République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 6983-A
16. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de M. Jean-Luc Richardet, repris par Mmes Liliane Maury Pasquier et Sylvie Châtelain modifiant la loi sur les constructions et les installations diverses (L 5 1). ( -) PL6983
Mémorial 1993 : Projet, 4128. Renvoi en commission, 4146. Divers, 7270.
Rapport de M. Florian Barro (L), commission d'aménagement du canton

La commission d'aménagement du canton sous les présidences deMM. Jean-Luc Richardet et Hervé Dessimoz a étudié ce projet de loi au cours des séances des 25 août, 8 septembre, 13 et 20 octobre 1993, ainsi que les22 juin, 31 août et 7 septembre 1994.

Assistaient également aux travaux: MM. C. Grobet et P. Joye, conseillers d'Etat successifs au département des travaux publics et de l'énergie, G. Gainon, chef de la division des plans d'affectation, J.-C. Pauli et Mottiez, juristes au département des travaux publics, P. Brun, chef de service des plans de zones, Mme S. Lin, chef du service du plan directeur.

1. Généralités et historique

Le présent projet de loi a pour but de porter, sous certaines conditions exceptionnelles, l'indice d'utilisation du sol en zone 5 de 0.3 à 0.4. Nous vous renvoyons à l'exposé des motifs qui traite de l'historique de la densification de la zone villas (zone 5A, puis zone 5) au mémorial 1993, no 29, pages 4128 et suivantes.

2. Travaux de la commission

Lors d'un premier tour de table les commissaires s'accordent à dire que la zone villas n'est pas toujours rationnellement utilisée et que ce projet de loi peut s'inscrire dans son principe comme un outil simple de densification sans passer par le déclassement. Toutefois, le taux proposé fera dire à certains que les communes, peu enclines à la densification par déclassement, notamment de la zone 5 aux zones 4A ou 4B, voire 3, se contenteront de cette mesure d'aménagement.

Audition de la société de propriétaires de villas (SPV)

La SPV, bien que comprenant le souhait de l'auteur du projet de loi visant à encourager la forme d'habitat groupé, ne peut souscrire à la dénaturation de la zone villa. Si elle admet que les constructions de villas mitoyennes peuvent être opportunes et ont rencontré un vif succès, l'indice de 0.4 est exagéré et est contraire à la définition de la zone. Elle rejette donc ce projet de loi et recommande d'en rester au texte de loi actuel.

Audition de l'Association des promoteurs constructeurs genevois (APCG)

L'APCG accueille favorablement ce projet de loi au nom de l'utilisation rationnelle du terrain. Par contre, elle ne peut pas suivre l'auteur du projet de loi sur l'obligation du PLQ préalable.

Cette densification devrait avoir lieu sur des périmètres d'importance, sur lesquels, de cas en cas, après réflexion, l'idée d'envisager la possibilité d'un PLQ pourrait être éventuellement étudiée. Elle rappelle que le Conseil d'Etat a toujours la faculté de demander un PLQ préalablement à toute autorisation de construire.

3. Conclusion

A l'issue des auditions, les commissaires s'interrogent sur l'obligation ou non du PLQ, sur l'article 75 LCI fixant le nombre de logements par bâtiment, sur les gabarits identiques des zones 5 et 4B et sur la surface des parcelles touchées par ce projet. L'idée du PLQ obligatoire est refusée, la commune devant obligatoirement procéder à une délibération avant l'octroi de la dérogation, ce qui n'est pas nécessaire pour un PLQ; le Conseil d'Etat pourrait très bien voter un PLQ sans l'avis favorable de la commune. D'autre part, le propriétaire, embarqué dans une telle procédure, se satisfera des taux actuels évitant de se perdre dans les lenteurs administratives, privant ainsi la collectivité d'une meilleure utilisation des zones à bâtir. La commission renonce également à quantifier le nombre de logements ou la taille des surfaces de terrains minimums concernés par ce projet.

A la suite d'une discussion sur la forme rédactionnelle des articles de loi, la commission vote, par 12 oui (dc - lib- peg- rad - soc), 1 abstention (adg) et 2 oppositions (adg) le projet de loi amendé ci-dessous et recommande au Grand Conseil d'en faire de même.

