que désirant la prendre au sérieux elle doit se trouver dans le contexte économique. Dans les cantons qui nous entourent, il en va de même, et c'est dans ces conditions que ce choix a été fait. Aucun service de l'agriculture n'a été supprimé et on attache, aujourd'hui, la même importance à l'agriculture que celle qu'on lui attachait hier.
C'est vrai, Monsieur Dupraz, que sur le plan du fonctionnement la commission de l'agriculture et de l'environnement est parfois confrontée à des problèmes de coordination. Nous nous en rendons compte et vous faites constamment la démonstration que nous ne pouvons pas sérieusement parler de la globalité de l'environnement dans ce canton en oubliant les agriculteurs.
Personne n'a imaginé oublier les agriculteurs. J'aimerais d'abord souligner, surtout vis-à-vis de M. Beer qui, il y a quelques semaines, relevait avec pertinence toutes les qualités des collaborateurs qui étaient arrivés à l'âge de la retraite et qui avaient donc quitté leurs responsabilités, que ces collaborateurs n'avaient pas été distraits par rapport à l'importance de la préservation de la nature et que les compliments que vous leur avez adressés ne sauraient aujourd'hui être allégés de quelque manière que ce soit en laissant entendre que leur attention n'était pas celle que vous souhaitiez. Ce que je vous assure, c'est que la nouvelle équipe aux responsabilités entend bien poursuivre dans la direction engagée, notamment lorsqu'en 1981 on rédigeait un «Livre vert» qui était un inventaire de la situation de notre canton. On ne s'est pas borné à créer un événement, ensuite on a actualisé ce document pour disposer d'une radiographie complète de cette situation.
Vous n'ignorez pas que, aujourd'hui, d'une manière constante, des commissions travaillent sur ces différents points de manière à disposer de l'inventaire que vous demandez et de ce plan de conservation sur lequel aujourd'hui nous sommes au travail, pour lui donner une impulsion dont il a indiscutablement besoin. Un sujet sur lequel je vous rejoins totalement, c'est ce que vous appelez les «couloirs écologiques». Je les présente d'une manière plus simple, en relevant tout simplement qu'hier nous avions des parcs à Genève qui faisaient notre fierté et notre bonheur et dans lesquels nous pouvions nous promener. Le développement urbain de notre canton a fait qu'il a été nécessaire de créer d'autres espaces de détente, d'autres parcs dans les autres communes. Il faut que nous songions très sérieusement à avoir une vision d'ensemble du territoire de manière à créer de véritables couloirs naturels qui nous permettent de nous déplacer sur des espaces plus vastes, grâce à une concertation au niveau du canton, au niveau intercommunal et régional.
Quelle est la manière la plus efficace de traiter cette motion ? Si vous désirez être renseignés sur le travail qui a été réalisé - car je vous dis formellement ce soir que ce travail-là a été engagé - soit nous vous présentons un rapport allant dans le sens de l'intervention de M. Lyon, dans lequel nous vous parlerons notamment de l'intérêt que nous portons aux activités de l'agriculture, soit vous allez en commission pour auditionner toute une série de groupements que nous avons déjà entendus dans le cadre des activités du département. Est-ce que vous désirez que nous fassions ce travail au niveau de l'exécutif ou est-ce que vous désirez l'influencer, à ce stade, et procéder aux auditions par un transfert, en quelque sorte, d'activités ? Je n'en tourne pas la main, mais si nous sommes animés par un souci d'efficacité, ce ne serait pas faire un mauvais choix que de la renvoyer au Conseil d'Etat. Encore une fois, je retiens le caractère positif de votre démarche, et je vous assure qu'elle sera largement prise en compte.
M. Roger Beer (R). M. Haegi m'a quelque peu inquiété en parlant de multiples auditions en commission. Je m'empresse de vous dire que ce n'est pas ce que nous désirons, Monsieur le conseiller d'Etat. La commission peut définir le mandat. Seules deux entités aimeraient être entendues, à savoir l'Association genevoise de la protection de la nature, à la base du projet de maillage vert, et les agriculteurs. Cela peut être fait en une fois. Ce n'est pas du luxe de passer par la commission de l'environnement et de l'agriculture pour traiter ce genre de motion. Alors j'insiste sur le renvoi en commission.
La proposition de renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'environnement et de agriculture est mise aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'environnement et de l'agriculture par 41 oui et 36 non.