République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 8 décembre 1994 à 17h
53e législature - 2e année - 2e session - 45e séance
IU 59
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je voudrais souligner que la LDTR est, dans mon esprit, un outil de travail indispensable pour le gouvernement. Grâce à elle, on a évité des situations qui se sont produites dans d'autres villes, à savoir le démantèlement d'un parc immobilier qui était réservé à des catégories de revenus moyens ou faibles et qui faisait l'objet de rénovations lourdes.
Les efforts du département des travaux publics et de l'énergie, depuis que je suis arrivé au département, se poursuivent sur la même lancée que tout ce qui a été fait auparavant dans ce domaine. La pratique de mon prédécesseur à la tête du département était extrêmement restrictive en matière de changement d'affectation, de sorte que toute requête visant à remplacer des locaux d'habitation par des surfaces professionnelles ou commerciales était quasi systématiquement refusée.
Cependant, je dois dire que l'idée de ces compensations financières n'est pas de moi, mais bien de mon prédécesseur, dans un cas précis où il avait imaginé, avec le concours de la BPS, de trouver un arrangement de ce genre pour résoudre un problème qui relevait des questions que vous posez.
Il est tout à fait exact que l'Elvia, pour douze appartements à l'avenue du Bouchet, nous a octroyé un prêt de 5 millions de francs à un taux préférentiel de 1/8ème par rapport au taux du marché et que le Crédit suisse, pour dix appartements, au 12, rue de Chantepoulet, nous a donné 500 000 F pour financer une opération de construction de logements sociaux.
Je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur, que ce n'est peut-être pas exactement le but de la loi. Par contre, le fait que nous puissions obtenir des taux préférentiels et des montants d'une importance tout à fait intéressante pour financer des logements sociaux me permet de dire qu'il ne s'agit en aucun cas d'un trafic d'indulgences, ni d'une éthique qui sous-tend une inégalité de traitement. La compensation est en principe exigée en surfaces équivalentes de bureaux, ce qui rend l'opération globalement neutre. A quelques rares occasions, j'ai admis cette compensation sous forme financière, lorsqu'il n'était pas possible pour le requérant de proposer des locaux commerciaux à transformer en logements. Cette somme est ensuite affectée, par le biais de la direction générale du logement, à la construction de logements sociaux. Cette compensation financière peut, a priori, revêtir la forme d'un transfert d'un certain montant ou de l'octroi d'un prêt à taux préférentiel.
D'autres solutions sont peut-être également envisageables. Il serait particulièrement intéressant que vous m'indiquiez de quelle manière et selon quelle formule une juste compensation financière pourrait, selon vous, être admise par l'autorité administrative, dans les cas extrêmement peu nombreux où cela est nécessaire. En tout cas, je peux vous dire que nous ne faisons pas de cadeau à celui qui sollicite un changement de destination dont il a un impérieux besoin. Nous tentons seulement de trouver, lorsque les circonstances particulières du cas d'espèce le justifient, une solution raisonnable et pratique qui permette de poursuivre l'un des buts essentiels de la LDTR consistant à préserver le contingent de logements existants. J'attends donc votre détermination à ce sujet.
Je voudrais tout de même dire deux mots au sujet de la LDTR. La notion du besoin prépondérant, ou des besoins prépondérants, qui figure dans la loi est intéressante et permet des exceptions. Les récents jugements du Tribunal administratif vont à l'encontre d'un assouplissement de cette notion, alors que nous constatons, à l'évidence, qu'il y a des cas dans lesquels cette loi n'est tout simplement pas applicable, par exemple pour des immeubles conçus à l'origine pour des gens qui menaient un grand train de vie, avec des pièces de 25 à 30 m2 en moyenne. Je pense notamment à un immeuble de luxe au quai Wilson, le Splendid Park.
Lorsque vous devez procéder à une rénovation, comment voulez-vous satisfaire à la notion de «besoins prépondérants», sachant que la substance de l'objet n'est pas de 3 200 F mais déjà de 4 000 F au départ. Il est donc impossible de satisfaire à cette loi; c'est une question architecturale. Je vous défie de trouver un expert architecte qui ne soit pas d'accord avec moi sur ce point !
D'autre part, pour ce qui est de la localisation géographique, même si la notion de besoins prépondérants doit être appliquée de façon aussi homogène que possible, il est impossible de croire que l'on peut le faire, comme cela a été pratiqué jusqu'à maintenant, pour des raisons analogues à celles que j'ai décrites.
Voilà ma réponse, Monsieur le député. Je reste à votre disposition si vous désirez un entretien pour poursuivre la discussion et j'attends vos propositions.
Cette interpellation urgente est close.