Premier débat

M. Florian Barro, rapporteur. Je voudrais apporter deux petites précisions.

Dans le vote, bien sûr, il y avait deux oppositions de l'Alliance de gauche, ce qui ne figure pas dans le rapport.

Pour ce qui est de la faculté du Conseil d'Etat qui pourrait voter un PLQ sans avoir pour autant obtenu l'assentiment de la commune, la loi sur les voies de communication et de l'urbanisme prévoit toutefois qu'il faut également l'assentiment du Grand Conseil, dans le cas où le Conseil d'Etat entend voter un PLQ contre l'avis de sa commune. C'est aussi pour cela que la majorité de la commission a considéré que la forme amendée du projet de loi tel qu'il vous est soumis, sans l'obligation du PLQ, était une forme suffisamment intéressante pour contraindre la commune à un vote favorable à un projet de densification jusqu'à 40% de la surface de terrain.

M. Pierre Meyll (AdG). Il me semble nécessaire qu'un PLQ soit rendu obligatoire et c'est la raison pour laquelle j'ai fait une demande d'amendement pour revenir sur le projet de loi tel qu'il avait été proposé par nos collègues socialistes. Nous demandons que le projet de loi ne soit pas changé dans sa première partie. On pourrait parler de : «...forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 30% - au lieu de 40%, comme cela est indiqué sur le projet de loi - de la surface du terrain.» Ensuite, il devrait être rajouté, cela afin que les choses soient clairement établies :

«Ce taux peut être porté à 40% de la surface du terrain moyennant l'adoption préalable d'un PLQ en conformité à la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers et localités du 9 mars 1929.».

Contrairement à ce que dit M. Barro dans son rapport, je ne pense pas que cette possibilité retarde considérablement les travaux. En tout cas, elle aurait le mérite de la clarté. De toute manière, j'imagine mal des promoteurs perdre ce pourcentage accordé en supplément, sous prétexte que cela occasionne des formalités supplémentaires ! Dans certains endroits, il est absolument nécessaire qu'un plan localisé de quartier soit établi et rendu obligatoire, compte tenu des circonstances et des lieux où les voies de communication ne sont pas toujours aussi larges qu'on veut bien le dire.

Mme Liliane Maury Pasquier (S). Le projet de loi qui vous est soumis après passage et toilettage en commission poursuit deux buts.

Le premier concerne la zone villa, qui, comme le rappelle l'exposé des motifs accompagnant le projet de loi 6983, représente 46% des zones à bâtir et même 55% des terrains destinés à la construction de logements dans ce canton. C'est beaucoup, cela d'autant plus que, vu sa configuration et les taux d'utilisation du sol qui y sont autorisés, la zone villa accueillait - mes chiffres datent de 1982 - 11% de la population seulement. Il n'est pas question ici de remettre en cause cette zone villa, mais bien, vu l'exiguïté du territoire cantonal, d'en permettre une densification modérée, là où cela est possible, après accord du conseil municipal sous la forme d'une délibération et préavis de la commission d'architecture, soit des garde-fous suffisants pour empêcher - je l'espère - la réalisation de mauvais projets.

Cette loi nous permettra également de faire de l'aménagement du territoire en cinquième zone. Nous pourrons ainsi utiliser la possibilité qu'offre l'indice de 0,4 pour servir de zone de transition entre une vraie zone villa et une zone de construction plus dense. Nous pourrons ainsi négocier, par exemple, des passages pour piétons.

Les modifications apportées par la commission au projet initial de M. Richardet - que nous avons repris, Mme Châtelain et moi-même - ne nous paraissent pas - je parle au nom du groupe socialiste - le modifier fondamentalement. C'est pourquoi nous n'avons pas jugé nécessaire de maintenir notre proposition de PLQ, puisque, justement, les garde-fous auxquels je faisais allusion nous paraissent suffisants.

Notre groupe vous recommande donc de voter ce projet de loi.

M. John Dupraz (R). Monsieur le président...

Une voix. Madame !

M. John Dupraz. Madame la présidente ! Veuillez m'excuser ! (Rires.) La force de l'habitude est terrible !

Le groupe radical, bien sûr, votera ce projet de loi. Permettez-moi tout de même d'émettre une première réserve. Je trouve judicieux de donner cette possibilité de densifier certaines zones villa, dans certaines conditions, jusqu'à 0,4, mais cela ne doit pas devenir la règle. Cette densification ne doit pas conduire à une forme d'urbanisation qui conduirait à faire de la zone villa une mini-zone immeuble.

Deuxième réserve : il ne faudrait pas que ce projet de loi soit pour les communes ou pour le Conseil d'Etat un échappatoire...

Une voix. Une échappatoire !

M. John Dupraz. ...une solution facile pour éviter les problèmes de densification parfois délicats de certaines zones. Je m'explique. Jusqu'à maintenant, dans le plan directeur cantonal - je ne sais pas ce que nous réservera le prochain - la politique menée par le Conseil d'Etat et par le Grand Conseil a consisté à utiliser au maximum les zones à bâtir. Cela veut dire que toutes les fois que l'on a eu affaire à de grandes surfaces en zone villa, libres de construction, on tentait, après discussion avec les communes et les intéressés, de trouver une meilleure utilisation pour ériger des bâtiments correspondant notamment à la zone 4 A.

Je ne voudrais pas, et je ne souhaite pas, que ce projet de loi empêche l'utilisation judicieuse et optimum des terrains, comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant. Il est vrai qu'à certaines occasions les déclaration de M. Joye m'ont inquiété, notamment en ce qui concerne les terrains situés à la périphérie de la ville de Genève, et là, je crois que nous devons veiller, vu l'exiguïté du territoire, à son utilisation optimum.

M. René Koechlin (L). Voici la raison pour laquelle nous estimons qu'il serait dangereux d'introduire l'obligation de passer par un plan localisé de quartier en appliquant ce projet de loi.

La zone 5 affectée aux villas existe et permet déjà de construire avec un coefficient d'utilisation du sol de 0,2 et, de façon dérogatoire, avec un taux d'occupation allant jusqu'à 0,3. Si l'on veut accroître légèrement cette densité et la porter à 0,4, il ne faut pas trop compliquer les procédures, parce qu'alors les propriétaires ne seront plus enclins à utiliser cette possibilité, et ce projet de loi restera lettre morte. C'est la raison pour laquelle, puisqu'il faut mettre des garde-fous, la solution qui est proposée nous paraît suffisante. En effet, elle préserve contre les velléités spéculatives, notamment par le biais d'une résolution de la commune, sans risquer de dissuader les propriétaires d'utiliser cette possibilité. Or, le sens de cette loi consiste bien à inciter ces derniers à l'appliquer, pas le contraire.

M. Christian Grobet (AdG). Je suis en désaccord - cela ne vous étonnera pas - avec les propos de M. Koechlin. Je suis frappé de la manière avec laquelle certains constructeurs continuent à ne pas se rendre compte, et plus particulièrement dans ce cas, de l'intérêt que peut représenter un plan localisé de quartier.

M. Dupraz a bien fait d'évoquer tout à l'heure les problèmes de densification qui se posent, surtout en zone villa. Depuis que la loi sur les constructions a été modifiée, sauf erreur en 1984, pour introduire la possibilité de porter le coefficient d'utilisation du sol à 0,3, les projets qui ont bénéficié de cette possibilité par les communes d'aller entre 0,25 et 0,30 se comptent sur les doigts de la main. Cette proposition avait été acceptée à l'époque avec beaucoup d'hésitation par le Grand Conseil, car le taux de 0,3 donne lieu à un type de construction très différent des villas contiguës. Précisément, l'impact de ces projets à 0,3 est très fort. Vous verrez, Monsieur Koechlin, que porter ce taux à 0,4 ne représente qu'une augmentation modeste au niveau de la zone villa. Au contraire, au niveau constructif l'impact sera considérable. Cela n'aura plus rien à voir avec le type de projet à 0,3 que l'on a connu avec des pseudo-villas contiguës, cela ressemblera plutôt à des petits immeubles.

Il est évident que ces constructions, à l'intérieur d'un quartier de villas, vont provoquer des oppositions de la part des voisins. Sur ce point, le plan localisé de quartier sera précisément un moyen de faciliter la construction, car - vous le savez en tant que constructeur - une fois qu'un plan localisé de quartier a été adopté, l'autorisation de construire, si elle est conforme au plan, ne peut pas être remise en cause. De fait, le plan localisé de quartier pour nombre de projets a permis de les réaliser plus rapidement que s'il n'y en avait pas eu, comme par exemple le triangle de Villereuse qui a donné lieu à des contestations à n'en plus finir pendant des années et des années, ce qui a amené les promoteurs à demander un plan localisé de quartier.

Mais, indépendamment de cet intérêt des promoteurs, que vous ne semblez pas saisir vous-même, il faut, malgré la disproportion entre des maisons individuelles et des petits bâtiments, arriver à élaborer un projet aussi cohérent que possible. C'est là, me semble-t-il, qu'un plan localisé de quartier est indispensable.

J'ai été frappé par les propos de Mme Maury Pasquier. Lorsqu'on porte la densification à un tel taux en zone villa, il est nécessaire de créer des cheminements. M. Meyll a raison de proposer un élargissement des dessertes pour accéder à ces nouveaux lotissements. En effet, les chemins en zones villa sont étroits. Le plan localisé de quartier est précisément l'instrument par excellence qui permet non seulement de procéder à l'élargissement des voies, d'imposer des passages piétons ou autres à travers un lotissement, mais encore - ce qui n'est pas négligeable pour les communes - d'obtenir gratuitement les cessions nécessaires.

Je le dis d'autant plus volontiers - mais peut-être que cela ne vous intéresse pas sur les bancs d'en face - que chaque fois que les communes devaient élargir un chemin communal, à l'occasion d'une requête en autorisation de construire, elles demandaient une cession gratuite du propriétaire. Mais il est évident que cette cession gratuite ne peut pas être imposée dans le cadre d'une autorisation de construire ordinaire. Il fallait donc constamment expliquer aux communes que c'était une exigence à laquelle elles ne pouvaient pas prétendre. Par contre, dans le cadre d'un plan localisé de quartier, l'élargissement des dessertes, qui sera certainement nécessaire pour des projets de cette importance, peut se faire sous forme de cession gratuite. L'intérêt est donc évident pour les communes.

Il y a un moment où le dogmatisme de certains dans ce domaine devrait être dépassé pour penser aux intérêts collectifs que représente le plan localisé de quartier !

M. Pierre Meyll (AdG). (L'orateur est annoncé par la présidente.)

M. Claude Blanc. Encore !

M. Pierre Meyll. Encore, Monsieur Blanc ! On vous supporte bien ! Il faut que vous me supportiez aussi ! Après ce petit «blanc», nous allons passer à quelque chose de plus sérieux !

Je voudrais vous citer les propos de M. Gainon, cela sans violer les secrets de fonction d'une commission. Je lis textuellement ce que dit le rapport du 7 septembre 1994, je cite :

«Un projet à 0,4 en zone villa provoquerait des réactions pouvant déclencher des recours de longue durée, ce qui ne se produirait pas avec un PLQ. C'est donc un gain de temps pour la suite de la procédure.».

C'est donc une réponse aux propos de M. Koechlin qui prétend que cette mesure risquerait de retarder les projets et que ce ne serait pas supportable. Cette réponse me paraît suffisamment convaincante pour que le plan localisé de quartier soit adopté !

M. René Koechlin (L). A entendre M. Grobet, j'ai cru qu'il était le seul à se nourrir d'illusions, mais je me rends compte que c'est aussi le cas de M. Meyll ! Cela ne m'étonne pas ! M. Grobet croit, à tort, qu'un plan localisé de quartier résout tous les problèmes et qu'il permet de gagner du temps. Vous êtes pourtant bien placé, Monsieur, pour savoir que ces plans localisés de quartier subissent des procédures qui durent des années et qu'ils sont de la sorte dissuasifs pour les propriétaires qui doivent s'y plier. C'est une évidence. Pas un seul constructeur dans cette salle ne pourrait me contredire, Monsieur !

Nous sommes confrontés à un cas particulier dans lequel la zone n'est pas modifiée et où le plan localisé de quartier n'est pas obligatoire. Dès lors, pour quelques différences de densité, le propriétaire, plutôt que d'attendre les interminables procédures engendrées par un plan localisé de quartier, préférera construire avec une densité moindre, mais rapidement. Le projet de loi que nous proposons ce soir risque de rester lettre morte. C'est donc une illusion de croire que les propriétaires seront incités à utiliser cette possibilité si on leur impose un plan localisé de quartier.

Un tel plan se justifie pleinement, Monsieur Grobet, dans les zones de développement qui ont subi un déclassement et dans lesquelles les densités sont fondamentalement modifiées, où l'on passe d'un 0,2 d'une zone villa, ou d'un 0,0 d'une zone agricole, au 1,2 ou 1,5 d'une zone de développement. C'est évidemment une énorme différence qui implique nécessairement une mesure d'urbanisation radicale, laquelle n'est possible qu'à travers un plan localisé de quartier. Dans un tel cas, il est normal qu'il soit obligatoire. Par contre, dans le cas que nous traitons ce soir, cela est superflu et serait dissuasif, allant à fins contraires du projet de loi. Je comprends que vous le préconisiez, car, probablement, vous voudriez que cette loi ne soit jamais appliquée !

Monsieur Meyll, si vous croyez qu'un plan localisé de quartier vous prémunit d'éventuels recours, vous vous trompez ! C'est exactement le contraire qui se passe. Les plans localisés de quartier ne cessent de les provoquer tous azimuts. Les recourants contre un plan localisé de quartier, s'ils n'ont pas obtenu satisfaction après des mois et des années de procédure, interjettent un nouveau recours au moment de l'autorisation de construire pour des questions de détail qui n'ont plus trait au plan localisé de quartier; ils trouvent toujours moyen de le faire pour un simple abattage d'arbre, ou autre.

Le plan localisé de quartier est souvent une occasion supplémentaire pour des voisins «mal embouchés» de recourir contre un projet. Vous vous nourrissez d'illusions en croyant qu'un tel plan permet d'éviter des recours !

M. Pierre Meyll (AdG). Je suis navré, Madame la présidente, de m'adresser à M. Koechlin, mais il m'a directement interpellé !

Monsieur Koechlin, soyez logique ! Je ne crois pas qu'un promoteur refuserait la possibilité d'augmenter, voire de doubler, son taux d'occupation des sols, ou même, dans le plus mauvais des cas, de l'augmenter d'un tiers. Pourtant, c'est ce qui se produirait d'après vous. Il nous est arrivé, à la commune de Versoix, d'avoir des problèmes très sérieux en remontant le taux d'occupation des sols à 0,3 seulement, et vous le savez fort bien ! Un plan localisé de quartier permet de travailler en toute connaissance de cause, mais vous voulez l'ignorer ! Je me demande bien pourquoi, car c'est la condition sine qua non qui permet un développement normal, régulier et qui soit contrôlé sans léser les intérêts communaux.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Il faut d'abord souligner que ce projet de loi a été approuvé par la commission d'aménagement du canton par 12 oui, 2 non et 1 abstention, et qu'il a rencontré l'adhésion de notre département et de la direction de l'aménagement.

En ce qui concerne le problème de la densification, il est connu que la densité 0,3 n'est pas très rentable dans le rapport/terrain construction et que la meilleure densité pour des immeubles intermédiaires entre la villa et des blocs locatifs est de 0,4. Il existe de très beaux exemples d'habitats qui ont été réalisés dans ce domaine, dans toute la Suisse et aussi en Suisse romande. Ce taux de 0,4 correspond à un seuil de rapport/qualité entre le terrain et la construction qui est optimal pour tout le monde, puisqu'il permet de garder la substance et l'habitabilité dans le quartier de villas, tout en augmentant notablement le nombre d'appartements créés.

Depuis mon entrée en fonctions, tous les plans de quartier, tous les changements d'affectation que l'on a voulu faire pour passer d'une densité de 0,2 à 1,2 se heurtent à une opposition farouche de tous les habitants, quel que soit le quartier. Il est donc utile - le député Richardet avait raison de faire cette proposition de motion - de chercher une forme d'urbanisme transitoire à trente ans qui permette de faire cohabiter des constructions un peu plus importantes que de simples villas et de passer ainsi à une urbanisation différente. La thèse selon laquelle on peut construire des immeubles sur des terrains importants, comme l'a dit M. Dupraz, est tout à fait juste, même s'ils sont situés en zone villa. Malheureusement, la réalité est toute autre. Dès qu'un promoteur possède trois ou quatre terrains et des parcelles de l'ordre de 4 000 m2, il veut construire un bahut de 1,2 de densité, c'est-à-dire deux rez, plus sept étages, plus attique, ce qui donne les chocs et les oppositions que nous connaissons.

Pour ces raisons, je vous propose de voter le projet de loi tel qu'il vous a été soumis.

M. Pierre Meyll (AdG). Je dois contester...

Une voix. C'est la quatrième fois !

M. Pierre Meyll. Ce serait même la sixième, ce ne serait pas suffisant pour arriver à vous convaincre. Je continuerai tout de même !

Monsieur Joye, vous répondez à côté de la question. Vous ne parlez pas des plans localisés de quartier. Il est clair, d'autant plus après ce que vous avez dit, qu'il faudra des plans localisés de quartier dans les zones situées à proximité des grands ensembles, lorsque les voies de communication ne sont plus conformes, et, de ce fait, il sera nécessaire d'intervenir. J'ai abordé les «petits» problèmes communaux - vous ne répondez pas à ma question - mais c'est le développement de la commune qui en souffre dans beaucoup de circonstances. Les plans localisés de quartier sont d'autant plus nécessaires pour les terrains proches des zones de déclassement et des zones habitées.

La présidente. Monsieur Meyll, vous savez que notre nouveau règlement prévoit que l'on ne peut pas prendre la parole plus de trois fois, sauf si on a été mis en cause. Vous ne l'avez pas été, pourtant je vous ai accordé la parole, mais, je vous en prie, respectez le règlement à l'avenir !

M. Pierre Meyll. Je vous remercie, Madame la présidente !

M. John Dupraz (R). Je ne saurais me satisfaire de la réponse de M. Joye !

Je ne sais pas si vous connaissez un peu l'histoire de l'aménagement de ce canton et les problèmes d'urbanisme que nous avons connus. J'aimerais simplement vous citer l'exemple du quartier des Mouilles à Lancy où les procédures ont été nombreuses. Contre l'avis de tout le monde - des opposants, des habitants du quartier, de la commune - le Conseil d'Etat, de guerre lasse, a répondu que, puisque même sur une basse densification les gens n'étaient pas d'accord, il faisait table rase de tout cela et repartait sur un taux de 1,2. Le Conseil d'Etat de l'époque - y compris M. Grobet, qui a bien des défauts mais qui a quand même certaines qualités - a eu ce courage. Actuellement, qui parle du quartier des Mouilles ? Personne ! C'est une réalisation urbanistique exemplaire !

Je ne souhaite pas que ce projet de loi soit une solution de facilité pour appliquer un taux de 0,4, voire de 0,8, à ces terrains en zone villa, en périphérie de la zone urbaine.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. M. Dupraz évoque ses souvenirs. Il devrait venir avec moi se promener devant les assemblées communales, lorsqu'il faut résister à deux cent cinquante personnes et leur expliquer ce qui se passe. Votre voisine de gauche pourra témoigner de ce que cela signifie. Le quartier des Mouilles est une histoire qui a vingt d'âge et deux bâtiments ont été construits après cette affaire, Monsieur Dupraz. Alors, s'il vous plaît, occupez-vous d'agriculture, vous serez plus compétent ! (Sifflets, chahut.)

Monsieur Meyll, la commune peut autoriser un projet de construction, exceptionnellement, sous forme d'une délibération municipale et après consultation de la commission d'architecture. Ces moyens sont largement suffisants vu la densité du contrôle réel effectué par l'ensemble des partenaires, de la population et des groupes de pression de toute nature. Nous sommes tout à fait couverts et nous n'avons pas de crainte à avoir dans ce domaine !

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Annen, vous pourriez réagir de la même façon vis-à-vis des députés de vos rangs qui s'expriment sur ce point.

Je remercie M. Dupraz. Ce taux de densité de 0,4 devrait être limité à des cas exceptionnels. En effet, si un terrain est suffisamment important, il faudrait tout de même arriver à concocter des projets plus cohérents que ce qu'il est possible de faire avec un taux de 0,4. Je m'étonne que M. Joye évoque des bahuts de six ou sept étages pour du 1,2. On sait qu'avec ce taux on peut réaliser des projets de deux ou de trois niveaux sur rez-de-chaussée, donc des immeubles qui s'intègrent parfaitement bien à l'environnement.

Monsieur Joye, je reconnais qu'il n'est pas toujours aisé de défendre les projets de densification. Je suis très heureux que M. Dupraz reconnaisse aujourd'hui le geste urbanistique exemplaire que représente le quartier des Mouilles. Je souligne qu'à l'époque, Monsieur Dupraz, vous n'en faisiez probablement pas partie, mais je me souviens de M. Blanc et d'autres qui vociféraient au sujet de ce projet que vous qualifiez d'exemplaire ! Sans nul doute, M. Joye bénéficiera d'un appui plus solide au niveau du parlement que son prédécesseur n'en disposait ! Vous devriez vous sentir encouragé, Monsieur Joye, dans ces assemblées publiques et prêcher la bonne parole pour arriver à un urbanisme cohérent.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je fais toutes mes amitiés à M. John Dupraz, et je lui concède le droit de prendre la parole en matière d'aménagement du territoire, domaine dans lequel il est très compétent ! (Rires.) Ayant dit cela, je rappelle encore une fois qu'en réalité, contrairement à ce que dit M. Grobet, on ne peut pas construire un rez plus deux étages avec un taux de 1,2. C'est tout simplement illusoire et impossible !

Le projet qui nous est soumis est véritablement raisonnable, puisqu'il peut s'intégrer dans des infrastructures existantes de routes, telles qu'on les connaît ici, et permet à la commune de faire ses vérifications elle-même et de décider là où les choses sont possibles ou non. Par exemple, un développement de ce genre ne serait pas possible à Corsier-Port. L'évolution de quartiers de villas doit être dirigée au coup par coup. Cela ne sert à rien de vouloir prescrire des règlements et des plans localisés de quartier supplémentaires, qui ne font que retarder encore davantage le processus. Tous les plans de quartier dont je m'occupe ont en moyenne six à sept ans d'âge. C'est beaucoup trop pour être efficaces !

Ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Le titre et le préambule sont adoptés.

Article unique (souligné)

Art. 59, al. 4, lettre b (nouvelle teneur)

La présidente. Je mets aux voix l'amendement déposé par M. Meyll visant à remplacer à l'avant-dernière ligne de la lettre b, : «n'excède pas 40%» par «30%» et de compléter cet alinéa par la phrase suivante :

«Ce taux peut être porté à 40% de la surface du terrain moyennant l'adoption préalable d'un PLQ en conformité à la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers et localités du 9 mars 1929.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Cet article est adopté, de même que l'article 75, alinéas 1 et 3 (nouvelle teneur).

L'article unique (souligné) est adopté

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

modifiant la loi d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses

(L 5 1)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988 est modifiée comme suit:

Art. 59, al. 4, lettre b (nouvelle teneur)

b) peut autoriser exceptionnellement, avec l'accord de la commune, exprimé sous la forme d'une délibération municipale, et après consultation de la commission d'architecture, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40% de la surface du terrain.

Art. 75, al. 1 et 3 (nouvelle teneur)

1 Chaque construction ne peut pas comporter en principe plus de 4 logements,

3 Le département peut accorder des dérogations pour des constructions édifiées en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé.

 

La séance est levée à 23 h 25.